Par ailleurs, nous avons proposé de manière systématique
un second look endoscopique aux patientes opérées par
cœlioscopie. Vingt patientes ont accepté cette deuxième
intervention réalisée entre 3 et 9 mois après l’intervention
initiale et qui comportait une cytologie péritonéale, une
biopsie de toutes les zones péritonéales suspectes. L’inter-
vention a été négative dans 18 cas. Dans ce groupe, deux
patientes ont récidivé, une a présenté une tumeur bénigne
controlatérale 2 ans plus tard, traitée par annexectomie, la
deuxième a présenté une carcinose péritonéale classée de
stade IIIc 2 ans après la cœlioscopie. Cette carcinose a été
diagnostiquée en fin de grossesse, la patiente est décédée un
an plus tard. La lésion initiale était une lésion mucineuse à
malignité limite. La cœlioscopie de contrôle a été positive
chez deux patientes. Dans le premier cas, l’examen histolo-
gique du moignon d’annexectomie a identifié une glande
compatible avec l’aspect histologique de la lésion initiale-
ment traitée par annexectomie. Cette patiente ne présentait
aucun autre signe macroscopique ou microscopique de réci-
dive ou de dissémination. Elle est suivie dans le service,
elle est en vie sans signe de récidive plus de 10 ans après la
dernière intervention. Dans le deuxième cas, il existait des
implants péritonéaux, mais la patiente avait subi une tumo-
rectomie bilatérale. En effet, la tumeur était bilatérale et se
présentait sous la forme de lésions solides appendues à
l’ovaire dont les pédicules avaient pu être sectionnés. Cette
patiente de 19 ans a subi par la suite une annexectomie bila-
térale après congélation d’embryons et elle a eu deux
enfants. Elle est en vie sans récidive 5 après l’intervention
initiale (7).
L’examen extemporané a été utilisé pour 43 des 52 patientes
incluses dans cette étude. Chez 9 patientes, cet examen n’a pas
été utilisé pour les raisons suivantes :
– une patiente opérée par laparotomie première a subi une
annexectomie bilatérale, il avait été décidé de ne pas réaliser
de geste chirurgical complémentaire en raison de son âge et de
son mauvais état général ;
– une lésion a été diagnostiquée macroscopiquement comme
bénigne ;
– dans les sept autres cas, l’examen n’a pas été demandé parce
qu’il n’était pas possible (au début de notre expérience) ou
parce qu’il avait été décidé de limiter le traitement immédiat à
une annexectomie unilatérale chez des femmes jeunes encore
désireuses de fertilité.
L’examen extemporané a conclu au diagnostic de tumeur à
malignité atténuée dans 33 cas (63,5 %), à celui de lésion
bénigne dans 7 cas et à celui de cancer invasif dans trois cas.
Ces trois patientes ont subi une hystérectomie, une annexecto-
mie bilatérale, et une omentectomie. Deux ont subi un curage
ganglionnaire sans complication postopératoire. Parmi les
patientes dont la lésion a été diagnostiquée comme bénigne,
les gestes chirurgicaux ont été interrompus après une kystecto-
mie dans 1 cas, après une annexectomie dans 4 cas après une
hystérectomie avec annexectomie bilatérale dans 2 cas. Les
interventions de ré-évaluation ont toujours été négatives quel
que soit le geste initial.
DISCUSSION
En préopératoire, nos résultats confirment que le diagnostic de
TMA est très difficile. Ce cadre peut être évoqué devant un
aspect échographique suspect du fait de la taille de la lésion,
de la présence d’une ou plusieurs cloisons épaisses, d’une ou
plusieurs végétations intra-kystiques. Mais dans notre série de
1600 patientes évaluées par cœlioscopie, 148 avaient une
lésion qui comportait des végétations à l’échographie (4).
Dans ce groupe, à l’examen histologique, 112 lésions étaient
bénignes (75,6 %), 18 étaient des cancers invasifs et 18 des
tumeurs à malignité atténuée (12,2 %). Ces notions confirment
les problèmes rencontrés dans le cadre du diagnostic histolo-
gique préopératoire grâce à l’échographie. Récemment, Mol et
al. ont revu de manière rétrospective, 21 méthodes ou score
échographique proposé dans la littérature dont le but était de
faire la distinction entre lésions bénignes et malignes. Cet
auteur montre qu’un score ou une méthode sont beaucoup
moins performants dès lors qu’ils ne sont plus employés par
leur inventeur. Ils confirment que pour atteindre une grande
sensibilité du diagnostic de malignité, il faut une spécificité
faible de 45 % à 60 % (11). Gotlieb et al. ont confirmé les dif-
ficultés du diagnostic préopératoire de TMA (8). En effet, dans
une série de 91 patientes 13 % avaient été opérées pour une
lésion kystique pure, 38 % des lésions comportaient une ou
plusieurs cloisons et 65 % des végétations ou une écho-
structure mixte. Ces auteurs concluaient leur article en disant
que si l’on prenait en compte l’échographie, le doppler et le
CA 125, au moins un des critères était anormal dans 93 % des
cas. Ce résultat est intéressant, mais la réalité clinique est
mieux représentée si l’on connaît le pourcentage de lésion
bénigne parmi les patientes qui avaient au moins un critère
anormal !
Dans notre expérience, le dosage du CA 125 est peu informa-
tif. Dans le service, ce dosage n’est pas utilisé pour décider de
la voie d’abord, il est prélevé dans le service la veille de
l’intervention pour permettre le suivi des patientes finalement
opérées pour une tumeur maligne. Son intérêt est limité dans le
cadre des TMA, il s’agit de patientes plus jeunes chez les-
quelles il existe de nombreuses pathologies bénignes qui peu-
vent être associées à des augmentations modérées du CA 125
sérique.
Enfin, il est intéressant de citer un travail récent sur le type et
la durée des signes cliniques de ces tumeurs à malignité limite
(12). Dans une série comportant 616 tumeurs invasives et 151
tumeurs à malignité atténuée, le pourcentage de lésions décou-
vertes lors d’examen systématique était deux fois plus élevé
dans le cadre des tumeurs à malignité atténuée que dans le
cadre des tumeurs invasives (28 % vs 16 %), la durée
moyenne des signes avant le diagnostic était plus longue
(6 mois pour les tumeurs à malignité atténuée, 4 mois pour les
lésions invasives).
À ces notions classiques à propos des lésions suspectes, il est
important d’ajouter les antécédents familiaux et personnels de
la patiente. En effet, le risque de rencontrer une lésion de ce
type est plus élevé dans ces deux cadres, particulièrement chez
les patientes déjà opérées pour une lésion de ce type.
DOSSIER
14
La Lettre du Gynécologue - n° 272 - mai 2002