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La Lettre du Gynécologue - n° 302 - mai 2005
Ce n’est pas être malveillant que de souligner les conditions
d’accueil dans certains hôpitaux ou les services d’urgence, quand
les malades attendent de longues heures sur un chariot. C’est une
autre histoire qui donne lieu à bien des remous pour le moment…
on ne peut pas dire, cependant, que cette situation contribue au
bon moral des patients.
CE QUI N’EST PAS MESURABLE…
De nos jours, tout ce qui n’est pas mesurable est mal pris en
compte. C’est le cas de la fatigue qui peut plomber une vie aussi
bien que la douleur. Mais il y a des centres anti-douleur dans toute
la France. Devant la fatigue, le médecin est désarmé. Non pas que
le marché soit dépourvu de remèdes, il est au contraire florissant :
vitamines, acides aminés, phytothérapie, homéopathie, procaïne,
formules diverses avec autorisation de mises sur le marché, médi-
caments anti-fatigue mentale et nerveuse, plus sophrologie et
relaxation. On n’a que l’embarras du choix. Mais quel choix?
Il est le plus souvent laissé au pharmacien ou à l’auto-médication.
Mais quand dix personnes parlent de la fatigue, il n’y en a pas
deux qui parlent de la même chose et toutes la subissent à des
degrés divers.
Le généraliste n’est pas toujours compétent et mieux vaut avoir
recours à un service de médecine interne. Toutefois, les internistes
sont encore mal connus du grand public. Il existe cependant, dans
quelques hôpitaux, des services spécialisés qui disposent
d’échelles d’évaluation de la fatigue, pratiquent des bilans, et sont
susceptibles de reconnaître les causes et de pratiquer l’écoute
indispensable.
La médecine, bien qu’elle soit de plus en plus compétente, soigne
de plus en plus “de loin” en raison du fractionnement des prises en
charge. C’est dans cette distance-là que se créent les problèmes.
Autrefois, nos grands-mères priaient le Seigneur pour avoir un
enfant ou guérir d’une maladie grave. Aujourd’hui, et c’est heu-
reux, les femmes ont la fécondation in vitro et le dépistage. Reste
que le gynécologue est aux premières loges pour annoncer les
mauvaises nouvelles : infertilité, endométriose, cancer, grossesse
extra-utérine, etc. En ce qui concerne le sujet délicat de l’inferti-
lité, d’une part les fécondations in vitro demeurent un parcours du
combattant et, d’autre part leur taux de succès reste faible. Quant
aux cancers du sein, toujours en augmentation, ils sont pour les
femmes un traumatisme psychogique, une désorganisation qui
demande un soutien massif de l’équipe hospitalière. En oncologie,
la femme est emportée dans un tourbillon de soins, d’examens,
elle passe d’un d’interlocuteur à un autre, chacun avec sa spécia-
lité et ses mots qui sont parfois aussi redoutables que le scalpel. À
cette étape, le gynécologue doit se montrer disponible, car c’est
souvent lui qui doit calmer les doutes et les angoisses.
Mais c’est à la fin du traitement que se manifeste le plus claire-
ment la détresse du malade quand il se sent “abandonné”. On sait
bien, les études l’ont démontré, que c’est en cette période que se
déclarent le plus souvent les dépressions. Et aucune structure n’est
prévue pour accueillir ces patients auxquels le généraliste prescrit
des antidépresseurs à des doses parfois inadaptées.
Enfin, des questions délicates se posent régulièrement aux
malades : où aller se faire soigner ? comment trouver les bons
spécialistes ? Que faire sinon suivre les indications du médecin
traitant qui envoie chez son correspondant dont il ne vous dit rien.
Si bien que, à l’occasion d’un article publié dans la grande presse,
les journalistes sont parfois envahis par les appels demandant les
coordonnées de médecins interrogés. Il arrive que ce ne soit pas
toujours les plus compétents, sauf dans les journaux et magazines
sérieux. Il en existe… Il faut se méfier néanmoins des médecins
trop médiatisés qui sont plus souvent à la télévision et dans les
laboratoires qu’à leur cabinet.
Une des missions médicales est la prévention. Or, on peut consta-
ter, d’année en année, que le nombre des IVG reste stable et, à ce
jour, il n’y aucune véritable explication à cette situation. Les
médecins ne peuvent être accusés d’en être responsables. Les
oublis et les retards de prise de pilule sont à mettre en cause.
Néanmoins, l’information a son rôle à jouer. Elle mérite des dia-
logues approfondis orientés vers les risques et conséquences des
oublis. Mais ces dialogues sont-ils suffisants ?
Malgré les efforts de communication de certains laboratoires face
à la presse, il faut toutefois admettre que la science médicale ne
peut tout résoudre, en particulier ce qui n’est pas de son ressort, et
le comportement des patients en fait partie.
Ce comportement intervient aussi face au dépistage du cancer du
sein. Dans ce domaine, on ne peut invoquer l’absence d’informa-
tion qui a été massive. Cependant, 43% seulement des femmes se
rendent aux invitations du dépistage systématique : peur, blocage
ou négligence ? Comment y remédier si le médecin traitant
n’attire pas fermement l’attention de sa patiente sur la nécessité de
cet examen. Quitte à provoquer une anxiété chez des personnes
qui ne sont pas malades et qui ne pensent pas à une maladie
future. Il y a aussi les tabous, les non-dit qu’il faut savoir vaincre,
comme l’incontinence ou encore les MST.
En réalité, ce que ne fait pas la médecine aujourd’hui ne relève ni
des soins ni de la technique ni de la connaissance, mais presque
uniquement de l’insuffisance du dialogue. Les professionnels que
sont les médecins, et dont personne ne discute les compétences,
sont-ils persuadés que leur fonction les implique au-delà du geste
strictement professionnel ? Ou sont-ils démotivés par les
contraintes et les entraves ? Il faut – honnêtement – y réfléchir.
Édouard Zarifian, le célèbre psychiatre affirme : “Aucune guéri-
son n’est complète si ne s’instaure entre le malade, ses proches et
son médecin une relation humaine particulière, véritable alchimie
fondée sur le pouvoir de la parole. La médecine moderne l’oublie
trop souvent.” ■
GYNÉCOLOGIE ET SOCIÉTÉ
ÉTINCELLE
Étincelle est un espace d’accueil situé en dehors de l’hôpital qui
se consacre à la qualité de vie des femmes atteintes d’un cancer
du sein. Objectif : aider les femmes en désarroi, en perte de
confiance et d’image. Pour cela, Étincelle met à disposition : une
psychologue, une diététicienne, une réflexothérapeute, des
soins de beauté, des groupes de parole, un atelier d’information
et de travaux pratique sur les chevelures d’appoint. Tout cela
gratuitement grâce à des fonds privés.
À Étincelle on peut parler. Et être entendue. C’est un état d’esprit.
Un lieu à part, convivial, entièrement voué au bien-être et au service
des femmes.
ÉÉttiinncceellllee :: 2277 bbiiss,, aavveennuuee VViiccttoorr--CCrreessssoonn ((àà pprrooxxiimmiittéé iimmmmééddiiaattee dduu
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