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Chirurgie
laparoscopique
E. Nini, K. Slim*
Risques théoriques
de la laparoscopie
Ils sont en rapport avec les effets du
pneumopéritoine. Schématiquement,
celui-ci intervient selon deux mécanismes (2) : des perturbations hémodynamiques, avec réduction du flux sanguin utéro-placentaire, et un déséquilibre
acidobasique pouvant aboutir à une acidose fœtale, avec une tachycardie et une
HTA. La transposition des études expérimentales à la pratique n’est pas aisée,
car les conditions sont différentes.
Quelques précautions s’imposent chez
la femme enceinte sur le plan anesthésique (correction de l’acidose respiratoire
en fonction du monitorage de la capnie,
surveillance de l’activité cardiaque fœtale, et compression intermittente des
membres inférieurs pour favoriser le
retour veineux) (2).
D
epuis la fin des années 1990, la grossesse n’est plus considérée
comme une contre-indication à la chirurgie laparoscopique.
Plusieurs études ont évoqué la faisabilité de la chirurgie digestive par laparoscopie dans ce contexte (1). Cette faisabilité est évaluée
en termes de risque maternel (avortement, accouchement prématuré)
et fœtal (malformations, maladies néonatales). Nous évoquerons ici les
risques théoriques de la laparoscopie, ses indications et ses résultats.
La cholécystectomie : la laparoscopie
est le traitement de choix de la lithiase
biliaire symptomatique pendant la grossesse (4-6). La recherche d’un calcul de
la voie biliaire principale doit se faire
par écholaparoscopie (4) pour éviter la
cholangiographie et donc l’irradiation
fœtale.
L’appendicectomie : la cœlioscopie a
montré son intérêt dans le diagnostic différentiel des douleurs de la fosse iliaque
droite de la femme enceinte (7, 8, 9) ;
si nécessaire, on procède à une appendicectomie.
La chirurgie des annexes : elle a lieu
en urgence, en cas de torsion, ou si le
kyste à une taille supérieure à 5 cm (1).
Résultats
Indications de la laparoscopie
Il est recommandé d’intervenir durant
le deuxième trimestre de la grossesse
(fin de l’organogenèse fœtale). L’indication opératoire est souvent posée en
urgence (1). La voie laparoscopique est
préférée à la laparotomie (1, 11, 12).
Du fait de la taille utérine, la voie “opencoelio” est recommandée (4, 6, 10). La
cholécystectomie ainsi que l’appendicectomie par voie laparoscopique semblent
être les interventions les plus réalisées en
chirurgie viscérale (1, 2, 4, 5, 8-11).
* Service de chirurgie digestive, Hôtel-Dieu,
Clermont-Ferrand.
Dans la majorité des séries, l’innocuité
de la laparoscopie à été démontrée chez
la femme enceinte (1). Le faible nombre
de patientes et le caractère souvent
rétrospectif des études et des enquêtes,
ainsi que l’absence d’études contrôlées
ou prospectives, font que la laparoscopie chez la femme enceinte ne peut être
considérée comme une chirurgie “factuelle”. La morbidité et la mortalité ne
sont pas augmentées après cholécystectomie ou appendicectomie par laparoscopie (4-9). Les données de l’étude
du registre suédois confirment ces constatations (3). La laparoscopie induit une
hospitalisation plus courte, un iléus
moins long, et une douleur postopératoire moindre (3, 11).
Supplément à La Lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 3 - vol. VIII - mai-juin 2005
Conclusion
La laparoscopie est devenue le traitement
de choix pendant la grossesse, mais il est
nécessaire de réaliser des études contrôlées, prospectives et multicentriques
pour pouvoir prouver son indication
dans le cadre de la médecine factuelle
(intérêt d’un registre national).
■
Références
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et grossesse
Tube digestif
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200-4.
et al. n’a pas montré de surrisque pour
le fœtus chez 27 patientes atteintes d’une
maladie de Crohn et ayant pris du métronidazole au cours de leur grossesse (3).
Cependant, dans toutes ces études, le
métronidazole n’était pas pris de façon
prolongée comme cela peut être le cas
lors de la maladie de Crohn.
naissance a été décrit avec une dose
supérieure à 2 g par jour (3). La dose
maximale actuellement recommandée
au cours de la grossesse est de 2 g par jour.
Médicaments
J. Belloc, G. Bellaïche*
Antibiotiques
– Fluoroquinolones de troisième génération : des études rétrospectives datant
de 1994 et de 1998 ne montraient pas
d’augmentation de la survenue de malformations fœtales, notamment neuromusculaires, lors de la prise de ces fluoroquinolones au cours de la grossesse (1, 2).
Cependant, dans l’une d’entres elles, le
taux d’avortements thérapeutiques était
supérieur dans le groupe des patientes
sous fluoroquinolones (2). Par ce biais,
il pourrait y avoir une sous-estimation
du risque. Une étude rétrospective récente
incluant 18 patientes ayant une maladie
de Crohn et traitées par fluoroquinolones
durant leur grossesse parvient aux mêmes
constatations (3).
– Métronidazole : des cas de malformations fœtales lors de la prise de métronidazole au cours du premier trimestre
de la grossesse ont été décrits. Cependant, une méta-analyse de Burtin et al.
ne retrouvait pas d’augmentation des
malformations fœtales sous métronidazole (4). De plus, l’étude de Moskovitz
* Service de gastroentérologie, hôpital
Robert-Ballanger, Aulnay-sous-Bois.
Corticoïdes
Les corticoïdes traversent la barrière
placentaire et sont métabolisés en un
métabolite inactif chez le fœtus. Leur
prise durant la grossesse n’entraîne aucun risque malformatif ou abortif (3, 5).
Des cas d’insuffisance surrénalienne et
d’infections néonatales ont cependant
été décrits (3, 5).
Dérivés du 5-ASA
Des études récentes rétrospectives (3, 5)
ne montrent pas de surrisque de malformation par rapport à la population générale lors de la prise de 5-ASA durant la
grossesse. Un cas d’insuffisance rénale
ayant régressé quelques mois après la
Supplément à La Lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 3 - vol. VIII - mai-juin 2005
Immunosuppresseurs
Le méthotrexate est tératogène et abortif. Lors de la survenue d’une grossesse,
des malformations du système nerveux
central et des défections cranio-faciales
ont été décrites (6). La période la plus
critique durant la grossesse se situe
entre la sixième et la huitième semaine
d’aménorrhée, surtout avec des doses
supérieures à 10 mg par jour (7). Cependant, des cas de grossesses sous méthotrexate avec accouchement d’un enfant
sans malformations ont été décrits (6, 7).
Ici, les doses de méthotrexate étaient
faibles. Il reste formellement contreindiqué chez la femme enceinte.
Un traitement par ciclosporine durant la
grossesse est associé à un risque majoré
d’avortement, de prématurité et de retard
de croissance intra-utérin, intéressant
jusqu’à 40 % des grossesses dans certaines séries (6, 7). Chez le rongeur, une
embryo-fœtotoxicité a été observée uniquement à des doses suprathérapeutiques
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et grossesse
Tube digestif
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