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International Journal of Neglected and Underutilized Species (2016) 2: 42-56
Original Paper
Etude de la production des plants de bananiers et plantains (Musa
spp.) par la technique des PIF au Congo: Effets des substrats sur la
croissance et le développement des plants en pépinière
A. ONGAGNA1* ; F. MIALOUNDAMA2 ; M. G. F. BAKOUETILA2
1Direction Générale de l’Innovation Technologique, Ministère de la Recherche Scientifique et de l’Innovation
Technologique, Brazzaville, République du Congo,
2Université Marien Ngouabi, BP: 69, Brazzaville, République du Congo
*Auteur correspondent, E-mail : ongagnalphonse@gmail.com, Tél : (+242) 06 632 76 26 / 05 556 60 86
RESUME
Cette étude a été menée dans le département de la Cuvette au Congo dans le but d’apprécier
l’effet des différents substrats locaux sur le comportement des plants en pépinière, issus de
quatre (4) variétés de bananiers et plantains. Pour apprécier l’effet de ces substrats sur le
comportement des plants en pépinière, les paramètres de croissance et de développement ont
été notés trois mois après le repiquage. Les plants issus de fragments de tiges de bananiers
(Gros Michel et Rose naine) et plantains (Faux corne et French moyen) ont été produits.
Dans le germoir, le taux de survie des explants de rejets de bananiers et plantains était de
98,25% avec une productivité moyenne de 16,79 plantules ayant évolués dans quatre
substrats locaux : terre noire (100%), terre grise (100%), litière forestière décomposée
(100%), sciure de bois (100%), terre grise (50%) mélangée à la sciure de bois (50%). Par
conséquent, la litière forestière décomposée a été le meilleur substrat avec un bon
développement des plants. Cependant, la terre noire et la terre grise se sont avérées des
substrats moyens, contrairement à sciure de bois et son mélange avec la terre grise.
Mots clés : Bananiers, Congo, Paramètres de Croissance, PIF, Plantains, Substrats
INTRODUCTION
La banane plantain occupe le quatrième
rang mondial après le riz, le blé et le maïs
(Arias et al, 2004) et a été pendant
longtemps considérée comme deuxième
aliment de base des populations
congolaises après le manioc. Mais, il
semble perdre progressivement sa
prépondérance dans les régimes
alimentaires, notamment dans les villes,
sous l’effet de la concurrence du pain et du
riz importés. En effet, le bananier est une
plante alimentaire cultivée pour son fruit.
L’on distingue : la banane plantain et la
banane douce ou banane dessert. La
banane plantain ou le plantain sert à la fois
d'aliment énergétique et de dessert. Elle
joue un rôle social, économique et culturel
très important. Riche en glucides, le fruit
du bananier plantain possède selon les
variétés une valeur énergétique plus élevée
ou proche de celle de certains produits
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amylacés de grande consommation
(igname, patate douce, taro, pomme de
terre, etc). Il peut se consommer sous
plusieurs formes (bouillie, frite, chips, pilé,
consommé sous forme de pâte, etc…) ;
transformé en farine, le plantain peut servir
à la fabrication du pain, des beignets, du
foufou, biscuits et gâteaux, dans la
formulation d’aliments infantiles ou à
épaissir des sauces (Tomekpe, 2006). La
purée de la banane peut être congelée pour
une utilisation ultérieure lors de la
fabrication des glaces, des bonbons, le
milk-shake, les chewing-gums, etc.
(Tchango Tchango, 1998).
Cependant, la banane dessert est
utilisée à l’état frais ou transformé. Par
ailleurs, elle est utilisée en thérapeutie car,
elle fortifie les os et diminue les risques
d'hypertension et d'accident vasculaire
cérébrale grâce à sa richesse en potassium
et en substance nutritive, traitement des
ulcères gastriques et la diarrhée,
soulagement du stress et de l'anxiété
(Dhed’a et al 1991). Les feuilles de
bananiers peuvent servir comme
emballage, elles peuvent être utilisées pour
la fabrication des objets artisanaux, ou
pour diminuer de l'érosion, et aussi comme
matière organique après décomposition.
Le problème de manque de matériel de
plantation sain et performant constitue
donc l’un des goulots d’étranglement de la
filière banane qu’il faut à tout prix lever
pour que les bananes d’autoconsommation
continuent à jouer leur rôle de sécurité
alimentaire. C’est pourquoi, nous avons
expérimenté la technique de production
rapide et massive des plants sains de
bananiers et plantains appelée "Technique
des PIF" (Plants issus de fragments de
tige).
La technique des PIF permet d'exploiter
la plupart des bourgeons de la plante, que
ceux-ci soient visibles ou non. En effet,
plusieurs bourgeons formés sur le bananier
sont perdus au champ; seuls quelques
rejets, généralement 2 ou 3, peuvent être
récoltés sur pied-mère au cours d'un cycle.
Grâce à la technique des PIF, on peut
significativement augmenter la production
de rejets de chaque pied de bananier
exploité en vue de multiplier ce matériel
végétal (Kwa, 2002). Ainsi, cette
technique permet d’envisager des
rendements de 10 à 20 plantules par
souche. Dans des conditions optimales, il
est possible d’obtenir 50 ou plus de plants
en fonction de la variété. La technique des
PIF est une technique très plastique car,
elle s’adapte facilement aux moyens des
communautés et des agriculteurs sans que
le rendement ne soit réduit en plants et
qualités. Pour obtenir un bon résultat, il
faut envisager aussi un bon site de collecte
des rejets à multiplier. Il sera prudent
d’installer sa pépinière sur un terrain plat
dégagé et à proximité d’un point de
collecte d’eau en vue de l’arrosage. Ce
type de matériel ne demande ni arrachage
ni parage ni traitement (Anonyme 2, 2002).
Par son mode de production, c’est un
matériel exempt de nématodes et de
charançons.
Ces plants ont été cultivés sur différents
substrats. Tenant compte des études
menées par Henry (1973) en France,
Patrick et al. (1992) au Québec, Belaidi
(2010) en Algérie, Mayeti et al (2010) au
Gabon, Ignoumba (2011) et Tchikaya
(2011) au Congo-Brazzaville et celles du
CARBAP (Kwa, 2003) au Cameroun sur
les différents substrats ; il est indiqué que
pour la production des PIF, le substrat
utilisé par le CARBAP est le mélange
sable et parche de café; les autres substrats
sont recommandés en fonction de leur
disponibilité dans chaque pays. Or, avec la
disparition de l’Office congolais de café et
cacao (OCC), les parches de café sont
devenus rares au Congo et on ne peut
envisager d'en importer du Cameroun ou
d’ailleurs, au risque d'augmenter les coûts
de production. Il est donc question de
proposer aux paysans congolais d'autres
substrats de pépinière, qui seraient
disponibles dans leurs environnements afin
de mener à bien la technique des PIF.
L'objectif principal de cette étude a é
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d’apprécier l’effet de ces différents
substrats sur le comportement des plants en
pépinière, issus de quatre (4) variétés de
bananiers (Gros Michel "Michel" et Rose
naine "Itoro la Kaha") et plantains (faux
corne "Nganga" et French moyen
"Ombombo"). Les varietés "Michel, Itoro
la Kaha, Nganga et Ombombo" sont ainsi
appelés en Kouyou, langue vernaculaire
parlée à Owando dans le département de la
Cuvette.
Les objectifs spécifiques sont de :
- rechercher le substrat sur lequel on peut
obtenir une meilleure croissance des plants
issus des PIF de bananiers et plantains ;
- utiliser les produits et matériels locaux
pour la mise au point de ce substrat
optimal.
MATERIEL ET METHODES
CADRE D’ETUDE
L’étude a été menée à la station de
multiplication horticole d’Owando (district
d’Owando, Département de la Cuvette)
située à 505 km de Brazzaville (Figure 1).
Owando a une population de 53.565
habitants. Son climat est de type
subéquatorial avec des températures
variant entre 23 et 24°c et des
précipitations dépassant 1500 mm d’eau
par an. On y distingue deux (2) types de
saisons, la saison de pluies (septembre à
mai) et la saison sèche (juin à septembre).
La saison des pluies est interrompue par
une petite saison sèche qui va de mi-
décembre à mi-mars. Les sols sont
ferralitiques ou hydromorphes (Jamet,
1969; Jamet et Rieffel, 1976). La
végétation est du type savanicole et
forestier. Dans cette région l’agriculture
est extensive et les cultures pratiquées
sont principalement les cultures vivrières
dont le bananier et le plantain occupent le
2e rang après le manioc.
METHODOLOGIE
Méthode de la technique des PIF
Cette technique a consisté à cultiver un
bulbe de bananiers et plantains entier
incisé en croix c’est-à-dire fragmenté, en
condition artificielle en germoirs sous
serres (Ignoumba, 2011). Après
prélèvement au champ (Figure 2a), les
rejets ont été lavés à l’eau et débarrassés de
leurs racines et de toute partie nécrosée due
aux attaques des nématodes et des galeries
creusées par Cosmopolites sordidus. La
première étape est le parage à blanc
(Figure 2b) après réduction au tiers de la
longueur du pseudotronc du rejet
baïonnette. Cette étape se poursuit par le
décorticage (Figure 2c) qui consiste à ôter
le maximum des gaines foliaires,
Figure 1 : Situation de la zone d’étude dans la carte
de la République du Congo
Source : Atlas de la République du Congo, 1984
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imbriquées les unes sous les autres et
formant le pseudo-tronc, de telle sorte que
les yeux dormants situés généralement au
point d'intersection de deux gaines
foliaires, puissent réagir après avoir stressé
le bourgeon terminal. La deuxième étape
est une opération qui consiste à sécher à
l'air libre et sous abri, l'explant obtenu
pendant 48 à 72 heures, afin de continuer
la déshydratation. La troisième étape est le
rajeunissement des explants qui consiste à
poursuivre le corticage après le séchage
des explants à l’air libre. Cette opération
est suivie de la pose des fentes qui est une
opération mécanique, qui consiste à faire
des incisions croisées au centre de l'explant
(Figure 2d). Les explants étaient séchés à
l'air libre pendant une heure environ sous
abri avant leur mise en germoir. La
quatrième étape est la mise en germoir
(Figure 2e). Lors de cette étape, les
explants placés côte à côte et orientés vers
le haut, sont enfouis complètement dans la
sciure sèche. Le premier arrosage a eu lieu
24 h après la mise en germoir, puis un ou
deux apports d’eau ont ensuite été
effectués chaque semaine en appoint en se
basant sur les conditions météorologiques
extérieures et le degré d’humidité de la
sciure dans le germoir. Le sevrage des
plantules (Figure 2f) est intervenu 3 à 6
semaines plus tard au stade deux feuilles
et plus de la plantule. Ces plantules ont été
repiquées en phytocel et placées sous
ombrière (Figure 2g).
En s’appuyant sur les conditions que
doit remplir un plant de qualité selon
Francois (1989), les critères de sélection
des plantules étaient les suivantes: la
vigueur: base large et feuille bien
conformée, la taille: 10 cm et le nombre de
feuilles: 2.
c: Décorticage du rejet à Owando
b: Parage du rejet à Owando
a : Rejet baïonnette
d: Explants incisés à Owando e: Introduction des explants
dans le germoir à Owando f: Sevrage des plantules à
Owando
g: Production des plants en pépinière
Figure 2 : Etapes de la technique des PIF
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Préparation des substrats
Les différents matériaux de base (terre
noire, terre grise, litière forestière
décomposée, sciure de bois) sont pris
séparément (Tableau 1). La terre et la matière
organique ont été stérilisées par chauffage
au feu de bois pendant 12 heures pour
éliminer les maladies. De même, elles ont
été émiettées et tamisées à l’aide d’un
tamis ayant des mailles de 1 mm (Mayeki
et al, 2010) sauf, la sciure de bois.
Analyses chimiques des substrats
Les analyses chimiques des substrats
(Tableau 2) ont été effectuées au
laboratoire du Centre de Recherche sur la
Conservation et la Restauration des Terres
(C.R.C.R.T.) à Pointe-Noire.
Conduite de l’essai
Les plantules sevrées ont été d’abord
habillées puis transplantées dans des pots
contenant de substrat. 320 plantules ont été
repiqués, le même jour, dans 5 blocs
contenant chacun 64 plants par substrat. La
collecte des données a été faite en un jour
pour le repiquage des plantules et au 3e
mois après le repiquage, pour le comptage
et la mensuration.
Dispositif expérimental
Nous avons utilisé un bloc randomisé
caractérisé par deux facteurs.
Facteur 1 : les substrats; 5 niveaux :
- S1 : Terre noire (horizon 0-10 cm)
- S2 : Terre grise (horizon 0-10 cm)
- S3 : Litière forestière décomposée
- S4 : Sciure de bois
- S5 : Sciure de bois (50%) mélangée à
la terre grise (50%)
Facteur 2: cultivars de bananiers et
plantains; 4 niveaux:
- Bananier dessert "Gros Michel"
Michel
- Bananier dessert "Rose naine", Itoro la
Kaha
- Plantain "faux corne" Nganga,
- Plantain "French moyen" Ombombo.
Les facteurs "cultivars de bananiers et
plantains et substrats" ont été combinés
comme l’indique le tableau 3:
Facteurs observés
- Nombre de feuilles des plants
- Surface des feuilles des plants
- Nombre de racines des plants
- Hauteur et diamètre des plants
- Taux de mortalité des plants
Tableau 2: Composition chimique des substrats
SUBSTRAT
pH H2O
pH KCl
N
(%)
C/N
K
(meq/
100g)
Na
(meq/
100g)
Ca
(meq/
100g)
Mg
(meq/
100g)
CEC
(meq/
100g)
Terre noire
S1
5,04
4,74
0,10
9,90
0,06
0,05
0,16
0,05
0,89
Terre grise
S2
4,97
4,58
0,14
9,92
0,10
0,05
1,31
0,10
13,80
Litière
forestière
décomposée
S3
6 ,79
6,64
4,21
0,36
11,69
2,45
0,17
14,53
3,41
31,43
CEC : Capacité d’échange cationique
Tableau 1: Composition des substrats
Substrats
Composantes
Terre
Noire
(% Vt)
Terre
Grise
(% Vt)
Matière
organique
(% Vt)
Sciure de
bois
(% Vt)
S1
100
0
0
0
S2
0
100
0
0
S3
0
0
100
0
S4
0
0
0
100
S5
0
50
0
50
Sn= Substrats (avec n= 1, 2, 3, 4, 5) ; Vt= Volume total
Tableau 3: Combinaisons des facteurs
Cultivars
Substrats
S1
S2
S3
S4
S5
Mi
MiS1
MiS2
MiS3
MiS4
MiS5
It
ItS1
ItS2
ItS3
ItS4
ItS5
Ng
NgS1
NgS2
NgS3
NgS4
NgS5
Om
OmS1
OmS2
OmS3
OmS4
OmS5
Mi = Michel ; It = Itoro la Kaha ; Ng= Nganga ; Om=
Ombombo
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