Dix-huit leçons sur la société industrielle – Raymond Aron –... Leçon 5 – De la société industrielle

Dix-huit leçons sur la société industrielle – Raymond Aron – Résumé
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Leçon 5 – De la société industrielle
Economie (abrégé parfois en « éco ») industrielle: l'entreprise est radicalement séparée de la
famille. La séparation du lieu de travail et du cercle familial est une donnée qui est nullement
universelle, même dans nos sociétés. Les entreprises artisanales et les paysans en sont un contre-
exemple. En second lieu, une entreprise industrielle (abrégés parfois en « en ind ») introduit un
mode original de division du travail. Division intérieure à l'entreprise, division technologique du
travail qui est l'une des caractéristique des sociétés industrielles modernes. En troisième lieu, une
EnInd suppose une accumulation du capital. Une civilisation Ind exige que chaque ouvrier travaille
sur un capital important et que celui-ci se renouvelle. De la notion de société Ind peut sortir la
notion d'Eco progressive.
Nous savons par l'expérience historique actuelle que l'accumulation du capital ne caractérise pas
seulement les sociétés capitalistes, mais tous les sociétés Ind. A partir du momentle travailleur a
besoin d'un capital important, en voie d'expansion, une quatrième notion est introduite, celle du
calcul rationnel. Dans des grandes En, tjs nécessaire de calculer le prix de revient le plus bas, pour
renouveler et augmenter le capital. Toute société Ind implique un calcul économique rigoureux sans
lequel les pertes de richesses et d'énergie seraient immense. Le mode de calculs peut varié selon le
régime.
Dans une société Ind, on ne peut jamais réaliser tout ce que la technique rend possible. Ex:
comment répartir les ressources entre les chemins de fer et les transports routiers? Plus largement:
comment répartir les ressources de la collectivi entre les différents usages? En fait, il est
impossible qu'on emploie à chaque instant tous les procédés techniques les plus perfectionnés, car
cela supposerait des ressources en capital illimitées. Par définition, nous observons toujours des
retards, dans certains secteurs, par rapport aux possibilités techniques. Pour savoir quels sont les
procédés techniques que l'on doit employer, il faut procéder à un calcul économique. Enfin, le 5ème
caractère que l'on peut tirer de la notion des En Ind est la concentration ouvrière sur le lieu de
travail. Du coup surgit la question de la propriété des moyens de production. C'est la première fois
qu'existent d'immenses concentrations ouvrières, la 1ère fois que les moyens de prod semblent
dépasser par leurs dimensions les possibilités de la propriété individuelle, et par conséquent, posent
la question de savoir à qui ils doivent appartenir.
Définition "économique": satisfaire les besoins des hommes? Homme: besoins non essentiels aussi
urgent que ceux essentiels. A partir du moment les besoins fondamentaux (eau, nourriture,
protection) sont satisfaits, d'autres besoins surgissent (sociaux, reconnaissance, prestige, puissance)
de telle sorte qu'il est impossible de dire que tels besoins sont économiques et que tels autres ne le
sont pas. Ou deuxième définition: activité économique, ou sens que les hommes dans leur conduite
donnent à l'économie.
La monnaie est une sorte de moyen universel d'atteindre les buts que chacun peut se proposer.
Dans les sociétés les plus simples, les moyens ne font pas l'objet d'un calcul alternatif, les besoins
ou les buts sont largement déterminés, une fois pour toutes, par la coutume ou par des croyances
religieuses.
Toutes les sociétés sont pauvres et ont à résoudre un problème que nous appelons un problème
économique. Ce qui ne signifie pas que toutes les sociétés ont conscience du problème économique,
c'est-à-dire de l'administration rationnelle des moyens rares. Toutes les sociétés ont une économie
en soi, mais elles n'ont pas toutes une économie pour soi. Plus simplement, toutes les sociétés ont
une économique et résolvent leurs problèmes économiques, mais elles ne le posent pas toutes
explicitement en termes économiques.
Quel que soit le type de société (primitive, avancée), celle-ci comporte de toute façon la production,
la circulation des biens et la consommation.
Production: effort ou travail pour recueillir les fruits de la terre ou pour transformer les matières
premières. La condition de l'homme est telle qu'il ne peut vivre qu'en satisfaisant ses besoins et qu'il
ne peut satisfaire ses besoins que par un certain travail.
Ce travail peut être considéré sous trois points de vue principaux:
1) technologique: de quels outils dispose l'homme ou la société que l'on étudie?
2) juridique: à qui appartiennent les outils, en particulier la terre?
3) organisation sociale, administrative, du travail en commun?
2ème phase de tout ce système économique est celle que l'on peut appeler la circulation, à savoir
l'échange et la répartition. Nous devons étudier un système économique au point de vue du mode
des échanges, au point du vue du système qui permet les échanges, c'est-à-dire du système
monétaire, et enfin au point de vue de la répartition des biens ou du degré d'égalité ou d'inégalité de
la consommation.
Etudier une économie par rapport à la consommation , c'est chercher d'abord ce que la société veut
consommer, c'est-à-dire quels sont les buts qu'elle se propose, quels sont les biens auxquels elle
tient et qu'elle veut obtenir. Dans une société complexe, étudier la consommation, c'est déterminer
le niveau auquel se situe la consommation d'une société globale, ou d'une certaine classe, ou de
certains individus, et également essayer de déterminer comment, à partir d'une certaine quantité de
ressources les individus répartissent leur consommation en fonction de leurs désirs, ce qui amàne à
différencier ce que l'on appelle le niveau de vie, qui est une notion quantitative, et le mode de vie,
qui est une notion qualitative.
Un ensemble économique peut être saisi synthétiquement à partir de diverses considérations:
1) La division du travail et le type de division du travail dans la société globale
2) L'esprit ou des mobiles de l'activité économique
Nous avons des sociétés domine l'activité directe en vue de satisfaire les besoins, et des
économies domine le mobile du profit, les hommes travaillent essentiellement pour vendre
sur le marché et pour faire des bénéfices. Mon avis: ces deux types de sociétés sont peut-être plus
troubles à déceler ajd, car toute entreprise qui ne fait pas de bénéfices ira à sa perte (comme avant
certes, mais ajd la concurrence est rude et la rentabilité exigée tjs plus grande). Restent les ONG ou
d'autres institutions basées sur un but non lucratif, même si elles doivent faire rentrer de l'argent
d'une manière ou d'une autre.
3) Le mode de régulation ou le type d'organisation du système économique.
Il y a au moins deux types simples de gulation de l'économie: la régulation par décision centrale
ou planifiée et la régulation par les mécanismes du marché. Ce sont des types abstraits. Par ex: une
grande Ent (pour voitures) est dirigée centralement, elle établit des plans de prod pour l'année, mais
ces plans dépendent des ventes, donc des désirs des consommateurs. Ces plans peuvent donc se
modifier. Tout n'est pas planifiable. Tous les ensembles économiques comportent un mélange de
régulation par décision centrale et de régulation par ajustement des offres et des demandes sur le
marché.
Les différences des sociétés Ind dépendent, dans une large mesure, non pas de l'opposition
schématique entre marché et planification, mais de la part qui est faite au marché et de la part qui
est faite à la planif.
4) La part respective des fonctions de l'Etat et des initiatives des individus dans le système
économique.
Attention à l'opposition entre économie individuelle et économie étatisée, car elle est équivoque et
combine deux critères clairs. Il y a un critère clair qui est la propriété des instruments de prod,
propriété individuelle ou collective, et un autre critère clair qui est le mode de régulation de
l'économie. La notion du rôle de l'Etat, utilisée vulgairement, doit se subdiviser en un certain
nombre de critères plus précis.
On emploie vulgairement la notion d'esclave mécanique, c'est-à-dire à peu près l'énergie que
représente le travail normal d'un homme huit heures par jour pendant 300 jours. La société française
de 1938 disposait par tête de travailleur de 15 esclaves mécaniques; à la même période la Grande-
Bretagne en avait 36 et les USA 55. Si nous multiplions ces chiffres par 10, nous concevons un type
de société originale par rapport à toutes les sociétés connues dans le passé.
L'énumération des critères a pour but de nous montrer que, pour comprendre un ensemble
économique, nous devons nous placer à plusieurs points de vue. Ce que l'on doit chercher, c'est à
partir d'un certain critère, à fixer la marge de variation.
Le problème scientifique est le suivant: quels sont les caractères que l'on retrouve dans toute
économie où il y a séparation de l'entrepreneur et des salariés et quelles sont les marges de variation
des économies fondées sur le salariat?
Les 5 critères (entreprise séparée de la famille, d'où type original de prod, division technique du
travail, accumulation du capital et progression de l'économie, calcul économique inévitable et donc
concentration ouvrière) se retrouvent-ils tant dans une économie capitaliste que soviétique? Sur
quoi portent les oppositions? En quoi consistent les différences entre les espèces de sociétés
industrielles?
Les oppositions entre ces deux types d'économie portent essentiellement sur deux points:
1) La propriété des instruments de prod: capitalisme --> appartient à des particuliers, soviétique
--> état.
2) Le mode de régulation. On peut dire que, d'un côté, la répartition des ressources est
déterminée souverainement par le bureau du plan et que de l'autre côté, la répartition des
ressources est déterminée par les décisions des individus sur le marché, ou encore que
l'équilibre entre l'offre et la demande est obtenu dans un cas par la planif, dans l'autre cas par
approximation sur le marché.
En combinant les différents critères énumérés, on peut dire que le régime capitaliste est celui:
1) Où les moyens de prod sont l'objet d'appropriation individuelle
2) la régulation de l'économie est décentralisée (équilibre entre prod et consommation n'est
pas établi une fois pour toutes par décision planifiée, mais progressivement par tâtonnement
sur le marché.
3) employeurs et employés sont séparés les uns des autres, de telle sorte que les uns ne
disposent que de leur force de travail et les autres sont propriétaires d'instruments de prod,
d'où la relation appelée salariat.
4) Où le mobile prédominant est la recherche de profit.
5) Où, comme la répartition des ressources n'est pas déterminée de manière planifiée, il y a
fluctuation des prix sur chaque marché partiel, et même dans l'ensemble de l'économie, ce
que l'on appelle "l'anarchie capitaliste).
En fait, il n'y a aucune société capitaliste qui soit totalement, idéalement capitaliste.
Quelles sont les critiques fondamentales contre une économie capitaliste? Il y a une question de
mode: en 1880, l'anticapitaliste faisait scandale, ajd c'est plutôt le contraire. Passons en revue les
arguments principaux de cet acte d'accusation.
Il semblerait qu'on reproche au capitalisme d'abord de comporter, en tant que tel, l'exploitation
ouvrière, ensuite d'être un système immoral, fondé sur la recherche du profit; troisièmement
d'aboutir à une extrême inégalité des revenus; quatrièmement d'être dominé par l'anarchie, c'est-à-
dire par la non planification, par la non répartition volontaire des ressources et des revenus et, par
conséquent, de comporter en permanence le risque de crises. L'ouvrier, par son travail, produit une
certaine quantité de valeur, il reçoit une contrepartie inférieure à ce qu'il a produit et le reste va aux
bénéfices des capitalistes.
Tant dans le système capitaliste que soviétique (planifié), il y a un surplus investi. Le
réinvestissement de ce surplus est décidé et réparti par le bureau du plan (soviétique) et réinvesti par
l'intermédiaire des revenus individuels (capitalisme).
Quels sont les inconvénients possibles du système le surplus de valeur passe par les revenus
individuels? Ce surplus de valeur destiné à être investi pour élargir l'appareil de prod risque d'être
consommé par les détenteurs de ces revenus. Si, dans un système capitaliste, les capitalistes
recueillent des profits considérables et les utilisent à des dépenses somptuaires, le système est
détestable. Si, dans un système capitaliste, la plus grande partie des revenus qui vont aux
capitalistes est réinvestie, il n'importe pas que les revenus passent par les individus pour retourner
ensuite dans les différents secteurs de l'économie. Le 1er problème est de savoir quelle est la
fraction de ce surplus de valeur consommé par les privilégiés. Le 2ème problème est de savoir
quelle est l'efficacité relative du système de prod privée et du système de prod collective. Le 3ème
est de savoir si la répartition des investissements par décision du bureau du plan est meilleure ou
non que la répartition des investissements par le marché des capitaux, par emprunt des capitaux sur
le marché.
Mais aussi, quelle est la part de ce surplus de valeur qui va aux capitalistes? Des chiffres de 1953
sur les répartitions des dépenses totales des sociétés capitalistes américaines. Sur le total: les
salaires représentent 76.9%, 12.4% vont à l'Etat sous forme d'impôts; 5.2% sont réinvestis
directement dans l'entreprise et il reste 5.5% pour les actionnaires. Quelles sont les parts en 2000?
en 2015?
Ce dernier chiffre, 5.5%, est faible, pourquoi? Deux facteurs limitent les possibilités de dépenses
somptuaires et non-réinvestissement. 1) La concurrence. Dans une économie concurrentielle, il faut
réinvestir des capitaux pour développer l'appareil de prod pour ne pas être dépassé dans la lutte
entre les différents producteurs. 2) La pression des syndicats ouvriers. Les observateurs pessimistes
ont toujours tendance à croire que le volume de l'exploitation est directement proportionnel à la
capacité qu'ont les hommes d'exploiter leurs semblables. Plus une classe sociale détient une position
qui lui permet d'exploiter les autres classes, plus cette classe exploitera effectivement les autres
classes. Dans le cas d'une société capitaliste peu développée, appelée aujourd'hui sous-développée,
existe un petit nombre de capitalistes, qui n'ont pas l'esprit capitaliste mais l'esprit de dépenses
somptuaires, le salriat est parfois un système d'exploitation détestable à la fois pour les exploités et
pour la société dans son ensemble.
Leçon 6 – Les types de société industrielle
D'une part, l'esprit de profit peut être considéré en tant que mobile individuel du sujet économique.
En deuxième lieu, le profit peut 'etre considéré, dans le cadre d'une entreprise, en tant que
remplissant une fonction économique. Il existe une certaine proportionnalité entre le prestige d'un
métier et les revenus qu'il permet d'obtenir, mais attention de ne pas simplifier à l'excès. D'autre
part, dans une société industrielle capitaliste, la comptabilité des entreprises doit consigner, au bout
de l'année, un excédent des revenus sur les dépenses. En ce sens, il faut qu'il y ait un profit. Mais ce
fait n'est pas propre à la société capitaliste: dans tout régime économique, il faut que l'entreprise, au
bout de l'année, ait une comptabilité excédentaire.
Il est vrai qu'une entreprise publique a la possibilité d'accepter le déficit et de que celui-ci peut être
utile afin de réduire le prix d'un service ou d'une marchandise, et de favoriser ainsi le
développement industriel. Encore ne faut-il pas abuser de cette tolérance.
Que les entreprises soient privées ou publiques, le profit joue un rôle. Une fois de plus, il faut
déterminer si ce rôle est différent selon que les entreprises sont privées ou publiques, selon le mode
de fonctionnement du système.
Revenons au mobile individuel: dans une économie planifiée, il existe une monnaie (on ne peut
éviter une monnaie, on y reviendra) et le désir d'un revenu monétaire élevé continuera à jouer un
rôle. Dans une économie planifiée de type soviétique, les salaires, sauf certains salaires agricoles,
sont payés sous forme de quantité de monnaie, le désir d'obtenir le revenu monétaire le plus élevé
n'y semble pas moins vif que dans une économie capitaliste. Aussi longtemps qu'il y a une monnaie,
il y a les prix: les prix des différents objets sont inégaux, les revenus monétaires les plus élevés
permettent d'acquérir certaines bonnes choses de l’existence. De plus, des revenus monétaires
élevés apportent du prestige. Il serait souhaitable, à certains points de vue, moral ou religieux, qu'il
n'y ait aucune relation entre le montant des revenus et le prestige.
En ce qui concerne le mobile individuel, la différence est de degré plutôt que de nature. A l'intérieur
de l'entreprise, dans toutes les sociétés modernes, le calcul du profit doit intervenir en tant que
garantie du bon fonctionnement de l'entreprise. La différence, c'est que dans une économie planifiée
on peut consacrer de grandes ressources à une branche industrielle qui ne fait pas de bénéfices; dans
une société capitaliste, l'absence de bénéfices est le signe soit que l'entreprise est mal gérée, soit que
la demande diminue. Le profit remplit une fonction, il contribue à déterminer la répartition des
ressources nationales; dans une société planifiée, au contraire, la répartition des ressources
nationales est déterminée du centre, sans référence au profit que l'on peut obtenir. Mais, le jour
l'on tiendra compte des désirs des consommateurs, la répartition planifiée des ressources nationales
sera influencée par la réponse des sujets économiques qui s'exprimera plus ou moins dans le
montant des profits.
Le troisième argument contre la société capitaliste est qu'elle comporte un large degré d'inégalité
dans la répartition des revenus. L à la propriété individuelle des moyens de prod, il existe une
inégalité dans la répartition du capital. Que cette inégalité soit constante ou non, tout système qui
laisse aux individus la propriété des moyens de production, qui accepte la concurrence des individus
en vue du profit maximum, ne peut pas ne pas comporter une inégalité substantielle d'abord du
capital et ensuite des revenus. Pour l'inégalité des revenus, l'essentiel est de savoir quelle part
représentent les revenus du capital dans l'ensemble des revenus. Ex: si les revenus du capital
représentent une part faible dans l'ensemble des revenus distribués, le facteur principal d'inégalité
devient l'inégalité des salaires et des traitements à l'intérieur du système industriel lui-même.
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