Rev. sci. tech. Off. int. Epiz., 1982, 1 (4), 1031-1064.
La
peste porcine
africaine.
Nouveaux
développements*
C.
SÁNCHEZ
BOTIJA**
Résumé
: La
P.P.A.
continue à faire peser une menace sur la
produc-
tion porcine
mondiale,
bien que
la
situation sanitaire dans les pays
atteints se soit nettement améliorée ces dernières
années.
En ce qui concerne
l'épizootiologie,
le porc malade est la principale
source de contagion
directe,
les produits dérivés du porc et les vecteurs
mécaniques étant les principaux agents de
la
contagion
indirecte.
Le
rôle des porteurs de virus est encore mal
connu.
Par
contre,
celui des
tiques du genre
Ornithodorus
et des porcins sauvages en tant que
réser-
voirs du virus est bien
établi.
L'incidence
et la répartition de la
P.P.A.
restent étroitement liées aux systèmes de production et de
commerciali-
sation du
porc.
Du point de vue
clinique,
les formes subaiguës et
chroniques,
les cas
subcliniques
et
les formes
à
évolution insidieuse prennent de plus en
plus
d'importance
et
compliquent le diagnostic et la
prophylaxie.
C'est
dans
le
diagnostic
de
laboratoire que les progrès les plus
importants ont été
obtenus,
aboutissant à une efficacité des techniques
très satisfaisante
:
identification de
l'antigène
viral par
l'immunofluo-
rescence directe et
l'hémadsorption
sur culture de
leucocytes,
recherche
des anticorps
par l'immunofluorescence
indirecte,
l'immuno-électro-
osmophorèse
et la
méthode
ELISA.
En matière de
lutte
contre
la
maladie,
les principaux aspects des
orientations nouvelles sont
: la
coopération
des
éleveurs
au sein
d'Associations
de défense
sanitaire,
la qualification sanitaire des
éleva-
ges,
la création de zones
indemnes,
le contrôle
sérologique,
l'enregistre-
ment officiel des
exploitations,
la réglementation de la création de
nou-
velles
exploitations,
l'aménagement
des élevages
extensifs,
le
contrôle
permanent des
abattoirs,
la
transformation des
«
cycles ouverts
»
en
« cycles fermés
»,
la
transformation des élevages familiaux et
l'inter-
diction des transactions de ferme en
ferme.
*
Rapport présenté à la 50e Session Générale de l'O.I.E., Paris, 24-29 mai 1982 (Thème
technique II). Traduction du rapport original intitulé : « Peste porcina africana. Nuevos desar-
rollos ».
**
Chef du Département de Virologie animale de l'Institut national de Recherches agricoles,
Embajadores, 68, Madrid-12 (Espagne). Professeur à la Faculté de Médecine vétérinaire de
l'Université de Madrid.
1032
Dans
le
domaine
de
la
recherche,
d'importants
progrès
ont été faits
dans
la
connaissance
du
virus
:
structure
chimique,
biologie
molécu-
laire
et
structure
antigénique.
Les
essais effectués jusqu'à présent pour
l'obtention
d'un
vaccin contre
la P.P.A.
n'ont
pas
donné
de
résultats
satisfaisants.
Cependant,
les études
d'immunologie
entreprises ces
der-
nières
années
pourraient déboucher
sur une
meilleure connaissance des
phénomènes immunologiques
de
la P.P.A.
I.
INTRODUCTION
L'apparition
de la
peste porcine africaine (P.P.A.)
au
cours
des
cinq der-
nières années dans
de
nouvelles régions d'Amérique, d'Afrique
et
d'Europe,
a
mis une
nouvelle fois
en
évidence
la
menace permanente
que
fait peser cette
maladie
sur la
production porcine mondiale.
La forte recrudescence
de la
maladie
en
1977
en
Espagne
et au
Portugal,
et
son
apparition
en 1978 à
Malte,
en
Sardaigne,
au
Brésil,
en
République
Dominicaine
et à
Haïti, ainsi
qu'à
Cuba
en
décembre
1979, a
provoqué
une
situation sanitaire alarmante entraînant
le
risque
d'une
extension
à
d'autres
parties
de
l'hémisphère occidental.
L'application
de
programmes
de
contrôle
et
d'éradication dans
les
pays
atteints
et
l'adoption
par les
pays voisins
de
mesures pour prévenir l'introduc-
tion
de
cette maladie, avec
le
soutien
d'une
importante coopération interna-
tionale,
ont
contribué
à une
régression progressive
de
l'épizootie
à
partir
de
1980
et à une
nette diminution
des cas
dans
les
régions encore contaminées
de
l'Amérique
et de
l'Europe.
Cependant,
les
périodes
de
rémission
de
l'activité épizootique
de la
peste
porcine africaine, suivies
de
périodes
de
recrudescence,
se
sont répétées dans
l'histoire
de
cette maladie. L'expérience
a
montré
que la
propagation
de la
maladie
au
cours
des
périodes d'activation
a été
généralement facilitée
par le
relâchement
de la
surveillance
et des
mesures sanitaires appliquées dans
les
pays atteints
ou
menacés.
C'est
pourquoi
les
programmes
de
prévention,
de
contrôle
et
d'éradication actuellement
en
cours doivent être renforcés
au
maximum, précisément dans
la
période actuelle,
où la
phase
de
diffusion
explosive
qui a
démarré
en
1977-1978
a été
freinée
et
placée sous contrôle
avec
une
importante diminution
de
l'incidence offrant
de
meilleures possibili-
s d'éradication.
L'avancement
des
programmes régionaux actuels
de
lutte
sur le
terrain
et
les progrès dans
le
domaine
du
diagnostic,
de la
Pathogénèse
des
infections
inapparentes (porteurs),
de
l'immunologie
et de la
connaissance
des
proprié-
s chimiques
et
biologiques
du
virus, apportent l'espoir
d'une
diminution
à
court terme
de la
menace
que
fait peser cette maladie
sur les
effectifs porcins
de nombreux pays
et de son
éradication future dans
les
régions atteintes.
1033
Le présent document passe en revue certains des principaux aspects de la
situation actuelle de la P.P.A. à l'occasion de sa nouvelle phase historique
d'extension dans l'hémisphère occidental. Cette mise au point porte sur l'évo-
lution récente, l'épidémiologie, le diagnostic, les nouvelles connaissances
scientifiques et la lutte sur le terrain.
II.
ÉVOLUTION DE LA P.P.A. (1977-1981)
Amérique.
Au Brésil, les premiers foyers officiellement déclarés se sont présentés en
mai 1978 à Paracambi (Rio de Janeiro). Le dernier foyer déclaré
s'est
produit
en décembre 1979 et le total des foyers éteints jusqu'à cette date était de 226
(1).
En 1980, tous les cas suspects étaient négatifs aux épreuves de labora-
toire.
En 1981, aucun nouveau cas n'avait été officiellement déclaré jusqu'au
mois de juillet. Lors de la réunion C.E.E./F.A.O. d'experts sur la P.P.A. qui
s'est
tenue en Sardaigne du 23 au 25 septembre 1981, l'information a été don-
e de l'apparition au mois d'août de deux cas sporadiques entraînant des
mortalités dans les régions du Sud du pays. La surveillance sérologique dans
trois Etats du Sud (Sta. Catarina, Rio Grande do Sul et Parana) a permis de
déceler 0,3 % de sérums positifs recueillis dans des abattoirs, sur un échantil-
lon de 49 643 porcs. Les sérums positifs provenaient de l'Etat de Parana. Les
sérums de Rio Grande et de Sta. Catarina se sont avérés négatifs (2). Un pro-
gramme de lutte contre la P.P.A. est en cours.
La République Dominicaine (avec un effectif de 1 400 000 porcs) a été
atteinte en février-mars 1978 par la maladie qui
s'est
rapidement répandue
dans tout le pays. En vue de son éradication, outre l'extinction de tous les
foyers, on a procédé à l'élimination complète des porcs en 1980, avec la coo-
pération de la F.A.O., des Etats-Unis et de l'Agence Internationale de Déve-
loppement. Pour réaliser le repeuplement, des porcs sentinelles ont été intro-
duits à partir de juillet 1980 afin de déceler le virus résiduel dans les régions
de l'Est, du Centre, du Nord-Est et du Nord-Centre. Ce programme n'a pas
encore été mis en œuvre au Nord ni à la frontière avec Haïti. Jusqu'en sep-
tembre 1981, aucun cas de maladie clinique n'a été enregistré et tous les exa-
mens sérologiques des porcs introduits ont été négatifs (3).
En Haïti, la maladie a fait son apparition en décembre 1978 ; elle est res-
e enzootique dans le pays en 1979, 1980 et 1981 où l'on a observé un petit
nombre de cas avec des manifestations cliniques. Une enquête sérologique
portant sur 1 368 sérums de provenances diverses a permis de déceler 7 % de
cas positifs accompagnés d'infections inapparentes pour la plupart, indi-
quant la présence significative de porteurs du virus. En 1981, les Autorités de
Haïti, avec la coopération de plusieurs pays (Etats-Unis, Mexique, Canada)
et d'Organismes internationaux (F.A.O. et I.I.C.A.) ont entrepris un pro-
gramme d'éradication de cette maladie (9).
1034
A Cuba, la P.P.A. a été décelée une première fois en 1971 et une
deuxième fois en janvier 1980. Les enquêtes rétrospectives soulignent la pos-
sibilité de son existence dans la province de Guantanamo en décembre 1979,
avant le diagnostic des premiers cas. La maladie
s'est
étendue à trois provin-
ces : Guantanamo, Santiago de Cuba et Holguin, où 56 foyers ont été déce-
lés.
Tous les porcs de l'une de ces provinces (Guantanamo) ont été éliminés
pour supprimer la maladie. 173 287 porcs ont été abattus ou sont morts, la
plupart ont été détruits et la viande des animaux sains des zones voisines a été
utilisée pour la consommation humaine. Depuis mars 1980, aucun nouveau
cas n'a été enregistré. Au mois de septembre 1980, commença le repeuple-
ment en procédant d'abord à l'introduction de porcs sentinelles répartis dans
les zones atteintes pour y déceler la présence de virus résiduel. Ce test s'étant
terminé en décembre 1980 sans qu'aucun cas n'ait été décelé, il a été ultérieu-
rement procédé au repeuplement des régions atteintes (4, 10). En 1981, aucun
cas n'a été enregistré, et cette seconde épizootie est considérée comme éradi-
quée.
Europe.
En Espagne, atteinte depuis 1960, l'incidence de la P.P.A. a diminué
notablement au cours des dernières années. En 1977, on a noté une recrudes-
cence alarmante avec 1 780 exploitations atteintes, la plus forte incidence
enregistrée au cours de ces dix dernières années. A partir de 1978, le nombre
de cas a diminué progressivement, tombant en 1981 à 300 exploitations
atteintes déclarées jusqu'en octobre, soit l'incidence la plus faible de ces dix
dernières années, après celle de 1974.
La transformation de la structure du secteur porcin et l'application de
nouvelles orientations du programme d'éradication récemment renforcé par
l'appui financier de la C.E.E., ont contribué à cette évolution favorable de
l'incidence de la maladie.
Au Portugal, le nombre de cas a diminué de façon significative au cours
de ces dernières années. Après la recrudescence enregistrée en 1977 avec 5 017
exploitations atteintes, une régression progressive de l'incidence a eu lieu
dans les années suivantes avec 2 527 exploitations atteintes en 1978, 440 en
1979,
257 en 1980 et 68 au cours des sept premiers mois de 1981. Un pro-
gramme de prophylaxie est en cours avec la coopération financière de la
C.E.E.
En Sardaigne, la P.P.A. a été décelée en mars 1978, 19 foyers ayant été
déclarés jusqu'en décembre de cette même année. Dans les années suivantes,
14 foyers ont été enregistrés en 1979, 42 en 1980 et 4 en 1981 (jusqu'en octo-
bre).
La maladie garde actuellement son caractère enzootique, favorisé par le
système de production familial et le régime de pâturage en liberté, ainsi que
par l'écologie de l'île.
A Malte, le repeuplement se poursuit sous contrôle, sans aucune inci-
dence, avec la coopération de la C.E.E. et de la F.A.O.
1035 -
Afrique.
L'information disponible par l'intermédiaire de l'O.I.E. signale l'inci-
dence suivante déclarée au cours des dernières années (1978-1981).
L'Angola a signalé 29 foyers en 1978, 28 en 1979, 45 en 1980 et 23 foyers
en 1981 jusqu'au mois de septembre.
Le Zimbabwe a notifié 1 cas en 1978 et un autre en 1979 ; le Soudan, 2
foyers en 1978 ; la République Sud-Africaine, 4 foyers en 1978, 1 en 1979 et 1
en 1981 (jusqu'en septembre) ; le Mozambique, 1 cas en 1979 ; la Zambie, 4
cas en 1979.
A Sao Tomé et Principe, le premier foyer de P.P.A. a été décelé en mars
1979 dans une porcherie de 70 animaux qui utilisait les déchets d'aliments
provenant d'une caserne proche de la ferme, qui recevait des viandes de porcs
de l'Angola. Le 4 avril, le laboratoire de Luanda confirma le diagnostic (5).
En mai 1979, plus de 7 000 porcs avaient été abattus ou étaient morts (6). Le
gouvernement du pays a établi un programme de prophylaxie et d'éradication
avec l'assistance de la F.A.O. En 1980 et 1981 (jusqu'au mois de septembre),
aucune information officielle sur la situation n'est enregistrée dans le Bulletin
du Service d'information de l'O.I.E.
En résumé, l'évolution de la P.P.A. sur le plan mondial présente actuelle-
ment une tendance à la régression de l'activité épizootique.
La maladie persiste sous forme enzootique avec une diminution impor-
tante du nombre de cas en Espagne, au Portugal, en Sardaigne et au Brésil.
En Haïti, la P.P.A. reste également enzootique. Aucun nouveau cas ne
s'est
présenté en République Dominicaine, à Cuba ni à Malte après l'élimination
des porcs et le repeuplement sous contrôle réalisé jusqu'à présent.
III.
ÉPIZOOTIOLOGIE
Introduction et propagation de la
P.P.A.
dans les pays indemnes.
L'entrée du virus dans un pays a lieu par l'introduction de produits déri-
s du porc ou de porcs sur pied provenant de pays infectés.
L'origine des premiers cas dans les pays nouvellement atteints au cours de
dernières années (1978-1979), Malte, Sardaigne, Brésil, République Domini-
caine, Haïti, Sao Tomé et Principe, a été attribuée, de même que précédem-
ment dans d'autres pays, à l'alimentation des porcs par l'utilisation de
déchets de cuisine provenant de bateaux ou d'avions. Dans le cas de pays
ayant des frontières terrestres, la propagation de la maladie, à partir des pays
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