Anévrisme congénital du sinus de Valsalva non rompu C

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Anévrisme congénital du sinus de Valsalva non rompu
asymptomatique - Réparation chirurgicale
● E. Coignard, F. Jault, I. Gandjbakhch*
L’anévrisme du sinus de Valsalva a été décrit pour la première fois par Thurnam en 1840 (1). En 1957, Lillehei rapportait la première correction chirurgicale réussie sous circulation extracorporelle (CEC). L’incidence de cette
anomalie est inférieure à 1 %. Elle est diagnostiquée lors
d’une complication (une rupture dans une cavité cardiaque)
ou lors d’une échocardiographie systématique. Nous rapportons ici le cas d’un anévrisme non rompu, de découverte
fortuite, traité chirurgicalement.
s’agir soit d’un anévrisme du sinus de Valsalva postérieur, soit d’un
abcès de l’anneau. Cette néocavité anéchogène dépend du sinus,
coronarien postérieur (figure 2) et correspond donc à un anévrisme
du sinus comme le montre le plan longitudinal (figure 3). Il n’y a
ni insuffisance aortique ni rupture ou fistulisation.
Monsieur C. est adressé dans notre service pour une endocardite
mitrale aiguë à streptocococcus oralis avec emboles cérébraux (de
découverte fortuite sur un scanner cérébral). Ce patient de 40 ans
sans antécédent connu est traité médicalement depuis quinze jours.
À l’admission, il est apyrétique. On entend un souffle holosystolique 1/6 maximal à la pointe. Il n’y a pas de signes d’insuffisance
cardiaque. L’électrocardiogramme est normal. La radiographie
thoracique montre un index cardiothoracique à la limite supérieure
de la normale. L’examen neurologique est normal.
L’échocardiographie transœsophagienne montre une fuite mitrale
modérée avec une végétation de 12 mm au niveau de la face auriculaire de la grande valve mitrale. On note une image anormale
entre les deux oreillettes en incidence 4 cavités (figure 1). Il peut
Figure 1. Échocardiographie transœsophagienne, plan transversal, incidence 4 cavités obtenue à 0° : “néocavité anéchogène” entre les deux
oreillettes correspondant à un anévrisme du sinus de Valsalva postérieur.
* Hôpital de la Pitié, Paris.
La Lettre du Cardiologue - n° 309 - mars 1999
Figure 2. Échocardiographie transœsophagienne, coupe petit axe de
l’orifice aortique à 53° : anévrisme du sinus de Valsalva postérieur (1) de
4 cm de diamètre.
Figure 3. Échocardiographie transœsophagienne, plan longitudinal :
l’incidence obtenue à 122° confirme le diagnostic d’anévrisme du sinus
de Valsalva postérieur sans site de rupture.
Le patient est opéré sous CEC. Une aortotomie basse transversale est pratiquée. Le chirurgien confirme une dilatation du sinus
de Valsalva postérieur créant un anévrisme hémisphérique de 4 cm
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de diamètre. L’orifice d’entrée de cet anévrisme est fermé par la
mise en place d’une pièce de Vascutex assujettie par un surjet de
Prolène 5/0. Les sigmoïdes aortiques sont normales. Il n’y a pas
d’abcès. Par ailleurs, la végétation mitrale est excisée. Une plastie mitrale est effectuée. L’échocardiographie transœsophagienne
peropératoire ne met en évidence qu’une minime fuite mitrale
centrale
DISCUSSION
L’anévrisme du sinus de Valsalva est une pathologie rare. Quant
à l’étiologie de cette lésion, les études sont contradictoires. Une
faiblesse structurelle à la jonction de la média et de l’anneau
fibreux paraît contribuer à la formation de l’anévrisme (2). Les
formes anatomiques se répartissent en quatre groupes selon l’origine de l’anévrisme (3) : dans le type I, l’anévrisme prend naissance dans le tiers antérieur du sinus coronarien droit, dans le
type II, dans son tiers moyen, dans le type III, dans son tiers postérieur. Le type IV implique le tiers antérieur du sinus postérieur,
comme dans notre cas. Le sinus coronarien gauche n’est à peu
près jamais impliqué.
L’anévrisme non rompu est asymptomatique en l’absence d’une
insuffisance aortique. L’échocardiographie a amélioré considérablement sa découverte. Devant l’attitude à tenir ensuite, les données de la littérature sont insuffisantes en l’absence d’autres anomalies associées, comme dans notre cas : les anévrismes
sacculaires évolueraient plus vers la rupture que les autres types.
Un traitement chirurgical serait également à envisager en cas d’insuffisance aortique, d’obstruction de la chambre de chasse ventriculaire droite (4) et d’apparition de troubles du rythme (5).
La réparation peut s’effectuer par les cavités droites ou par l’aorte,
comme dans notre cas. Dans certains cas, une approche bilatérale est indiquée (3, 5).
Les résultats du traitement chirurgical sont habituellement très
bons et les récidives très rares (3). Chez notre patient, les suites
postopératoires étaient simples. À sa dernière visite de contrôle,
il restait asymptomatique et l’examen clinique était normal. ■
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É F É R E N C E S
B I B L I O G R A P H I Q U E S
1. Thurnam J. On aneurysm and especially spontaneous aneurysm of the ascending aorta and sinus of Valsalva. Med Chir Tr 1840 ; 23 : 323.
2. Fischbein M.C., Obma R., Roberts W.C. Unruptured sinus of Valsalva aneurysm. Am J Cardiol 1975 ; 35 : 918-22.
3. Cartier
P., Boudreault J.R., Jean J.D., Chartrand C. Rupture d’anévrisme
congénital du sinus de Valsalva. Chir Pediatr 1984 ; 25 : 83-6.
4. Chau E.M.C., Cheung K.L., Yip A.S.B., Chow W.H. Large unruptured aneurysm in sinus of Valsalva. An unusual cause of right ventricular inflow and outflow tract obstruction. Circulation 1998 ; 97 : 114-5.
5. Akasaka T., Ogura Y., Anbe J., Nakajima H., Ozeki M., Mitsuishi T., Takahashi
S., Kato H., Yanagawa Y. Unruptured congenital aneurysm of the sinus of Valsalva
associated with LV-RA communication. Surgical repair in an infant - a case
report. Vascular Surgery 1992 ; 26 : 222-6.
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Dépôt légal 1er trimestre 1999
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La Lettre du Cardiologue - n° 309 - mars 1999
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