seuil ischémique... Malgré l’amélioration constante de l’image-
rie, son interprétation peut cependant être ardue en présence d’une
échogénicité médiocre, et elle reste actuellement subjective, dans
l’attente de procédés de quantification (Color Kinesis, méthode
dérivée de la reconnaissance automatique des contours, doppler
tissulaire, quantification de l’épaississement pariétal...).
Certaines situations rendent la détection de l’ischémie myocar-
dique plus délicate et méritent que l’on s’attarde sur la faisabi-
lité et l’apport diagnostique de l’échocardiographie dobutamine,
méthode d’échocardiographie de stress la plus diffusée actuelle-
ment en France, face à ces contextes particuliers.
ÉCHOCARDIOGRAPHIE DOBUTAMINE
ET BÊTABLOQUANTS
Qu’attendre d’une échocardiographie dobutamine sous bêtablo-
quants ? Cette question peut paraître saugrenue, les bêtabloquants
inotropes et chronotropes négatifs ayant une action antagoniste
de celle de la dobutamine. Il est donc habituellement de règle de
stopper progressivement les bêtabloquants avant d’effectuer une
échocardiographie dobutamine.
Dans certains cas cependant, le clinicien éprouve des difficultés pra-
tiques ou thérapeutiques à arrêter les bêtabloquants, et il ne semble
pas alors rédhibitoire de réaliser l’examen sous bêtabloquants, à
condition de pouvoir utiliser l’atropine pour potentialiser l’accéléra-
tion de la fréquence cardiaque, de manière à obtenir un test inter-
prétable (mené à ≥85 % de la fréquence maximale théorique [FMT]).
P.M. Fioretti et al. (2) ont comparé les résultats de l’échocardio-
graphie dobutamine chez 26 patients explorés sans et sous bêta-
bloquants (métoprolol 100 mg x 2/jour), avec potentialisation par
l’atropine en fin de test (au maximum 1 mg i.v.) si le patient
n’avait pas atteint 85 % de la FMT. L’atropine a été plus souvent
utilisée pour les patients sous bêtabloquants (22/26 contre 6/26) ;
sous dobutamine et atropine, que les patients soient bêtabloqués
ou non, l’examen est parvenu à son terme (≥85 % FMT et/ou
ischémie myocardique ) pour 25 des 26 patients. De nouvelles
anomalies de la contraction segmentaire ont été constatées sans
bêtabloquants pour 12 patients (46 %) sous dobutamine seule,
puis pour 14 patients (53 %) après injection d’atropine ; si seuls
3patients sous bêtabloquants (12 %) ont été positifs sous dobu-
tamine isolée, l’ischémie est finalement détectée chez 15 patients
(57 %) après atropine, et le score de cinétique segmentaire au pic
du test est similaire pour les examens effectués sans ou sous bêta-
bloquants (1,22 ± 0,22 et 1,24 ± 0,25). La coronarographie a
confirmé des lésions coronaires significatives ≥50 % pour les
15 patients positifs, et la sensibilité diagnostique de l’examen est
comparable avec ou sans bêtabloquants. Ainsi, si le traitement
bêtabloquant réduit l’effet chronotrope de la dobutamine et
l’incidence de l’ischémie myocardique pendant le test, l’ad-
jonction d’atropine autorise une accélération du rythme car-
diaque et une détection de l’ischémie myocardique compa-
rable à celle obtenue pour les mêmes sujets démaquillés.
L’étude de L.H. Ling et al. (3) confirme l’intérêt de l’atropine,
dont la posologie maximale est ici de 2 mg i.v., pour la réalisa-
tion et la fiabilité de l’échocardiographie dobutamine chez
271 patients bêtabloqués.
En termes de faisabilité dans notre pratique personnelle, nous
avons revu les résultats obtenus pour 29 patients bêtabloqués.
L’échocardiographie dobutamine avait pour but non pas le dia-
gnostic d’ischémie myocardique, mais la détection d’une isché-
mie résiduelle sous traitement. La fréquence cardiaque de base
était en moyenne de 64/mn. L’examen a été mené jusqu’au palier
de 40 γ/kg/mn de dobutamine et la dose moyenne d’atropine i.v.
utilisée a été de 1 mg, sans dépasser la dose maximale de 1,5 mg.
Seize des 29 patients ont atteint la fréquence cardiaque cible
(≥85 % FMT), 8 autres ont eu un examen stoppé volontairement
avant ce seuil pour positivité de l’échocardiographie dobutamine
ou effets secondaires nécessitant l’arrêt ; restent 5 patients, dont
2 n’ont pu recevoir de l’atropine en raison de contre-indications
prostatiques et n’ont atteint, de ce fait, respectivement que 70 %
et 74 % de la FMT. Nous avons constaté sous bêtabloquants un
même comportement : faible accélération de la fréquence car-
diaque (en moyenne 50 % de la FMT) jusqu’au palier inclus de
30 γ/kg/mn de dobutamine en dépit de la première injection
d’atropine (0,25 mg) dès la fin du palier de 20 γ/kg/mn, puis accé-
lération brutale de la fréquence cardiaque en fin d’examen lors
du palier de 40 γ/kg/mn sous doses maximales d’atropine.
S’il reste préférable d’effectuer l’échocardiographie dobuta-
mine démaquillée, il est possible d’obtenir des informations
fiables en termes de détection d’ischémie myocardique chez
des patients bêtabloqués, sous réserve d’utiliser des posologies
relativement élevées d’atropine (sans dépasser 2 mg i.v.), et
donc de s’assurer au préalable de l’absence de contre-indica-
tions classiques à ce produit (glaucome, adénome de prostate...).
ÉCHOCARDIOGRAPHIE DOBUTAMINE ET
FIBRILLATION AURICULAIRE PERMANENTE
En présence de troubles du rythme auriculaires paroxystiques,
l’échocardiographie dobutamine peut se compliquer de leur réci-
dive. Mais lorsque la fibrillation auriculaire est permanente, peut-
on rechercher une ischémie myocardique par l’échocardiographie
La Lettre du Cardiologue - n° 358 - octobre 2002
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MISE AU POINT
.../...
Tableau I. Données d’une méta-analyse (1) comparant la valeur dia-
gnostique de l’échocardiographie de stress (effort ou dobutamine) par
rapport à la scintigraphie myocardique (effort ou dobutamine).
Échocardiographie Scintigraphie
Sensibilité Spécificité Sensibilité Spécificité
%%% %
GMP GMP
Effort* 78 67 92 91 83 78 90 83
Dobutamine** 80 69 88 86 86 78 91 73
* Méta-analyse reposant sur sept études comparant échocardiographie et scintigraphie
myocardique à l’effort. Résultats globaux.
** Méta-analyse reposant sur huit études comparant échocardiographie et scintigraphie
myocardique sous dobutamine. Résultats globaux.
( G : tous patients. M : monotronculaires. P : pluritronculaires).