Association pour l’initiative du Master Environnement – Droit Retour sur la conférence du jeudi 4 février 2016 au café des Champs libres « L’après COP21 : la parole est aux juristes » : C’est donc par une approche juridique que ce nouvel épisode de la série de conférences « post COP21 » a été abordé. La parole est donnée à trois chercheurs CNRS de l'Université de Rennes 1, spécialistes en Droit européen de l’environnement et en Droit international du climat. Parmi eux, un membre de la délégation du Costa Rica présent au négociation de la COP21! Ce dernier démarre la conférence sur les difficultés d’un petit pays comme le Costa Rica à négocier seul sur la scène internationale. C’est la raison pour laquelle il s’est associé avec 5 autres pays d’Amérique latine et des Caraïbes sous l’égide de l’association indépendante AILAC, pour le rendez-vous de Paris. On apprends que la tâche s’annonçait difficile dès la première semaine, qui consistait à l’accord d’un texte qui ferait ensuite l’objet de la négociation de haut niveau entre les ministres, lors de la dernière semaine. Le chercheur ajoute même : « avant la négociation rien n’était décidé. Chaque paragraphe était entre crochets ». Mai ce n’est plus un secret pour personne, si la lutte contre le changement climatique est fédératrice, la position de chaque pays diverge fortement eu égard à leurs différences. Nos trois juristes ont assurément tenté de donner une tonalité positive à cet accord de Paris, du moins un regard enthousiaste, qui n’en fait pas une finalité mais la fusée de lancement d’une grande mobilisation. Certes, à l’issu des négociations, ce sont des promesses étatiques généralisées, sans système de contrôle et en faveur d’un objectif qui, malgré des efforts utopiques, aura des conséquences notables et irrémédiables sur la vie terrestre. Alors OUI, le régime du protocole de Kyoto était effectivement plus strict, avec une obligation de résultats pour les pays membres sous peine de sanction et un contrôle des réductions de GES vérifiés par des indicateurs de l’ONU! Et OUI on a eu des résultats probants, au-delà même des objectifs fixés! SEULEMENT voilà, les Etats-Unis n’ont pas ratifié, le Canada s’est retiré, et on s’est retrouvé avec seulement 37 pays industrialisés réellement engagés sur les objectifs, puisque les pays en développement, incluant le Brésil, la Chine, l’Inde et l’Indonésie, n’étaient pas concernés par l’engagement de réduction d’émissions de GES! Bilan : l’austérité est-il le meilleur moyen d’atteindre des résultats planétaires et d’obtenir la contribution des pays développés, pollueurs historiques et des pays en développement qui marchent sur leurs pas. Rappelons que c’est un accord universel des 195 pays qui a été obtenu (de longue haleine) à l’issu de cette COP, incluant la Chine, les Etats-Unis et le Canada, qui avec l’Europe représentent plus de la moitié des émissions de GES mondiales. Et Marion Lemoine d’ajouter que l’enjeu est également (et surtout) financier alors on peut dire que ce « Big 4 » est le bienvenu ! Ajouté à un objectif revu à la hausse (1,5°C) qui manque pas d’ambition et d’un traité juridiquement contraignant à la clé (s’il est ratifié), on est loin d’un échec. Le succès de la COP21 tient bien à une nouvelle logique, qui promeut le respect des obligations en évitant le « blame and shame » du protocole de Kyoto, ciblant les Etats qui ne respecteraient pas leurs engagements gravés dans le marbre. Cela dit, avant de crier victoire, il y a encore trois étapes/obstacles à franchir: la signature du traité (ouverture le 22 avril à New York), la ratification et, à la condition que 55 pays représentant au moins 55% des émissions ratifient, l’entrée en vigueur de l’accord. Le deuxième point souligné par nos juristes à ceux qui cracheraient encore dans la soupe : l’aboutissement de cette COP se regarde à plusieurs niveaux. Elle n’est bien-sûr pas une finalité en soi mais bien la base d’un mouvement juridique national et d’une action volontaire locale. Nathalie Hervé-Fournereau explique bien les répercutions du traité en Droit communautaire européen par l’adoption de textes juridiques contraignants. A l’issu il y aura donc la possibilité de revendiquer ce Droit international. Gardons les pieds sur Terre néanmoins (tant que c’est encore possible), il ne faut pas attendre tout de l’Etat, c’est à l’échelle locale que ça se joue, quand bien même ce soit le « green business » qui amorce et boost le changement. Hé oui arrêtons d’être hypocrite deux secondes! Si on attend l’effet « goutte d’eau » de chaque citoyen, au nom d’une responsabilité climatique abstraite, les 15 ans pour agir vite vont passer pour le coup très très vite ! Mathilde Jourdan, consultante APIMED Vous pouvez réécouter les conférences en post-cast sur http://www.espacesciences.org/conferences/revoir-une-conference