Prise en charge de la douleur Établir et respecter les protocoles Si tout le monde sait ce qu’est la douleur, tout se complique quand il s’agit de la définir ou de la prendre en charge. La protocolisation de la prise en charge est-elle une solution pour une meilleure qualité de soins ? C ette protocolisation semble avoir fait ses preuves au CHU Gaston-Doumergue, à Nîmes. Le Dr Éric Viel*, anesthésiste, témoigne : « Cette démarche prend en compte la douleur suivant sept étapes : entendre, observer, rechercher, évaluer, transmettre, traiter et réévaluer le traitement. » Au CHU de Nîmes, tous les types de douleurs sont traités : douleur postopératoire, douleur rhumatologique, douleur cancéreuse, douleur de l’enfant... Introduire la démarche qualité Les spécialistes sont formels et les patients encore plus : il reste encore des progrès à accomplir dans le traitement de la douleur. Ainsi, dans le cadre de la chirurgie ambulatoire, il semblerait plus aisé de contrôler la prise en charge de la douleur. Or, le constat n’est guère brillant puisque plus de 50 % des patients expriment des plaintes algiques ; seuls 11 % profitent de traitements antalgiques. L’avantage d’une protocolisation est de permettre d’atteindre la qualité grâce à la traçabilité des médicaments mais aussi de bénéficier de protocoles établis pour soulager les douleurs. La douleur est une sensation personnelle exprimée par chaque individu selon son mode propre, en rapport avec son vécu. Entendre, pour le soignant, c’est d’abord apprendre à écouter la plainte du patient. « Savoir écouter doit éviter à autant de patients de sortir de chirurgie ambulatoire sans ordonnance (plus de 1 personne sur 2), sans médicaments pour le soir (plus de 4 personnes sur 5) », précise le 8 Dr Viel. Après l’écoute, ou parallèlement, vient l’observation. Observer, c’est savoir détecter chez l’enfant, par exemple, une position de repli sur lui-même, signe de souffrance. La recherche s’exerce par l’interrogatoire, l’examen clinique de tout signe d’algie direct ou indirect, comme une accélération du pouls du rythme respiratoire. Une fois diagnostiquée, encore faut-il évaluer la douleur. Le meilleur outil d’évaluation est alors la règle analogique que le patient manipule lui-même après que l’on s’est assuré qu’il en a bien compris le fonctionnement ; les résultats numériques doivent alors être notés sur le dossier médical, au même titre que les pouls, la pression artérielle ou la température. La transmission de ces données est essentielle à la qualité du suivi du malade. « Un service rarement rendu au point que, dans le cadre de la chirurgie ambulatoire, les personnels de santé amenés à prendre le relais thérapeutique, s’ils connaissent le type d’intervention subie par le patient, sont rarement tenus au courant de l’anesthésie et des médications appliquées alors », déplore le Dr Viel. Dans ces conditions, il devient difficile d’assurer une liaison correcte avec une efficacité maximale. Par ailleurs, de retour à la maison, les familles ne suivent pas toujours correctement les prescriptions d’antalgiques et ne comprennent pas forcément l’importance de la régularité dans la prise des médicaments. C’est tout l’intérêt des démarches qualité destinées à mettre le doigt sur les insuffisances d’un système responsables d’une mauvaise prise en charge de la douleur. Professions Santé Infirmier Infirmière - No 45 - avril 2003 La douleur de l’enfant La douleur de l’enfant, peut-être encore plus que chez l’adulte, est inégalement prise en compte. D’autant que certaines idées ont la vie dure ! Chez l’enfant, la douleur ne se résume pas à un simple problème physiologique ou psychologique à traiter avec un outil d’évaluation et une prise de médicaments. La solution n’est pas unique mais multiple, et souvent complexe. D’où la nécessité de se former** afin de comprendre les différentes notions nécessaires à la bonne prise en charge. Pour soulager la douleur de l’enfant, il faut assimiler des connaissances très techniques. C’est d’abord reconnaître à l’enfant le droit d’avoir mal, lui dire la vérité, ensuite l’informer et le rassurer en tenant compte de ses angoisses spécifiques. Prendre en charge un enfant douloureux n’est jamais simple ; c’est parfois long et le succès n’est jamais assuré. Il faut savoir revenir en arrière. Le traitement n’est pas réservé aux seuls services de prise en charge de la douleur ; il doit être une préoccupation constante de tout soignant dans toutes les occasions de soin. Tous les professionnels qui interviennent auprès d’un enfant sont concernés. Et tous les moyens, médicamenteux ou non, sont complémentaires. Il faut savoir que la non-prise en charge des gestes douloureux dans la petite enfance risque de provoquer un comportement phobique à l’égard des soins, des soignants et du monde hospitalier, et de devenir un frein à la prise en charge de la maladie elle-même. A.-L.P./J.B. * Medec, mars 2003. ** L’association Sparadrap met à la disposition des soignants un livret et un film : Pour en savoir plus sur la douleur de l’enfant. Cf. www.sparadrap.org ou [email protected]