La Lettre du Cardiologue - n° 365 - mai 2003
41
terminale pas encore arrivé au stade de la décompensation
majeure. Les études contrôlées prospectives actuellement en cours
paraissent encourageantes.
Quel que soit le type de système utilisé (12), le taux de succès est
très voisin, toutes indications confondues : chez les patients pris
en charge au stade du choc cardiogénique, le taux de décès pen-
dant la période d’attente sous assistance est de l’ordre de 25 %,
et le taux de succès de la greffe est comparable à celui observé
dans une greffe classique (80 % de succès à un an). Le facteur de
risque essentiel est constitué par la sévérité de l’état initial, et l’on
peut opposer un taux d’échec supérieur à 50 % dans les indica-
tions compassionnelles, trop tardives, à un taux de succès de 80 %
dans les bonnes indications.
Le recul permet de dire que si l’assistance mécanique a supprimé
l’indication de la greffe cardiaque en extrême urgence, elle ne
constitue cependant pas une solution acceptable au problème de
la pénurie d’organe.
L’attente de la récupération myocardique
Les techniques d’assistance peuvent à la fois autoriser la survie
et créer un nouvel équilibre hémodynamique et métabolique faci-
litant la récupération de la fonction ventriculaire native (15).Cela
se voit couramment dans les salles de cathétérisme où la contre-
pulsion diastolique est aujourd’hui très largement utilisée. Cela
est aussi démontré au décours de l’infarctus du myocarde, où la
réduction même minime de l’étendue de la nécrose peut per-
mettre au malade la survie et une meilleure qualité de vie que
celle d’un greffé. Les plus beaux succès de l’assistance, indis-
cutables, sont obtenus dans les cas de myocardites aiguës, gra-
vissimes, la récupération myocardique étant observée après
quatre à six semaines d’assistance.
De façon tout à fait surprenante, la prolongation de l’assistance
mécanique a permis de révéler un potentiel de récupération,
jusque-là peu soupçonné, chez les patients en insuffisance car-
diaque chronique. Les quelques belles observations de sevrage
réussi après six à dix mois d’assistance chez des patients porteurs
de cardiomyopathies dilatées, idiopathiques, sont ainsi très encou-
rageantes. Les progrès de la biologie moléculaire, qui permettent
une meilleure compréhension de cette maladie (16), aux contours
encore méconnus, devraient fournir des indicateurs précis de cette
récupération à l’échelon moléculaire et cellulaire. L’association à
l’assistance mécanique (qui assure la perfusion périphérique et la
décharge du ventricule) des agents pharmacologiques suscitant ou
favorisant le remodelage myocardique paraît augmenter les
chances de la récupération mécanique des ventricules. Il n’est sur-
tout pas exclu de penser que la thérapie génique et/ou la thérapie
cellulaire appliquées pendant la période d’assistance puissent aug-
menter les chances de reprise fonctionnelle dans ces cœurs très
altérés initialement, mais mis au repos de façon prolongée.
L’implantation définitive se conçoit de deux
manières
✓L’implantation définitive d’une dérivation ventriculaire
gauche, les batteries portables à la ceinture, ou connectée à des
batteries implantées. L’expérience acquise avec des systèmes
à pompe volumétrique (Novacor®,Thermedic®II, LionHeart®)
souligne les difficultés de la réhabilitation complète des patients,
surtout si l’état initial est plus critique ou le patient plus âgé, mais,
surtout, les risques infectieux à long terme. Les résultats récem-
ment obtenus à l’aide de systèmes comprenant des pompes non
occlusives paraissent, en revanche, tout à fait encourageants. Quel
que soit le système utilisé, l’expérience clinique souligne enfin
la faisabilité et l’intérêt de l’assistance ventriculaire gauche, exclu-
sive, permanente, définitive, alternative au remplacement car-
diaque complet du fait de la récupération très fréquente et com-
plète de la fonction ventriculaire droite.
✓L’implantation de deux ventricules orthotopiques. Les suc-
cès récents dans ce domaine, notamment avec le cœur AbioCor®,
autorisent l’optimisme, malgré les risques thromboemboliques,
les perturbations de l’inflammation et de l’immunité. La relative
autonomie complète, réduite à la durée de charge de la batterie
primaire, reste cependant un souci.
LES PROBLÈMES POSÉS
L’expérience acquise depuis le début des années 1980 permet
d’identifier les problèmes encore mal maîtrisés, qui sont d’ordres
très divers :
Problèmes technologiques
La technologie des pompes volumétriques elle-même est aujour-
d’hui bien maîtrisée, ce dont atteste le caractère exceptionnel des
dysfonctions primaires de système d’assistance ou de cœurs arti-
ficiels. En revanche, la fiabilité des pompes axiales, quelles
qu’elles soient, reste à démontrer. L’expérience clinique, encore
restreinte, des pompes axiales de première génération, où la tur-
bine est fixée sur des supports, confirme la nécessité d’une évo-
lution vers les pompes sans support, où la turbine est maintenue
sur son axe par un champ magnétique.
Un second problème est constitué par la durée de charge des
batteries implantées, qui contrôle la durée de la vie totalement
autonome ; l’expérience montre que celle-ci est encore insuf-
fisante.
Le troisième problème concerne l’impact des biomatériaux sur
l’interface avec le sang : l’activation des diverses cascades (coa-
gulation, fibrinolyse, inflammation) et des plaquettes persiste,
quel que soit le revêtement choisi. Le risque thromboembolique
reste un souci majeur, directement lié aux propriétés des surfaces,
mais aussi aux caractéristiques du circuit (17). Le comportement
à long terme des surfaces, enfin, reste mal évalué. Il y a tout lieu
de penser, cependant, que l’augmentation de l’activité clinique
permettra de dégager les protocoles adéquats et de financer le
développement des nouveaux systèmes.
Problèmes cliniques
L’expérience confirme le rôle considérable de l’état du patient au
moment de l’implantation : la simplicité des suites opératoires et,
partant, le risque vital sont fonction de la sévérité de l’atteinte
des grandes fonctions, cérébrale, hépatique, rénale, pulmonaire,
au moment de l’implantation. Cette observation permet de sou-
MISE AU POINT