a question posée ne supporte qu’une seule réponse : pour
tout le monde.
Cependant, la rigueur de la politique éditoriale et la faillibilité
de l’auteur imposent de restreindre le propos aux deux acteurs
principaux que sont le médecin et le malade.
Nous envisagerons dans un premier temps l’état actuel de l’ac-
cès à l’information et émettrons, dans un second temps, un cer-
tain nombre de souhaits qui, loin de créer une situation idoine,
permettraient d’améliorer la situation quant à l’information sur
la sécurité d’emploi des médicaments dans notre pays.
L’information est un droit pour le malade, un droit et un devoir
pour le médecin. Ainsi nombre de textes concernant le droit à
l’information des malades sont-ils publiés dans le code civil
(article 16-3), le code de déontologie (article 35) et dans la
charte des patients hospitalisés et le référentiel de l’Agence
nationale d’accréditation et d’évaluation en santé (ANAES).
En ce qui concerne l’information dont disposent les médecins,
force est de constater que les deux sources principales sont
d’une part la visite médicale conduite par les laboratoires, ainsi
que l’atteste une étude menée par Jolliet et al. au Centre régio-
nal de pharmacovigilance de Nantes et, d’autre part, la presse
médicale spécialisée et l’Internet. Les autres sources dispo-
nibles, qui restent malheureusement peu utilisées, sont le Centre
régional de pharmacovigilance (CRPV), l’Agence française de
sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) et la Caisse
nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés
(CNAMTS). On peut regretter que l’information fournie par
ces différents organismes soit souvent d’accès difficile et très
peu homogène. Il paraît dès lors indispensable d’envisager la
création d’une structure regroupant les différentes institutions,
non concurrente de l’industrie pharmaceutique, mais chargée
d’informer, par divers moyens à discuter, les professionnels de
santé sur la pharmacovigilance, la prévention du risque iatro-
gène médicamenteux, et surtout le bon usage du médicament.
Cette mesure est à l’évidence utile, mais ne représente qu’un
seul aspect de l’accès à l’information. Ainsi, deux sources d’in-
formation sont essentielles, mais souvent négligées, et dans tous
les cas peu formalisées actuellement dans notre pays : l’ensei-
gnement et la formation médicale continue.
Les leaders de la pharmacologie d’aujourd’hui sont désormais
convaincus de l’importance à accorder à l’information sur la
sécurité d’emploi et le bon usage du médicament. Ainsi, l’en-
seignement sur les vigilances, la iatrogénie médicamenteuse et
le bon usage du médicament représente une part de plus en plus
importante de l’enseignement dans nos facultés. On ne peut que
se réjouir de cet état de fait et encourager la pérennisation d’une
telle option.
En ce qui concerne la formation médicale continue, il est regret-
table que toute tentative de réforme ou de réflexion à propos
de cet indispensable outil revête un côté tabou. Il s’agit pour-
tant d’un volet essentiel de l’accès à l’information pour les
médecins. Son développement requiert l’adhésion et la parti-
cipation de tous (politiques, enseignants, industriels…).
C’est à ce prix que les praticiens de notre pays pourront enfin
disposer d’une information sur le risque médicamenteux claire,
validée et utile.
En ce qui concerne les patients, ils sont bien souvent informés
par les médias grand public, l’industrie pharmaceutique à tra-
vers les annexes 2 et 3 des médicaments, leur médecin, leur
pharmacien et, beaucoup plus rarement, par les structures ins-
titutionnelles de type CRPV,AFSSAPS et CNAMTS. Il est évi-
dent que dans le cas du patient, il convient de privilégier le rap-
port médecin-malade, afin de s’assurer d’une compréhension
optimale de l’information délivrée. Les pharmaciens ont éga-
lement un rôle de tout premier plan à jouer. Toutefois, trois
questions restent posées. Compte tenu du développement de
l’automédication, considère-t-on que les patients disposent à
ce jour d’une information claire et utilisable ?
L’industrie pharmaceutique peut-elle informer directement le
consommateur des risques encourus ? La question mériterait
une large réflexion. A priori, pourquoi pas, à condition qu’il
existe une instance de régulation nationale et publique.
Enfin, doit-on à terme charger les centres régionaux de phar-
macovigilance de répondre aux patients de et recueillir leurs
déclarations ? À l’évidence, l’histoire va dans ce sens. Encore
faut-il que nous disposions des moyens nécessaires et d’une
réflexion adéquate sur ce sujet.
CONCLUSION
Si la nécessité du développement d’une information large, vali-
dée et bien conduite fait l’unanimité, les modalités d’applica-
tion en fonction de la cible sont difficiles à définir. Il s’agit donc
là d’une question de société dépassant très largement le simple
domaine du médicament. Mais il est clair que, dans les années
à venir, le problème devra être résolu. !
La Lettre du Pharmacologue - Volume 16 - n° 3 - mai/juin 2002
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ADPC
L’information sur la sécurité d’emploi du médicament : pour qui ?
! Le point de vue d’un directeur de CRPV
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H. Lelouet*
L
*Service de pharmacologie, hôpital Henri-Mondor, 94010 Créteil.
“Ceux qui ne savent rien en savent toujours autant que ceux qui n’en savent pas plus.”
Pierre Dac