GRAZIA CULTURE EXPO LE DÉCLIC FÉMININ PAS MOINS DE DEUX LIEUX POUR EXPOSER LE REGARD DE 75 FEMMES QUI ONT FAIT L’HISTOIRE DE LA PHOTOGRAPHIE. LE MUSÉE D’ORSAY ET LE MUSÉE DE L’ORANGERIE REVIENNENT SUR UN SIÈCLE DE PRISES DE VUE ET DE POSITIONS FÉMININES. Par Lucie ETCHEBERS Portrait de Joan Maude, 1932, de Madame Yevonde (1893-1975). A Autoportrait à la caméra, 1933, de de Margaret Bourke-White (1904-1971). u milieu du XIXe siècle, les îles britanniques sont le berceau d’un engouement quasi mystique d’amateurisme féminin pour un art naissant : la photographie. Subtilement dérobée à l’autocratie patriarcale, cette pratique se révèle vite une voie d’émancipation et de subversion pour des milliers d’Européennes et d’Américaines désireuses d’apprendre la prose mécanique de cette poésie de l’instantané. Les évolutions sociales qui vont marquer la fin du siècle rendent possible les premières incursions féminines dans le domaine de la photo. Les frontières entre licite et illicite se floutent. La « nouvelle femme » émerge et transgresse, porte le pantalon, le cheveu court et se réapproprie le nu et l’érotisme féminin, jadis réservés aux hommes. L’image devient une arme. C’est le temps des premières voyageuses, des reporters amateurs et des photojournalistes de guerre. Celui aussi de l’essor de la presse illustrée et de la publicité, qui va permettre à la gent féminine de conquérir par l’image les champs politique et militaire. Que révèlent les photographies présentées à l’Orangerie et à Orsay ? Un certain sens féminin de l’Histoire, en même temps qu’un tournant dans celle des femmes. Où la chambre noire devint enfin une chambre à soi. «"QUI A PEUR DES FEMMES PHOTOGRAPHES"?"», jusqu’au 24 janvier au musée de l’Orangerie (période 1839-1919), Paris 1er, et au musée d’Orsay (période 1918-1945), Paris 7e. PHOTOS!: DIGITAL IMAGE MUSEUM ASSOCIATES/LACMA/ART RESSOURCE NY/ SCALA, FLORENCE!; YEVONDE PORTRAIT ARCHIVE!; ROGER SARGENT EXPO BOLTANSKI SIMPLE ET MORTEL «"FAIRE-PART"», LA NOUVELLE EXPOSITION DE CHRISTIAN BOLTANSKI, JOUE LE DEUIL POUR MIEUX DÉFIER LA MORT. ET SI LE GRAND CHRISTIAN N’AVAIT JAMAIS AUTANT APPRÉCIÉ LA VIE"? Par Léa CHAUVEL-LÉVY «!Si j’étais né en Afrique, j’aurais été sorcier!; en Amazonie, chaman!». Ainsi Christian Boltanski se confiait-il à nous à l’occasion de son exposition à la galerie Marian Goodman. Chaman et sorcier, il l’est un peu, tant ses créations ont des vertus guérisseuses. Il faut regarder en face la mort pour se défaire de ses angoisses. C’est un peu le chemin que nous fait prendre l’artiste sur deux plateaux. A l’étage, on parcourt un vaste labyrinthe composé de rideaux sur lesquels sont imprimées des photos de famille, et balisé par deux installations de néons qui affichent «!arrivée!» puis «!départ!». Métaphore de la traversée de la vie, bien sûr, de la naissance à la mort. Au sous-sol, des secondes défilent sur un panneau!: celles de l’artiste depuis qu’il est sur Terre. La vie comme compte à rebours fatal. Plus loin, un champ de foin et de roses, voué à disparaître doucement avec le temps. Mais l’exposition n’est pas sombre, elle qui se clôt sur une vidéo de quatorze heures — plan fixe d’une représentation de la carte du ciel du jour de naissance de l’artiste. Le plan commence à l’aube et se jette dans la nuit. «!Un départ vers les étoiles!», selon ses mots. Mystique, spirituel, Boltanski émeut une fois encore. «"FAIRE-PART"» de Christian Boltanski, jusqu’au 19 décembre à la galerie Marian Goodman, Paris 3e.