La prostate métastatique : de la biologie à la clinique dossier thématique Orteronel (TAK-700) : à jeu égal avec l’abiratérone ? Orteronel (TAK-700): equal with abiraterone? » Grande spécificité pour le CYP17. » Inhibiteur enzymatique non stéroïdien. » Profil de toxicité favorable, pas de dose limitante toxique retrouvée. » Profil d’activité séduisant en phase d’hormonorésistance chimionaïve. Mots-clés : Inhibiteur du CYP17 – Nouvelle hormonothérapie – Cancer de la prostate avancé. Mode d’action * Département d’oncologie médicale, institut mutualiste Montsouris, Paris. 182 COU-12 + pubs.indd 182 L’orteronel (TAK-700) fait partie, comme l’acétate d’abiratérone, de ces molécules dont le principe du mécanisme d’action n’est pas d’empêcher l’action de la testostérone sur son récepteur intracytoplasmique (“antiandrogène”), mais d’inhiber la synthèse de la testostérone à partir de ses précurseurs testiculaires ou surrénaliens. Historiquement, depuis les années 1980, le kétoconazole, un antifongique, jouait le rôle, parmi la pharmacopée disponible dans le cancer de la prostate, de cet inhibiteur de la synthèse résiduelle de testostérone sous analogue de la LH-RH (Luteinizing Hormone-Releasing Hormone) [1]. En raison d’un rapport bénéfice/risque discutable, du fait notamment des effets indésirables hépatiques, à type de gynécomastie douloureuse ou d’insuffisance surrénalienne, il a finalement été peu prescrit en France. Il s’agit par ailleurs d’un inhibiteur puissant du cytochrome P450, multipliant ainsi les risques d’interactions médicamenteuses ; ce problème est particulièrement sensible sur cette population cible âgée, polypathologique et polymédicamentée. À titre d’exemple, il pourrait exister, in vitro et sur des modèles animaux, une synergie entre le docétaxel et le kétoconazole, mais chez l’homme il a été montré que cet antifongique highlights P o i nt s f o rt s S. Ropert* High specificity for CYP17. Non steroïdal imidazole inhibitor. Favorable toxicity profile. No dose limiting toxicity in phase I. Good activity profile in chemonaïve-hormonoresistance phase. Keywords: CYP17 inhibitors – New hormonotherapy – Advanced prostate cancer. augmente d’un facteur 1,3 à 1,5 l’exposition au docétaxel, rendant la prédiction de la toxicité du docétaxel totalement hasardeuse. Le kétoconazole est un inhibiteur de la 11β-hydroxylase et surtout du CYP17. Rappel sur le CYP17 Il s’agit d’un complexe multi-enzymatique appartenant au cytochrome P450. Son activité se situe dans le réticulum endoplasmique des cellules surrénaliennes, testiculaires, ovariennes et placentaires (2). Deux fonctions enzymatiques le caractérisent : ✓ 17α-hydroxylase ; ✓ 17.20 lyase. Le CYP17 se place ainsi à la croisée d’étapes clés de la synthèse des stéroïdes sexuels et des glucocorticoïdes. Notamment à l’issue de son activité, ses 2 principaux substrats, la prégnénolone et la progestérone, sont transformés en déhydroépiandrostérone (DHEA) et en androstènedione, à une seule étape enzymatique de la testostérone. L’objectif du ciblage pharmacologique du CYP17 est donc ainsi soumis à plusieurs exigences : ✓ il faut avoir une action puissante sur l’inhibition de l’activité enzymatique 17α-hydroxylase/17.20 lyase afin de rendre les taux intratumoraux de testostérone les plus bas possible ; Correspondances en Onco-Urologie - Vol. II - no 4 - octobre-novembre-décembre 2011 13/12/11 15:59 Orteronel (TAK-700) : à jeu égal avec l’abiratérone ? ✓ être le plus spécifique possible sur l’activité 17α-hydroxylase/17.20 lyase afin d’éviter tout effet secondaire off target, notamment minéralocorticoïde (risque d’insuffisance surrénale). L’objectif de cette spécificité est aussi d'éviter toute inhibition d’activité cytochrome impliquée dans la détoxification d’autres médicaments (CYP3A4, CYP2D6, etc.) avec un risque d’interaction médicamenteuse associé. Ciblage pharmacologique du CYP17 Un inhibiteur du CYP17 se caractérise par sa structure stéroïdienne ou non. Le kétoconazole et l’orteronel sont non stéroïdiens. L’acétate d’abiratérone et le TOK-001 ont un noyau stéroïdien. Ils agissent ainsi comme des inhibiteurs compétitifs. La mesure des concentrations inhibitrices à 50 % (IC50), constantes d’inhibition (Ki), constantes de Michaelis (Km) et concentrations sériques devrait permettre de comparer en phase préclinique ou clinique précoce ces différentes molécules. Néanmoins, la variabilité des techniques employées ne permet pas de faire ce travail. La comparaison, en dehors d’un hypothétique essai clinique de comparaison directe de ces différents composés, est à ce jour très difficile, d’autant plus qu’ils ne sont pas tous au même stade de développement. Le TAK-700 [(1S)-1-(6,7-diméthoxy-2-naphthyl)-1-(1Himidazol-4-yl)-2-méthylpropan-1-ol] est un dérivé imidazolé, inhibiteur du CYP17, actuellement en développement dans le cancer de la prostate selon un schéma d’étude clinique très proche de ceux de l’acétate d’abiratérone et du MDV3100. L’orteronel (3) est ainsi hautement spécifique de l’activité 17,20 lyase (IC50 : 38 nM), avec une activité sur les enzymes 11β-hydroxylase et CYP3A4 négligeable. Les IC50 sont respectivement supérieures à 1 000 nM et 10 000 nM sur des modèles in vitro. Sur un autre modèle plus proche de la réalité humaine de microsome, l’IC50 pour la 17,20 lyase est à 18 nM et à plus de 30 000 nM pour les CYP3A4 et 2D6. Ces données soulignent la grande spécificité de l’orteronel pour sa cible déclarée, et laissent présager sinon de son efficacité, du moins de la très faible probabilité d’interaction médicamenteuse à en attendre avec d’autres produits substrats du cytochrome 450. la prise unique de 1 mg/kg d’orteronel diminue de 75,9 % la testostéronémie à 2 heures et de 61,1 % la DHEA à 2 heures. Activité clinique Les résultats d’une phase I/II ont été présentés à l’ASCO® 2010 (4). Lors de la phase I, 5 paliers de dose ont été réalisés (100, 200, 300, 400 et 600 mg × 2/j) chez des patients atteints d'un cancer de la prostate hormonorésistant métastatique. Le profil de tolérance est favorable et les principaux effets indésirables de grade 3 notifiés sont la fatigue et une toxicité gastrointestinale sans spécificité. Il n’y pas eu de dose limitante toxique. Il existe une linéarité entre l’augmentation de la dose et la Cmax (et l’aire sous la courbe [ASC]) de 100 à 600 mg, 2 fois par jour. À 4 semaines, la testostéronémie médiane est passée de 4,9 à 0,6 ng/dl et la DHEA-S de 54,6 à moins de 0,1 μg/dl pour le palier 400 mg × 2/j. Les premiers résultats de l’extension de phase II ont été présentés à l’ASCO® 2011 (5). Les données d’efficacité concernant 96 patients traités à une dose supérieure ou égale à 300 mg × 2/j ont été ainsi rapportées. À partir du palier 400 mg, une supplémentation en prednisone/prednisolone est requise. Les taux de réponse du PSA (diminution d’au moins 50 %) à 12 semaines étaient de 63 %, 52 %, 41 %, et 62 % pour les paliers 300 mg × 2/j, 400 mg et 600 mg × 2/j + prednisone, et 600 mg/j. Pour les 43 patients avec une maladie évaluable selon les critères RECIST, 6 présentaient une réponse partielle, 23 avaient une maladie stable et chez 9 d’entre eux la maladie progressait. À 12 semaines, pour tous les paliers, la DHEA-S et la testostéronémie ont diminué (tableau). Ces résultats ont fait retenir la dose de 400 mg × 2/j avec supplémentation en prednisone/prednisolone de 5 mg × 2/j pour les études cliniques à venir en monothérapie. Deux essais d’enregistrement sont actuellement en cours, soit en pré-docétaxel soit en post-docétaxel versus placebo + prednisone. Un essai de phase I/II en combinaison avec le docétaxel est également ouvert (6). Tableau. Variation de la testostéronémie et de la DHEA-S sous orteronel. Orteronel Activité biologique en préclinique Sur des modèles de rat, l’orteronel diminue significativement le poids de la prostate et des vésicules séminales ainsi que la testostéronémie. Sur un modèle de singe, DHEA-S (μg/dl) Testostéronémie (ng/dl) Correspondances en Onco-Urologie - Vol. II - no 4 - octobre-novembre-décembre 2011 COU-12 + pubs.indd 183 À l’inclusion 53 36,3 51,7 31,2 12 semaines 8,65 0,1 0,1 5,3 À l’inclusion 8,5 9,90 7,33 6,75 12 semaines 0,98 0,3 0,07 0,9 183 13/12/11 15:59 La prostate métastatique : de la biologie à la clinique dossier thématique Conclusion Ces résultats sont tout à fait prometteurs et peuvent être comparés plutôt favorablement, à ce stade du développement, à ceux obtenus avec l’acétate d’abiratérone et le MDV3100. La place de l'orteronel comparativement aux 2 autres inhibiteurs est difficile à définir a priori. On peut supposer, à l’instar de ce qui a pu être observé avec les anti-aromatases (7), que son mécanisme d’action original (inhibiteur non stéroïdien versus inhibiteur stéroïdien pour l’acétate d’abiratérone) fait que les mécanismes de résistance ne seront pas strictement croisés avec l’acétate d’abiratérone. Une stratégie séquentielle plutôt qu’une comparaison frontale de ces molécules serait une manière plus pertinente de définir les places respectives de ces traitements. À suivre… ■ Références 1. Ryan CJ, Halabi S, Ou SS et al. Adrenal androgen levels as 3. Kaku T, Hitaka T, Ojida A et al. Discovery of orteronel (TAK- 5. Agus DB, Stadler WM, Shevrin DH et al. Safety, efficacy, and predictors of outcome in prostate cancer patients treated with ketoconazole plus antiandrogen withdrawal: results from a cancer and leukemia group B study. Clin Cancer Res 2007;13(7):2030-7. 700), a naphthylmethylimidazole derivative, as a highly selective 17,20-lyase inhibitor with potential utility in the treatment of prostate cancer. Bioorg Med Chem 2011;19(21):6383-99. pharmacodynamics of the investigational agent TAK-700 in metastatic castration-resistant prostate cancer (mCRPC): updated data from a phase I/II study. ASCO® 2011:abstr 4531. 2. Vasaitis TS, Bruno RD, Njar VC. CYP17 inhibitors for 4. Dreicer R, Agus DB, MacVicar GR et al. Safety, pharmacokinetics, and efficacy of TAK-700 in castration-resistant, metastatic prostate cancer: a phase I/II, open-label study. ASCO® 2010:abstr 3084. 6. http://clinicaltrials.gov/ct2/results?term=tak-700 7. Lønning PE. Lack of complete cross-resistance between prostate cancer therapy. J Steroid Biochem Mol Biol 2011;125(1-2):23-31. different aromatase inhibitors; a real finding in search for an explanation? Eur J Cancer 2009;45(4):527-35. Des questions ? Des suggestions ? Déjà abonné ? Contactez le 01 46 67 62 87, du lundi au vendredi de 9 h à 18 h, ou par fax au 01 46 67 63 09, ou e-mail à [email protected] REJOIGNEZ-NOUS... ET BÉNÉFICIEZ D’UNE FORMATION CONTINUE et à renvoyer complété et accompagné du règlement à : EDIMARK SAS – Service abonnements – 2, rue Sainte-Marie – 92418 Courbevoie Cedex OFFRE DE LANCEMENT : 1 AN PAYANT = 1 AN GRATUIT ! 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