Q U E S T I O N S / R É P O N S E S Nos experts vous répondent ? Chez un patient ayant une monoarthrite avec une sérologie de Lyme fortement positive, l’absence d’ADN de Borrelia burgdorferi dans le liquide synovial remet-elle en question le diagnostic ? Le diagnostic de borréliose de Lyme repose essentiellement sur des critères cliniques et sérologiques. Une monoarthrite du genou en zone d’endémie est très évocatrice d’une borréliose si la sérologie est positive (seules 5 % des formes sont séronégatives). Une PCR négative ne s’oppose pas au diagnostic, comme le suggèrent les chiffres de sensibilité de cette méthode qui sont, dans la plupart des études, de l’ordre de 40 à 70 % dans le liquide et le tissu synovial. Cela s’explique par différentes raisons : 1. Les PCR, selon la méthode utilisée, n’ont pas la même sensibilité. Tous les composants du test peuvent “jouer” : les amorces, l’enzyme (Taq polymérase)... 2. La préparation de l’ADN à partir des prélèvements synoviaux est très variable. De plus, la présence de “contaminants” comme de l’hémoglobine peut induire un effet inhibiteur qui entraîne de faux négatifs. 3. En dernier lieu, dans les arthrites de Lyme, la quantité de bactéries (dans la synoviale) est limitée, voire très limitée (dans les formes chroniques), donc difficile à détecter, même avec des techniques sensibles. J. Sibilia ? Un de mes patients âgé de 30 ans, chez lequel un diagnostic d’ostéonécrose de hanche droite d’origine cortisonique vient d’être posé, me demande s’il peut espérer repousser la pose de la prothèse grâce à un traitement chirurgical. C’est la découverte sur Internet d’une possibilité de lambeau vascularisé qui l’amène à me consulter. Il est très gêné, avec un indice de Lequesne à 14. Il a déjà une perte de sphéricité sur la radiographie. 40 Chez un patient jeune, il est bien sûr très tentant de proposer un geste chirurgical pour freiner l’évolution naturelle de l’ostéonécrose de la tête fémorale, mais il faut savoir réserver les gestes lourds, et qui ne sont pas encore parfaitement validés, aux indications qui leur correspondent le mieux. Dans le cas présent, puisque la tête n’est plus ronde, l’atteinte radiographique est au moins au stade 3 de Ficat (stade 4 de Steinberg). Aussi, il nous semble difficile de proposer une intervention n’ayant pas fait ses preuves à un stade que l’on considère comme trop avancé dans notre expérience et dans la plupart des publications (il est probablement trop tard dès que l’on atteint les stades 2B de Ficat ou 3 de Steinberg – c’està-dire une coquille d’œuf – et a fortiori en cas de perte de la sphéricité). Dans le cas présent, il reste donc le choix entre le traitement médical, une intervention de rotation de la tête fémorale (si l’aspect IRM le permet, et seulement si une équipe très entraînée la propose) et la pose d’une prothèse totale de hanche. A. Saraux ? Une danseuse professionnelle, ayant exercé pendant près de 12 ans dans un corps de ballet, se plaint d’une douleur de hanche correspondant à une coxarthrose ; la coxarthrose est-elle vraiment plus fréquente chez les danseurs ? La hanche est très sollicitée dans la danse, en particulier de haut niveau. En effet, le mouvement de base qui permet les différentes figures consiste en une rotation externe de hanche. L’atteinte de la hanche chez le danseur a souvent un caractère évolutif et invalidant, contrairement à la coxopathie engainante observée chez les footballeurs. La douleur est souvent déclenchée par certains mouvements : élévation et maintien du membre inférieur dans la position dite seconde, grands arrondis et sauts et appuis monopodaux prolongés. La raideur succède dans un deuxième temps à cette douleur. La Lettre du Rhumatologue - n° 276 - novembre 2001 Q L’étude de M. Revel, en 1989, a permis de mieux préciser la fréquence de cette atteinte chez les danseurs et danseuses professionnels (4-6 heures d’entraînement quotidien intensif) avec un âge moyen de 45 ans au moment de l’étude. Il s’agit d’une enquête rétrospective portant sur 126 professionnels de la danse ayant débuté jeunes (avant 12 ans). La prévalence de la coxarthrose radiologique était de 17,5 % contre 2 à 4 % dans la population générale. La coxarthrose était bilatérale, et symptomatique dans 50 % des cas. Fait très intéressant, 80 % de ces hanches arthrosiques présentaient un degré variable de dysplasie coxofémorale, notamment d’obliquité anormale du cotyle. Ainsi, la coxarthrose est nettement plus fréquente chez le danseur de haut niveau. Elle survient sur une hanche dysplasique, ce qui pourrait expliquer la plus grande souplesse de hanche des danseurs et leur aptitude à cette activité. X. Chevalier U E S T I O N S / R É P O N S E S ? Faut-il interrompre le traitement par bisphosphonate lors de la survenue d’une fracture chez un patient ostéoporotique ? De façon physiologique, la réparation d’une fracture passe par plusieurs étages (ossification enchondrale, production d’os tissé, résorption ostéoclastique, remodelage et maturation du cal osseux) mettant en jeu une activation globale du remodelage. Les bisphosphonates (BPN), de par leurs propriétés de frénation du remodelage et leur fixation préférentielle aux sites de fracture, pourraient compromettre ce processus. En fait, il n’en est rien, et les données dont nous disposons chez l’animal sont rassurantes à ce sujet. Dans ces modèles expérimentaux, l’administration prolongée de BPN après fracture d’un os long a pour principales conséquences une augmentation de volume du cal osseux et un allongement de la phase de réparation . Surtout, les propriétés biomécaniques de l’os ne sont pas altérées ; au contraire, sa résistance et sa rigidité apparaissent même .../... 41 Q U E S T I O N S / R É P O N S E S .../... augmentées. En pratique, il n’est pas nécessaire d’interrompre le traitement par BPN (aux doses usuelles dans l’ostéoporose) lors de la survenue d’une fracture, afin de permettre sa consolidation. De même, ce traitement pourra être commencé dès que possible après une fracture. J.M. Pouillès ? Coxibs et dispositif intra-utérin : quelles précautions ? Une mise en garde figure dans le dictionnaire Vidal® pour tous les anti-inflammatoires non stéroïdiens classiques dans la rubrique “interaction”. Elle précise : “risque controversé de diminution d’efficacité du dispositif intrautérin”. Cette mise en garde est une spécificité française. Cette notion repose uniquement sur des bases théoriques. À une époque, l’hypothèse selon laquelle l’effet antiinflammatoire des AINS pourrait diminuer la réaction 42 inflammatoire locale causée par les dispositifs intrautérins et, par là même, diminuer leur efficacité a été évoquée. Cette notion n’a cependant été confirmée par aucune donnée scientifique ou clinique objective. Cette mise en garde n’a donc pas été maintenue dans le résumé des caractéristiques des produits pour les AINS introduits sur le marché récemment, non plus que pour les coxibs, que ce soit pour le rofécoxib ou le célécoxib. Il n’y a donc aucune contre-indication à prescrire un coxib chez une femme porteuse d’un dispositif intra-utérin. Il n’y a pas non plus de précautions particulières à prendre. B. Combe Nous souhaitons que cette rubrique favorise les échanges. Faites-nous parvenir vos critiques, vos idées, vos questions. Les auteurs et/ou le comité de rédaction y répondront. Adressez vos courriers au Professeur B. Combe, Fédération de rhumatologie, hôpital Lapeyronie, 371, avenue du Doyen-Gaston-Giraud, 34295 Montpellier Cedex