La Lettre du Rhumatologue - n° 296 - novembre 2003
En résumé, le tableau habituel est celui d’oligoarthrite tou-
chant les grosses articulations, essentiellement des membres
inférieurs, avec une intensité douloureuse franche et un carac-
tère classiquement migratoire. La cardite est volontiers pré-
coce, dans les semaines qui suivent le début de la maladie,
mais inconstante. L’échographie cardiaque est conseillée de
façon systématique en cas de suspicion de rhumatisme arti-
culaire aigu, puisque l’examen clinique cardiaque n’est patho-
logique qu’une fois sur deux, alors que l’échographie car-
diaque l’est dans près de 70 % des cas. Toutes les tuniques
peuvent être touchées, l’endocardite étant celle qui laisse des
séquelles. Certains signes cutanés sont très intéressants, parce
qu’ils sont relativement spécifiques (érythème marginé, nodule
sous-cutané), mais ils sont tardifs et rares. On peut parfois
observer une fièvre, une altération de l’état général, une perte
de poids.
Chez l’adulte, il s’agit plus volontiers d’une polyarthrite aiguë
fébrile, habituellement sans lésion cutanée, et plus rarement
avec une atteinte cardiaque.
L’importance du syndrome inflammatoire et la présence d’an-
ticorps (ASLO et antistreptodornases) constituent des argu-
ments du diagnostic qui ne sont toutefois pas décisifs.
À côté du rhumatisme articulaire aigu, on distingue l’arthrite
réactive post-streptococcique, qui est une forme de polyar-
thrite d’évolution bénigne, sans atteinte cardiaque, survenant
au décours d’une infection streptococcique documentée
récente. Il est en pratique bien difficile de différencier les deux
affections, puisque le rhumatisme post-streptococcique peut
survenir à tout âge, est volontiers polyarticulaire, mais éven-
tuellement oligo- ou monoarticulaire, fébrile, au décours d’une
angine, et peut être associé à des signes cutanés (érythème
maculeux des extrémités, nouures, vascularite leucocytocla-
sique), avec biologiquement une élévation des ASLO et anti-
streptodornases (tableau II). Ce qui le différencie du rhuma-
tisme articulaire aigu, c’est le fait qu’il n’y a jamais d’atteinte
cardiaque, et donc que l’antibioprophylaxie associée, si l’on
est bien certain qu’il ne s’agit pas d’un rhumatisme articulaire
aigu, n’est pas nécessaire.
Fréquence du rhumatisme articulaire aigu
La fréquence du rhumatisme articulaire aigu n’a jamais été
évaluée chez l’adulte, tandis qu’une enquête nationale réali-
sée en 1995 et 1997 a permis de connaître avec précision son
incidence chez l’enfant. Olivier et al. (9) ont en effet demandé
aux 284 services de pédiatrie générale s’ils avaient observé
entre 1995 et 1997 des cas de rhumatismes articulaires aigus,
en partant du principe que tous les cas étaient probablement
hospitalisés, compte tenu de la sévérité du diagnostic. Ils ont
obtenu un taux de réponse de 92 % permettant de dénombrer
33 cas, soit une incidence nationale entre 0,08 et 0,15 pour
100 000 enfants selon les années.
PROPOSITION DE TRAITEMENT
RATIONALISÉ DES ANGINES
PAR ANTIBIOTIQUES
(9-13)
L’angine aiguë est une inflammation d’origine infectieuse des
amygdales, voire de l’ensemble du pharynx. Les virus sont
majoritairement en cause (tableau III).
Le streptocoque hémolytique du groupe A n’est responsable
que de 25 à 40 % des angines de l’enfant et 10 à 25 % des
angines de l’adulte (AFSSAPS) (13). Aucun signe ou score
clinique n’a de sensibilité et ou de spécificité suffisantes pour
affirmer l’origine streptococcique d’une angine. Pour cela, il
est donc recommandé d’utiliser des tests de diagnostic rapide
du streptocoque dont la sensibilité doit être d’au moins 90 %
dans les conditions réelles d’utilisation. Un test positif
confirme la responsabilité du streptocoque ß-hémolytique du
groupe A et justifie l’antibiothérapie. Lorsque le test est néga-
tif, la culture du prélèvement pharyngé et le traitement anti-
biotique ne sont généralement pas justifiés chez les patients
sans facteurs de risque de rhumatisme articulaire aigu. Le trai-
tement historique de référence des angines était la pénicil-
line V. Les difficultés d’observance liées à la durée du traite-
ment (10 jours) ont conduit à proposer des schémas abrégés
ÉDITORIAL
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Tableau II. Critères diagnostiques des arthrites réactionnelles post-
streptococciques (d’après Deighton).
Arthrites survenant après une infection pharyngée avec :
1. un délai inférieur à 10 jours,
2. une arthrite prolongée supérieure à deux mois ou récurrente,
3. une non-réponse aux salicylés.
Agent microbien %
Viral Rhinovirus (100 types) 20
Coronavirus (> 3 types) 5
Adénovirus (type 3, 4, 7, 14, 21) 5
Herpes simplex (1 et 2) 4
Para-influenza (types 1-4) 2
Influenza (A et B) 2
Coxsackie (types 2, 4-6, 8, 10) < 1
Epstein-Barr < 1
Cytomégalovirus < 1
HIV-1 < 1
Bactérien Streptococcus pyogenes 15-30
Groupe C ß-hémolytique 5
Neisseiria gonorrhoeae < 1
Corynebacterium diphtheriae < 1
Arcanobacterium haemolyticum < 1
Chlamydia Chlamydia pneumoniae inconnu
Mycoplasme Mycoplasma pneumoniae < 1
Tableau III. Étiologies microbiennes des angines (11) (liste non
exhaustive).
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