Mélanges thermoplastique/thermodurcissable à base d`époxy

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Etude Bibliographique
CHAPITRE I :
Etude Bibliographique
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I-1] Les réseaux époxydes
Les réseaux époxydes sont utilisés dans de nombreuses applications industrielles. Ils
sont en général formés par polyaddition d’un mélange monomère époxyde et durcisseur dans
lequel un au moins des composants a une fonctionnalité supérieure à 2 afin d’obtenir un
réseau après réaction [PAS02]. De nombreux systèmes réticulants peuvent être utilisés. Ce
sont par exemple des molécules nucléophiles telles que les anhydrides d’acide, les polyamines aromatiques ou aliphatiques, les alcools et éventuellement des amorceurs
(imidazole…) qui augmentent la vitesse de polymérisation… Parmi tous ces durcisseurs, les
plus utilisés sont de type amine.
La réaction entre époxyde et diamine est celle que nous avons utilisée. Elle peut être
décrite en 3 réactions principales comme schématisées ci-dessous :
Equation 1
Equation 2
Equation 3
L’Equation 1 traduit la réaction d’addition d’un groupement époxyde avec
l’hydrogène d’une amine primaire. L’amine secondaire formée de la première réaction réagit
avec un autre groupement époxyde pour donner une amine tertiaire (Equation 2). Ces
réactions époxyde/amine sont connues pour être auto-catalysées par les groupements
hydroxyle présents initialement dans le milieu et créés au cours des 2 réactions. C’est
pourquoi, k1 et k2 correspondent aux constantes cinétiques du mécanisme catalysé et k1’ et k2’
à celles du mécanisme non catalysé. Nous pouvons définir le rapport des constantes de
réactivité de l’amine secondaire sur l’amine primaire, noté r = k2/k1 qui permet la
comparaison de réactivité des différentes amines. Ce rapport est égal à 0,65 dans le cas de
mélange DGEBA (diglycidyle éther de Bisphénol A) et diamine MCDEA (4,4’-méthylènebis
[3-chloro 2,6-diéthylaniline]) [GIR95].
L’Equation 3 correspond à la réaction d’éthérification qui a lieu entre groupements époxyde
et hydroxyle. La plupart du temps, cette réaction est négligée. Elle intervient essentiellement
pour des fortes températures de polymérisation et lorsque la concentration en amine est faible,
donc en fin de réaction. Cependant Girard-Reydet [GIR95], a également montré grâce à des
analyses infrarouges, que la réaction 3 se produisait dans le cas de la MCDEA et devait être
prise en compte pour une bonne description du modèle cinétique. Il a également montré qu’il
n’en était rien avec deux autres diamines : la 4,4’-diaminophényl sulfone, DDS et la 4,4’méthylènebis dianiline, MDA.
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Etude Bibliographique
La réaction d’un thermodurcissable fait intervenir deux transformations structurales
majeures : la gélification et la vitrification. Le terme de gélification marque le passage de
l’état initial liquide ou visqueux selon les formulations, à l’état caoutchoutique. Ce
phénomène est lié à la brutale augmentation des masses molaires moyennes du réseau en
formation. A ce moment, tout le volume réactionnel est occupé par une molécule
tridimensionnelle.
La vitrification traduit le passage de l’état liquide ou caoutchoutique à un état vitreux du fait
de l’augmentation de la densité de réticulation. C’est le moment où la température de
transition vitreuse du système est du même ordre de grandeur que la température de réaction
et donc la réaction est contrôlée par la diffusion. Cette transformation peut intervenir avant la
gélification suivant la température de réaction.
Gillham [ENN83] résume l’ensemble de ces phénomènes sur un diagramme appelé
TTT, Temps-Température-Transformation présenté ci-dessous :
Figure I1 : Diagramme T-T-T de Gillham pour un système réactif [ENN83].
Cette représentation permet d’estimer le temps de réaction nécessaire à l’obtention de
la gélification et de la vitrification pour une température de réaction choisie.
I-2] Modélisation des cinétiques des réactions époxyde/amine
Deux sortes de modèles peuvent rendre compte des cinétiques de réaction entre amine
et époxyde. L’approche mécanistique s’appuie sur les mécanismes de réaction alors que le
modèle phénoménologique est l’application d’un modèle mathématique pour correspondre au
mieux aux points expérimentaux.
I-2-a) Approche mécanistique
Elle se base sur les trois réactions principales époxy/amine décrites par les Equations
1, 2 et 3. En s’appuyant sur les dites réactions, il est possible d’obtenir le jeu d’équations
suivantes (Equations 4) où tous les paramètres ont un sens physique [GIR96] :
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− de =e {[k1' + k1(OH )]⋅a1+[k '2 +k 2(OH )]⋅a 2 +[k 3' +k 3(OH )]⋅(OH )}
dt
− da1 =2e⋅a1⋅[k1' +k1(OH )]
dt
da 2 =e {[k1' +k1(OH )]⋅a1+[k '2 +k 2(OH )]⋅a 2}
dt
Equations 4
d(OH )
=e {[k1' +k1(OH )]⋅a1+[k '2 + k 2(OH )]⋅a 2}
dt
avec
e : concentration en groupement époxyde
a1, a2 : concentration en groupement amine primaire et secondaire
(OH) : concentration en groupement hydroxyle
k1, k2 : constantes de vitesse des réactions autocatalysées
k’1, k’2 : constantes de vitesse des réactions non catalysées
k3, k’3 : constantes de vitesse de réaction d’éthérification
De ce jeu d’équations, découle le modèle de Horie qui prend en compte le caractère
autocatlytique des réactions époxyde/amine (Equation 5). Il fait intervenir la concentration en
hydroxyle au cours de la réaction comme suit. Riccardi et al [RIC84] ou Horie et al [HOR70]
l’ont utilisé pour étudier les réactions DGEBA/diamines aliphatiques.
− de =e0 {k1' +k1(OH )0 +k1e0x}(1−x )² qui équivaut à dx ={K 0 +K1x}(1−x )² Equation 5
dt
dt
en posant (OH)=(OH)0+e0-e et x.e0= e0-e
avec
e0 : concentration initiale en groupement époxyde
x : conversion en groupement époxyde
(OH)0 : concentration initiale en groupement hydroxyle
K0=e0.{k1’+k1(OH)0} : constante de vitesse à l’instant initial
K1= k1e0² : constante de vitesse du processus autocatalysé
K0 et K1 suivent la loi d’Arrhénius.
Ce modèle peut être précisé en tenant compte des réactions d’éthérification [COL91]
et de l’effet de substitution des amines (Equations 6). Il a été utilisé par Riccardi et al
[RIC86] et Girard-Reydet et al [GIR95] [GIR96] pour modéliser des réactions
DGEBA/amines. Les équations sont les suivantes :
r
dx =(1−x )⋅[K1' +K1F(α)]⋅⎡2(1−r )α+rα 2 +(2−r )F(α)L⎤⋅(2−r )
⎢⎣
⎥⎦
dt
dα =−2α⋅(1−x )⋅[K1' +K1F(α)]
dt
⎡(1−r )α+α 2r ⎤
⎥⎦
(OH)0 − ⎢⎣
avec F(α )=1+
(2−r )
e0
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Equations 6
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α=a1/e0 : conversion en amine primaire
K1= k1e0², K1’= k1’e0
r=k2/k1=k2’/k1’, L=k3/k1=k3’/k1’=K3/K1; L étant ajustable (il tend vers 0 quand les
réactions d’éthérification sont négligées).
avec
Ces modèles sont particulièrement bien adaptés pour des cinétiques faisant intervenir
la DGEBA et une amine primaire. Ils ne sont valables que jusqu’à la vitrification. En effet,
après ce phénomène, la croissance du réseau n’est plus gérée par une cinétique de réaction
mais par une cinétique de diffusion. Il est possible d’introduire un facteur supplémentaire
dans la cinétique pour en tenir compte [CHE87] [GIR95].
Cette liste n’est pas exhaustive mais les cinétiques proposées ici sont les plus souvent
utilisées dans la littérature.
I-2-b) Approche phénoménologique
L’approche phénoménologique consiste à élaborer un modèle mathématique qui
estime la conversion en fonction du temps. C’est une description globale de la cinétique qui
est réalisée. Le modèle de Kamal [KAM73] (Equation 7), le plus utilisé repose sur l’équation
suivante :
dx =(K+K'x m )⋅(1−x )n
dt
avec
Equation 7
K et K’ suivant la loi d’Arrhénius.
Les résultats ne sont que lissage des courbes par ajustement des paramètres m et n.
Kenny [KEN94] l’utilise pour décrire un système à base de dicyanate. Cependant, on retrouve
une apparence mécanistique pour des valeurs appropriées de n et m.
- Par exemple, n+m=2 revient à considérer que l’ordre global de la réaction est 2 (réaction
bimoléculaire). Très souvent, on pose n=m=1 [GOL86]. Teng et al [TEN93] ont fait de
même pour simuler la réaction entre DGEBA/DDS en présence d’un thermoplastique
(Phénoxy).
- On retrouve le modèle de Horie en posant, m=1 et n=2.
En résumé, le choix d’une telle approche se justifie si on se contente de connaître
l’évolution de la conversion avec le temps. Le modèle phénoménologique est souvent utilisé
en génie des procédés.
I-2-c) Cas de l’éthérification
La polymérisation des époxydes peut également se produire en présence d’amine
tertiaire. Nous n’assistons donc plus à une réaction de polyaddition mais à une polymérisation
en chaîne. Vazquez et al. [VAZ91] ont travaillé sur la polyéthérification d’époxydes en
présence de benzyldiméthylamine (BDMA) et proposent le mécanisme suivant :
1) L’amine tertiaire réagit sur une fonction époxyde pour former une espèce
zwitterionique de type amine quaternaire. Cette dernière au contact d’un groupement
hydroxyle du milieu produit l’espèce active alcoolate. Comme nous nous trouvons dans un
milieu assez polaire, le contre-ion se dissocie de son anion.
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2) RO- réagit en chaîne sur les fonctions époxyde ce qui produit un poly-époxyde. C’est
l’étape de propagation.
3) Cette macro-chaîne anionique réagit dans l’étape de terminaison sur une fonction
époxyde pour former le poly-époxyde final.
Ces étapes peuvent être schématisées par les équations suivantes :
Formation de l’amine quaternaire et Initiation :
R3 N + E = R 3 N+ E-
(K)
R3N+E- + ROH = RO- + R3N+EH
(ki)
Propagation :
RO- + E
= RO-E-
RO-(E)n-E- + E = RO-(E)n+1-E-
(kp)
Terminaison :
RO-(E)n-E- + E =
produits inactifs
(kt)
Avec: R3N : amine tertiaire, ROH : fonctions alcool du milieu, E : époxyde.
K constante d’équilibre de la formation du zwitterion.
ki, kp et kt constantes d’initiation, de propagation et de terminaison.
La disparition des fonctions époxydes s’écrit :
−
d[E]
=k p⋅[RO− ]⋅[E]
dt
Equation 8
En appliquant l’état quasi-stationnaire à l’espèce active alcoolate, on obtient :
ki(R3N+E-)(ROH)= kt(RO-)(E)
d’où : (RO-)=(ki/kt)(R3N+E-)(ROH)/(E)=(kiK/kt)(R3N)(ROH)
Equation 9
Nous obtenons alors une équation du premier ordre en époxyde en combinant les
équations (Equation 8) et (Equation 9) :
−
( )
d[E]
=k p⋅ ki⋅K ⋅[R 3N][⋅ ROH][⋅ E]=A⋅[R 3N][⋅ ROH][⋅ E]
dt
kt
Equation 10
Ce modèle de polymérisation des époxydes par une amine ternaire fait donc intervenir
une relation linéaire (Equation 10) entre la consommation en époxyde et sa concentration. La
pente est directement proportionnelle à la concentration en amine tertiaire et en fonctions
hydroxyle du milieu.
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Une autre modélisation de ces réactions repose sur une équation du second ordre par
rapport aux fonctions époxyde [CON04]. Le mécanisme réactionnel proposé est le suivant :
Formation de l’amine quaternaire et Initiation :
R3 N + E = R 3 N+ E-
(K’)
R3N+E- + ROH = RO-R3N+EH
(ki’)
Propagation :
R-(E)n-O- R3N+EH + E = R-(E)n+1-O- R3N+EH
(kp’)
Transfert de chaîne :
R-(E)n-O- R3N+EH + ROH = RO- R3N+EH + R-(E)n-OH (kc’)
Terminaison :
R-(E)n-O- R3N+EH =
produits inactifs
(kt’)
La principale différence avec la modélisation proposé par Vazquez et al consiste à
faire intervenir le contre-ion dans toutes les étapes. Il reste toujours proche de l’anion
alcoolate du fait de la faible polarité du milieu. Ainsi pour la terminaison, le complexe
anionique et son contre-ion réagissent pour former les espèces inactives.
De nouveau, en appliquant l’état quasi-stationnaire à l’ion alcoolate de toute longueur :
ki’(R3N+E-)(ROH)= kt’(RO-)
Or (R3N E )=K’(R3N)(E)d’où (RO-)=(ki’K’/kt’)(R3N)(ROH)(E)
+ -
Equation 11
En combinant (Equation 8) et (Equation 11), l’équation différentielle finale
s’exprime :
−
2
2
d[E] ' ⎛ ki' ⋅K' ⎞
=k p⋅⎜ ' ⎟⋅[R 3N][⋅ ROH][⋅ E] =A'⋅[R 3N][⋅ ROH][⋅ E]
dt
⎝ kt ⎠
Equation 12
De nouveau la pente est directement liée à la concentration dans le milieu en fonctions
amine tertiaire et hydroxyle. Mais une équation du second ordre est obtenue.
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I-3] Mélanges thermoplastiques/thermodurcissables (TP/TD)
Les mélanges thermoplastique / réseau époxyde ont été largement traités dans la littérature ces
20 dernières années. L’objectif étant le plus souvent de 2 types :
1. les réseaux époxydes étant fragiles, l’introduction d’une phase dispersée riche en
thermoplastique ductile permet l’amélioration des propriétés mécaniques sans perdre en
module. [HED85] [BON99] [PAS02]
2. l’introduction de monomères de faible viscosité dans certains thermoplastiques à haute
température de transition vitreuse permet d’améliorer leur processabilité. [VEN94]
[BON99]
I-3-a) Miscibilité initiale du TP dans les précurseurs époxydes
La miscibilité d’un mélange est gouvernée par l’énergie de Gibbs de mélange
∆Gm définie par (Equation 13) :
∆G m =∆Hm −T⋅∆Sm
avec
Equation 13
∆Hm la variation d’enthalpie de mélange
∆Sm la variation d’entropie de mélange.
La condition nécessaire mais non suffisante pour que deux composés soient miscibles
est ∆Gm < 0. Pour un système TP/ précurseur d’un TD, l’énergie libre de mélange peut être
généralement estimée grâce à la théorie de Flory-Huggins [FLO53]:
∆Gm =Vr.⎛⎜ ρ1⋅ϕ1⋅ln⎛⎜ ϕ1 ⎞⎟+ρ2⋅ϕ2⋅ln⎛⎜ ϕ2 ⎞⎟ ⎞⎟+χ12(T)⋅ϕ1⋅ϕ2
RT
⎝ M1 ⎠
⎝ M2 ⎠ ⎠
⎝
terme entropique
avec
Equation 14
terme enthalpique
R: constante des gaz parfaits
T: température (en °K)
Vr: volume de référence, pris comme le plus petit volume molaire du mélange
ρi: masse volumique de l’espèce i
ϕi: fraction volumique de l’espèce i
Mi: masse molaire de l’espèce i
χ12: paramètre d’interaction entre l’espèce 1 et 2.
Cette théorie repose sur les hypothèses suivantes :
- l’iso-molécularité des espèces
- la non variation du volume lors du mélange
- l’évolution de χ en 1/T
Si le paramètre d’interaction décroît avec la température, alors le diagramme de phase
présente un comportement de type UCST (Upper Critical Solution Temperature). Au
contraire, si χ croît avec la température, un comportement de type LCST (Lower Critical
Solution Temperature) est observé. La Figure I2 suivante montre la représentation des 2
diagrammes de phase obtenus pour 2 TP de comportement différent dans le monomère
DGEBA.
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Comportement de type UCST
LCST
Figure I2 : Représentation des différents diagrammes de phase
observés pour des mélanges binaires non réactifs.
Evolution de ses diagrammes avec la masse molaire des composés [PAS00].
La courbe de point de trouble (CPC) et la courbe de vitrification sont représentées sur
ce diagramme. La première peut être tracée expérimentalement en notant pour quelle
température le mélange à une composition donnée, passe de trouble à transparent. Elle
correspond à la transition liquide homogène/liquide biphasique. La seconde délimitant la
transition entre phase liquide et phase vitreuse peut être estimée par l’équation simplifiée de
Fox [PAS00] (Equation 15) ou par l’approche plus complexe de Couchmann [COU87]
(Equation 16) :
1 = ϕ1 + ϕ2
Tg Tg1 Tg2
ϕ1⋅∆Cp1⋅ln(Tg1)+ϕ2⋅∆Cp2⋅ln(Tg2 )
ϕ1⋅∆Cp1+ϕ2⋅∆Cp2
ln(Tg )=
avec
Equation 15
Equation 16
ϕi : fraction massique de l’espèce i
Tgi : température de transition vitreuse de l’espèce i
∆Cpi : capacité calorifique massique isobare de l’espèce i mesuré à la Tg
Le monomère DGEBA, par exemple se trouve être un assez bon solvant pour quelques
polymères linéaires tels que le polyétherimide (PEI), le poly(2,6-diméthyl-1,4phénylène)
(PPE), le poly(éther sulfone) (PES) ainsi que le poly(méthacrylate de méthyle) (PMMA).
Après l’ajout d’amine, la miscibilité du mélange peut varier de manière assez importante.
Pascault et al [PAS00] rappellent que l’influence de la structure chimique du durcisseur est
importante sur la solubilité du TP au temps initial. Pour un mélange DGEBA/PEI, l’ajout
d’une quantité stœchiométrique de MCDEA favorise la miscibilité initiale du TP alors que
pour la DDS ou la MDA, l’effet inverse est observé.
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I-3-b) Miscibilité au cours d’une réaction époxyde/amine
Les cas généralement rencontrés pour les mélanges TP/TD sont ceux dits
« initialement miscibles », pour lesquels l’additif thermoplastique est dissout dans les
monomères précurseurs du réseau époxyde. Le mélange est ensuite chauffé en isotherme. Au
cours de la réaction, les masses molaires augmentent ce qui entraîne une diminution du terme
entropique de mélange (Equation 14). La conséquence est que l’énergie de Gibbs de mélange
diminue au fur et à mesure que les masses molaires augmentent et devient positive pour une
conversion critique. Il apparaît donc le phénomène de séparation de phase induite par réaction
(RIPS : « reaction induced phase separation ») qui peut avoir lieu soit par décomposition
spinodale, soit par nucléation/ croissance [PAS00]. 2 phases distinctes sont créées et
différentes morphologies peuvent être produites suivant le taux de thermoplastique : une
structure bi-continue ou une matrice riche en thermoplastique ou thermodurcissable contenant
des nodules de phase dispersée.
L’addition de TP à un mélange époxyde/amine a un effet de dilution sur les fonctions
réactives. Cet effet de dilution entraîne une diminution de la vitesse de réaction pour le
mélange comparé au système époxyde sans additif, jusqu’au moment de la séparation de
phase. Au delà, il se forme une phase riche en époxyde dont la vitesse de réaction est
beaucoup plus grande, ce qui a pour effet d’augmenter la vitesse globale. C’est ce qu’a
observé et modélisé A.Bonnet [BON99] pour les systèmes DGEBA/MCDEA avec du PS et
du PEI.
La miscibilité initiale, le taux de thermoplastique, la cinétique de polymérisation et
l’éventuelle réaction entre TP et réseau en croissance sont les principaux facteurs
déterminants qui vont contrôler la microstructure et les propriétés finales du matériau. Il est
donc possible, mais plus rare de trouver des systèmes finaux miscibles c’est à dire qu’aucune
séparation de phase n’est observée au cours de la réaction époxyde/amine.
C’est, par exemple, le cas du polyméthacrylate de méthyle dans certains réseaux
époxyde/amine. Suivant le type d’amine, une séparation de phase ou non est observée. Pour
des mélanges DGEBA/MCDEA/PMMA réticulés à 135°C, Ritzenthaler [RIT00] conclut à
une structure homogène et montre qu’il n’y a pas de réactions de trans-estérification entre
réseau et PMMA. D’autres auteurs utilisant d’autres amines, Gomez et al avec la 4,4’diamino-3,3’-diméthyldicyclohéxylméthane [GOM93] et Kun Hseih avec la DDS [KUN96],
observent pour leur part une séparation de phase.
Guo [GUO95] observe le même phénomène pour le poly(hydroxy éther de Bisphénol
A) dans des matrices DGEBA/durcisseur. Pour les anhydrides aliphatiques utilisés ou avec la
4,4’-diaminodiphénylméthane, le mélange final ne présente pas de séparation à l’inverse de
systèmes à base de DDS ou d’anhydride phtalique.
Pour d’autres exemples, la miscibilité finale du thermoplastique dans le réseau ne
provient non pas d’interactions, de considérations thermodynamiques ou cinétiques mais de
réactions chimiques entre le TP et le réseau en croissance. Le thermoplastique peut interagir
soit par des fonctions en fin de chaînes, soit par des fonctions pendantes sur son squelette, soit
par réactions d’échange.
Huang et al [HUA02] rapportent qu’ils obtiennent des mélanges réticulés homogènes
préparés à base de DGEBA/DDS et poly(4-vinyl phénol), du fait des réactions des fonctions
hydroxyle du thermoplastique.
Su et al [SU95a] [SU95a] démontrent la miscibilité de mélanges époxyde/
polycarbonate par des réactions chimiques entre composants.
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Etude Bibliographique
I-4] Cas des mélanges avec le thermoplastique Phénoxy
Les phénoxy, et en particulier le Poly(hydroxy éther) de Bisphénol-A présentent une
structure assez similaire (structure aromatique, groupements hydroxyles sur la chaîne
macromoléculaire) aux époxy thermoplastiques (BLOX) utilisés dans notre étude. Ce
polymère amorphe de température de transition vitreuse (Tg) proche de 100°C, relativement
ductile et rigide, montre de très bonnes propriétés barrière aux gaz et en particulier à
l’oxygène.
Comme nous travaillons sur un nouveau polymère pour lequel il n’y a rien dans la
littérature, il nous a semblé intéressant d’avoir un aperçu du comportement en terme de
miscibilité de ce thermoplastique avec d’autres polymères. Dans cette partie bibliographique,
l’accent sera mis sur les interactions finales dans les mélanges.
Les mélanges entre phénoxy et différents polyméthacrylates ont été largement étudiés
par de nombreux auteurs. La structure du groupement latéral du poly(méth)acrylate et les
ponts inter-moléculaires entre phénoxy et polyméthacrylates sont les clés pour expliquer la
miscibilité de ces systèmes.
Le poly(méthacrylate de méthyle), PMMA, est miscible et le mélange avec le phénoxy
montre un comportement de type LCST [CHI91] [ERR92] [SOH92] [KIM93] en opposition
avec d’autres poly(n-alkyl méthacrylates) [GOH93] [ERR99] [ERR00]. Cette miscibilité,
intensivement étudiée par spectroscopie RAMAN [WAR99] et infrarouge à transformée de
Fourrier, s’explique par une très forte interaction entre le groupement carbonyle du PMMA et
le groupement hydroxyle du Phénoxy. De nombreux essais ont été effectués avec des
polyméthacrylates à chaînes plus ou moins complexes [CHO92]. Par exemple, le
poly(tétrahydrofurfuryl methacrylate) PTHFMA et le poly(tétrahydropyranyl-2-méthyl
méthacrylate) PTHPMA, sont miscibles avec le phénoxy [GOH87] [GOH93].
Le poly(acrylate de méthyle) est immiscible avec le phénoxy mais des tentatives de
compatibilisation ont été réalisées avec un copolymère statistique acrylate de méthyle /
méthacrylate de méthyle, P(MA-co-MMA), et les auteurs concluent que le taux de MMA dans
le copolymère doit être supérieur à 72 % pour obtenir la miscibilité du binaire [WU98b].
Les polyoléfines et le phénoxy présentent des structures complètement opposées, les
premiers non polaires et le second présentant de nombreux groupements hydroxyles. Des
mélanges physiques entre polyéthylène [CHO95] ou polypropylène [CHO96] et phénoxy ont
été réalisés dans un malaxeur. Une nette séparation de phase apparaît et les propriétés
mécaniques sont décevantes du fait de la non miscibilité et d’une faible adhésion interfaciale.
La littérature indique que quelques polyesters [SEY80] [HAR82] sont miscibles ou
partiellement miscibles avec le phénoxy. La structure chimique du Polyester joue un rôle
indéniable sur la miscibilité du binaire. Un optimum de densité de groupement esters sur la
chaîne macromoléculaire doit être trouvé pour favoriser un maximum d’interaction avec le
phénoxy [HAR83] [ZHE97]. Des réactions de trans-estérification peuvent apparaître entre
groupements hydroxyle du phénoxy et groupes ester conduisant à une plus large fenêtre de
miscibilité [KOD92] [YUA98]. Le Poly-ε-caprolactone, le poly(éthylène téréphtalate) PET
ou le poly(butylène téréphtalate) PBT [ROB79] ainsi que le copolymère (PET-co-CL)
[ZHA95] sont miscibles avec le phénoxy.
Guerrica-Echevarria et al ont déterminé les tensions interfaciales de plusieurs
mélanges de polymères et observent que les systèmes miscibles correspondent aux
échantillons présentant les plus faibles valeurs de tension interfaciale comme pour le mélange
Phénoxy/PBT ou PMMA [GUE00].
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Etude Bibliographique
Les polycarbonates présentent également une structure proche de celle des polyesters
avec un groupement carboxyle. Cependant les mélanges Polycarbonate de Bisphénol
A/phénoxy sont immiscibles [MON86]. Grâce à des conditions de mélange optimisées
(température et temps), des réactions de trans-estérification peuvent conduire à un système
présentant une Tg unique [ROB85]. Les morphologies [WOO97] ainsi que les propriétés
mécaniques et viscoélastiques [MON88] ont été étudiées pour ces systèmes avant et après
réaction.
Du fait d’une très faible miscibilité entre phénoxy et polymères styrèniques, on trouve
très peu d’études sur les mélanges avec le Polystyrène, PS ou le copolymère acrylonitrilebutadinène-styrène, ABS. Vanneste et al [VAN94] ont montré que si le taux d’acrylonitrile
d’un ABS était compris entre 5 et 34 % en masse, le mélange était partiellement miscible. Des
essais de compatibilisation de ces 2 polymères ont été effectués. Les résultats obtenus par
[CHE94] sont bons car l’adhésion interfaciale et les propriétés mécaniques ont été accrues.
Zheng et al [ZHE99a] ont polymérisé in-situ un mélange homogène SAN/DGEBA et
bisphénol A. Les mélanges Phénoxy/SAN obtenus présentent deux phases issues d’une
séparation induite au cours de la réaction.
Le mélange polyéthersulfone (PES) et phénoxy est miscible avec un comportement de
type LCST. Un maximum de propriétés mécaniques (élongation à la rupture, et module) est
atteint lorsque le phénoxy est introduit dans une matrice PES. Cependant après un certain
temps, ces propriétés se perdent [AN96]. Des essais de sorption et de diffusion de gaz ont
également été réalisés sur ces mélanges [REI94].
Le poly(oxyde d’éthylène) PEO, est miscible avec le phénoxy sur toute la gamme de
composition à des températures raisonnables. Des travaux de miscibilité ont aussi été
effectués avec des copolymères Poly(oxyde d’éthylène-co-oxyde de propylène) de différentes
compositions. Qipeng et al [QIP93] montrent que pour des taux de EO inférieurs à 66 %
molaire, une séparation de phase apparaît à haute température.
Zheng et al [ZHE99b] ont polymérisé in-situ un mélange homogène Poly(acétate de
vinyle), PVAc/DGEBA et bisphénol A. Les mélanges Phénoxy/PVAc obtenus présentent
après réaction, deux phases distinctes.
Quelques publications se sont intéressées à démontrer l’influence de ponts hydrogène
intra-moléculaire entre phénoxy et des polymères contenant des groupes accepteurs de
protons (polymères contentant des amides tertiaires [DAI96], des résines phénoliques
[WU98a] ou avec le poly(N-vinyl-2-pyrrolidone) [EGU84] par exemple …) sur la
miscibilité.
Certains travaux ont étudié le mélange de Phénoxy avec des polymères moins
traditionnels en terme de structure. Gaztelumendi et al [GAZ98] rapportent que l’élastomère
Hytrel, copolymère multiblocs de PBT et PTMEGT, poly(tétraméthyl-éther-glycol
téréphtalate) est miscible dans le phénoxy après un court de mélange du fait de réactions de
trans-estérification. Il en est de même entre Phénoxy et PEK-C, poly(éther éther cétone) de
phénolphtaleïne [QIP88] où les interactions entre polymères sont fortes. Yuan et al [YUA98]
ont étudié le mélange Phénoxy/Poly(3-hydroxy butyrate), PHB, polymère biodégradable et
assurent que le mélange est miscible pour des taux en PHB inférieurs à 20 %. Ils montrent
également que certaines réactions d’estérification peuvent également se produire.
19
Etude Bibliographique
D’autres auteurs ont étudié des mélanges ternaires composés de 3 binaires miscibles.
Bien que les polymères soient miscibles par paire, le diagramme ternaire peut comporter des
fenêtres de non-miscibilité dépendant de la composition du mélange. C’est le cas pour les
systèmes à base de Poly-ε-caprolactone / Phénoxy / Polycarbonate [CHR87] et
Poly(méthacrylate de méthyle) / Polyoxyde d’ethylène / Phénoxy [HON97].
Un mélange Poly-ε-caprolactone /Phénoxy/ Poly(Styrene-co-acrylonitrile) a été réalisé
par dissolution/coprécipitation. Grâce à des mesures SAXS, il a été possible de localiser les
différents polymères dans un ternaire à fort taux de Poly-ε-caprolactone à morphologie semicristalline. Pour 90% de Poly-ε-caprolactone, le SAN se trouve dans les espaces
interlamellaires alors que le phénoxy est présent majoritairement dans les zones
interfibrillaires [VAN97].
On trouve également des publications traitant de l’effet de compatibilisation d’un
mélange de polymères immiscibles par introduction d’un troisiéme thermoplastique. C’est le
cas du mélange Phénoxy/SAN avec du Poly-ε-caprolactone [JO94] ou Polyarylate/Phénoxy
avec du PBT [EGU86].
Les mélanges de Phénoxy dans une matrice époxyde ont également été étudiés.
Ce polymère est miscible sur toute la gamme de concentration dans le monomère
DGEBA et aucune séparation de phase n’est observée pour des températures inférieures à
280°C. Ensuite de nombreux systèmes réticulants ont été testés et différents comportements
observés [GUO95]. Suivant la nature de l’amine ou l’anhydride utilisé, une séparation de
phase apparaît ou non. L’interprétation apportée est la présence ou non d’interaction de type
liaison hydrogène entre la matrice époxyde et le thermoplastique.
Teng et al. [TEN96] quant à eux, ont fait varier la cinétique de réaction d’un mélange
DGEBA/Phénoxy/DDS (diaminodiphényl-sulfone) par ajout de différentes quantités de
catalyseur CEMI (1-cyanoethyl-4-méthyl imidazole) et obtient suivant le taux d’accélérateur,
des échantillons opaques, translucides ou transparents. Son explication repose sur une
compétition entre équilibre thermodynamique et cinétique du système.
Hseih et al. [HSE98] se sont intéressés au système TGDDM (tetraglycidyl-4,4’diaminodiphényle méthane)/Phénoxy/DDS et s’est consacré à l’influence des groupements
hydroxyles du Phénoxy sur la cinétique. La présence du thermoplastique à un effet catalytique
sur la cinétique. Cependant, avant le gel, il n’observe pas de réactions entre le phénoxy et le
réseau en formation et voit apparaître une séparation de phase. Dans un second temps, lorsque
l’amine a été grandement consommée et qu’il reste des fonctions oxiranes non réagies, il met
en évidence la réaction chimique entre matrice thermoplastique et domaines riches en
époxydes.
Différentes morphologies ont été observées [WOO98] et les propriétés mécaniques
testées [TEN96].
Cette bibliographie sur les Phénoxy nous montre l’importance des liaisons
hydrogènes et des réactions chimiques sur la miscibilité des systèmes. Le Tableau IA suivant
récapitule les principaux résultats.
20
Etude Bibliographique
Comportement du mélange avec le
Phénoxy
Polymères
Famille
Nom
poly
méthacrylates
Poly(méthacrylate de méthyle)
PMMA
Poly(méthacrylate d'éthyle)
PEMA
Poly(méthacrylate de n-propyle,
n-butyle) PnPMA et PnBMA
Poly(méthacrylate de
tétrahydrofurfuryle) PTHFMA
Poly(méthacrylate de tétrahydro
pyranyl -2-méthyle) PTHPMA
Poly(acrylate de méthyle) PMA
polyacrylates
Immiscible Miscible Commentaires férence
Polyéthylène PE
Polypropylène PP
polyesters
Poly(ε-caprolactone) PCL
r
r
[GOH93]
r
polymères
polaires
fortes interactions
LCST
LCST
r
T=185°C, ϕ=0,5
r
Si %masse MMA
> 70 %
r
r
r
r
r
Poly(butylène téréphtalate) PBT
r
Poly(3-hydroxybutyrate) PHB
r
P(ET-co-CL)
r
Polycarbonate of bisphenol-A
PC
Poly(N-methyl-Nvinylacétamide) PMVAc
Résine Novolac (phénolique)
Poly(N,N-dimethylacrylamide)
PDMA
Poly(2-ethyl-2-oxazoline)
PEOx
Polyoxyde d’éthylène PEO
r
Dépend du temps
de chauffe
[HAR82]
[ROB79]
[HAR82]
[YUA98]
r
[ROB85]
[MON86]
r
Réactions
[DAI96]
r
LCST
[WU98]
r
Réactions
[DAI96]
r
Réactions
[DAI96]
[ZHA95]
[QIP93]
P(EO-co-PO)
r
si %molaire EO
>20 %
Poly(ether sulfone) PES
ABS
r
LCST
Tableau IA : Miscibilité des mélanges TP/TP à base de Phénoxy.
21
[WU98b]
Réactions
Si %masse ET
<90 %
Dépend du temps
de chauffe
r
r
[GOH87]
[GOH93]
[CHO92]
[GOH93]
[WU98b]
[CHO95]
[CHO96]
[HAR82]
[HAR83]
r
Poly(éthylène téréphtalate) PET
polycarbonates
LCST
[CHI91]
[SOH92]
[GOH93]
[ERR99]
r
P(MA-co-MMA)
polyoléfines
Ré
[QIP93]
[AN96]
[CHE94]
Etude Bibliographique
I-5] Conclusion
Après des rappels généraux sur les réactions époxyde/amine et les principaux
phénomènes se produisant au cours de la polymérisation, la gélification et la vitrification,
nous avons regroupé les principales équations (ou jeu d’équations) permettant de modéliser
ces réactions amine/époxyde. Nous avons particulièrement détaillé la partie sur les réactions
d’éthérification en traitant l’exemple de la polymérisation en chaîne de la DGEBA par une
amine tertiaire.
Dans la troisième partie, nous avons abordé les mélanges thermoplastique/
thermodurcissable en appuyant sur le fait que deux comportements étaient possibles : le cas
majoritaire où se produit une séparation de phase induite ; le second où le système reste
miscible tout au long de la réaction s’explique par réactions chimiques ou forte interactions
entre TP et réseau en croissance.
Enfin, nous nous sommes attachés dans la dernière partie de l’étude bibliographique, à
passer en revue le comportement en terme de miscibilité, de mélanges de polymères à base de
Phénoxy. En effet, puisque nous allons travailler sur un époxy thermoplastique, BLOX sur
lequel la littérature est inexistante, nous avons tenté de trouver un thermoplastique de
structure proche (cycles aromatiques, nombreuses fonctions hydroxyle sur la chaîne…). Notre
choix s’est donc porté sur le Phénoxy. Ce dernier est miscible à une très faible quantité de
polymères. Cependant, nous avons mis en avant le fait que de très fortes interactions
hydrogènes ou des réactions chimiques (comme des réactions de trans-estérification)
pouvaient être à l’origine de la miscibilité finale dans de nombreux cas.
Nous pouvons penser que, de par leur structure chimique voisine, la miscibilité du
Phénoxy dans les monomères ou polymères sera proche de celle du BLOX.
22
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