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DÉVELOPPEMENTS RÉCENTS D’UN NOUVEAU CONCEPT DE VACCINS ET LEURS EFFETS
SUR LES PROGRAMMES DE CONTRÔLE DES MALADIES ANIMALES
P. Vannier
Agence française de sécurité sanitaire des aliments, AFSSA Ploufragan
BP 53, 22440 Ploufragan, France
Original : français
Résumé : La biologie moléculaire et les avancées technologiques en matière de recombinaison de l’ADN
ont ouvert une nouvelle ère en vaccinologie.
Avant l’avènement des techniques de biologie moléculaire, les souches vaccinales vivantes étaient
atténuées par passages en série sur différentes espèces animales ou sur cultures cellulaires. Depuis
quelques années elles peuvent être remplacés par des vaccins à marqueurs sérologiques, obtenus par
délétion d’un gène qui code pour une glycoprotéine dont la fonction n’est pas essentielle. Par ailleurs,
des vaccins à vecteurs vivants recombinants, exprimant une glycoprotéine immunogène d’un autre agent
infectieux, sont également développés.
A partir d’exemples précis, l'auteur analyse l’impact de la découverte de ces nouveaux vaccins sur les
programmes de lutte contre certaines maladies réglementées, comme la maladie d’Aujeszky, la peste
porcine classique et la rage. L’utilisation de ces vaccins délétés, permettant de différencier les animaux
infectés des animaux vaccinés, a en effet donné un essor nouveau à certains programmes de lutte puisque
le dépistage d’animaux infectés devient possible même lorsque la vaccination est systématique et rendue
obligatoire.
Néanmoins, à la lumière des expériences acquises dans différents pays et notamment dans le cadre des
programmes de lutte contre la maladie d’Aujeszky et la peste porcine classique, il semble impossible
d’atteindre l’éradication d'une maladie par la seule vaccination. Les avantages et les limites de cette
approche sont donc discutés en détails dans ce document.
Enfin, une nouvelle génération de vaccins (à ADN) est en développement rapide et permettra, sans doute,
de mieux cibler la réponse immunitaire induite par l’emploi de tels vaccins.
1. INTRODUCTION
La biologie moléculaire et les avancées technologiques en matière de recombinaison de l’ADN1 ont ouvert une
nouvelle ère en vaccinologie.
Plus particulièrement, le concept de vaccins « délétés », utilisés en association avec une trousse de diagnostic
appropriée, s'est développé aux cours des dix dernières années. Les premiers vaccins de ce type ont été utilisés pour
protéger les porcs contre la maladie d’Aujeszky. Puis les mêmes principes ont été appliqués pour développer des
vaccins contre la rhinotrachéite infectieuse bovine ou contre la peste porcine classique relançant, dans ce dernier cas, un
débat sur les choix de prophylaxies de type sanitaire ou médical.
Par ailleurs, des vaccins recombinants ont été utilisés pour protéger les espèces aviaires contre la maladie de Newcastle
et l’influenza aviaire et, depuis de nombreuses années, un autre vaccin recombinant administrable par voie orale a été
utilisé avec succès pour vacciner les animaux sauvages contre la rage.
1 ADN : Acide désoxyribonucléique
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2. PRINCIPES GÉNÉRAUX
2.1. Atténuation contrôlée
Avant le développement des techniques de biologie moléculaire, les souches vaccinales atténuées étaient obtenues
par passages en série sur des cellules ou chez des espèces animales qui n'étaient pas les hôtes naturels de l'agent
pathogène. Plus tard, l'emploi d'anticorps monoclonaux capables d'exercer une pression de sélection qui favorise
l'émergence de mutants apathogènes mais immunogènes a permis d'obtenir des vaccins très efficaces, notamment
le vaccin "SAG2" contre la rage (8).
Mais les techniques de recombinaison de l’ADN permettent, à présent, d’enlever (déléter) directement les gènes
associés à la virulence de certains agents infectieux, ou d'enlever les gènes codant pour des enzymes qui jouent un
rôle dans la réplication du virus dans l'organisme.
2.2. Les vaccins à marqueurs sérologiques
Lorsqu’on déléte un gène qui code pour une glycoprotéine dont la fonction n’est pas essentielle, mais qui est
associée à la virulence de l’agent infectieux, l’absence d’expression de cette glycoprotéine peut être mise à profit
pour créer un vaccin à marqueur sérologique. En effet, la souche vaccinale atténuée n’induira pas d’anticorps
spécifiques de la glycoprotéine, qui n’est plus exprimée. Cela permettra de distinguer les animaux vaccinés des
animaux infectés, car cette glycoprotéine étant exprimée systématiquement chez les souches sauvages virulentes,
tout animal infecté produira des anticorps dirigés contre elle (voir Figure 1 a).
2.3. Les vecteurs vivants recombinants
Il y a de très nombreux exemples de vecteurs vivants recombinants exprimant une glycoprotéine immunogène
appartenant à un autre agent infectieux. L’un des plus récents, et certainement les plus connus, est celui du virus
de la vaccine modifié génétiquement qui exprime une glycoprotéine du virus de la rage (voir Figure 1 b) ; ce
vaccin a été utilisé avec succès pour lutter contre la rage sylvatique (2).
3. UN EXEMPLE HISTORIQUE : LES VACCINS CONTRE LA MALADIE D’AUJESZKY
3.1. Le développement de nouveaux vaccins
Dans un premier temps, les progrès en biologie moléculaire ont contribué à une meilleure connaissance du
génome des souches vaccinales existantes. Puis, en étudiant des souches vaccinales classiques, il a été constaté
que certaines séquences codantes de la zone courte à séquences uniques de la souche "Bartha" du virus de la
maladie d’Aujeszky étaient délétées. Ces séquences, situées dans le fragment de restriction enzymatique BamH1
7, codent pour deux glycoprotéines structurales : gE, gI. Ainsi, la souche Bartha, isolée dans des conditions
naturelles, n’exprime pas la gE ce qui permet de distinguer les animaux vaccinés des porcs infectés, à condition
d’utiliser, bien sûr, les kits ELISA2 correspondants. Ces derniers permettent de détecter, dans le sérum des porcs,
les anticorps anti gE grâce à l’emploi d’anticorps monoclonaux très spécifiques de certains épitopes de la gE
comme l'on décrit Van Oirschot et al. (17).
Dans un second temps, la connaissance de la biologie moléculaire des mutants du virus de la maladie d’Aujeszky
a permis de mieux connaître les fonctions des glycoprotéines du virus. Le premier facteur de virulence qui a été
identifié chez les herpès virus est l’enzyme thymidine-kinase qui permet au virus de se répliquer dans le système
nerveux central. Plus tard, la virulence des souches de virus de la maladie d’Aujeszky n’exprimant pas la
glycoprotéine d’enveloppe gE est apparue considérablement diminuée par rapport à celle des virus sauvages (1).
Ainsi, cette gE semble-t-elle jouer un rôle majeur dans la diffusion du virus au sein du système nerveux,
l’infection se progageant aussi bien par voie olfactive que trigéminale (10). Cette connaissance a permis le
développement de nouveaux vaccins obtenus par recombinaison génétique. Le génome des souches vaccinales a
été alors modifié en utilisant les techniques de recombinaison génétique pour exciser, enlever ou déléter certaines
séquences qui codent pour des glycoprotéines alors non exprimées. Ces dernières n’induisent pas d’anticorps chez
les animaux vaccinés et sont donc utilisées comme marqueurs sérologiques. Les fonctions de ces mêmes protéines
sont souvent responsables d’une partie de la virulence des souches sauvages (comme la gE) ; leur non expression
contribue à diminuer ou supprimer le pouvoir pathogène de ces souches vaccinales, qui expriment toujours les
2 ELISA : épreuve immunoenzymatique
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glycoprotéines majeures (gB, gC, gD) induisant les réponses immunitaires protectrices chez les porcs vaccinés ou
infectés.
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