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n° 15
si :
fiche
pratique
A. Breining*, M. Verny*, J. Boddaert*
Sous la responsabilité de ses auteurs
Prise en charge du syndrome
confusionnel aigu chez le sujet âgé
en unité de soins intensifs cardiologiques
Le DSM-IV (Diagnostic and Statistical Manual of Mental
Disorders, quatrième édition) indique que le diagnostic
de confusion doit être porté lorsque 4 critères présents
simultanément : l’altération de la conscience avec déficit de
l’attention, l’altération cognitive ou perceptive, l'installation
rapide avec fluctuation dans la journée et le “facteur déclenchant”. Il s’agit d’un diagnostic exclusivement clinique,
parfois difficile. Afin de faciliter ce diagnostic et ne pas
passer à côté d’une confusion, certains outils sont prévus.
La Confusion Assessment Method (CAM) [1], dont il existe
une version française (2), est une échelle de confusion simple
et rapide, sensible (88 %) et spécifique (100 %) [tableau].
La confusion survient souvent, bien que non exclusivement,
chez un patient ayant des troubles cognitifs préexistants et a
fortiori une démence. Dans ce cas, le caractère d’aggravation
aiguë des troubles cognitifs et/ou comportementaux avec
une modification franche par rapport à l’état antérieur, la
fluctuation dans le nycthémère, la présence de troubles de
la conscience et la détection d’une pathologie somatique
intercurrente (incluant l'intoxication ou le sevrage) doivent
orienter vers une confusion. Attention, tous les patients
confus ne sont pas agités. D’une manière plus générale, tout
patient présentant des troubles cognitifs dont l’ancienneté
ne peut être établie par l’anamnèse doit être considéré
comme confus jusqu’à preuve du contraire.
Chercher une étiologie
En premier lieu, il faut chercher une modification de
prescription récente ou une erreur d’administration pouvant
être à l’origine de la confusion (introduction d’un nouveau
Critère 2 – Inattention
A. Est-ce que le patient avait de la difficulté à focaliser son attention,
par exemple était-il facilement distrait ou avait-il de la difficulté à
retenir ce qui a été dit ?
B. Si oui, est-ce que ce comportement a fluctué lors de l’entrevue,
c’est-à-dire qu’il a eu tendance à être présent ou absent, ou à
diminuer et augmenter d’intensité ?
Critère 3 – Désorganisation de la pensée
Est-ce que la pensée du patient était désorganisée ou incohérente,
telle qu’une conversation décousue ou non pertinente, ou une suite
vague ou illogique d’idées, ou le patient passait-il d’un sujet à un
autre de façon imprévisible ?
Critère 4 – Altération de l’état de conscience
En général, comment évalueriez-vous l’état de conscience de ce patient ?
✓ Alerte (normal)
✓ Vigilant (hyperalerte, excessivement sensible aux stimuli de
l’environnement, sursaute très facilement)
✓ Léthargique (somnolent, se réveille facilement)
✓ Stuporeux (difficile à réveiller)
✓ Comateux (impossible à réveiller)
médicament, augmentation des doses). L’arrêt brutal d’un
traitement en cours, en particulier à base de benzodiazépines, peut aussi être source de confusion aiguë. En
effet, la prise de benzodiazépines au long cours peut être
méconnue. Il est donc recommandé d’interroger systématiquement l’entourage sur l’ensemble des traitements pris
par le patient, sur les pathologies préexistantes et sur toute
notion de traumatisme ou de chute plus ou moins récente.
C
* Service de gériatrie, hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris.
F
I
Critère 1 – Début soudain
Y a-t-il évidence d’un changement soudain de l’état mental du patient
par rapport à son état habituel ?
Face à une confusion aiguë chez la personne âgée, il est
recommandé, en plus de l’examen clinique habituel, de
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À
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T
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R
Reconnaître la confusion
Tableau. Algorithme diagnostique de la Confusion Assessement
Method (d’après [2]). Le diagnostic de l’état confusionnel aigu requiert
la présence des critères 1 + 2 + 3 ou 4.
La Lettre du Cardiologue • n° 460 - décembre 2012 | I Patients inhabituellement apathique ou agité
Traitement de la pathologie
cardiaque
Traitement non médicamenteux+++
– favoriser l’apaisement, la réassurance
– favoriser la présence de l’entourage
– mettre les prothèses auditives et les lunettes
– donner les repères temporels et spatiaux
Éviter la contention physique
Rechercher systématiquement
une cause associée +++
– médicamenteuse dont sevrage aux benzodiazépines
–g
énérale : douleur, globe ou fécalome, fièvre
– infectieuse : pneumopathie d’inhalation ou infection
urinaire
–m
étabolique : déshydratation, d
­ ysnatrémie, hypoxie,
etc.
– toxique : alcool
–n
eurologique : tomodensitométrie ­cérébrale si
signes de localisation neurologique, suspicion
d’hémorragie méningée, traumatisme crânien
même mineur
Traitement de la cause associée +++
Si persistance de l’agitation avec mise en danger
Traitement médicamenteux
– Si agitation anxieuse sévère : benzodiazépine à demi-vie courte ➙ alprazolam 0,25 mg p.o.
Si voie p.o. impossible ➙ clorazépate ½ ampoule = 10 mg i.m. ou i.v. ½ vie = 30-150 h
–S
i hallucinations ou délire : neuroleptique atypique ➙ rispéridone 0,5 mg p.o.
Si voie p.o. impossible ➙ tiapride ½ ampoule = 50 mg i.m. ou i.v.
+ avis spécialisé
Figure. Démarche diagnostique devant un syndrome confusionnel en USIC.
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E
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C
A
T
En cas de confusion aiguë, et si la prise en charge non
médicamenteuse s’avère insuffisante, un traitement
pharmacologique de courte durée (de 24 à 48 heures) peut
être indiqué : benzodiazépines si l’anxiété prédomine, et
neuroleptiques uniquement en présence d'hallucinations
et/ou de délires. Ce traitement n’est à prescrire que si le
patient se met ou met les autres en danger. La contention
physique doit être considérée comme un échec thérapeutique et doit rester exceptionnelle.
■
À
La tomodensitométrie cérébrale ne doit pas être pratiquée
de façon systématique. Elle est recommandée en première
intention en cas de signes de localisation neurologique,
de suspicion d’hémorragie méningée ou de traumatisme
crânien, même mineur, a fortiori si un traitement anticoagulant ou antiagrégant est pris ou est envisagé.
La prise en charge d’une confusion (figure) nécessite avant
tout le traitement du ou des facteurs déclenchants. Parallèlement, quels que soient le lieu de soin ou la gravité
du syndrome confusionnel, il faut commencer la prise en
charge par des mesures non médicamenteuses. Dans un
grand nombre de cas, une prise en charge relationnelle
individuelle suffit à elle seule à désamorcer l’agitation du
patient et à diminuer son angoisse. La présence (si possible)
d’une personne de l’entourage est souvent très apaisante.
Il faut aussi mettre en place les prothèses auditives et/ou les
lunettes pour favoriser la communication avec le patient.
É
Le bilan initial recommandé (3) en urgence et de façon systématique est destiné à éliminer les causes les plus fréquentes
de confusion qui, dans la majorité des cas, pourront être
traitées sans nécessiter une sédation : hémogramme
(anémie) ; ionogramme sanguin (dysnatrémie, déshydratation) ; urée, créatininémie avec calcul de la clairance de
la créatinine (insuffisance rénale aiguë) ; protides totaux
(hémoconcentration) ; calcémie (hyper­calcémie) ; glycémie
capillaire (hypoglycémie) ; CRP (syndrome inflammatoire) ;
bandelette urinaire (leucocytes, nitrites).
Mesures thérapeutiques
D
commencer par rechercher tous les facteurs déclenchants de
la confusion (et plus spécifiquement chez la personne âgée),
et d’éliminer en premier lieu un globe vésical, un fécalome
ou une cause de douleur même non verbalisée dans ce
contexte. Ensuite, un avis spécialisé doit être envisagé.
H
3. Haute Autorité de santé. Confusion aiguë chez la
personne âgée : prise en charge initiale de l’agitation.
Mai 2009.
C
2. Inouye SK, van Dyck CH, Alessi CA, Balkin S, Siegal
AP, Horwitz RI. Clarifying confusion: the confusion
assessment method. A new method for detection of
delirium. Ann Intern Med 1990;113:941-8.
I
1. Adamis D, Sharma N, Whelan PJ, Macdonald AJ. Delirium scales: A review of current evidence. Aging Ment
Health 2010;14:543-55.
E
Références bibliographiques
F
n ° 15
p ra t i q u e
f i c h e
Diagnostic de confusion en unité de soins intensifs cardiologiques
II | La Lettre du Cardiologue • n° 460 - décembre 2012
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