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Ptolémée : un expert de l’Antiquité
Dotés d’instruments logiques et d’observations riches, les as-
tronomes grecs conçurent une science apte à prédire le mouve-
ment des étoiles, des astres et des planètes. Notons que le but
de l’astronomie sera de découvrir quel mécanisme régulier meut
l’horloge céleste, dont les cinq planètes et les deux luminaires
composent les aiguilles. Le but de l’astrologie sera de décoder la
volonté divine pour chaque âme et chaque époque selon « l’heu-
re » qu’afficheront les aiguilles.
Ptolémée triera et compilera les données et théories de ses
prédécesseurs, Apollonios de Perga (-262 - -180) et Hipparque
(IIe siècle av.) en particulier. Le « modèle abstrait quantifié » de
Ptolémée utilise la géométrie et comporte 9 propositions de base
(postulats) qui fondent l’astronomie.
La Terre
La Terre est ronde. La « légende urbaine » qui affirme qu’on
pensait la Terre plate avant Colomb est fausse. Dans le Phédon
(vers -385), par la bouche de Socrate, Platon affirme que la Ter-
re est sphérique, centrale et immobile. Dans son traité Des corps
flottants (vers -250), Archimède note que tout liquide au repos
épouse à sa surface une courbure dont le rayon mène au centre de
la Terre. Ptolémée estimait la circonférence terrestre à environ
33 345 km (20% d’erreur comparé aux 41000 km). Finalement
au Moyen-Âge, dans sa Somme théologique, Thomas d’Aquin écrit
(Dieu, Q.1, art. 1) : « Ainsi, la rondeur de la Terre est démontrée à
la fois par l’astronomie [...], et par le physicien. »
La Terre est immobile. Les Anciens n’avaient aucune raison
sérieuse de prétendre que notre Terre possédait un quelconque
déplacement. D’ailleurs, nous ne percevons aucun mouvement
du sol alors que toute personne, à pied ou à cheval, perçoit être
en mouvement dès qu’il s’enclenche. Avant le XVIIe siècle, les hy-
pothèses quant à un possible déplacement de la Terre étaient de
pures spéculations facilitant l’explication des mouvements pla-
nétaires.
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De ces observations et déductions dérivent les deux premières
propositions de base :
T1 — la Terre fixe
T2 — la Terre est centrale
Une fois ce centre fixe de l’univers établi, il restait aux astro-
nomes à observer, décrire et prédire le mouvement des compo-
santes du ciel.
La sphère des étoiles
Pour Aristote et les astronomes qui suivirent, l’ensemble des
étoiles est situé sur la surface interne d’une sphère opaque qui
tourne sur elle-même selon un axe nord-sud. L’ensemble des
étoiles bouge en bloc d’un mouvement constant. Seule la lumino-
sité varie selon les étoiles.
Les Anciens savaient cette sphère immense et fort éloignée de
nous. Dans Consolation de la philosophie, le Romain Boèce écrivait
en 524 : « On sait que la superficie totale de la Terre, comme l’en-
seignent les astronomes, n’a au regard de l’étendue du ciel que la
valeur d’un point. » Hipparque avait estimé avec seulement 10 %
d’erreur l’éloignement de la Lune, le plus proche objet céleste.
Sur une échelle d’observation de plusieurs milliers d’années,
les astronomes n’ont remarqué aucun changement dans la posi-
tion relative des étoiles les unes par rapport aux autres. Pour fa-
ciliter la mémorisation, ils groupèrent les étoiles en figures. Nous
avons hérité de ce ciel imagé se trouvent la Grande Ourse et
Orion, par exemple. Ces figures seront suffisantes pour satisfaire
les besoins des astronomes, des astrologues et des navigateurs.
L’Almageste de Ptolémée contient un catalogue de 1022 étoiles et
une liste de 48 constellations. Il est demeuré un ouvrage de réfé-
rence durant de nombreux siècles.
La rotation complète de la sphère sur 360º définit une année.
Elle correspond à un cycle de la nature. Si, à minuit, nous obser-
vons un réseau d’étoiles, haut dans le ciel, nous le reverrons le
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nuit suivante légèrement décalé vers l’est. En trois mois, il som-
brera dans la lumière du soleil levant. Six mois plus tard, il réap-
paraîtra à l’ouest un peu après le soleil couchant pour remonter
dans le ciel et se retrouver exactement à la même place que l’an-
née précédente. Une année complète aura passé.
De ces observations et déductions sont tirées quatre proposi-
tions fondamentales :
E1 — la sphère céleste clôture l’univers
E2 — les étoiles sont toutes à même distance de la Terre
E3 — le monde supralunaire au-delà de » la Lune) est consti-
tué de luminaires
E4 — aucune modification n’a lieu dans l’espace supralunaire.
La feuille quadrillée des astronomes
À l’intérieur de la sphère des
étoiles se meuvent deux luminaires,
le Soleil et la Lune, et cinq planetos,
les « errants », ainsi appelés à cau-
se de leur mouvement irrégulier ou
hésitant. Ce sont Mercure, Vénus,
Mars, Jupiter et Saturne. Ces sept
objets lumineux se déplacent tous
sur une bande de 16º d’épaisseur
avec un écart de ± de son centre.
Cette bande est inclinée de 23º par
rapport à l’axe de rotation de la sphè-
re. Elle sera coupée en 12 portions
égales de 30º et les étoiles importan-
tes s’y trouvant seront mémorisées
en 12 figures mnémotechniques : les constellations du zodiaque
européen (figure 1, ci-contre).
Les trois dernières propositions de base concernent les planè-
tes et les luminaires. Seule la dernière résulte de l’observation.
Figure 1 La bande zodiacale se
distribue sur l’écliptique (Ec) in-
clinée de 23º par rapport à l’équa-
teur, (ligne pointillée E-E’). La li-
gne pointillée NS représente l’axe
de rotation de la Terre.
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Les deux premières sont des propositions métaphysiques (livre 2,
ch.3) dérivées des propriétés de la sphère étoilée :
P1 — la vitesse de déplacement des planètes et luminaire est
constante
P2 — le cercle est l’unique forme de déplacement des objets cé-
lestes
P3 — plus un corps céleste s’approche de la Terre, plus ses irrégu-
larités de comportement augmentent.
L’année solaire1
Une année consiste en un tour de la sphère sur elle-même, les
mêmes figures reprenant exactement la même position que l’an-
née précédente à minuit. Calculer une année solaire revient à se
demander combien de jours, soit de tours du Soleil autour de la
Terre, sont nécessaires avant que la sphère étoilée fasse un tour
complet sur elle-même. Il faut comprendre la difficulté. Faire le
calcul du nombre de jours passés durant une année prend forcé-
ment un an. Il faut un système d’observation fixe et précis pour
obtenir un échantillonnage étalé sur plusieurs années. Les Baby-
loniens avaient décrété qu’une année comptait 360 jours. Pro-
fitant d’une structure sociale stable, les astronomes égyptiens
rectifièrent à 365 jours, un nombre plus pertinent.
C’est Jules César qui ordonna l’établissement d’un calendrier
annuel plus précis. Le calendrier « julien » adopté compor-
tait l’insertion d’une journée supplémentaire tous les quatre ans
(celle qui est un multiple de 4), portant à 366 le nombre de jours
durant l’année bissextile deux six »). L’année comportant un
1 Longtemps la rotation de la Lune fut une référence temporelle pratique. Surtout près
de l’équateur les variations des saisons sont le moins perceptibles. D’ailleurs, l’ob-
servation facile du croissant de Lune permet de définir quatre phases de sept jours :
pleine, demi-pleine ouest, vide, demi-pleine est, les quatre semaines du mois (mens, la
lune). Calculer la longueur moyenne d’un mois est aisée, l’échantillonnage peut s’étaler
sur plusieurs cycles lunaires. Un tour de Lune dans le Zodiaque varie en moyenne de
27,5 à 29,5 jours, selon le point de départ choisi sur l’orbite. Il y a donc un peu plus de
13 lunaisons dans une année solaire. L’année lunaire sert à calculer le mois du Rama-
dan.
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peu plus de 365 jours, cette insertion avait pour objectif de ralen-
tir le compteur, trop rapide. Un tout petit peu trop en fait. Le ca-
lendrier julien prend un retard de 11 minutes et 14 secondes sur
l’année réelle. Un détail à l’époque.
Les vagabonds de l’espace
Les astronomes babyloniens avaient mis au point des techni-
ques de calcul pour la prévision de phénomènes astronomiques.
Ils avaient consigné soigneusement pendant des siècles de pré-
cieuses observations (positions des astres, éclipses…) Hippar-
que avait intégré ces observations dans sa théorie des épicycles
pour calculer les mouvements des corps célestes. Dans son traité,
Ptolémée perfectionne le modèle d’Hipparque. Ses observations,
jointes aux données antérieures, couvrent une période d’obser-
vation de près de neuf siècles.
Les cinq planètes se meuvent elles aussi sur la bande zodiacale.
Leur proximité de la Terre fut déterminée par un raisonnement
d’Aristote de type sacré. Plus une planète fait le tour du zodiaque
rapidement, moins elle est pure, car proche du monde terres-
tre. La plus éloignée serait Saturne (cycle de 29 ans), puis Jupiter
(12 ans), puis Mars (2 ans), et enfin Vénus et Mercure (1 an). Un
raisonnement qui s’avéra heureux.
Mais la trajectoire des planètes est capricieuse. D’abord Mars,
Jupiter et Saturne progressent en sens inverse du mouvement ré-
gulier quand elles sont opposées Soleil. Elles sont alors visibles
la nuit et plus lumineuses, donc plus proches de la Terre. C’est le
phénomène de « rétrogradation » des planètes, d’où leur erran-
ce. Le cas de Vénus et Mercure est plus étrange encore. Ces deux
planètes ne s’éloignent pas de plus de 45º et 28º respectivement
de l’astre solaire. Quand elles atteignent cet écart limite, elles
s’immobilisent puis changent de direction, progressant globale-
ment vers l’est par séquences avance-recul.
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