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Une mort omniprésente
Cette double page contextualise la transition démo-
graphique des e-e siècle, en rappelant ce qu’est
l’ancien régime démographique marqué par un équi-
libre précaire entre natalité et mortalité, équilibre
régulièrement ébranlé par de graves crises démogra-
phiques en Europe.
Doc. 1
La peste qui touche Byzance a laissé un tel souvenir par
son ampleur que Procope de Césarée donne des chiffres
qui, sans être forcément faux, sont incroyables : 5 000 à
10 000 morts par jour. Mais surtout la catastrophe épidé-
mique devient un bouleversement de l’ordre social : des
domestiques sans maîtres et vice-versa. Enfi n, c’est le
salut des morts qui est même menacé puisque certains
ne sont pas enterrés chrétiennement. L’auteur fait de la
peste un événement apocalyptique.
Doc. 2
1. L’épidémie de peste noire qui touche l’Europe vient
d’Asie centrale. Le point de départ réel serait le lac Issyk
Koul.
2. La peste est semble-t-il passée par le nord de la mer
Noire, suivant ensuite la grande voie des marchands
gênois. L’Italie et Marseille sont touchées dès 1347, et la
peste remonte ensuite vers le nord en suivant les rou-
tes de commerce. Le port anglais de Waymouth est tou-
ché en juin 1348. Après une période de ralentissement
durant l’hiver, la progression de l’épidémie reprend à
l’été 1349 et cette seconde expansion pénètre l’intérieur
des terres plus largement et progresse vers l’Europe du
Nord. Si l’on ajoute le renversement de la conjoncture
économique (saturation de la production agricole par
rapport au peuplement) et les guerres, l’Europe perd
aux XIVe et XVe siècles entre la moitié et les deux tiers de
sa population.
Doc. 3
1. L’union entre Jacques Vivien et Madeleine Brayon a
duré 27 ans, ce qui est court. S’il n’y a pas de limitation
volontaire des naissances dans le mariage (la liaison
entre mariage-vie sexuelle-procréation est de règle), la
croissance de la population est régulée par le biais du
contrôle de la nuptialité et du mariage tardif, ici de l’hom-
me (il a 29 ans lors du mariage, quand son épouse en a
18). On se marie quand on peut s’établir : la moyenne
s’établit plutôt vers 25 ans pour les fi lles au début du
XVIIIe siècle et cela réduit la descendance possible à sept
enfants en théorie.
2. Les époux Vivien ont eu au total onze enfants. Si la
natalité est élevée au XVIIIe siècle, c’est ici un cas extrême.
La fécondité naturelle théorique est de dix-douze enfants
par femme entre la puberté et la ménopause. La moyen-
ne en France au milieu du XVIIIe siècle est plutôt de 4,6
enfants par femme, ce qui est très élevé malgré tout.
3. D’ailleurs, l’intervalle entre les naissances est à peu
près de deux ans, un peu plus long après 1736, l’épouse
atteignant déjà l’âge de 35 ans. Ces délais correspondent
aux intervalles intergénésiques de 30 mois en moyenne,
c’est-à-dire, le temps de la grossesse, les aménorrhées
après naissance et allaitement qui est relativement
long.
4. Sur onze naissances, seulement cinq enfants ont sur-
vécu, les autres ne dépassant pas l’âge de 10 ans.
5. La mortalité infantile est énorme (350 ‰ à la fi n du
XVIIe siècle) ainsi que la mortalité juvénile en raison des
maladies infantiles (diphtérie, rougeole, etc.). Au total,
la moitié des enfants nés n’atteignent pas l’âge adulte
au XVIIe siècle et encore au milieu du XVIIIe siècle, comme
le disait Goubert dans son étude sur le Beauvaisis, « il
faut deux enfants pour faire un adulte ».
Doc. 4
Ce document montre une crise agricole et démographi-
que typique d’Ancien Régime. L’envolée des prix du blé
est le signe de mauvaises récoltes. Pendant un an ou
deux, le nombre des décès double (voire est multiplié
par 3 ou 5 comme ici), le nombre des mariages et des
naissances s’effondre. Le facteur économique avec une
agriculture où la production est de l’ordre de 4 à 5 fois
la semence, 6 dans les bonnes années (soit 9 quintaux
à l’ha) est essentiel (mais toutes les chertés ne provo-
quent pas une crise). Toute récolte insuffi sante provoque
la hausse des prix des céréales et du pain, parfois l’in-
suffi sance physique des denrées, aggravée par les spé-
culations des gros producteurs qui attendent la hausse
pour vendre. Il y a alors disette, voire famine. Dans les
cas les plus dramatiques, les plus pauvres meurent de
faim ou sont affaiblis physiquement et constituent des
proies toutes désignées pour les épidémies. La crise est
grave car elle intervient dans un régime démographique
d’Ancien Régime où le taux de natalité ne dépasse que
faiblement le taux de mortalité (avec une part importante
de mortalité infantile).
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Réponses aux questions
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