II
À la différence, la connaissance scientifique se veut être précise, car fondée sur un
instrument de mesure. Lors que la table en question est posée sur une balance, X et Y
peuvent lire le poids exact de la table. Devant une bassine d’eau, X et Y peuvent avoir des
appréciations différentes : l’eau est chaude, déclare l’un ; pendant que l’autre affirme que
l’eau est froide. Le thermomètre permet de départager les deux individus, puisque l’un et
l’autre diront que l’eau en question fait 31° (degré). Une connaissance est scientifique,
lorsqu’elle est mesurée par des appareils ou tout autre instrument approprié. Ainsi là où le
commun des gens déclare qu’il y a beaucoup d’eau, le savant dira précisément qu’il s’agit de
tel nombre de molécules d’eau.
La scientificité est liée au degré d’intégration de l’outil mathématique dans
l’explication des faits. Le microscope photonique prolonge nos sens, en permettant
d’observer le mouvement des paramécies dans une fusion d’herbes. Mais, le microscope
électronique ou les rayons X utilisés en radiographie expliquent davantage. On parle de
progrès des sciences dans la mesure où les théories qui ont servi à fabriquer le microscope
photonique sont obsolètes et rudimentaires par rapport aux rayons X et aux rayons laser.
Les connaissances scientifiques sont donc relatives en fonction de la qualité des instruments
de mesure.
La physique classique, de Lavoisier à Newton, était construite autour de l’atome,
jusque-là considéré comme l’élément de la matière. Expliquer scientifiquement, c’est tenter
de modéliser la loi ou la causalité, c’est aussi énoncer ce qui rend telle ou telle chose
possible ou ce par quoi une chose se produit. La physique traditionnelle ou physique de
l’atome explique les mouvements des corps grâce à la mesure du temps.
Au XXe siècle, la physique des quanta, encore appelée mécanique quantique, se
spécialise dans la description de l'infiniment petit. Depuis les années vingt, les travaux de
Max Planck, d’Einstein et d’Heisenberg, en physique des particules, ont fait chavirer toute
idée de déterminisme. La physique des particules démontre l’existence de quartz ou
l’antimatière. C’est-à-dire des ondes et de l’énergie. La propriété des particules est
ondulatoire : les électrons, les protons ou les particules de la lumière dénommées "photons"
ne semblent guère obéir à la loi de la causalité. Du moins, l’on ne sait plus évaluer leur
mobilité, ni leur structuration. C'est l'indéterminisme qui régit le monde quantique. Peut-on
conférer un statut univoque à la réalité matérielle, en la réduisant à l’espace euclidien,
tridimensionnel ?
Dans la mesure où toute nos connaissances sont relatives et jamais absolue, il est
possible de considérer problématiques nos savoirs et nos méthodes d’approche de la réalité.
Un sujet ou une situation est problématique quand il/elle donne lieu à des questionnements.
Lorsqu’un individu déclare qu’il ne dort pas, c’est qu’il manifeste des problèmes d’insomnie.
On peut lui demander s’il a mangé, s’il a des soucis ou s’il est simplement malade ?
Lorsqu’un paysan déclare avoir faim, on peut considérer la faim comme une problématique :
comment se fait-il que… ? Peut-être que l’intéressé n’a pas cultivé son champ, qu’il n’a pas
semé à temps, que la saison pluvieuse a ravagé ses récoltes, etc. On peut chercher à
comprendre ce qui lui arrive, dans quelles circonstances et comment en est-il arrivé là ?
Pour analyser et comprendre cette situation, on peut émettre des hypothèses,
suggérer des réponses et vérifier si les tentatives d’explication sont valables ou s’il est
besoin de changer de mode de questionnement, d’approche ou de réponse. En d’autres
termes, une problématique transforme les problèmes en questionnements et en réponses
provisoires, mais qui, sans cesse, sont sujets à des modifications. Puisque toute
connaissance est approchée (Gaston Bachelard) et relative, que signifie dès lors,
l’expression « problématique de la connaissance » ?