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Oetheimer Yohann n°2114789
Prevost Adrien n°2113523
Dossier d’enquête ethnologique
Le mouvement
psytrance
Entre déviance et engagement
Année 2011/2012, Semestre 2
Mme M. Bollon-Mourier
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Sommaire
I. Introduction
1. Présentation
a. Origine et histoire
b. Structure musicale et nature des évènements
2. Cadre et objet d’étude
3. Approches générales et questionnements
4. Stéréotypes et aprioris
a. La « Vox Populi »
b. Personnels
II. Le mouvement Psytrance : entre déviance et engagement ?
1. Premiers pas sur le terrain : la cohésion sociale
2. L’influence de Goa : une revendication d’ethnicité
3. Une atmosphère déviante… mais engagée.
a. Déviance
b. Engagement
III. Enseignements, contraintes, intérêt et perspectives
Annexe
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I. Introduction
Cette présentation a pour objectif de décrire dans ses grandes lignes l’histoire et la
nature du mouvement psytrance de ses origines à nos jours. Elle propose également de définir
la nature, l’ambiance et le contenu des évènements musicaux qu’il génère en Europe, sans
omettre une introduction au jargon qui lui est propre et dans lequel abondent les anglicismes.
Ceci étant notre premier et seul semestre d’enquête sur ce sujet, nous sommes tenus de
contextualiser notre terrain et de rendre intelligibles ses contours, y compris dans le domaine
du langage. Un lexique étoffé se trouve en annexe, définissant l’ensemble des termes
techniques relatifs à notre sujet.
1. Présentation
a. Origine et histoire
La trance psychédélique
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a vu le jour dans les années 1980 à Goa, ancienne colonie
portugaise de l’Inde. Les hippies
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« échoués » sur les côtes de cet État
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à la fin des années
1960 ont non seulement créé ce style de musique nouveau, mais aussi un « mode de faire la
fête » bien particulier. Aux débuts du mouvement, les parties se passaient la nuit, toujours en
plein air, dans des lieux paradisiaques (plage, forêt), avec des décorations surprenantes
(peintures, tentures, black lights, etc.). Mais le point le plus important est le fait que ces
évènements sont souvent situés dans un contexte et un temps bien spécifiques : « évènements
astronomiques (éclipse lunaire ou solaire), date symbolique (jour de l’an ; passage de saison)
[...] » (Boutouyrie, 2009). La forme de ces évènements n’avait donc rien de vraiment original,
mais c’est le contenu qui est entièrement singulier pour l’époque.
Les évènements organisés sur les plages de Goa avant 1980 étaient de type rock, reggae ou
encore dub, et c’est à partir de 1983/1984 que les premiers synthétiseurs électroniques
apparurent et se diffusèrent, faisant apparaitre les premières musique composées totalement à
partir de boites à rythme et de synthétiseur. Ce changement drastique de mode de composition
ne fut pas accepté par tous les hippies de Goa. En effet, « Leur culture musicale était plus
proche de « Pink Floyd » et « The Doors » que de « Tangerine Dream » ou « Can ». »
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Précédemment appelée « special music », puis « trance dance », puis « Goa-trance », notons ici l’importance du lieu de
naissance du courant musical, et enfin « psychedelic trance » ou trance psychédélique, d’où son nom raccourci : la
« psytrance ».
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cf. Boutouyrie, Eric. Goa aux portes des métropoles. Communautés transnationales et musique techno. Volume !, 2009,
n°6, p. 123-133.
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Goa est aujourd’hui un État de l’Inde, situé sur la côte sud-ouest.
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(Boutouyrie, 2009), et c’est la décoration et la mise en scène des fêtes qui fut décisive dans le
succès croissant de cette musique.
Par la suite, de nombreux artistes, à partir de 1988 reviennent de Goa avec
l’intention de reproduire et de diffuser dans leur pays d’origine, les fêtes qu’ils ont vu et vécu
là-bas. Par exemple, en France, la première fête appelée « rave
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» fut le « Trance Body
Express », à Paris, sur une péniche louée pour l’occasion en 1988.
Pour conclure sur l’histoire de ce mouvement musical, nous pouvons dire qu’aujourd’hui il
tend à devenir l’un courants majeurs de musique électronique « et par la vitalité de ses
productions (entre six et dix nouveaux CD par semaine) et par l’ampleur de ses manifestations
(depuis 1992 plus de 15 000 événements ont eu lieu dans 79 pays différents).» (Boutouyrie,
2009), les principaux « pôles de production » étant Israël, l’Amérique Latine et l’Europe. Ces
données datant de 2009 ne sont plus valides. Aujourd’hui la « production » de ce genre de
musique atteint de 3 à 5 nouveaux albums et compilations par jour et devient, petit à petit, un
réel phénomène de masse.
b. Structure musicale et nature des évènements
La structure musicale d’un morceau de trance psychédélique est bien particulière. La
musique provenant de Goa
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, très mélodieuse, avec un rythme constant, devient de plus en plus
rare. Même s’il existe un grand nombre de sous-genres
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de la trance psychédélique, nous
retrouvons certaines similitudes, notamment, une très forte présence des basses, un « beat »
soutenu, allant de 120 à plus de 160 battements par minutes (ou BPM). Une autre
caractéristique bien singulière de la structure musicale de la trance psychédélique, est la
progression des mélodies et des basslines
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. Une musique dure généralement de 6 à 8 minutes,
certaines peuvent même aller jusqu’à 20 minutes et c’est vers les trois-quarts de celle-ci
qu’elle atteint son summum.
Ce genre de musique est principalement joué en concert sous deux formes : le live act
et le DJ set. Le live act consiste à jouer en direct des musiques, à l’aide de machines
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Le verbe anglais « to rave » peut se traduire par « délirer », « divaguer » ou « s'extasier ». Le terme « rave » a été utilisé
pour désigner une fête (party) dès les années 1960 à Londres par les descendants des immigrants venus des Caraïbes ; il fut
ensuite repris dans les années 1980, lors de la naissance de l’Acid house à Chicago et en Grande-Bretagne, à Goa, Ibiza et
Israël ensuite. (Source : Encyclopédie en ligne Wikipédia)
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La Goa-trance a connu un grand succès dans les années 1990, et c’est à partir des années 2000 que le genre a changé
drastiquement : plus de basses, moins de mélodies et de synthétiseurs…
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Goa-trance, progressive trance, full-on, twilight, morning, dark, power, night
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La bassline est la ligne de basse d’une musique. Elle peut être très grave et rapide, notamment pour la dark psytrance,
mais aussi aiguë et lente pour la progressive trance, ou la full-on morning par exemple.
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électroniques, paramétrées avec des samples
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, des boucles (ou loops), auxquels l’artiste ajoute
des effets. Le DJ set est plus simple dans le sens le DJ joue des musiques qu’il n’a pas
composé, fait des transitions entre ces musiques et leur ajoute des effets.
Ces deux façons de jouer sont souvent accompagnées par des animations vidéo, projetées de
chaque côté de la scène. Ces dernières sont choisies et jouées par un VJ (ou vidéo-jockey). Et
en dernier lieu, nous trouvons les ingénieurs du son, qui s’occupent de tout ce qui concerne
les réglages sonores.
Les évènements de trance psychédélique se produisent dans des lieux et des contextes
très variés. Les formes de ces manifestations vont des festivals en plein air sur plusieurs jours
(organisés), aux free-parties et « tekos
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» sans organisation (et donc illégales), en passant par
les festivals en salle, les soirées d’une nuit en salle, ou en plein air. Selon DJ M., le cadre de
ces évènements reste très important, expliquant des droits d’entrée parfois élevés, jusqu’à
180€ pour une semaine, « ce qui rend les choses élitistes ».
Une party trance ou un festival peut se résumer en quelques caractéristiques
principales :
L’accent est mis sur la mise en scène, la décoration, l’ambiance, en d’autres termes, le
« spectacle ». Pour un DJ M., « c’est tout un show, avec des décors « de fou », la
structure, des jeux de lumière ». En effet, le spectacle prend toutes ses dimensions à
l’occasion de la nuit grâce au « Light Art » et à la musique.
La party trance met en jeu trois polarités bien distinctes et interdépendantes : le
« dance floor », le « chill-out
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floor » et le « Goa village ».
- Le « dance floor » correspond à la piste de danse ou à la « fosse ». Il est le
centre d’attraction dans la mesure la danse correspond au principal facteur
de déplacement. On y trouve, en plus des flux sonores, des toiles aux peintures
réagissant à la black light
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, des panneaux sur lesquels sont projetées des
images fractales et des formes abstraites, ainsi que des jeux de lumières, des
lasers...
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Les samples sont des échantillons de musique ou de sons, qui sont joués dans un ordre bien particulier, afin de reproduire
la musique originale, composée sur l’ordinateur.
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Festivals illégaux sur plusieurs jours, généralement de musique électronique.
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De l’anglais, « to chill out », se détendre.
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De l’anglais, la lumière noire, faisant ressortir toute forme de couleurs fluorescentes, ainsi que le blanc.
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