FACE À FACE...
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... avec Brian G. Weinshenker*
sur l’indication des plasmaphérèses dans les formes cortico-
résistantes de maladie inflammatoire démyélinisante
idiopathique aiguë du système nerveux central
La Lettre du Neurologue - n° 7 - vol. V - septembre 2001
J.C. Ouallet : Qu’est-ce qu’une maladie inflam-
matoire démyélinisante idiopathique aiguë du
système nerveux central ?
B.G. Weinshenker : Le terme de “maladie inflammatoire
démyélinisante idiopathique aiguë” (acute idiopathic inflamma-
tory demyelinating disease) comme celui, plus large, de “leuco-
encéphalopathie aiguë” (acute leukoencephalopathy) rassemblent
en un seul concept un ensemble de maladies aiguës ou subaiguës
sévères qui touchent la substance blanche du système nerveux
central. Il peut s’agir de maladies inflammatoires idiopathiques
de la substance blanche, de maladies de système, vasculaires,
toxiques, paranéoplasiques, métaboliques ou infectieuses tou-
chant la substance blanche du système nerveux central. Le terme
de “maladie inflammatoire démyélinisante idiopathique aiguë”
est plus restreint. Il comprend la sclérose en plaques et les patho-
logies aiguës qui gravitent autour d’elle, mais aussi la neuromyé-
lite optique de Devic, les myélopathies aiguës transverses, qui
semblent s’en différencier. Parmi les pathologies aiguës liées à la
sclérose en plaques, on peut schématiquement considérer des
variantes évoluant entre deux extrêmes. D’un côté, des atteintes
très démyélinisantes et peu inflammatoires : sclérose en plaques
pseudotumorale, ce qui correspond également à ce que l’on a
appelé la “maladie de Marburg”. Ces formes s’accompagnent
d’une nécrose parfois importante avec atteinte axonale sévère
dont il est difficile de récupérer. La localisation sustentorielle est
prédominante. Sur le plan clinique, elles peuvent s’accompagner
de signes “atypiques”, tels qu’une aphasie ou une apraxie. Les
rechutes sont possibles avec survenue d’une nouvelle poussée à
distance. De l’autre côté, des atteintes très inflammatoires, qui ont
surtout un caractère lymphocytaire à l’analyse neuropathologique
et comportent peu de macrophages (contrairement aux formes
pseudotumorales des SEP, qui en comportent beaucoup) mais qui
sont moins destructrices et donc susceptibles de s’accompagner
d’une meilleure récupération clinique. Les tableaux cliniques ini-
tiaux peuvent être monophasiques. Cette description correspond
à l’encéphalomyélite aiguë disséminée (acute disseminated ence-
phalomyelitis, ADEM). Cependant, il faut retenir qu’entre ces
deux extrêmes tout se voit : atteintes plus ou moins inflamma-
toires ou démyélinisantes, inflammatoires et à rechutes, etc.
JCO : Vous êtes l’un des principaux auteurs
d’un essai contrôlé randomisé en cross over et
double aveugle contre traitement simulé
récemment publié (1) concernant les traitements par
plasmaphérèses dans ces maladies inflammatoires
démyélinisantes idiopathiques aiguës du système ner-
veux central. Quelles sont les indications et les modali-
tés de ce traitement ?
BGW : Les traitements par plasmaphérèses sont indiqués dans
les maladies inflammatoires démyélinisantes idiopathiques
aiguës sévères de tout type (sclérose en plaques ou non), après
échec des perfusions de corticoïdes. Ils s’adressent donc égale-
ment à des maladies probablement différentes de la sclérose en
plaques, comme la maladie de Devic ou les myélites trans-
verses. Dans l’étude que nous avons publiée, un délai minimal
de deux semaines était requis après la fin des perfusions de
méthylprednisolone. En pratique, ce délai me paraît pouvoir être
réduit à quelques jours si l’état du patient continue de s’aggra-
ver malgré les perfusions de corticoïdes. Dès qu’il semble évi-
dent que le patient échappe au traitement par méthylpredniso-
lone, avec des signes neurologiques sévères qui persistent, le
traitement par plasmaphérèses me paraît pouvoir être discuté.
JCO : Pendant combien de temps et à quelle dose
doivent être réalisées les perfusions de méthyl-
prednisolone avant de réaliser des plasma-
phérèses ?
BGW : Notre habitude est de réaliser cinq perfusions de 1 g de
méthylprednisolone. Il ne me paraît pas nécessaire de faire plus.
Cette dose est suffisante pour juger de l’efficacité des corticoïdes.