Crises épileptiques après accident vasculaire M

MISE AU POINT
La lettre du Neurologue - n° 6 - vol. V - juin 2001
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Crises épileptiques après accident vasculaire
cérébral (AVC) : un essai de mise au point
P. Arnold*, J. Bogousslavsky*, P.A. Despland*
a notion de crises épileptiques secondaires à un AVC
est rapportée déjà à l’époque gréco-romaine, décrite
notamment par Hippocrate en 400 avant J.C. Elle fut
exposée plus précisément au XIXesiècle, par Jackson, puis par
Gowers. Depuis lors, et surtout ces 30 dernières années, les tra-
vaux cliniques, voire anatomopathologiques, se sont multipliés.
La synthèse entre ces différentes études reste cependant diffi-
cile. Il existe en effet des variations parfois importantes entre
les populations examinées ; la nature des AVC considérés
(notamment les accidents ischémiques transitoires [AIT], les
hémorragies sous-arachnoïdiennes [HSA] et les malformations
vasculaires) diffère également, les travaux se limitant parfois
aux seuls accidents ischémiques (1) ; parmi ces derniers, si
l’association à une origine embolique a souvent été relevée,
l’identification d’étiologies spécifiques (comme, par exemple,
la thrombose veineuse cérébrale) fait le plus souvent défaut.
Il est cependant possible de séparer trois types de crises épilep-
tiques associées aux AVC, en fonction de leur relation chrono-
logique avec l’installation de la lésion vasculaire :
– d’abord, les crises dites “précursives”, où l’épisode comitial
précède l’AVC, parfois de plusieurs années ; cette entité reste
encore mal définie et elle est souvent remise en question ;
– ensuite, les crises dites précoces (CEP), qui surviennent dans
les 15 premiers jours suivant l’AVC (certains auteurs limitent
cette catégorie à 1 semaine, d’autres l’étendent à 1 mois (2) ;
une attention spéciale doit être accordée à un sous-groupe
important de ces dernières, qui se développent simultanément
à, ou dans les premières 24 à 48 heures suivant l’AVC (3, 4) ;
le terme de crises “très précoces” est alors le plus souvent
retrouvé ;
– enfin, les crises tardives (CET), qui se manifestent au-delà du
15ejour suivant l’AVC.
Notre travail s’attachera à l’étude des crises survenant dans la
phase aiguë ou au décours de l’AVC et se fondera sur les résul-
tats de la littérature publiés sur le sujet. Ces derniers sont illus-
trés par les résultats de l’analyse des patients examinés dans
notre service pour la survenue de crises épileptiques secon-
daires à un AVC.
En dehors des études sur les épilepsies d’origine vasculaire
(EV), il faut relever, ces dernières années, de nombreux travaux
sur l’épilepsie de la personne âgée en général, souvent d’ori-
gine vasculaire (30-50 % des cas). Un parallèle entre les deux
populations doit toutefois être évité, du fait de la tranche d’âge
beaucoup plus large concernée par l’épilepsie vasculaire.
DONNÉES ÉPIDEMIOLOGIQUES
(TABLEAU I)
La prévalence des crises survenant à la suite d’AVC varie,
selon les travaux, entre 0,4 et 43 %, les chiffres les plus fré-
quemment retrouvés oscillant entre 3 et 11,5 % (1, 5). Le
* Service de neurologie, CHUV, Lausanne, Suisse.
Les crises d’épilepsie vasculaires (CEV) peuvent être
séparées en crises très précoces (< 48 heures), précoces
(< 2 semaines) et tardives (> 2 semaines).
Les CEV sont fréquentes, touchant 3 à 11,5 % des
patients victimes d’un AVC.
Lorsqu’une crise vasculaire survient, le risque de réci-
dive est élevé (30 à 50 % des cas).
Les crises surviennent préférentiellement lors de lésions
vasculaires superficielles, notamment en cas d’atteinte des
zones motrices.
Les lésions hémorragiques sont à l’origine d’un nombre
proportionnellement élevé de crises précoces.
Les CEV sont le plus souvent partielles simples, avec
ou sans généralisation secondaire.
Les mécanismes sous-jacents aux crises sont encore mal
connus, tant en cas de lésion ischémique qu’hémorragique.
Le risque de survenue d’une crise après un AVC n’aug-
mente pas avec l’âge.
Le choix du traitement antiépileptique doit être individuel.
La recherche de facteurs favorisant et/ou déclenchant
les crises est particulièrement important dans l’épilepsie
vasculaire.
POINTS FORTS
POINTS FORTS
L
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risque de récidive à la suite d’une première crise (ou de plu-
sieurs crises rapprochées) a été évalué entre 27 et 51 % (2). De
plus, ces résultats sont présentés alors que la majorité des
patients reçoivent déjà un traitement antiépileptique. Le risque
de développer une crise varie en fonction de la nature isché-
mique (5 à 6,5 %) ou hémorragique (4 à 25 %) de l’épisode
vasculaire (2, 6, 7).
La fréquence des crises épileptiques précoces varie entre 3,8 et
5,5 %, toutes étiologies confondues. Ces crises surviennent le
plus souvent (jusqu’à 90 % des cas) dans les 24 à 48 heures
suivant l’AVC (4, 5, 7).
Ces crises survenant dans la phase aiguë de l’AVC (“très pré-
coces”) ont été plus rarement étudiées, mais leur fréquence a
été évaluée entre 1,2 et 2,5 % (3, 4) des cas victimes d’AVC ;
un récent travail de thèse (3) effectué dans notre service, basé
sur l’analyse du registre lausannois des AVC, mérite en particu-
lier l’attention. Shinton signale même une fréquence de 5,7 %.
Les caractéristiques propres des patients sont semblables à
celles des malades victimes de crises précoces ; la nature des
épisodes comitiaux observés est également similaire. Il faut
toutefois signaler une morbidité et une mortalité augmentées
dans ce groupe, relevées notamment par Arboix (4), mais qui
pourraient en fait être l’expression du caractère symptomatique
de la crise. En effet, près de la moitié des décès survenus dans
cette série advinrent à la suite de herniations cérébrales. Enfin,
si le risque de récurrence n’a pas souvent été étudié en détail, il
paraît identique à celui des autres crises précoces (7).
Les crises tardives, dont la prévalence a été estimée entre 5 et
11,5 % (1) de la population victime d’un AVC, apparaissent habi-
tuellement dans les 12 premiers mois suivant l’épisode vasculaire.
La haute proportion relative des lésions hémorragiques, comparée
à celle des lésions ischémiques, tend alors à s’estomper.
Les crises sont le plus souvent partielles, simples, avec ou sans
généralisation secondaire (près de 90 % des cas), parfois d’em-
blée généralisées (même si le processus sous-jacent doit faire
envisager un début focal avec rapide généralisation secon-
daire). Les états de mal sont un peu plus rares, plus encore les
crises partielles complexes (5).
EXISTE-T-IL DES FACTEURS PRÉDICTIFS DES CRISES ?
De nombreux travaux ont tenté de retrouver, d’abord à travers
les caractéristiques propres au patient, ensuite en fonction de la
nature, de la cause et de la localisation de l’épisode neurolo-
gique déficitaire, les facteurs prédictifs de la survenue d’une
crise épileptique.
Concernant les caractéristiques du patient, les données diffèrent
souvent, mais on a parfois retrouvé une influence de l’âge : les
crises surviennent un peu plus fréquemment chez la personne
jeune (3, 4), mais une morbidité et une mortalité précoce dans
la phase aiguë plus élevées sont associées à l’âge avancé (4).
La consommation excessive d’alcool (3) n’est retrouvée que
chez le patient jeune ; ce facteur disparaît pour les tranches
d’âge plus élevées. Cette constatation peut vraisemblablement
s’expliquer par une morbidité et une mortalité augmentées
(complications neurologiques ou systémiques) dues à l’alcoo-
lisme. En revanche, le sexe ou l’origine du patient, les facteurs
de risques cérébrovasculaires associés restent sans influence.
Pour les crises épileptiques précoces, une influence d’étiologies
inhabituelles d’AVC mérite l’attention : l’analyse des patients
du registre lausannois retrouve en effet 3 thromboses veineuses
cérébrales chez les sujets de moins de 40 ans (50 % des cas).
Le risque d’apparition d’une crise épileptique à la suite d’un
AVC varie, nous l’avons déjà relevé, selon la nature ischémique
ou hémorragique de l’épisode. Cette tendance est aussi retrou-
vée chez les patients examinés dans notre service, quel que soit
le processus sous-jacent à l’hémorragie (rupture d’anévrisme,
hématome dans le cadre d’une micro-angiopathie hypertensive,
cavernome ou autre malformation vasculaire intraparenchyma-
teuse, angiopathie amyloïde, métastase, etc.). Elle est particu-
lièrement relevante pour les crises “très précoces” (3), reliées à
l’atteinte superficielle du parenchyme cérébral, voire à une
extension sous-arachnoïdienne de l’hémorragie. Un risque
moindre est au contraire relevé pour les hématomes purement
profonds (7). Il faut rappeler pour cette catégorie une évolution
decrescendo du risque de crise avec le temps (retrouvée chez
nos patients : 27 % des CEP, 17 % des CET) .
Pour les lésions ischémiques également, le risque est plus impor-
tant dans le premier mois suivant l’AVC, mais tend à décroître
plus lentement par la suite. Dans cette catégorie, une nette pré-
pondérance (75-90 % des cas) de lésions superficielles est
retrouvée (7), que ces dernières soient associées ou non à une
lésion profonde. Il apparaît cependant que des crises puissent
survenir à la suite de seules lésions profondes, qui sont alors
Crises précoces Crises tardives
(N= 34) (N= 56)
Nombre (%) Nombre (%)
Localisation de l’AVC
- corticale 27 (79) 49 (87,5)
- cortico-sous-corticale 2 (6) 1 (2)
- sous-corticale 5 (15) 6 (11)
Nature des crises
- partielles 22 (65) 31 (55)
- partielles avec généralisation
secondaire 9 (26) 20 (36)
- généralisées 1 (3) 2 (4)
- état de mal 2 (6) 3 (5)
Cause de l’AVC
- ischémique 18 (53) 41 (73)
- hémorragique 10 (29) 10 (17)
- autre* 6 (18) 5 (10)
Récurrence des crises 8 (23,5) 19 (34)
Tableau I. Caractéristiques des crises épileptiques observées chez les
patients examinés dans notre service, en fonction de la localisation de
la lésion vasculaire, du type de crise et de la cause de l’AVC.
* Malformations vasculaires (5), cavernomes (3), thromboses veineuses (3).
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exclusivement sus-tentorielles. Il existe également une relation
préférentielle pour les atteintes du territoire carotidien, en parti-
culier les aires motrices primaires (3, 5). Une prédominance de
lésions temporo-pariétales (2) ou occipitales ont toutefois égale-
ment été décrites. Une prévalence plus élevée de lésions jonc-
tionnelles est finalement signalée (2). La plus grande taille de la
lésion vasculaire est aussi souvent rapportée (5).
Enfin, une augmentation du risque lors de lésions emboliques
(1), en particulier à départ cardiaque, a plusieurs fois été rap-
portée, notamment pour les crises “très précoces” ; cette ten-
dance n’est cependant retrouvée qu’irrégulièrement lors des
études effectuées ultérieurement (2, 5) ; une explication à ces
résultats contradictoires pourrait être donnée par la localisation
préférentiellement superficielle des lésions vasculaires embo-
liques, et la tendance à la transformation hémorragique des
lésions cardioemboliques.
PHYSIOPATHOLOGIE
Si la présence d’une lésion cérébrale focale permet de com-
prendre intuitivement la survenue d’un épisode comitial, les
mécanismes exacts sous-jacents restent non élucidés. Si l’on ne
peut douter de l’influence de la lésion en soi, le rôle respectif
de l’ischémie périlésionnelle, des modifications hydro-électro-
lytiques et de pH, de la libération d’acides aminés excitateurs
neurotoxiques, de l’œdème et de la compression des structures
adjacentes reste indéterminé (7).
Dans les processus hémorragiques, l’élément causal principal
(par exemple, dépôt d’hémosidérine, composante d’hémorragie
sous-arachnoïdienne, dysfonctionnements associés à la lésion
du parenchyme, effet de masse) est également mal connu, et la
raison du faible risque de survenue de crises tardives reste en
particulier à élucider. Il faut cependant relever la prépondé-
rance des lésions hémorragiques lors de crises épileptiques pré-
coces, signant le caractère “irritatif” de ce type de lésion.
Encore une fois, cette constatation permettrait d’expliquer pour
une part les rapports faisant état de crises survenant plus fré-
quemment à la suite d’événements emboliques et d’origine car-
diaque, plus volontiers secondairement hémorragiques que les
autres lésions cérébrales ischémiques.
DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL
Comme pour toute crise d’épilepsie, le diagnostic s’établit
avant tout sur la base de l’anamnèse, ou de l’observation par le
personnel soignant lorsque l’épisode se présente chez un
patient hospitalisé. Les crises surviennent toutefois souvent à
domicile (rappelons que près de 90 % des crises précoces ont
lieu dans les 24 heures suivant l’AVC), et, lorsque le patient est
âgé, sans témoin.
En cas de perte de connaissance, le diagnostic d’une crise
généralisée ne peut alors être retenu qu’après exclusion d’une
autre origine, nécessitant parfois des investigations biologiques
(hypoglycémie, désordres hydro-électrolytiques) et cardio-vas-
culaires approfondies (en particulier recherche de troubles du
rythme cardiaque, fluctuations de la tension artérielle). La pré-
sence d’un phénomène de Todd peut nous orienter, mais ne doit
pas être confondue avec le déficit lié à l’AVC.
Pour les crises partielles simples, le diagnostic est souvent plus
aisé, mais la différence entre le phénomène de Todd et un AIT n’est
pas forcément commode. Le problème se pose également lors de
lésions vasculaires accompagnées de mouvements anormaux non
épileptiques (en particulier myoclonies), secondaires à des lésions
pariétales, thalamiques ou autres des noyaux gris centraux.
À l’opposé, des lésions focales intracrâniennes non vasculaires
(néoplasies primaires ou secondaires, hématome sous-dural,
processus infectieux, etc.) peuvent être à l’origine du phéno-
mène comitial et du déficit neurologique focal associé.
INVESTIGATIONS
Un bilan biologique doit être pratiqué à la recherche d’un fac-
teur déclenchant de la crise épileptique (syndrome inflamma-
toire, trouble hydro-électrolytique, hypoglycémie, insuffisance
rénale), qui devra alors être corrigé.
Un bilan neuroradiologique (CT scan et/ou IRM) (5) mérite
également d’être effectué, en particulier afin de confirmer la
nature vasculaire de la lésion sous-jacente à la crise. L’apport
de l’IRM ou d’imageries fonctionnelles n’est pas clairement
établi dans ce type de situation, mais nous relèverons le rapport
de Blandin (5) sur le SPECT, indiquant une relation entre la
taille de la lésion et le risque de survenue de crises épileptiques
(intérêt physiopathologique).
L’apport de l’EEG chez les patients victimes d’un AVC et
développant secondairement une épilepsie a été étudié dans
plusieurs travaux (5, 7, 8). L’examen est anormal dans la
presque totalité des cas, mais des résultats similaires sont
retrouvés chez les patients victimes d’un AVC aigu non com-
pliqué d’une crise comitiale, ou qui en présentent les séquelles
(8). Des éléments paroxystiques épileptiques ne sont décou-
verts que dans 20-27 % (8) des cas d’épilepsie vasculaire, alors
que l’anomalie la plus fréquemment reportée est un ralentisse-
ment focal (60-73 %). La présence de décharges épileptiformes
périodiques latéralisées (PLEDs) a également été étudiée ; leur
association avec l’AVC en phase aiguë a déjà été bien établie,
notamment pour les infarctus jonctionnels. Ces PLEDs ne sont
cependant retrouvées que chez un très faible pourcentage des
patients (< 5 %). Elles sont en revanche souvent découvertes au
décours d’un phénomène épileptique, en particulier d’un état
de mal. Un ralentissement généralisé peut encore être retrouvé.
L’apport de l’EEG dans la prise en charge de l’EV est donc
variable, mais reste cependant certain en cas d’état confusion-
nel associé à l’AVC.
ÉVOLUTION ET PRONOSTIC
Plusieurs études ont démontré, concernant les crises survenant
dans la phase aiguë de l’AVC, une mortalité hospitalière aug-
mentée (4, 9), mais cette constatation pourrait être liée au fait
que la crise survient en tant que marqueur de gravité de l’AVC
La lettre du Neurologue - n° 6 - vol. V - juin 2001 275
(4). Une aggravation du déficit neurologique à la suite de la
crise a également été démontrée (10), touchant 20 % des cas.
Cette tendance a été retrouvée également pour les crises “très
précoces” (score d’indépendance diminué à la sortie de l’hôpi-
tal) (3). En cas d’hémorragie cérébrale, la mortalité ou la mor-
bidité ne sont pas influencées par la survenue de crises épilep-
tiques, un meilleur pronostic fonctionnel ayant même été décrit
pour les cas d’hémorragies corticales (étude SASS).
Le risque de récidive à la suite d’une crise, qu’elle soit précoce
ou tardive, a déjà été discuté ; il est relié en particulier à la pré-
sence d’une lésion corticale et à la persistance d’une parésie.
TRAITEMENT
Les AVC surviennent souvent chez la personne âgée. La pres-
cription de médicaments antiépileptiques doit se faire alors
avec une grande de prudence. En effet, l’absorption, la distribu-
tion (fixation de la molécule aux protéines, augmentation de la
masse adipeuse liée à l’âge), le métabolisme et l’excrétion du
médicament peuvent être fortement affectés. En premier lieu, le
phénobarbital doit être déconseillé, en raison de son caractère
de puissant inducteur enzymatique hépatique (et des nom-
breuses interactions qui en résultent), de ses effets secondaires
cognitifs, et du risque augmenté d’algoneurodystrophie. Nous
relèverons aussi les difficultés liées à l’utilisation de la phény-
toïne (métabolisme non linéaire saturable, forte fixation à l’al-
bumine, inducteur enzymatique), qui présente cependant
l’avantage d’un faible risque d’effets secondaires sédatifs ou
cognitifs.
Par ailleurs, le médecin sera confronté aux interactions avec les
prescriptions, parfois nombreuses, destinées au traitement des
maladies associées dont souffre le patient. Finalement, il faut
rappeler le développement plus fréquent d’effets secondaires,
de quelque nature qu’ils soient, pour les patients âgés.
Il existe cependant, tous types de crises “vasculaires” confon-
dues, un fort risque de récidive à moyen terme (30 à 50 %),
avec parfois des conséquences dramatiques, dues à la crise elle-
même, mais aussi au traumatisme qui en résulte. Il faut aussi
rappeler la mise en évidence d’une mortalité intra-hospitalière
augmentée pour les patients présentant une crise dans la phase
aiguë de l’AVC d’une part, le risque d’aggravation irréversible
des séquelles neurologiques d’autre part (3, 10). Un traitement
incisif dans la phase aiguë de la crise et une prophylaxie secon-
daire méritent donc d’être encouragés dans la plupart des cas
(pour les crises “très précoces”, cette attitude doit être considé-
rée avec plus de réserve, en raison du manque de données dis-
ponibles concernant leur évolution naturelle). La durée du trai-
tement reste à établir. À ce jour, faute de bons moyens
prédictifs cliniques ou paracliniques, l’indication à une préven-
tion primaire ne peut être proposée.
Le plus souvent, une monothérapie suffira au contrôle de l’épilep-
sie. Si de nouveaux antiépileptiques commencent à s’affirmer dans
ce type d’indication, notamment la lamotrigine, il n’existe pas de
médicament de première intention, et le valproate de sodium et la
carbamazépine restent deux bonnes options thérapeutiques.
CONCLUSION
Les crises épileptiques survenant à la suite d’un AVC sont fré-
quentes, le plus souvent précoces, mais peuvent se présenter
parfois plusieurs années après l’événement (en particulier lors
de lésions ischémiques). Elles touchent près de 10 % des
patients, avec récidive dans 30 à 50 % des cas.
Elles apparaissent le plus souvent (mais pas exclusivement)
lors de lésions corticales et n’ont jamais été décrites après
lésion du tronc cérébral. Dans les cas de crises précoces, les
hémorragies sont plus fréquemment retrouvées.
Dans le cadre des investigations, l’EEG garde actuellement une
place mal définie, son rendement diagnostique n’ayant souvent pu
être établi. Son utilisation dans le suivi des patients ayant déve-
loppé une crise épileptique mérite cependant d’être considérée, en
particulier si une interruption du traitement peut être envisagée.
Le risque élevé de récurrence, d’aggravation permanente du défi-
cit neurologique et de complications traumatiques, justifie sou-
vent l’introduction d’un traitement après le premier événement,
une monothérapie étant alors en général suffisante. Chez la per-
sonne âgée, en raison des difficultés liées à une polypharmaco-
thérapie et des risques de mauvaise compliance, l’objectif de la
thérapie médicamenteuse devra être bien expliqué au patient et à
son entourage. La durée de traitement à proposer reste à définir.
Et, bien sûr, dans la mesure du possible, les facteurs favorisants
(par exemple, les troubles métaboliques, les médicaments poten-
tiellement épileptogènes) associés devront être pris en charge.
Si l’indication à traiter après la première crise peut le plus sou-
vent être envisagée, une prévention primaire ciblée ne peut être
proposée, faute de facteurs prédictifs suffisants. Ce constat peut
être lié à la mauvaise connaissance actuelle des mécanismes sous-
jacents au développement de phénomènes comitiaux. Ils mérite-
ront d’être étudiés par d’autres travaux, dans le but d’offrir au
patient une prise en charge plus personnalisée de son épilepsie.
R
ÉFÉRENCES
B
IBLIOGRAPHIUES
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AUTO-ÉVALUATION
AUTO-ÉVALUATION
Résultats : I. a - c - d II. b
2.Laquelle de ces affirmations est fausse :
a. Les crises épileptiques surviennent plus souvent après un AVC
hémisphérique superficiel
b. Si les crises surviennent rarement lors de lésions hémisphériques
profondes, et jamais en cas d’atteinte du tronc cérébral,c’est parce
que,dans ces cas-là,l’atteinte de la substance réticulée ascendante et
de ses projections protège le patient des complications épileptiques
c. Le risque de développer une crise après un AVC n’augmente pas
avec l’âge
d. Les lésions hémorragiques sont plus volontiers à l’origine de
crises précoces que tardives
e. Les CEV sont le plus souvent partielles simples, avec ou sans
généralisation secondaire
1.Lesquelles de ces affirmations sont exactes :
a. La prévalence des crises épileptiques après AVC peut être éva-
luée entre 3 et 11,5 %
b. La prévalence des crises épileptiques après AVC ne dépasse pas
0,5 % des cas
c. Le risque de récidive après une première crise atteint 30 à
50 % des cas
d. Les CEP surviennent le plus souvent dans les deux premiers
jours suivant l’AVC
e. Les CEP ne récidivent jamais, de sorte qu’aucun traitement au
long cours n’est nécessaire
TANAKAN
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