Fiche
Technique
Sous la responsabilité de leurs auteurs
Médicaments proctologiques
et grossesse
recevables sur ce sujet, dont une seule randomisée. Aucune
association n’a été notée entre la consommation d’aspirine et
les malformations fœtales, mais il existe une certaine tendance
à l’augmentation du risque de malformation de la paroi
abdominale. Ce risque est toutefois peu élevé, car le nombre
d’inclusions nécessaires pour l’apprécier correctement
devrait être vingt fois plus grand. Le taux spontané de malfor-
mations est de 3 à 6 pour 100 000 naissances (tableau).
Après le premier trimestre de la grossesse
Tous les AINS, y compris l’aspirine à des doses supérieures
ou égales à 500 mg/j et les inhibiteurs de la COX-2, sont
inhibiteurs de la synthèse des prostaglandines.
Cette inhibition peut être responsable d’effets vasoconstricteurs
sur certains territoires :
– Reins : insuffisance rénale fœtale et/ou néonatale, transi-
toire ou définitive, pouvant entraîner la mort.
– Appareil cardio-pulmonaire : constriction in utero du canal
artériel pouvant provoquer une mort fœtale in utero, une insuf-
fisance cardiaque droite et/ou une hypertension artérielle
pulmonaire, parfois mortelles chez le nouveau-né.
Ces atteintes peuvent apparaître lors de prises très brèves (un
jour), à des posologies usuelles, et sont d’autant plus graves
que l’exposition est proche de l’accouchement.
En raison de la gravité des effets décrits et compte tenu de la
banalisation de la prescription des AINS, y compris en cours
de grossesse (soins dentaires, otites, sinusites, douleurs lom-
baires et articulaires, céphalées, fièvre, hémorroïdes, para-
phlébites, etc.), l’AFSSAPS (4) rappelle cette dernière contre-
indication aux prescripteurs et aux pharmaciens (encadré).
Corticoïdes
Le risque de fente palatine est augmenté d’un facteur 3,35
(1,97 à 5,69) selon une méta-analyse (5). Au cours de la
grossesse, aucune contre-indication n’est retrouvée sur la
base des recommandations du Vidal®. Lors de maladies chro-
niques nécessitant un traitement tout au long de la grossesse,
un léger retard de croissance intra-utérin est possible. Une insuf-
fisance surrénale néonatale a été exceptionnellement observée
après corticothérapie à doses élevées. Il est justifié d’observer
une période de surveillance clinique (poids, diurèse) et biolo-
gique du nouveau-né. En conséquence, les corticoïdes peuvent
être prescrits pendant la grossesse si besoin est. En revanche,
en cas de traitement à des doses importantes et de façon
chronique, l’allaitement est déconseillé.
5 ASA
Il n’existe pas actuellement de données en nombre suffisant
pour évaluer un éventuel effet malformatif ou fœtotoxique de
la mésalazine lorsqu’elle est administrée pendant la gros-
sesse. Le traitement par la mésalazine peut être poursuivi aux
doses efficaces les plus faibles possibles, en évitant de dépasser
la posologie de 2 g par jour. En effet, au-delà de cette poso-
logie, les concentrations plasmatiques de la mésalazine, qui
est un dérivé salicylé, sont susceptibles d’exposer le fœtus à
un risque malformatif rénal comparable à celui rapporté avec
les AINS. Le passage de la mésalazine dans le lait maternel
est faible. Néanmoins, il n’existe pas d’études documentant
ce passage par des dosages répétés. L’allaitement pendant un
traitement par ce médicament semble possible. Toutefois, l’inno-
cuité à long terme n’est pas prouvée. De plus, la survenue d’un
rash ou d’une diarrhée ne peut pas être exclue.
Le Courrier de colo-proctologie (V) - n° 2 - oct.-nov.-déc. 2004
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Tableau. Évaluation du risque malformatif lié à la prescription d’aspirine au cours du premier trimestre de la grossesse.
Risque Études Exposé (n/N) Contrôle (n/N) Odds-ratio (IC95)
Malformations congénitales 8 888/16 138 1935/49 890 1,3 (0,9 à 1,9)
Malformations cardiaques 6 692/15 130 1772/48 146 1,0 (0,9 à 1,1)
Gastroschisis 5 52/261 523/2 449 2,4 (1,4 à 3,9)
●
●La prescription d’AINS est contre-indiquée à partir du début
du sixième mois de la grossesse (24 semaines d’aménor-
rhée révolues), même en prise ponctuelle.
●
●Cette contre-indication concerne tous les AINS, y compris l’aspi-
rine à des doses supérieures ou égales à 500 mg/j et les inhi-
biteurs de la COX-2, qu’ils soient sur prescription médicale ou
en vente libre, et quelle que soit la voie d’administration.
●
●Une attention particulière est nécessaire pour éviter toute
automédication avec les AINS pendant cette période à risque.
●
●Une alternative à ces médicaments existe pour faire face à
des problèmes douloureux ou fébriles, quel que soit le terme
de la grossesse (antalgiques de palier 1, 2 ou 3, corticoïdes,
etc.).