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La Lettre du Cancérologue - Volume XIV - n° 4 - juillet-août 2005
quotidienne et continue). La contraception est alors un bénéfice
secondaire “bienvenu”, mais il doit être clairement expliqué à ces
adolescentes que l’efficacité anticonceptionnelle ne peut être
garantie et qu’un autre moyen de contraception est nécessaire si
elles en ont besoin.
La micropilule progestative n’est pas un moyen contraceptif
recommandé en première intention chez les adolescentes et les
jeunes adultes atteintes de cancer.
Contraception postcoïtale
La contraception postcoïtale hormonale, aussi appelée “pilule du
lendemain”, disponible depuis 20 ans, présente un grand intérêt
en cas d’échec d’une contraception habituelle, de rapports non
protégés, d’“accident de préservatif”, ou d’agression sexuelle
(18, 24). Deux schémas sont disponibles :
– le schéma Yuzpe : 1 prise de 200 µg d’éthynilestradiol et
1mg de lévonorgestrel, renouvelée 12 heures plus tard, avec une
première prise dans les 72 heures au plus tard après le rapport
non protégé.
– le schéma fondé sur le lévonorgestrel (Norlévo®) (2 comprimés
de 750 mg de lévonorgestrel à 12 heures d’intervalle le plus tôt
possible, à savoir dans les 12 heures suivant le rapport sexuel non
protégé, et dans les 72 heures au plus tard). L’essai de l’OMS a
établi ce schéma comme le standard (26), et il est approuvé dans
plus de 80 pays. Une seule prise de 1,5 mg de lévonorgestrel est
aussi efficace que le schéma standard de deux prises, ce qui peut
être particulièrement utile chez les adolescentes sous chimiothé-
rapie, puisque ce schéma entraîne moins de nausées (27). Il n’y a
pas de contre-indications médicales en dehors d’une grossesse en
cours, et la poursuite d’une contraception hormonale régulière n’est
pas contre-indiquée (18, 28). En France, dans les pharmacies le
lévonorgestrel est en délivrance gratuite aux mineures, et les infir-
mières scolaires ont l’autorisation de donner la contraception
d’urgence aux élèves quel que soit leur âge (2). Au Royaume-Uni,
il est en vente libre pour les mineures au-dessus de 16 ans (19). En
Suisse, le schéma Yuzpe est actuellement le seul autorisé (24).
Les adolescentes et les jeunes adultes atteintes de cancer ont
le même risque de rapport non protégé ou imposé que les
autres jeunes filles du même âge, et la discussion au sujet de
la contraception postcoïtale doit faire partie de l’information
délivrée.
Progestatifs injectables de longue durée
(Dépo-Provera®)
La médroxyprogestérone (Dépo-Provera®) ou MPA est la méthode
de contraception injectable la plus répandue dans le monde ;
elle est efficace et réversible. L’efficacité contraceptive dure
12 semaines, sans nécessité d’une compliance quotidienne. À une
dose de 150 mg en injection intramusculaire profonde, les études
ont retrouvé des taux d’échec de 0 à 0,7 grossesse pour 100 femmes
par an (29). Elle agit par suppression de l’ovulation et de la pro-
duction ovarienne d’estradiol, par inhibition de la sécrétion des
gonadotrophines, ainsi que par l’altération de la composition et des
caractéristiques physiques de la glaire cervicale, avec formation
d’un endomètre fin, ces effets réunis rendant compte de l’effica-
cité anticonceptionnelle élevée. L’effet indésirable le plus fréquent
est l’irrégularité menstruelle, et de nombreuses utilisatrices devien-
nent aménorrhéiques. L’aménorrhée survient chez 8 % des femmes
après la première injection, et chez 45 % après 10 à 12 mois d’uti-
lisation (30). Cependant, malgré son efficacité et son acceptabi-
lité, l’utilisation du Dépo-Provera®chez les adolescentes et les très
jeunes femmes traitées pour cancer pose deux problèmes. Tout
d’abord, une injection intramusculaire profonde dans le deltoïde
ou le fessier peut être source d’hématome et/ou d’infection pour
des patientes potentiellement neutropéniques et/ou thrombopé-
niques. Par ailleurs, le retentissement sur la masse osseuse reste à
évaluer, avec un possible risque de diminution de la densité osseuse
en cas d’utilisation prolongée du Dépo-Provera®(31-34). L’ado-
lescence est une période cruciale de croissance osseuse, avec acqui-
sition de la majeure partie de la masse osseuse de la hanche et de
la colonne vertébrale jusqu’à l’âge de 18 ans (35). La médroxy-
progestérone doit être évitée chez les adolescentes à risque
d’ostéoporose comme dans les insuffisances rénales chroniques
(17). Les enfants et adolescents traités par chimiothérapie ont un
risque de perte de densité osseuse (36, 37). De plus, cette méthode
n’offre aucune protection contre les MST et la transmission du
VIH.
Il semble donc prudent d’éviter l’usage du Dépo-Provera®
chez les adolescentes traitées par chimiothérapie.
Les implants contraceptifs
Le Norplant I®, contenant du lévonorgestrel, a été le premier
implant commercialisé, et il est efficace pendant cinq ans.
L’implant Jadelle®(Norplant III®) est approuvé pour cinq ans
d’efficacité dans la plus grande partie du monde, et pour trois ans
aux États-Unis.
En France, seul Implanon®est commercialisé ; il est fait d’un
noyau de copolymère d’éthylène d’acétate de vinyle contenant
de l’étonogestrel, et est efficace pendant trois ans. Ces trois
implants fournissent une contraception transitoire, et doivent être
insérés sous la peau, habituellement dans le bras (38, 39). Ils ne
protègent pas contre les MST et la transmission du VIH. L’utili-
sation de Norplant®n’est pas recommandée chez les patientes
prenant des inducteurs enzymatiques, de la rifampicine, de la phé-
nytoïne, de la carbamazépine et des barbituriques en raison du
risque augmenté de grossesse lié à la diminution du taux sanguin
de lévonorgestrel (40, 41).
Les effets indésirables rencontrés avec les implants sont les irré-
gularités menstruelles, l’aménorrhée, la prise de poids, les maux
de tête et les modifications de l’humeur. Cette méthode est pra-
tique et assez populaire chez les adolescentes, car elle règle le
problème de la compliance quotidienne. Elle est fiable (taux
d’échec de 0,2 grossesse pour 100 années-femme, indice de
Pearl), et de longue durée. Mais les adolescentes craignent sou-
vent l’insertion sous-cutanée et les effets secondaires tels la
prise de poids, l’acné et les saignements intermenstruels (32,
42-44). La satisfaction des patientes avec Norplant®a été direc-
tement corrélée à l’information et aux conseils donnés avant
l’insertion. Les taux de poursuite de Norplant®sont supérieurs
à ceux de la pilule estroprogestative chez les adolescentes bien
préparées (45, 46). Il n’existe pas de données sur l’utilisation
au long cours d’Implanon®chez les adolescentes.
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