La gestion pratique des formalités administratives concernant une maladie
professionnelle respiratoire, conséquence directe de l’exposition d’un tra-
vailleur à un risque physique, chimique, biologique ou résultant des condi-
tions d’exercice de son activité professionnelle, fait appel à de nombreuses
règles qui peuvent paraître absconses au pneumologue.
Un élément important à repérer initialement est le régime de protection so-
ciale dont relève le patient : régime général de la Sécurité sociale (RGSS), ré-
gime agricole (RA), régime spécial (Mines, EDF, SNCF, RATP, etc.), Fonction
publique, ou régime des travailleurs indépendants (“non salariés non agri-
coles” : artisans, professions libérales). À l’exception de cette dernière caté-
gorie, pour laquelle il n’y a pas d’avantages sociaux liés à la reconnaissance
du caractère professionnel d’une maladie (sauf souscription volontaire préa-
lable d’une assurance spécifique), les différents régimes offrent des avantages
sociaux qui rendent importante la déclaration de maladie professionnelle
(DMP) pour un patient donné, les bénéfices étant à la fois individuels et
collectifs (incitation à renforcer la prévention notamment).
AVANTAGES SOCIAUX
Nous focaliserons l’exposé sur les avantages médico-sociaux tenant à la
reconnaissance du caractère professionnel d’une maladie respiratoire in-
demnisable dans le cadre du régime général de la Sécurité sociale, les autres
régimes offrant de façon générale des avantages voisins. Ils consistent en
la gratuité des soins concernant l’affection (y compris l’exemption du for-
fait journalier en cas d’hospitalisation) et le versement de prestations en
espèces : indemnités journalières durant l’arrêt de travail, majorées par rap-
port aux indemnités “maladie” (60 % du salaire brut jusqu’au 28
e
jour sans
délai de carence, puis 80 % à partir du 29
e
jour), et capital ou rente selon
le taux d’incapacité permanente partielle (IPP) après consolidation : pour
une IPP < 10 %, versement d’un capital d’environ 300 par pour cent ;
pour une IPP comprise entre 10 et 50 %, la rente correspond à la moitié
du taux d’IPP x le salaire brut de référence ; enfin, pour une IPP > 50 %,
la rente est égale à (25 % + 1,5 x [taux d’IPP - 50 %]) x le salaire brut de
référence (à titre d’exemple, pour une IPP de 80 %, la rente servie est de :
25 % + 1,5 x [80 % - 50 %] = 70 % x salaire brut de référence, plafonné).
Cette rente, révisable en cas d’aggravation ou d’amélioration, n’est pas
imposable, peut donner droit à une demi-part supplémentaire pour le cal-
cul de l’impôt sur le revenu si le taux de l’IPP est supérieur ou égal à 40 %,
et est cumulable avec un salaire en cas de reprise d’activité, avec des
indemnités de chômage ou une retraite le cas échéant ; elle n’est pas
cumulable avec une rente d’invalidité “maladie” servie pour la même af-
fection. Enfin, il existe théoriquement une protection de l’emploi ; le contrat
de travail est en effet suspendu durant l’arrêt de travail, et le patient peut
bénéficier d’un circuit privilégié de reclassement avec mesures incitatives
renforcées pour l’employeur.
PROCÉDURES ET FORMULAIRES
Après avoir posé le diagnostic de maladie respiratoire professionnelle, il faut,
pour aider le patient à obtenir une réparation du préjudice subi, se référer
aux tableaux des maladies professionnelles du RGSS et du RA : le guide de
l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS) est à cet égard très pré-
cieux, puisqu’il propose des
entrées par pathologies, par
nuisances et par tableaux.
Les travailleurs non salariés
non agricoles peuvent bé-
néficier non de prestations
en espèces, mais de pres-
tations en nature s’ils ont
veillé à souscrire une as-
surance personnelle cou-
vrant le risque “maladie
professionnelle”.
La déclaration de mala-
die professionnelle est un
acte volontaire du salarié :
celui-ci remplit une de-
mande de reconnaissance
au titre des maladies
professionnelles (imprimé
CERFA vert n
o
60-3950 -
UCANSS S 6100b : do-
cument 1), qu’il adres-
sera à la Caisse primaire
d’assurance-maladie
(CPAM), de préférence par envoi recommandé
avec accusé de réception, accompagné du certifi-
cat médical initial, des photocopies de l’attestation
d’affiliation à la Sécurité sociale, des certificats de
travail correspondant aux périodes mentionnées sur le certificat médical (ou
en cas de perte, des copies des bulletins de salaire), éventuellement du re
levé de carrière et de l’attestation de salaire remplie par le dernier employeu
en cas d’arrêt de travail. Des témoignages écrits de collègues de travail jus
tifiant de leur emploi dans la même entreprise pourront être utiles pour le
maladies professionnelles dont l’exposition parfois ancienne est difficile
prouver (exemple : maladies induites par l’inhalation de fibres d’amiante)
Le médecin traitant soutient la démarche du patient en rédigeant le certifi
cat médical initial, sur lequel il doit mentionner clairement l’affection don
est atteint le patient (imprimé CERFA violet n° 11138*01 - UCANSS S 6909a
document 2), mais il est possible de rédiger un certificat sur papier libre)
Dans tous les cas, il est recommandé d’employer les termes utilisés dans l
tableau correspondant à l’affection désignée et de mentionner le numéro d
ce tableau. La prescription des droits à prestations se fait par deux ans
compter de la date à laquelle la victime est informée de l’existence d’un lie
possible entre son affection et son activité professionnelle actuelle ou anté
rieure par la remise de ce certificat médical. Le patient est ultérieuremen
convoqué par la CPAM, qui diligentera une double démarche : une enquêt
administrative, veillant à déterminer la réalité de l’exposition au risque, e
une enquête médicale, aboutissant à une expertise par le médecin consei
qui peut éventuellement s’adjoindre les services d’un médecin sapiteur. L
Fiche à détacher et à archiver
N° 21
La Lettre du Pneumologue - Volume VI - no5 - septembre-octobre 2003
Fiche
Déclaration d’une maladie professionnelle respiratoire
J.P. L’Huillier1, 2, J.C. Pairon2, 3
technique
Sous la responsabilité de ses auteurs
Déclaration d’une maladie professionnelle respira
1. Cabinet de pneumologie, La Varenne-Saint-Hilaire.
2. Unité de pathologie professionnelle, service de pneumologie et pathologi
professionnelle, centre hospitalier intercommunal, Créteil.
3. INSERM E0337, faculté de médecine, Créteil.
Document 1. Imprimé
CERFA n° 60-3950 -
UCANSS S 6100b.
*PNEUMO FICHE 21 20/11/03 11:20 Page I
CPAM dispose d’un dé-
lai de trois mois, éven-
tuellement prorogeable
une fois, pour statuer
sur la reconnaissance
en maladie profession-
nelle de l’affection
dont souffre le patient
(positivité de l’enquête
administrative
et
avis
favorable du médecin
conseil vis-à-vis de
l’affection désignée
dans le certificat).
Lorsque la maladie
professionnelle est
reconnue, les soins
sont gratuits pour
l’affection considé-
rée si le patient pré-
sente des volets de
soins spécifiques dé-
livrés par la CPAM.
Toutefois, le capital
ou la rente ne sont versés qu’après consolidation (il y
a donc lieu de rédiger un certificat de consolidation,
qui précise qu’il persiste des séquelles et les décrit, sur
le même imprimé violet que celui utilisé pour la DMP). La date de cette
consolidation est importante puisqu’elle détermine le jour à partir duquel
le capital ou la rente sont dus. Dans certains cas, par exemple celui de
plaques pleurales secondaires à une exposition professionnelle à l’amiante,
une date de consolidation identique à la date du certificat initial peut être
proposée dès ce certificat initial, puisqu’il n’y a pas lieu de penser que des
modifications significatives sont à attendre avant un long délai. S’il y a be-
soin de soins post-consolidation, un imprimé spécifique est à remplir, pré-
cisant le programme de soins qui sera contresigné par le médecin conseil,
ce qui permettra à l’assuré de disposer de volets de soins lui assurant la gra-
tuité de ces soins (imprimé bleu n
o
649-03-2001 : document 3).
MODALITÉS DE RECONNAISSANCE
(figure 1)
Fiche à détacher et à archiver
La Lettre du Pneumologue - Volume VI - no5 - septembre-octobre 2003
II
Déclaration d’une maladie professionnelle respiratoire
Maladies
professionnelles
relevant
de la présomption
d’origine
Lorsque le patient pré-
sente une affection
figurant sur l’un des
tableaux du régime
général ou du régime
agricole de la Sécurité
sociale, si le délai de
prise en charge est
respecté, si l’activité
professionnelle fait
bien partie de la liste
des travaux lorsque
celle-ci est limitative,
et si la durée mini-
male d’exposition est
respectée (critère re-
quis pour certains ta-
bleaux seulement), la présomption d’origine
s’applique (article L 461-1, alinéa 2 du code de la
Sécurité sociale).
Maladies professionnelles
relevant du système complémentaire
Si l’affection figure bien sur l’un des tableaux, mais si l’une ou plusieurs des
conditions de prise en charge mentionnées ci-dessus ne sont pas remplies (dé-
lai de prise en charge dépassé, durée d’exposition insuffisante ou emploi non
mentionné dans la liste des travaux lorsque celle-ci est limitative), il y a possi-
bilité de reconnaissance de la maladie professionnelle s’il existe un lien
direct
entre l’activité professionnelle et la maladie, après avis du Comité régional
de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) (article L 461-1,
alinéa 3 du code de la Sécurité sociale).
Affection hors tableau : une affection peut aussi être reconnue en maladie
professionnelle par le CRRMP (article L461-1, alinéa 4), avec les mêmes avan-
tages sociaux et financiers que pour une maladie professionnelle reconnue
via les tableaux, à deux conditions : l’affection doit justifier d’un taux d’IPP
supérieur ou égal à 25 %, et un lien
direct
et
essentiel
entre l’activité pro-
fessionnelle et la maladie doit être établi.
Recours : en cas de refus formulé par sa CPAM, l’assuré a toujours la pos-
sibilité de déposer un recours, mais il convient de respecter le délai de deux
mois qui court à partir de la date de notification de la décision de la CPAM.
“Maladies à caractère professionnel” : lorsque l’affection n’est pas men-
tionnée dans un tableau et si le taux d’IPP est inférieur à 25 %, le patient
relève d’une “maladie à caractère professionnel”, qui ne comporte aucun
des avantages sociaux évoqués ci-dessus. L’affection est prise en charge en
“assurance-maladie”, sa déclaration aide à l’extension ou à la création de
nouveaux tableaux de maladies professionnelles. Elle doit, dans ce cas spé-
cifique, être faite par le médecin (et non par l’assuré) auprès de l’Inspection
médicale du travail.
POUR EN SAVOIR PLUS...
“Les maladies professionnelles : guide d’accès aux tableaux du régime général et
du régime agricole de la Sécurité sociale.” INRS, Paris, 2eédition, 2000. (Une nou-
velle édition du guide est en cours de préparation.)
Reconnaissance et indemnisation de la pathologie professionnelle respiratoire.
Rev Mal Respir 2000 ; 17 : 995-1048.
Document 3. Imprimé
649-03-2001.
Document 2. Imprimé
CERFA n° 11138*01 -
UCANSS S 6909a.
Figure 1. Réparation des maladies professionnelles (salariés du régime général de la
Sécurité sociale).
TABLEAU PAS DE TABLEAU
Médecin conseil
Critère
respectés
Présomption
d’origine
Critères
non respectés
CRRMP
“alinéa 3”
lien direct
avec le travail
CRRMP
“alinéa 4”
• IPP 25 %
• Lien direct
et essentiel
avec le travail
Maladie
à caractère
professionnel
*PNEUMO FICHE 21 20/11/03 11:20 Page II
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