Le développement coopératif: leçons à tirer des expériences récentes Michel Lafleur IRECUS 19 octobre 2007 Forum sur le développement coopératif en Acadie Sujets 1) Définition de succès 2) Les grands constats 3) Leçons tirées du terrain 4) Conclusion 1- Définition de succès Dans le monde des affaires traditionnelles: maximiser la richesse des actionnaires par un rendement sur des investissements financiers. Le libre-marché et les choix éclairés des citoyens constituent les balises dans la recherche de l’intérêt général. La recherche d’un maximum de gains financiers est alors la dynamique et la finalité de l’activité humaine. Tout y est subordonné. 1- Définition de succès Dans le monde des affaires coopératives: optimiser une relation d’usage (travail, consommation, production). Le libre-marché, les choix éclairés des citoyens et les valeurs et principes coopératifs constituent les balises dans la recherche de l’intérêt général. L’optimisation d’une relation d’usage face à un besoin partagé est alors la dynamique de l’activité humaine et le développement de sa condition humaine et collective en est la finalité. La gestion : comme outil de développement Utopie : Le libre-marché, la concurrence et l’intérêt personnel = optimisation de l’utilisation des ressources Entreprise Profitabilité La gestion : comme outil de développement Utopie : Le libre-marché, la concurrence et l’intérêt personnel = optimisation de l’utilisation des ressources Environnement Pauvreté Entreprise Profitabilité 1- La définition du succès aujourd’hui Environnement Social Économique 2- Les grands constats 2.1- Développement 2.2- Gestion 2.1- Les grands constats, développement – Une capacité technologique très riche; – Une connaissance toujours meilleure de notre vie et de l’univers; – Beaucoup de création de richesse financière; – Beaucoup de pauvreté, voir d’exclusion; – Des écosystèmes en détérioration; Voir notre emprunte écologique – «Ce sont les institutions humaines, et en particulier les institutions capitalistes, qui sont responsables des problèmes de développement et en particulier des famines que nous connaissons actuellement.» Armartya Sen, Poverty and famines, famines, Oxford university press, press, 1981 2.2- Les grands constats, gestion « Les sociétés commerciales, parce qu’elles constituent l’institution dominante sur cette planète, doivent absolument prendre en compte les problèmes sociaux et environnementaux de l’humanité. Actuellement, tout acte dans notre société industrielle n’aboutit qu’à la dégradation de l’environnement, quelle que soit l’intention, il nous faut concevoir un système où l’inverse sera vrai, où faire le bien tombera sous le sens, où les actes quotidiens de la vie et du travail s’accumuleront pour faire un monde meilleur, tout naturellement et non pas grâce à un altruisme conscient. […] La question qui se pose est : peut-on créer des entreprises rentables, qui se développent sans détruire, directement ou indirectement, le monde autour d’elles? » HAWKEN, Paul, (1995). L’écologie conomie quand tout le monde ’écologie du marché marché ou l’é l’économie gagne, gagne, Le souffle d’ d’or. 2.2- Les grands constats, gestion «Depuis que les économistes et les actionnaires en ont pris le contrôle [des organisations], elles ont changé de mission. L’efficacité et la rentabilité ont fait oublier leur raison d’être: nous les avons créées pour nous servir. Et voilà qu’aujourd’hui nous travaillons pour les enrichir.» - Henry Mintzberg Bérard, D. (1999). Mintzberg: Mintzberg: la thé théorie prend trop de place!, Revue l'Actualité l'Actualité, 1999, juin, 1414-16. 2.2- Les grands constats, gestion – «Nous avons plus que jamais besoin d'actions collectives qui vont au-delà de la traditionnelle dichotomie marché-État, et parmi les stratégies possibles figurent, en tête de liste, les coopératives.» Joseph Stiglitz (2003), Quand le capitalisme perd la tête, Fayard – Dans notre monde globalisé, avec des défis de création et de partage de richesse, de démocratie et de solidarité, la formule coopérative est plus pertinente que jamais. Koffi 2002 Anan, Résolution A/RES/56/114 du 18 janvier 3- Leçons tirées Leçons tirées du terrain: – Différents résultats de recherche. L’identité coopérative, handicap ou avantage concurrentiel? Nouveau paradigme: – – – – La loyauté; L’organisation apprenante; La mobilisation par les valeurs; La recherche de sens et de légitimité. Ce nouveau paradigme et l’identité coopérative : atomes crochus? Côté, D. (2000). L’identité coopérative: handicap ou avantage concurrentiel. Cahier de la Chaire d’études en gestion des coopératives, HEC. Limites stratégiques de la coopérative Les principes coopératifs financiers limitent les possibilités d'investissements, donc une capitalisation limitante. Malgré l'orientation locale chez les grandes coopératives, il y a un faible sentiment d’appartenance et d'identification des membres. Si la gestion est démocratique chez les grandes coopératives, la réalité est que le contrôle des membres est faible. Roger Spear (2001) dans Côté, D. (2001). Les holding coopératifs. Bruxelles : De Broeck université. Ce que la coopérative fait de bien Les coopératives répondent bien aux échecs du marché et aux crises de l’État; L’avantage de la confiance; L’avantage de la prise en charge; L’avantage du capital social (solidarité dans une communauté); L’avantage de la participation; L’avantage des externalités positives. Roger Spear, (2000). The cooperative advantage, Annales de l'économie publique sociale et coopérative, vol 71, n. 4, p. 507 à 523 Exemple de renouveau coopératif La difficulté des organisations de l’économie sociale est «qu'elles tentent d'articuler justice sociale et efficacité économique, et satisfaction des besoins collectifs et/ou satisfaction des besoins individuels.» «Elles ont donc un caractère complexe que seule la logique marchande ou étatique ne suffit pas à expliquer et qui rend difficile l'appréhension de leurs performances à l'aune d'outils traditionnels.» Mendez, Ariel et Nadine Richez-Battesti (1999), La confiance, au centre d’un modèle alternatif de compétitivité?, RECMA, no. 274. Exemple de renouveau coopératif Les auteurs font une critique des principaux modèles économiques actuels afin de démontrer qu'ils sont imparfaits pour la compréhension du modèle coopératif. De la théorie des jeux en passant par la théorie de l'agence ou la nouvelle théorie de l'information, tous ces modèles rendent maladroitement la compréhension de l'économie en général puisqu'ils se renferment dans la seule logique marchande pure. Tout se passe comme si le consommateur ne retenait que des critères économiques lors du choix d'un bien ou d'un service. «Dans le prolongement de la théorie des jeux, la question de la confiance est instrumentée autour de deux notions: la réputation et la crédibilité.» Modèle des défis coopératifs Trois avantages concurrentiels possibles: – Coûts: Pratiques d’intercoopération, de capitalisation (et de ristourne), – Différentiation: Pratiques de bonne gouvernance, éducation coopérative, développement du milieu, relation d’usage; – Plus-value coopérative: Pratiques d’éducation coopérative, de bonne gouvernance, développement du milieu, parties prenantes. Lafleur, Michel (2005-2007), IRECUS Pratiques d’intercoopération 1- Pratiques de mise en marché coopérative 1.1- Marque maison « Coop » 1.2- Politique d’achats coopératifs 1.3- Rabais coopératifs lors de l’adhésion à une coopérative partenaire 1.4- Table d’intercoopération de Charlesbourg pour une publicité conjointe 1.5- Promotion et publicité 1.6- Promotion entre coopératives 2- Pratiques d’appui financier 2.1- Fonds d’entraide de la Fédération des coopératives funéraires du Québec 2.2- Programme « Solidarité » de la Fédération des coopératives funéraires du Québec 3- Pratiques de partage de ressources 3.1- Partage des coûts d'un employé 3.2- Partage de personnel spécialisé 3.3- Transfert du statut de membre vers une autre coopérative Pratiques d’intercoopération 4- Pratiques de mise en commun 4.1- Mutuelle de prévention des accidents de travail 4.2- Revendication pour un secteur spécifique 5- Pratiques d’achat commun 5.1- Négociation de prix de divers services 5.2- Groupements d’assurances collectives 6- Intercoopération Nord-Sud 6.1- Coopération internationale 7- Pratiques d’affaires 7.1- Coopérative multiservices 8- Pratiques de concertation 8.1- Table de concertation des formateurs coopératifs. 8.2- Comité Jeunesse du CQCM Pratiques d’intercoopération 1) Améliore la prise de décisions; 2) Augmente les capacités des personnes et l’efficacité; 3) Accroît l’accessibilité à des expertises, à des ressources, à des conseils; 4) Accroît la capacité de développement; 5) Augmente le sentiment d’appartenance; 6) Améliore l’image et accroît la notoriété; 7) Renforce la solidarité et accroît la force du réseau. Michel Lafleur, Ernesto Molina (2005), Pratiques d’intercoopération, IRECUS Quelques facteurs de succès Leadership; Produit offert unique: – Complémentarité des connaissances; – Ressources uniques. Vision commune: – Sentiment d’appartenance; – Cohérence entre mission et action. Ancrage sectoriel et régional; Soutien externe. Melek Teke, Claudine Uwimgapiye, Uwimgapiye, Guylaine Vézina, zina, IRECUS, Facteur de succè succès. InterventionIntervention-essai IRECUS 2006 Quelques résultats ♦ Au niveau mondial, les coopératives génèrent 20 % plus d’emplois que toutes les multinationales réunies. C’est un total de 100 millions d’emplois qui sont souvent créés dans des secteurs délaissés par le secteur capitaliste et/ou par l’État. ♦ Ensemble, les coopératives, à l’échelle de la planète formeraient la 8e économie mondiale. ♦ La paix: au centre des débats depuis 112 ans International Co-operative Alliance, http://www.ica.coop/coop/statistics.html. Quelques résultats Après 5 ans Après 10 ans Taux de survie moyen des coopératives Les coopératives nonfinancières au Québec 64% 46% Taux de survie moyen du secteur privé traditionnel Statistique Canada (ensemble des entreprises) 36% 20% Institut de recherche sur les PME (UQTR) (secteur manufacturier) 47% 30% Source: Ministère de l'industrie et du commerce. (1999). Taux de survie des entreprises coopératives au Québec, Gouvernement du Québec. Quelques résultats Avantage besoin : le fait que les coopératives soient issues d’un besoin largement partagé par tous les membres de la coopérative facilite le choix de la raison d'être de l'entreprise par un bon couplage entre besoin et produit (relation d'usage). Avantage réseau : la force du regroupement de coopératives en fédérations et en confédération permet aux coopératives de se doter de services plus amples (démarchage, formation, outils administratifs, etc.) contribuant à leur succès (intercoopération). Avantage soutien : la présence de leviers financiers et fiscaux ainsi que d’un réseau de soutien institutionnel et gouvernemental permettent un soutien approprié au développement de coopératives (intercoopération). Source: Ministère de l'industrie et du commerce. (1999). Taux de survie des entreprises coopératives au Québec, Gouvernement du Québec. 4- Conclusion 1- La coopérative n’est pas un véhicule comme les autres. – À contre-courant au niveau de la forme, avant-gardiste au niveau de la finalité. – Le succès impose la faisabilité (nous réussissons sans maximiser le capital financier, donc c’est possible). – La première organisation de développement durable. 2- La coopérative demande une vision différente, une gestion différenciée. – Des DG avec la connaissance coopérative et des CA forts. Un tandem DG-Président/CA complémentaire et équilibré – Une implication immense des membres-administrateurs. – Différence grande et petite coopérative. 4- Conclusion 3-Un succès qui repose sur: – Un besoin et un produit qui évolue; – L’intercoopération. – Un solide ancrage dans le milieu. – La confiance – Sa réelle signification (moyen/finalité). 4-Prendre le bâton du pèlerin dans un monde globalisé, dans une société de plus en plus anonyme pour: – Faire valoir le projet. – Situer le projet coopératif dans le présent. – «Imposer» des critères de réussite. MERCI!