“ L CRIOAC : trois ans déjà ! CRIOAC: three years already!

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ÉDITORIAL
CRIOAC : trois ans déjà !
CRIOAC: three years already!
“
L
es centres de référence des infections ostéoarticulaires complexes
(CRIOAC) ont été labellisés en France par le ministre Roselyne BachelotNarquin à partir de septembre 2008, après des années de concertation
entre le ministère et différentes sociétés savantes, conduites, en particulier pour
la SPILF, par le très regretté Pr J.M. Besnier. Au nombre de 9, dont 2 en région
parisienne, ces centres nous sont enviés par nos collègues des différents pays
européens, impressionnés par cette tentative d’organisation de la prise en charge
des patients atteints d’une IOAC. Plus de 3 ans et demi après la labellisation
des CRIOAC, où en sommes-nous réellement ?
Éric Senneville,
Henri Migaud
Coordonnateurs du Centre de référence des infections ostéoarticulaires
complexes de l’interrégion NordOuest (CRIOAC-G4 Lille-Tourcoing).
La réflexion sur la nécessité de créer des CRIOAC a été initiée par l’association
“Le Lien” et son président J.M. Ceretti, soutenus par le Dr P. Mamoudy, après la survenue
de cas groupés d’infections postopératoires à Mycobacterium xenopi dans une clinique
de la région parisienne dans les années 1990. L’objectif annoncé de ces centres était
de faciliter l’accessibilité des patients souffrant d’une IOAC à un centre spécialisé dans ce
domaine et disposant d’une équipe multidisciplinaire. L’une des idées phares à l’origine
de ce projet était que seul un très petit nombre de ces centres français (à peine 2 ou 3,
comme on a pu le lire dans la presse à l’époque) était apte à traiter ce type de patient.
Les difficultés ont commencé lorsqu’il s’est agi de définir les missions des centres.
La première était que la notion d’IOA “complexe” n’était connue d’aucun des responsables
des centres. La seconde résidait dans le terme de “centre de référence”, élogieux et
gratifiant pour les centres labellisés mais qui, pour les autres centres ayant postulé sans
être retenus, pouvait les amener à réduire leur ardeur à s’investir dans le projet.
La perspective d’une surtarification des groupes homogènes de patients, définis par
le caractère complexe de l’IOA – dont la prise en charge était validée par le CRIOAC –,
et la volonté affichée de certains centres de s’investir dans cette aventure, ont finalement
permis la labellisation de centres associés (CA) aux CRIOAC. La notion de CA a fait
l’objet d’un débat qui illustre bien les différentes visions de ce que peut être une organisation
territoriale de la prise en charge de ces patients. L’une prônait la vision
élitiste des CRIOAC (peu, voire pas de centres associés, car ces centres compétents…
n’existent pas) ; dans ce schéma, la mission des CRIOAC, ne prenant en charge
que les pathologies les plus lourdes, était réduite à une offre de soins spécialisés
pour un nombre probablement limité de patients (bien que difficilement évaluable
actuellement). L’autre vision allait davantage dans le sens d’un maillage du territoire,
avec désignation d’un nombre suffisant de centres associés travaillant en coordination
avec le CRIOAC interrégional correspondant. Cette vision avait le mérite d’une appréhension plus globale de la pathologie, ne se limitant pas à la pathologie “extraordinaire”,
voire sensationnelle. C’est, comme souvent en pareille situation, une solution
intermédiaire qui a été retenue, prévoyant la désignation de 2 centres associés à chaque
CRIOAC, soit 18 centres en tout en plus des 9 CRIOAC. Certains CA sont ainsi distants
de leur CRIOAC de plus de 400 km, mais il est vrai que nous sommes à l’heure d’Internet… Malheureusement, on n’a pas encore réussi à faire circuler les patients par le
réseau du web ! Cela entraîne une certaine sélection en fonction des capacités à supporter
les frais engagés par ces déplacements.
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Les missions des CRIOAC sont très lourdes, associant la prise en charge effective
des patients les plus sévèrement atteints, l’organisation de l’offre de soins sur l’interrégion
et la validation des fiches de réunions de concertation pluridisciplinaires (RCP) proposées par les CA et d’autres établissements de soins. Une aide financière est allouée
chaque année aux CRIOAC pour aider à l’organisation interrégionale de leurs différentes
missions. L’année 2012 devrait voir aboutir les travaux du groupe des représentants
des CRIOAC sur la création d’une fiche de recueil commune permettant la validation
de la RCP, mais également l’alimentation d’une base nationale d’évaluation des pratiques
actuelles des centres impliqués dans la prise en charge des patients avec IOAC.
Le levier médico-légal sera amené à jouer un rôle majeur dans la “promotion”
des CRIOAC. En effet, une fois les CRIOAC identifiés et la liste des catégories
de patients relevant de ces centres connue de tous, partant du constat que les bénéfices
de la surtarification ne concernent que les CA/CRIOAC et que les demandes
de réparation en cas d’infection nosocomiale et de mise en cause des praticiens
chirurgiens orthopédistes ne cessent d’augmenter, on peut imaginer que les transferts de patients vers les CA/CRIOAC augmenteront dans un avenir très proche.
On peut interpréter cette évolution comme un résultat positif de la mise en place
des CA/CRIOAC, à la nuance près que beaucoup de ces centres sont déjà actuellement
saturés et que cela risque de conduire à une augmentation du délai de prise en charge
des patients et, en quelque sorte, à un contre-résultat.
Le modèle d’organisation des CA/CRIOAC tel qu’il est proposé actuellement ne doit
pas faire oublier que le diagnostic d’une IOAC est aussi, la plupart du temps, le résultat
de la prise en charge d’une situation infectieuse au départ simple mais qui, en raison
du non-respect de certaines recommandations, a abouti à une IOAC. Il paraît donc
important de penser dès à présent à l’organisation d’actions de prévention des IOAC
et de formation-information des praticiens orthopédistes dont il est utile de rappeler
qu’ils exercent, pour la grande majorité d’entre eux, dans des centres non CA/CRIOAC.
Liens d’intérêts. Éric Senneville
déclare avoir des liens d’intérêts
avec Sanofi-Aventis, MSD, Pfizer
et Novartis.
Henri Migaud déclare avoir une
activité ponctuelle de consultant
pour l’éducation et la recherche
pour Zimmer et Tornier.
Enfin, la mise en place de cette machine complexe n’est pas incompatible
avec l’intérêt que pourrait représenter la création d’un groupe multidisciplinaire
national, qui aurait pour vocation l’organisation de la recherche clinique et fondamentale
dans le domaine des IOAC, et, même, des infections sur matériel au sens large. Il suffit
de jeter un coup d’œil à l’activité considérable de publication dans ce domaine de la part
de nos collègues espagnols ces 10 dernières années pour nous en convaincre.
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