6 | La Lettre du Sénologue • n° 48 - avril-mai-juin 2010
San Antonio Breast Cancer Symposium 2009
DOSSIER THÉMaTIQUE
Références
bibliographiques
1. Perou CM, Sorlie T, Eisen MB et al.
Molecular portraits of human breast
tumours. Nature 2000;406:747-52.
2. Veer LJ, Dai H, Van De Vijver MJ
et al. Gene expression profiling
predicts clinical outcome of breast
cancer. Nature 2002;415:530-6.
3. Prat A, Perou CM. Deconstructing
the molecular portraits of breast
cancer. Mol Oncol 2010(in press).
* Institut Curie, Paris.
** Institut Paoli-Calmettes, Marseille.
Bilan et nouveautés 10 ans
après les premières publications
Innovations 10 years after the first publications
P. de Cremoux*, J. Jacquemier**
L
es cancers du sein représentent un groupe hétéro-
gène traduit par 39 types histologiques différents
mais dont les profils d’expression des récepteurs
hormonaux et de HER2 sont utilisés depuis longtemps
en clinique. Cependant, une avancée importante a été
apportée par les premiers travaux de Perou et Sorlie
(1), qui ont proposé une classification moléculaire et
pronostique des cancers du sein en 5 sous-types (luminal
A, luminal B, HER2 like, basal-like, normal-like), fondés
sur l’analyse du transcriptome des tumeurs. Depuis une
décennie, de nombreuses signatures pronostiques et
prédictives ont été publiées, certaines en comparaison
avec les facteurs clinico-pathologiques classiques (2).
Après un enthousiasme majeur, un certain nombre de
questions ont été posées concernant la reproductibilité
de ces analyses de haut débit, ce qui a conduit à revoir les
analyses non pas gène à gène mais par les voies majeures
responsables des réponses cellulaires (métagènes). Après
de nombreux travaux et publications, le décryptage de
l’hétérogénéité moléculaire des cancers du sein reste
encore incomplet, ce qui explique la poursuite des
recherches. Ainsi, dans son exposé, Ch. Perou (université
de Caroline du Nord) a repris l’historique d’une décennie
de découvertes moléculaires des cancers du sein, ajou-
tant une nouvelle classe moléculaire appelée le groupe
“claudin-low” (CL) représenté par la faible expression des
gènes codant pour des protéines de jonction intercellu-
laire, les claudin (3). Quelques questions permettent
de mieux comprendre ce nouveau sous-type.
➤
Que représente-t-il en fréquence ? Les CL
représentent 12 à 15 % des cancers du sein.
➤
Comment ce nouveau sous-type a-t-il été déter-
miné ? Il a été distingué des carcinomes basaux par la
sous-expression des claudin. Les claudin 3, 4 et 7 sont
de petites protéines jouant un rôle majeur dans les
jonctions intercellulaires. Elles sont constituées de 4
domaines transmembranaires, de 2 boucles extramem-
branaires et d’extrémités intracytoplasmiques. Parmi
les gènes associés à cette sous-expression, 20 sont
sous-exprimés et reliés aux jonctions intercellulaires,
ce qui explique leur plus grande différenciation dans
le sens d’une transition épithélio-mésenchymateuse
(EMT) [vimentine positive, N-cadhérine, twist…]. Le
deuxième cluster de 40 gènes est surexprimé et repré-
sente la composante immune (IL6, CXCl2, CD4...).
Par comparaison avec le sous-type basal-like, les gènes
de la prolifération sont également sous-exprimés
(inférieur au niveau des luminaux A), mais c’est aussi
le cas pour PARP1 .La caractéristique principale est
l’association avec les cellules souches, qu’elles soient
cd44+/cd24- ou ALDH1 positives, ce qui pourrait sous-
tendre une certaine résistance thérapeutique.
➤
Quelle place ces CL occupe-t-il au sein des carci-
nomes triple négatifs et des carcinomes basaux ?
Dans la catégorie des triple négatifs (TN), 32 % sont
CL pour 47 % de carcinomes basal-like. Inversement,
au sein des carcinomes basal-like, 60 % des CL sont
TN, 15 à 25 % sont RE+, pour 10 % de RE-.
➤
Existe-t-il un aspect morphologique spécifique ?
Oui, dans la mesure où les carcinomes médullaires et
métaplasiques sont CL. Cependant, ils ne représen-
tent que 5 à 7 % des cancers du sein ; par conséquent,
d’autres types de carcinomes canalaires sont CL. En
revanche, tous les CL sont de type canalaire.
➤
Pronostic. Les tumeurs CL sont de plus mauvais
pronostic que les luminaux A, mais ne sont pas plus péjo-
ratives que les autres sous-groupes (basal-like, HER2).
➤
Relation entre claudin-low et BRCA1. Peu d’études
sont publiées. Cependant, si 61 % des tumeurs BRCA1
mutées sont de type basal-like, 22 % seulement sont CL.
➤Réponse thérapeutique et claudin-low
Sur une petite série de tumeurs traitées en néo-adju-
vant associant anthracyclines et taxanes, les réponses
complètes histologiques ont été observées dans 39 %
des CL pour 73 % des carcinomes basal-like.
Conclusion
Le sous-type CL vient d’être identifié à partir du
sous-type basal-like considéré comme hétérogène.
L’intérêt clinique de cette nouvelle entité demande à
être exploré. Cependant, l’association du profil cellule
souche avec une différenciation plus mésenchymateuse
et une réaction immune importante pourrait permettre
la découverte de nouveaux gènes d’intérêt pour une
thérapeutique plus spécifique. Il s’agit par conséquent
d’un sous-type à suivre. ■