La Lettre du Neurologue - vol. IX - n° 8 - octobre 2005
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QUESTION-RÉPONSE
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Question..........................................
Une patiente de 80 ans présente un infarctus
sylvien sur arythmie par fibrillation auri-
culaire (AC/FA) non traitée. Le bilan est néga-
tif par ailleurs. L’ETO élimine un thrombus.
Il existe simplement une dilatation modérée
de l’oreillette gauche. La patiente est traitée
par Aspégic®à la phase aiguë et les anti-
vitamines K (AVK) sont instaurées au 5ejour.
La FA reste rapide au 5ejour sous digoxine
1cp/jour mais est bien tolérée. Après l’ETO,
les cardiologues proposent de commencer
immédiatement un traitement par Corda-
rone®avec dose de charge.
Faut-il suivre cet avis ou attendre une anti-
coagulation efficace par AVK ? Dans ce
dernier cas, après combien de temps d’anti-
coagulation efficace peut-on proposer de
réduire l’AC/FA ?
Réponse...........................................
Fibrillation auriculaire, infarctus cérébral récent et cardio-
version : que faire ?
Indépendamment de l’âge et de la possibilité ou non, dans le
contexte d’un infarctus cérébral récent, de réaliser la cardioversion
pharmacologique d’une fibrillation auriculaire, ce cas clinique
amène à discuter de manière plus générale les indications de cardio-
version chez les patients porteurs d’une fibrillation auriculaire.
Dans ce domaine, les données de la littérature permettent d’envi-
sager trois aspects : les indications de cardioversion dites immé-
diates, la nécessité éventuelle d’une anticoagulation efficace ainsi
que sa durée minimale et, plus largement, la place de la régulari-
sation du rythme cardiaque versus celle du simple contrôle de la
fréquence cardiaque chez ces patients.
Concernant la cardioversion immédiate chez cette patiente de
80 ans ayant présenté un infarctus sylvien sur fibrillation auricu-
laire d’évolution au moins égale à 5 jours, la littérature scientifique
et les recommandations des sociétés savantes spécialisées sont
claires : il n’y a pas d’indication (1, 2). En effet, les seules indica-
tions de cardioversion immédiate concernent les patients pour
lesquels la fibrillation auriculaire est mal tolérée, en particulier
lorsqu’il existe des signes d’insuffisance cardiaque aiguë, une
hypotension artérielle ou des signes de souffrance coronaire. Il est
par ailleurs conseillé, dans ce contexte, d’introduire un traitement
anticoagulant par héparine, qui sera ensuite remplacé par un anti-
coagulant par voie orale (1, 2).
En dehors de ces situations d’urgence thérapeutique, la cardio-
version chez un patient dont la fibrillation auriculaire évolue
depuis plus de 48 heures, voire dont l’ancienneté est inconnue,
comme cela est sans doute le cas pour cette patiente, ne peut s’en-
visager qu’après une période d’au moins 3 à 4 semaines d’anti-
coagulation efficace, et ce indépendamment de toute anomalie
échocardiographique éventuellement associée (1, 2). À ce terme,
le problème qui anime de nombreux débats et qui fait l’objet de
nombreuses études est celui de l’indication même de la cardio-
version, complétée le cas échéant d’un traitement antiarythmique
afin de maintenir un rythme sinusal, versus le recours à des
traitements n’ayant pour but que le contrôle de la fréquence
cardiaque.
Au-delà des querelles de spécialistes, il convient de réintroduire
ici la question du risque de récidive ischémique cérébrale. Alors
que cela était supposé depuis longtemps, les études récentes ont
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confirmé que la régularisation du rythme cardiaque et son main-
tien à long terme, chez les patients porteurs d’une fibrillation
auriculaire, ne permettent pas de réduire le risque thromboembo-
lique, notamment cérébral, qu’il s’agisse d’une fibrillation auri-
culaire préalablement paroxystique ou permanente (3, 4). D’autre
part, il existe de plus en plus d’arguments en faveur d’une mor-
bidité plus élevée avec la régularisation rythmique qu’avec le seul
contrôle de la fréquence cardiaque, en raison notamment des
effets indésirables des médicaments antiarythmiques (4).
Dans le cas clinique présenté ci-dessus, en l’absence de contre-
indications, l’anticoagulation et le contrôle de la fréquence car-
diaque semblent constituer des attitudes thérapeutiques raison-
nables et en adéquation avec les recommandations internationales
(1, 2, 4). Il convient cependant de rester attentif aux possibles
complications hémorragiques des anticoagulants oraux ainsi qu’aux
effets indésirables des médicaments dont l’indication est validée
pour ralentir la fréquence cardiaque au cours de la fibrillation
auriculaire, à savoir les bêtabloqueurs, les calcium-bloqueurs et
les digitaliques, dont l’utilisation n’est pas toujours aisée ni sans
risque chez le sujet âgé.
D. Deplanque, département de pharmacologie,
faculté de médecine, Lille.
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
1.
Fuster et al. ACC/AHA/ESC Guidelines for the management of patients with
atrial fibrillation: executive summary. Circulation 2001;104:2118-50.
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the role of pharmacologic therapy, electrical cardioversion, and echocardiogra-
phy. Ann Intern Med 2003;139:1018-33.
3.
Thibault et al. Thromboembolic events occur despite sinus rhythm maintenance
in patients treated for atrial fibrillation: The Canadian Trial of Atrial Fibrillation
experience. Can J Cardiol 2004;20:195-9.
4.
Vidaillet H. Rate control vs. rhythm control in the management of atrial fibril-
lation in elderly persons. Am J Geriatr Cardiol 2005;14:73-8.
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