Médecine du Maghreb 2000 n°83
28 Z. BEN ZINA, I. DHOUIB, A. ABID, H. BEN AYED,
M. LAZHARI, W. KHARRAT, M. CHAABOUNI
Selon une revue de la littérature, leur fréquence varie de 53
à 56 % (2,3).Ces accidents sont graves surtout s’ils s’ac-
compagnent de pénétration de corps étranger intraoculaire
(CEIO), entraînant des dégâts oculaires importants. Ce type
d’accidents oculaires touche essentiellement le sujet jeune,
de sexe masculin, en pleine activité. Ces accidents sont
graves car ils coïncident avec l’âge où l’activité profession-
nelle est la plus intense, entraînant par conséquent des
préjudices fonctionnels et esthétiques d’une part et des
r é p e rcussions économiques d’autre part. Certains métiers
sont plus exposants que d’autres. Le secteur industriel sem-
ble le plus grand pourvoyeur de ces accidents. En effe t ,
selon l’étude de LOPEZ (3), le secteur industriel est re s -
p o n s able de 29,3 % de ces accidents. La principale cir-
constance demeure l’accident de type mart e a u - bu rin pour
plus de 50 % des cas (2). En général, les corps étrangers de
nature métallique sont ceux les plus fréquemment rencon-
trés (4). Dans notre étude, nous avons noté la présence de
corps étrangers de nature métallique dans 79 % des cas.
Pour certains auteurs (3, 4), l’œil gauche est le plus touché.
Pour GAIN (2), l’atteinte de l’œil droit est prédominante.
La prédominance de l’atteinte de l’œil gauche est expliquée
par la protection instinctive de l’œil droit par la main droite
du travailleur le plus souvent droitier.
Selon KHALIL (4), la porte d’entrée est cornéenne dans
44 % des cas, limbique dans 19 % des cas et sclérale dans
37 % des cas. Selon RUNYAN (in 5), la porte d’entrée est
cornéenne dans 70 %, sclérale dans 20 % et limbique dans
10 %. Il semble que les lésions cornéennes soient plus fré-
quentes dans le secteur métallurgique.
Le CEIO siège le plus souvent au niveau du segment anté-
ri e u r. En effet, KHALIL (4) a noté que le CEIO était
localisé dans le segment antérieur dans 81 % des cas contre
11 % des cas où le CEIO était fiché dans le pôle postérieur
(4) ce qui corrobore nos résultats. Le diagnostic certain et
la localisation fine du CE ne peuvent être faits que grâce à
l ’ ex p l o ration ra d i o l ogi q u e. En outre, celle-ci a un gra n d
intérêt thérapeutique (orienter l’indication ch i ru rgicale) et
p ro n o s t i q u e. La ra d i ographie standard permet la détection
des corps étrangers radio-opaques. Elle est indiquée chaque
fois qu’un CEIO est suspecté. Cependant, le pri n c i p a l
écueil de cette méthode c’est que les dimensions minimales
re c o n n a i s s ables du CE, sont fonction du poids spécifi q u e
du matériau donc insuffisantes pour identifier ou exclure la
présence de CEIO. L’exploration tomodensitométrique aug-
mente cette dimension minimale (500 fois plus sensibl e s
que radiographie standard) ce qui permet de mieux identi-
fier et situer le corps étra n ger par rap p o rt aux diff é re n t e s
tuniques de l’œil surtout les corps de faible densité.
Le CEIO ra d i o - t ra n s p a rent (bois, ve rre) impose une IRM
après véri fi c ation d’absence d’hy p e rdensité en scanner et
d’opacité ra d i ographique (5). L’ é ch ographie orbitaire est
pratiquée en cas de trouble des milieux. Elle permet de réa-
liser un bilan lésionnel préopérat o i re (hémorragie dans le
vitré, décollement de la rétine). Selon LOPEZ (3), seule-
ment 31,5 % des ouvri e rs utilisaient de façon spora d i q u e
des lunettes de protection oculaire et personne n’utilisait de
p rotection au moment de l’accident. Ceci est éga l e m e n t
valable dans notre série où nous avons noté un port incons-
tant des moyens de protection. Les accidents de travail avec
présence de CEIO constituent une urgence chirurgicale.
Une antibio-pro p h ylaxie associant deux antibiotiques
s y n e rgiques est nécessaire. Le traitement ch i ru r gi c a l
consiste à côté du parage de la plaie du globe à l’extraction
du CEIO. Multiples facteurs interviennent dans la conduite
thérapeutique tels que la localisation du CEIO, sa taille, sa
forme et sa composition . Ainsi :
- les corps étra n ge rs intra - c a m é ru l a i res sont le plus sou-
vent ex t raits à la pince ou à l’électroaimant : la voie
d’abord sera soit par la plaie elle même soit par l’inci-
sion limbique.
- pour les corps étra n ge rs intra - c ristalliniens, l’ex t raction
du cristallin permet en même temps l’ablation du corps
étranger.
- les corps étrangers localisés au niveau du segment posté-
rieur sont extraits à l’électroaimant par incision sclérale
au niveau de la pars plana. Cette technique est réservée
s u rtout pour les corps étra n ge rs fi chés en rétine anté-
rieure particulièrement sur les méridiens de 6 heures,
- pour les corps étrangers les plus profonds (2), l’extrac-
tion par vitrectomie-pince est la technique la plus cou-
ramment utilisée (6, 7).
- l’extraction du corps étranger est indispensable pour les
c o rps étra n ge rs ox y d a bles tels que le fer et le cuiv re.
Elle est discutée pour les corps en plomb.