Soins périopératoires en chirurgie digestive. Recommandations de

Exercice de la Chirurgie
Soins périopératoires en chirurgie digestive.
Recommandations de la Société française
de chirurgie digestive (SFCD
1
)
Perioperative care in digestive surgery.
Guidelines of the French society of digestive surgery (SFCD)
C. Mariette
a,
*, A. Alves
b
, S. Benoist
c
, F. Bretagnol
d
, J.Y. Mabrut
e
, K. Slim
f
a
Service de chirurgie digestive et générale, hôpital C. Huriez, CHRU de Lille, place de Verdun, 59037 Lille, France
b
Service de chirurgie digestive, hôpital Lariboisière, Paris, France
c
Service de chirurgie générale, digestive et oncologique, hôpital A. Paré, Boulogne, France
d
Service de chirurgie digestive, hôpital Saint-André, CHU de Bordeaux, France
e
Service de chirurgie générale et digestive et de transplantation hépatique, hôpital de la Croix-Rousse, CHU de Lyon, France
f
Service de chirurgie générale et digestive, hôpital Hôtel-Dieu, CHU de Clermont-Ferrand, France
Disponible sur internet le 04 janvier 2005
Catégorie : Recommandations de pratiques cliniques
Mots clés : Recommandations professionnelles ; Chirurgie digestive ; Soins périopératoires
Keywords: Professional recommendations; Digestive surgery; Perioperative care
1. Introduction
La prise en charge périopératoire en chirurgie digestive
est variable selon les centres et les équipes, et reste mal codi-
fiée. L’évolution actuelle des connaissances se fait vers un
acte chirurgical et des soins périopératoires de moins en moins
invasifs. Beaucoup de données sur la prise en charge pério-
pératoire des malades en chirurgie digestive sont disponibles
à ce jour, mais à notre connaissance aucun travail n’a cherché
à élaborer des références fondées sur les données de la litté-
rature.
La Société française de chirurgie digestive (SFCD) s’est
proposée, par l’intermédiaire de sa commission d’évalua-
tion, de colliger les données factuelles disponibles dans le
but d’établir des recommandations sur les soins périopératoi-
res. Une recherche bibliographique a été faite dans trois bases
de données (Medline, Embase et Cochrane Library) sur la
période 1980–2004, en retenant comme langues de publica-
tion le français et l’anglais. Nous avons retenu les articles
originaux pertinents portant sur les soins périopératoires en
chirurgie digestive :
la nutrition périopératoire en chirurgie programmée de
l’adulte ;
la préparation colique préopératoire ;
les soins cutanés périopératoires ;
l’antibioprophylaxie ;
le drainage vésical ;
la transfusion périopératoire en chirurgie sus- et sous-
mésocolique ;
la place de l’aspiration digestive par sonde nasogastrique
après chirurgie élective ;
la réalimentation orale précoce en chirurgie sous-
mésocolique.
* Auteur correspondant.
Adresse e-mail : [email protected] (C. Mariette).
1
Membres de la commission d’évaluation de la SFCD : K. Slim (direc-
teur), A. Alves, N. Bataille, J.E. Bazin, S. Benoist, S. Berdah, F. Bretagnol,
E. Chouillard, B. Costaglioli, H. Johanet, A. Mebazaa, J.Y. Mabrut,
C. Mariette, T. Perniceni.
Annales de chirurgie 130 (2005) 108–124
http://france.elsevier.com/direct/ANNCHI/
0003-3944/$ - see front matter © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.anchir.2004.12.003
La thromboprophylaxie a été volontairement exclue de
notre propos car une grande conférence de consensus natio-
nale est en cours.
En cas de publications répétées sur les mêmes patients,
seul le dernier article était pris en compte. Les éditoriaux,
mises au point et résumés ont été exclus. Les études compa-
ratives étaient analysées en priorité. Parmi les études compa-
ratives, étude randomisée signifie une étude prospective avec
tirage au sort et étude prospective signifie une étude avec un
recueil prospectif des données mais sans tirage au sort entre
les groupes. Les études randomisées ont été analysées puis à
défaut les études prospectives comparatives et enfin les étu-
des non comparatives (prospectives et rétrospectives). Les
niveaux de preuves et les grades de recommandations fournis
par cette revue ont été évalués selon la classification définie
ci-dessous (Tableau 1). Les études randomisées n’ont été asso-
ciées à un niveau de preuvesA ou B que si leur méthodologie
était satisfaisante.
Les recommandations ont été faites en fonction des don-
nées de la littérature avec le niveau de preuves (NP) corres-
pondant, et après consensus entre les différents membres du
groupe. La rédaction de ces recommandations a fait appel à
la collaboration de membres d’autres sociétés savantes soit
au sein du comité de rédaction soit au sein du comité de lec-
ture : la Société française d’anesthésie réanimation (Sfar), la
Société française de transfusion sanguine (SFTS), la Société
francophone de nutrition entérale et parentérale (SFNEP), la
Société de nutrition et diététique de langue française (SN-
DLF), le conseil de lutte contre les infections nosocomiales
(CLIN), la Société française d’hygiène hospitalière (SFHH),
le centre de coordination de la lutte contre les infections noso-
comiales (CCLIN), l’Association française d’urologie (AFU)
et l’Association de recherche en urologie (ARU). Le texte de
recommandations a ensuite été adressé à un groupe de
50 experts pour une lecture critique. La version définitive des
recommandations a été retenue après cette dernière étape. La
liste des références n’est pas exhaustive ; seules les études
comportant le meilleur niveau de preuve ont été retenues.
2. Nutrition périopératoire en chirurgie programmée
de l’adulte
2.1. Introduction
La dénutrition est définie comme une carence d’apports
énergétiques et/ou protéiques par rapport aux besoins de
l’organisme, la malnutrition comme une carence de certains
nutriments. Elle est responsable d’une diminution des méca-
nismes de défense contre l’infection, d’un retard de cicatri-
sation, et d’une altération de certaines grandes fonctions (res-
piratoire, cardiaque, endocrinienne).
La dénutrition est un facteur indépendant de morbidité et
de mortalité, en relation directe avec la durée de séjour hos-
pitalier et le coût [2]. La prévalence de la dénutrition dans les
services de chirurgie est de 20 à 50 % [3].
L’identification de l’état nutritionnel en préopératoire et
le traitement préalable des carences fait partie d’une évalua-
tion systématique avant l’intervention. En situation d’urgence,
la prise en charge est faite en postopératoire.
2.2. Définitions
La nutrition artificielle est définie comme un apport calo-
rico azoté exogène équivalent aux besoins du patient compor-
tant un apport énergétique (glucides avec ou sans lipides),
des protéines, des électrolytes, des vitamines et des éléments-
traces.
L’évaluation clinique de l’état nutritionnel repose, en rou-
tine, sur la valeur de l’indice de masse corporelle [IMC
= poids
(kg)/taille
2
(m
2
)]. La dénutrition est évoquée pour une valeur
< 18,5 kg/m
2
chez l’adulte ou < 22 kg/m
2
chez le sujet âgé
de plus de 70 ans, et sur la perte de poids par rapport au poids
habituel du sujet en bonne santé. Une meilleure évaluation
est fournie par le Nutritional Risk Index (NRI = 1,519 × albu-
minémie g/l + 0,417 × poids actuel/poids usuel × 100). Les
malades sévèrement dénutris sont définis par une perte de
poids 20 % ou un NRI < 83,5. Les malades modérément
dénutris sont définis par une perte de poids > 10 % ou un
83,5 < NRI < 97,5.
Tableau 1
Niveaux de preuve et grade des recommandations [1]
Niveau de preuve scientifique fourni par la littérature Grade des recommandations
Niveau 1 A
essais comparatifs randomisés de forte puissance
méta-analyse d’essais comparatifs randomisés
analyse de décision fondée sur des études bien menées
Preuve scientifique établie
Niveau 2 B
essais comparatifs randomisés de faible puissance Présomption scientifique
Niveau 3 C
études comparatives contemporaines non randomisées bien menées
études de cohorte
Faible niveau de preuve scientifique
Niveau 4
études cas-témoin : essais contrôlés présentant des biais
Niveau 5
études rétrospectives
séries de cas
toute étude fortement biaisée
109C. Mariette et al. / Annales de chirurgie 130 (2005) 108–124
2.3. Modalités de la nutrition artificielle périopératoire
2.3.1. Besoins et apports
Les besoins énergétiques (caloriques) sont de l’ordre de
30 kcal/kg par jour chez les sujets alités et de 35 kcal/kg par
jour chez les sujets ambulatoires. En période postopératoire,
on considère que les patients incapables de reprendre une ali-
mentation couvrant 60 % des besoins relèvent d’un support
nutritionnel [4]. Les apports énergétiques sont assurés à
50–70 % par des glucides et à 30–50 % par des lipides. Les
besoins azotés recommandés varient de 150–200 mg
d’azote/kg par jour en période préopératoire à 250–300 mg
d’azote/kg par jour en période postopératoire. Les besoins en
glucides sont habituellement couverts par un apport de 3 à
4 g/kg par jour. Les besoins en lipides varient de 1,5 à 2 g/kg
par jour mais sans dépasser 2 g/kg par jour. Les besoins en
phosphore, magnésium, vitamines, éléments-traces doivent
être assurés quotidiennement et les apports électrolytiques
(KCl et NaCl) adaptés aux besoins estimés à partir des valeurs
dans le sang.
2.3.2. Voie parentérale
L’alimentation parentérale ne modifie pas la mortalité pos-
topératoire (NP 1) [5] mais diminue la morbidité infectieuse
postopératoire (NP 1, malgré l’hétérogénéité des essais inclus
dans les méta-analyses) [6,7]. La voie parentérale n’est indi-
quée que lorsque le tube digestif n’est pas utilisable (malob-
sorption intestinale, obstruction intestinale), dans ce cas une
voie veineuse centrale est le plus souvent utilisée. Les prin-
cipales complications sont liées au cathéter central : mécani-
ques, infectieuses et thromboemboliques. La nutrition paren-
térale préopératoire administrée à des patients non dénutris
augmente la morbidité infectieuse iatrogène (NP 1).
2.3.3. Voie entérale
La voie entérale est recommandée de première intention
quand l’état anatomique et fonctionnel du tube digestif le per-
met. Par rapport à la nutrition parentérale, son efficacité sem-
ble supérieure (NP 2) [8,9], sa morbidité et son coût sont infé-
rieurs (NP 1) [7].
Le plus souvent, elle utilise une sonde nasogastrique. Dans
certains cas particuliers de durée prolongée ( > 1 mois), une
gastrostomie ou une jéjunostomie peut être indiquée.
2.3.4. Durée
La durée optimale d’une nutrition artificielle préopéra-
toire ne semble pas devoir être inférieure à sept jours (NP 1)
[4].
La durée optimale d’une nutrition artificielle postopéra-
toire ne semble pas devoir être inférieure à sept jours (NP 1)
[4].
La réalimentation entérale postopératoire précoce dimi-
nue significativement le taux de complications infectieuses
postopératoires et la durée de séjour par rapport à la nutrition
parentérale, mais est moins bien tolérée (NP 1) [9].
2.4. Recommandations
2.5. Immunonutrition
2.5.1. Rationnel
La chirurgie majeure s’accompagne d’un état d’immuno-
suppression qui augmente le risque de mortalité et de com-
plications infectieuses. Améliorer les fonctions immunitaires
permettrait de réduire ces complications.
2.5.2. Produits
Les produits le plus souvent étudiés contiennent une asso-
ciation d’arginine, de glutamine, d’acides gras polyinsaturés
Malades ne devant pas recevoir une nutrition
artificielle périopératoire
Dans la période périopératoire (2 semaines
avant et 2 semaines après l’intervention chirur-
gicale), la nutrition artificielle standard est inu-
tile, chez les patients non ou peu dénutris (perte
de poids < 10 %) qui peuvent, dans la semaine
suivant l’intervention, reprendre une alimenta-
tion couvrant 60 % des besoins (grade A).
Malades devant recevoir une nutrition
artificielle périopératoire
La nutrition préopératoire est recommandée
chez les malades sévèrement dénutris (perte de
poids 20 %) devant subir une intervention chi-
rurgicale majeure sans que le type de celui-ci
constitue, à lui seul, une indication de nutrition
artificielle (grade A). On ne peut recommander
une attitude univoque chez les patients modéré-
ment dénutris (perte de poids de 10 à 19 %)
(grade B).
La nutrition postopératoire « de principe » est
indiquée :
chez tous les malades ayant reçu une nutri-
tion artificielle préopératoire (grade A) ;
chez tous les malades n’ayant pas reçu de
nutrition artificielle préopératoire et sévère-
ment dénutris (grade A) ;
chez les malades qui sont incapables de re-
prendre une alimentation couvrant 60 % de
leurs besoins nutritionnels, dans un délai
d’une semaine après l’intervention (grade A),
chez tout patient présentant une complica-
tion postopératoire précoce responsable d’un
hypermétabolisme et de la prolongation du
jeûne (grade A) ;
chez les autres malades, on ne peut recom-
mander une attitude univoque (grade B).
110 C. Mariette et al. / Annales de chirurgie 130 (2005) 108–124
oméga-3, de nucléotides et de micronutriments antioxydants
(vitamine E, vitamine C, b-carotène, zinc et sélénium).
La voie d’administration est soit parentérale (glutamine),
soit entérale (le produit le plus souvent évalué est Impact
®
),
soit orale (le produit le plus souvent évalué est Oral Impact
®
).
2.5.3. Conclusions
L’utilisation d’immunonutriments est plus efficace qu’une
diète standard à même niveau énergétique et azoté lorsque
l’une et l’autre sont prescrites en postopératoire et la réduc-
tion de la durée de séjour et des coûts est en faveur de l’immu-
nonutrition. Ceci est vérifié quel que soit l’état nutritionnel
des patients (NP 1) [10–13].
Chez les patients dénutris (perte de poids 10 %), une
immunonutrition préopératoire seule est moins efficace
qu’une immunonutrition périopératoire mais, dans tous les
cas, plus efficace qu’une nutrition standard (NP 1). Son effi-
cacité est démontrée en termes de diminution de la morbidité
infectieuse postopératoire et de la durée d’hospitalisation (NP
1), mais reste faible ou nulle sur la mortalité (NP 1) [10–12].
Chez les patients non dénutris (perte de poids < 10 %),
une immunonutrition préopératoire de courte durée (5 jours)
réduit l’incidence des complications infectieuses ainsi que la
durée de séjour (NP 1) [13].
2.6. Recommandations
3. La préparation colique préopératoire
3.1. Introduction
Les complications infectieuses menacent tout patient
devant subir une chirurgie abdominale et notamment colorec-
tale et sont à l’origine d’au moins la moitié des décès posto-
pératoires [14]. Les complications infectieuses (déhiscence
anastomotique, péritonite postopératoire localisée ou dif-
fuse, abcès de paroi, éviscération, etc.), survenant après ouver-
ture de la lumière intestinale, sont rapportées à la contamina-
tion par le contenu intestinal riche en germes aérobies et
anaérobies.
3.2. Principe de la préparation mécanique colique
Le principe de la préparation mécanique du côlon (PMC)
est de provoquer une purge intestinale aboutissant à l’élimi-
nation des selles et du contenu intestinal riche en germes et
obtenir ainsi un colon « vide et propre ». La PMC est deve-
nue en moins d’une décennie une pratique courante voire un
dogme. Les avantages théoriques de la PMC sont de :
réduire la contamination de la cavité abdominale et de la
paroi en cas d’ouverture volontaire ou accidentelle du tube
digestif ;
permettre une manipulation aisée d’un grêle ou d’un côlon
vidés de leur contenu (selles) ;
éviter de fragiliser une éventuelle anastomose colique ou
colorectale par le passage de selles dures ;
permettre une reprise plus rapide du transit car un côlon
vide se contracte mieux qu’un colon plein de matières ;
limiter la contamination péritonéale en cas de désunion
anastomotique.
3.3. Évaluation des différentes solutions de PMC
Les produits de PMC les plus utilisés sont :
(les laxatifs osmotiques (polyéthylène glycol, dihydrogé-
nophosphate de sodium) ;
les laxatifs stimulants (picophosphate de sodium) ;
les laxatifs salins (bisacodyl phosphate sodique) ;
les purgatifs anthracéniques (sénnoside B) ;
les autres solutions étant représentées par le mannitol et le
ringer lactate, tout en sachant que les produits peuvent être
associés dans certains protocoles.
Alors que la majorité des essais réalisés dans les années
1980–1990 suggéraient que le polyéthylène glycol (PEG) (4 l)
était meilleur que la préparation classique par lavements en
termes de propreté du côlon et accessoirement en termes de
complications infectieuses, aucune étude récente n’a confirmé
la supériorité du PEG [15–17]. Un essai français [16] a mon-
tré qu’un PMC par un sénnoside (X-Prep
®
) et un lavement
par de la povidone iodée (Bétadine
®
) diluéeà5%était plus
efficace que le PEG. Les autres essais ont montré que le phos-
phate de sodium (Fleet
®
phosphosoda, Picolax
®
, Prépacol
®
)
était aussi efficace et mieux toléré par les patients que le PEG.
Si on exclut les PMC au sérum physiologique, on peut
retenir à la lumière de l’ensemble des essais que, en chirurgie
colorectale :
le PEG ne peut être considéré comme la référence dans la
PMC avant chirurgie colorectale (NP 1) ;
le phosphate de sodium (Fleet
®
phosphosoda, Prépacol
®
)
et le lavement à la Bétadine
®
(± X-Prep
®
) peuvent être
retenus, mais avec un faible niveau de preuve du fait des
biais méthodologiques des essais publiés (NP 2).
Cependant le critère majeur d’efficacité qu’est la diminu-
tion de la fréquence des désunions anastomotique en chirur-
gie colorectale a été mal évalué dans la majorité des études
publiées.
En chirurgie abdominale non colorectale, les deux essais
publiés ne permettent pas de conclure sur la meilleure solu-
tion de PMC [18,19].
Une immunonutrition entérale d’une semaine
est recommandée en préopératoire chez tous les
patients soumis à une chirurgie digestive ma-
jeure (grade A).
Elle sera poursuivie en postopératoire chez les
patients dénutris en préopératoire :
pendant une semaine en l’absence de compli-
cations ;
ou jusqu’à reprise d’une alimentation orale
assurant au moins 60 % des besoins nutrition-
nels (grade A).
111C. Mariette et al. / Annales de chirurgie 130 (2005) 108–124
3.4. Tolérance des solutions de PMC
Le phosphate de sodium apparaît supérieur au PEG en ter-
mes de tolérance et de coût (niveau 1) [20], bien que pouvant
théoriquement donner des troubles électrolytiques (diminu-
tion de la phosphorémie, la calcémie et la kaliémie). Malgré
deux essais négatifs ayant cherché à évaluer le retentisse-
ment clinique de ces troubles, il est prudent (NP 2) de ne pas
recommander le phosphate de sodium en cas d’insuffisance
rénale, et de l’utiliser avec précaution en cas d’insuffisance
cardiaque congestive, cirrhose ou chez les personnes âgées.
3.5. La PMC est-elle nécessaire ?
Tous les essais randomisés et méta-analyses [21–24] ont
montré que la PMC par le PEG était soit inutile soit délétère
en termes de complications infectieuses et de désunion anas-
tomotique avant chirurgie colorectale (NP 1). À noter que les
bras témoins dans les essais publiés et méta-analyses com-
portaient un régime normal.
Le seul essai contrôlé [25] ayant évalué une PMC par les
phosphates de sodium a montré l’absence d’utilité de cette
préparation dans la prévention des complications postopéra-
toires en chirurgie colorectale (NP 2).
Le cas spécifique de la chirurgie rectale n’a pas été évalué
dans les méta-analyses du fait d’un faible nombre de patients
inclus.
En chirurgie abdominale non colorectale, l’utilité de la
PMC n’a pu être mise en évidence (NP 2).
3.6. Recommandations
4. Soins cutanés périopératoires
Les soins cutanés périopératoires comprennent la toilette
et la dépilation préopératoires, l’antisepsie en salle d’opéra-
tion, le drapage opératoire et le pansement postopératoire.
4.1. Toilette préopératoire
L’utilisation de solutions moussantes antiseptiques lors de
la toilette préopératoire est réalisée dans le but de :
diminuer la colonisation bactérienne au niveau cutané ;
diminuer le taux d’infection du site opératoire (ISO).
Sept études randomisées ont montré une diminution signi-
ficative de la flore cutanée après utilisation de solutions mous-
santes d’antiseptiques par rapport au simple savon [26–32]
(NP 1). Toutes ces études ont évalué la chlorhexidine compa-
rée à des savons et deux d’entre elles [27,28] ont comparé la
chlorhexidine à la polyvidone iodée. Deux études montrent
que deux douches diminuent significativement la colonisa-
tion par rapport à une douche et qu’un bain est moins efficace
qu’une douche (NP 2) [27,33].
L’effet de l’utilisation de solutions moussantes antisepti-
ques sur la diminution du taux d’ISO est controversé. Sept
études randomisées ont comparé la chlorhexidine à l’utilisa-
tion de savon [32–38] :
trois trouvaient une différence significative en faveur de la
chlorhexidine ;
trois ne montraient pas de différence.
Une étude a comparé la chlorhexidine à la polyvidone iodée
et ne montrait pas de différence significative [39]. Une étude
a montré une différence significative en faveur de deux dou-
ches par rapport à une douche sur le taux d’ISO [40].
4.2. Dépilation
Il n’est pas démontré que la dépilation diminue le risque
d’ISO (NP 1). À l’inverse, l’absence de dépilation s’accom-
pagne des taux d’ISO les plus faibles. Trois études randomi-
sées ont montré que le rasage par rapport à l’absence de dépi-
lation ne modifiait pas significativement le taux d’ISO
[41–43]. De plus deux études prospectives ont montré que,
par rapport à l’absence de dépilation, le rasage était un fac-
teur de risque d’ISO [44,45], alors qu’une autre ne retrouvait
pas de différence significative [46]. Si la dépilation s’avère
nécessaire pour des raisons de confort opératoire, elle devrait
être limitée à la seule zone opératoire.
Concernant les techniques de dépilation, parmi dix études
randomisées, quatre ne retrouvaient pas de différence sur les
taux d’ISO [47–50] ; trois retrouvaient une diminution signi-
ficative en faveur de la tonte par rapport au rasage [41,51,52],
deux retrouvaient une différence significative de la crème épi-
latoire par rapport au rasage [53,54]. Parmi quatre études ran-
domisées, une seule a retrouvé un avantage significatif pour
la tonte par rapport au rasage [55].
Concernant le moment de la dépilation, trois études ran-
domisées et une étude prospective ont étudié cette variable
[51,53,56,57] : trois ont montré un avantage pour la dépila-
tion le jour même [51,53,57] mais la différence n’était signi-
ficative que dans l’une d’entre elles [53].
4.3. Antisepsie en salle d’opération
La détersion préopératoire avec une solution moussante
antiseptique a pour objectif de réduire la contamination bac-
térienne et de diminuer les squames et débris cutanés pré-
sents sur la peau de la zone d’incision, avant l’application de
l’antiseptique.
La préparation cutanée du champ opératoire, doit être large.
Elle comporte une étape de détersion à l’aide d’une solution
moussante antiseptique suivie d’un rinçage à l’eau stérile, puis
de l’application d’un antiseptique de la même gamme que le
produit utilisé pour la douche.
Il est recommandé de ne pas réaliser de pré-
paration colique mécanique systématique par
PEG avant chirurgie colorectale élective (grade
A). On ne peut faire de recommandations quant
à l’utilisation des phosphates de sodium ou du
régime sans résidu en chirurgie colorectale.
112 C. Mariette et al. / Annales de chirurgie 130 (2005) 108–124
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