L1. Introduction à la psychopathologie Névroses Ce que la théorie freudienne apporte de plus spécifique dans la compréhension des névroses, c’est un ensemble d’argument en faveur de la signification fonctionnelle du symptôme névrotique. Ces derniers sont considérés comme l’expression de défenses destinées à protéger le Moi de l’angoisse engendrée par le conflit entre des exigences pulsionnelles et des exigences morales. En 1894, Freud parle des psychonévroses de défense, terme qui désigne hystérie, phobie, obsession, et certaines psychoses hallucinatoires. Dans chacune de ces affections, la défense joue un rôle essentiel. Elle sera considérée comme « le point nucléaire du mécanisme psychique des névroses en question ». Freud s’oppose à Janet pour qui le clivage de conscience est le trait primaire de l’hystérie et « repose sur une faiblesse innée de la capacité de synthèse psychique, sur l’étroitesse du champ de la conscience et en tant que stigmate psychique témoigne de la dégénérescence des individus hystériques ». Freud mettra l’accent sur la notion du conflit psychique et le rôle de l’étiologie sexuelle. Il distingue également les névroses actuelles des psychonévroses. A savoir que l’origine des névroses actuelles n’est pas à chercher dans les conflits infantiles, mais dans le présent. Le terme de névroses actuelles apparaît en 1898 pour désigner la névrose d’angoisse et la neurasthénie et plus tard l’hypocondrie. La névrose d’angoisse reste liée au nom de Freud qui, le premier, en a fourni une description clinique détaillée et surtout une interprétation psychodynamique. Bien entendu d’autres tout au long du 19° siècle (Esquirol, Morel, Pinel) ont essayé de délimiter le champ de l’anxiété morbide. Jacob Da Casta a décrit un ensemble de signes physiques liés à l’angoisse et évoque un dysfonctionnement neuro-végétatif à traduction essentiellement cardio-vasculaire.Enfin Georges Beard a parlé de la neurasthénie comme l’ensemble hétérogène de troubles intellectuels et physiques de nature fonctionnelle. Freud va conserver cette classe nosographique et la distinguer de la névrose d’angoisse. Mais l’une comme l’autre comme des névroses actuelles. Les symptômes ne sont pas une expression symbolique, mais résultent d’une absence ou d’une inadéquation de la satisfaction sexuelle. Donc, dans les névroses actuelles et les psychonévroses, la cause est bien sexuelle mais dans le premier cas, il s’agit de se pencher sur le présent alors que dans le second, il faut considérer la vie infantile et le passé du sujet. L’étiologie est somatique et non psychique dans les névroses actuelles. Actuelles signifie une actualité dans le temps. Le mécanisme de formation du symptôme serait somatique et non symbolique. Parmi les symptômes Freud énumère..cf. La psychiatrie aujourd’hui ne parle pas de la névrose d’angoisse mais des états anxieux névrotiques. L’anxiété est définie comme un sentiment pénible d’attente, une peur sans objet ou la crainte d’un danger imprécis. Elle parle également des crises d’angoisse, à savoir une installation soudaine et inopinée, à n’importe quelle heure de la journée et sans circonstance déclenchante d’une appréhension intense avec sensation d’une grande menace et perception de diverses modifications somatiques, elles-mêmes génératrices d’angoisse. Sur le plan comportemental, l’accès entraîne le plus souvent une agitation motrice. Les manifestations somatiques peuvent être : 1- cardiovasculaires (oppression thoracique), palpitation, accès tachycardie… 2- Digestives : spasmes pharyngés (sensation de boule dans la gorge), spasmes gastro-intestinaux, douleurs coliques…3respiratoires : dyspnée, sensation d’étouffement, accès de toux nerveuse…Les patients décrivent ces crises comme insupportables. En psychanalyse, de nos jours, le concept de névrose actuelle tend à s’effacer de la nosographie dans la mesure où quelle que soit la valeur précipitante des facteurs actuels, on retrouve toujours dans les symptômes l’expression symbolique de conflits plus anciens. Le terme de névroses de transfert est le plus admis aujourd’hui. Les psychonévroses englobent, de point de vue nosographique, l’hystérie de conversion, l’hystérie d’angoisse, névrose obsessionnelle ou de contrainte. L’hystérie de conversion. Bien que décrite depuis l’Antiquité et réactualisée par divers travaux cliniques au cours de la 2° moitié du XIX° siècle, c’est surtout grâce à Freud que l’hystérie a acquis ses lettres de noblesse. La névrose hystérique se caractérise typiquement par la survenue de divers troubles somatiques, transitoires ou durables, mais sans aucune lésion anatomoclinique sous-jacente. Les symptômes sont appelés « symptômes de conversion ». Rappel historique : Dans des textes de l’Egypte antique datés du XX° siècle avant J.C., on peut trouver la description des troubles analogues aux symptômes hystériques rapportés à la migration de l’utérus à travers le corps. Cette théorie allait être reprise par Hypocrate pour qui la migration de l’utérus (en Grec ustera, d’où l’étymologie du mot) était liée à la privation de rapports sexuels. Plus tard Galien devait abandonner la théorie de la migration au profit de la corruption du sang par un liquide séminal féminin censé s’accumuler en raison de la continence sexuelle. Donc, déjà dans l’Antiquité on établissait un rapport entre des troubles physiques et la sexualité ou l’insatisfaction sexuelle. Au Moyen Âge, l’hystérie s’est retrouvée confinée au domaine religieux passant d’une expression individuelle à une autre collective dominée par des phénomènes de contagion et d’identification. Les hystériques étaient considérées comme des possédées démoniaques, traquées et brûlées en tant que sorcières. Au XVI° siècle, Paraclès décrit l’influence de l’imagination sur le déclenchement des phénomènes hystériques. EN 1859, Paul Briquet publie un Traité clinique et thérapeutique de l’hystérie à partir de l’observation de 400 cas d’hystérie. Il réfute le rôle de la frustration sexuelle et accrédite la notion d’une hystérie masculine. Charcot utilisera plus tard l’hypnose dans le traitement de l’hystérie. Pendant la même période, l’école de Nancy (Bernheim et Liébaut) remet en question la relation spécifique entre l’hypnotisme et l’hystérie et dénonce la méthode d’observation de Charcot dans la mesure où les cas cliniques sur lesquels s’appuyaient les observations de Charcot étaient préalablement sélectionnés et préparés par des élèves dévoués au Maître de la Salpêtrière. Janet a soutenu sa thèse sur l’automatisme psychologique. Il s’intéresse également à l’hystérie et y voit un effet du rétrécissement de la conscience et d’un affaiblissement des facultés de synthèse psychologique d’où cette tendance à la division de la personnalité et la propension à vivre de façon intensive certaines représentations mentales. Ces dernières, ne sont pouvant être intégrés, continuent à agir « subconsciemment » de manière autonome. De point de vue clinico-psychiatrique, on décrit 5 grands syndromes qualifiés de troubles dissociatifs. 1- Amnésie psychogène. Incapacité soudaine d’évoquer des souvenirs personnels importants. Généralement après un événement particulièrement traumatisant, ou sélective concernant seulement un certain type d’événements. 2- Fugue psychogène. Elle consiste en un départ soudain du domicile ou du travail avec impossibilité de se souvenir du passé. On parle « des voyageurs sans bagages », qui sont rares. Ce trouble a été observé en temps de guerre ou de catastrophes naturelles. 3- Personnalité multiple. Elle se caractérise chez un même sujet de personnalités distinctes, chacune prédominant à des moments déterminés. Etat très rare. Alors que des états seconds avec production oniroïde d’images visuelles d’allure hallucinatoire est moins exceptionnelle. 4- Somnambulisme. Moins fréquent chez l’adulte que chez l’enfant avec une amnésie totale de l’épisode lors du réveil. Il réalise de façon caricaturale le clivage de conscience. 5- Dépersonnalisation : Il s’agit de l’altération de la conscience de soi. Il s’agit d’une perturbation de la perception de la réalité. Ce qui est extraordinaire, c’est que l’hystérie épouse son temps. Les formes de l’hystérie semble avoir constamment changé selon les époques, les cultures et l’évolution des mentalités. L’hystérie semble se modeler sur les attentes de la société dans laquelle elle vit. Freud. Rappel. Cf cours L.2 N’oublions pas que c’est de l’hystérie qu’est née la psychanalyse. Et c’est elle qui constitue le paradigme de la névrose avec la place qui revient au refoulement comme mécanisme de défense. Les expressions symptomatiques échappent au pouvoir médical. Et sont en lien avec un corps fantasmatique. Tout ce qu’elle touche est érotisé : désir de séduire, plasticité, théâtralisme, dramatisation… La problématique fondamentale est caractérisée par la fixation incestueuse à un père trop souvent décevant, par l’ambivalence à forte composante de haine à l’égard de la mère, par l’angoisse de castration et la revendication phallique. L’hystérie de conversion. N’oublions pas que c’est de l’hystérie qu’est née la psychanalyse. Et c’est elle qui constitue le paradigme de la névrose avec la place qui revient au refoulement comme mécanisme de défense. Les expressions symptomatiques échappent au pouvoir médical. Et sont en lien avec un corps fantasmatique. Tout ce qu’elle touche est érotisé : désir de séduire, plasticité, théâtralisme, dramatisation… La problématique fondamentale est caractérisée par la fixation incestueuse à un père trop souvent décevant, par l’ambivalence à forte composante de haine à l’égard de la mère, par l’angoisse de castration et la revendication phallique. Mais un rappel. Un rappel s’impose. Freud vient à Paris pour écouter le maître de la Salpêtrière. Il a même traduit les leçons du mardi. Dans un texte nécrologique (Le 6 août 1893) Freud écrit : « la jeune science neurologique a perdu bien trop tôt son plus grand promoteur, les neurologues de tous les pays leur maître et la France un de ses hommes les plus éminents » (R.I.P., p. 61). Charcot pour qui fut créée la première chair mondiale de clinique des maladies nerveuses. Et si l’intérêt de Charcot fut, dit-on, de libérer l’hystérie de l’étiologie utérine traditionnelle, il n’en demeura pas moins, comme l’attestent ses fameuses Leçons du mardi, que l’hypersthésie ovarienne resta à l’honneur devant le public médusé de la Salpêtrière et que l’anamnèse se résumait au rappel du quotidien difficile de la classe ouvrière, nécessitant ainsi les conseils du maître (« faites-la moins travailler »1, dit-il à la mère de la malade). Lectures du passage. Les leçons du mardi offraient des descriptions minutieuses des états du corps rappelant l’approche des anatomistes dans leur désir d’en transcender le mystère. Si pour l’anatomie, le corps ne cache rien qui ne puisse être rendu visible par le recours à la dissection, note Pierre Fédida, pour Charcot, le corps ne cache rien à un visuel qui sait prononcer le discours du maître2. L’éthique du voir dominait, en effet, le tableau, prenant ainsi le devant de la 1 2 Charcot J.-M., « Leçon du mardi » (1887-88), in L’hystérie, L’Harmattan, 1971, pp. 111-114. Fédida P., « L’anatomie dans la psychanalyse », in N.R.P., n° 3, 1971, pp. 109-126. scène, occultant toute narrativité. Devant le regard des « messieurs » de la Salpêtrière, les gesticulations théâtrales de l’hystérique répondaient à la voix du maître. Torsion, abasie, paralysies, anesthésie, aphonie, respiration coupée ou accélérée, évanouissement, névralgie, troubles fonctionnels… Tout est là excepté, comme le note J.-B. Pontalis, l’espace psychique qui sera le grand absent. Il a fallu tout un chemin pour que Freud rompe avec le voir au profit de l’écoute de ce qui se trame dans l’Autre scène. Désormais, on est prié de fermer les yeux et … d’écouter. Toujours dans le même article Freud écrit : « Ce n’était pas quelqu’un qui rumine, ni un penseur, mais une nature artistiquement douée, selon ses propres termes, un visuel, un voyant » (p. 62). Freud. Freud vient à Paris pour suivre les cours de Charcot. Traduit même Les leçons de mardi et dans une notice nécrologique, il lui rend hommage. C’était un visuel..la citation. Freud sera attentif à la parole plus qu’aux gesticulations théâtrales. C’est Etudes sur l’hystérie écrit avec Joseph Breuer que Freud se dégage de plus en plus de l’atmosphère psychiatrique concernant l’hystérie de conversion. Tout en continuant à avoir recours à l’hypnose, il reste attentif à la parole de l’hystérique. Dans le cas Elisabeth Von R., dont la vie est traversée par bien des drames et de traumatismes pendant l’enfance et l’adolescence, (mort du frère, une cousine qu’on emmène à l’asile des aliénés, les attaques de la mère (et le spectacle d’une mère qui git sur le sol…) à tel point que Freud écrit : « Atténuer l’action de cette sorte de souvenir est naturellement chose bien malaisée. » (p. 41)Freud utilisait l’hypnose et utilisait également le toucher, le contact de la main. Mais un jour, Freud la questionnant sur un souvenir, la malade répond qu’elle n’en sait rien. Freud lui dit qu’elle a jusqu’à demain pour retrouver ce souvenir et Elisabeth de répondre d’un ton bourru, qu’il ne faut pas lui demander toujours d’où provient ceci ou cela, mais la laisser raconter ce qu’elle a à dire. » (p. 49). C’est donc l’hystérique qui a su imposer la règle des associations libres. En plus, un jour elle dit à Freud : « Ne bougez pas, ne me touchez pas ». Elle a donc imposé la juste des distances des corps pour qu’une parole puisse surgir et qu’une écoute puisse capter cette parole. Lacan a tout à fait raison de dire : « où sont parties les hystériques, les Dora, les Elisabeth… ?) Au début, dans un début préanalytique, Freud cherchait l’événement traumatique qu’il essayera de dater. Les lettres à Fliess. Plus tard, écoutant le récit des hystériques, Freud découvre la fixation oedipienne et la sexualité infantile. « Il faut, avant d’entreprendre le traitement d’une hystérie, être convaincu de la nécessité de toucher à des sujets sexuels » (Le cas Dora). Le souvenir de l’événement traumatique originel agit comme un corps étranger pathogène. Et Freud dira : « C’est de réminiscence que souffre l’hystérique ». Or, Le génie de Freud est qu’il a su écouter l’interdit que lui imposait l’hystérique, la figure matricielle de la psychanalyse. « Ne me touchez pas. Ne dites rien ». Interdit de toucher et de parler. Que dit-elle ? La chose sexuelle. Les expressions symptomatiques peuvent atteindre n’importe quelle fonction corporelle. Mais les atteintes ne découlent pas d’une distribution nerveuse objective, mais d’une construction fantasmatique. La problématique fondamentale qui se dégage (Le cas Elisabeth) est la fixation à un père. Le cas Elisabeth. Au cours de l’automne 1892, Freud examina sur la demande d’un ami médecin une jeune fille qui souffrait des douleurs dans les jambes et marchait avec difficulté. Elle était âgée de 24 ans. Intelligente. Freud écrit : « Dès le début je soupçonnais que Fraülein Elisabeth devait connaître les motifs de sa maladie, donc qu’elle renfermait dans son conscient non point un corps étranger, mais seulement un secret. En la regardant on pensait aux paroles du poète : « Ce petit masque-là fait augurer un sens caché » (Etudes sur l’hys. p. 109) Freud renonce à l’hypnose et écoute la malade. « Ce fut là ma première analyse complète d’une hystérie ». Il utilise la métaphore archéologique « Elle me permit de procéder pour la première fois, à l’aide d’une méthode que j’érigeai plus tard en technique, à l’élimination, par couches des matériaux psychiques, ce que nous aimerions à comparer à la technique de défouissement d’une ville ensevelie » (p. 109). « L’analyse fait remonter la conversion d’un émoi psychique en douleur physique à une époque où cette douleur ne fut certainement pas ressentie et ne fut pas l’objet d’un souvenir. » (p. 116-117) « Une période fructueuse de traitement débuta après la découverte du motif de la première conversion. La malade commença par me surprendre en m’annonçant qu’elle savait maintenant pour quelle raison les douleurs partaient toujours d’un point déterminé de la cuisse droite et y étaient toujours les plus violentes. C’était justement l’endroit où, chaque matin, son père posait sa jambe très enflée, lorsqu’elle en changeait les bandages (…) les jambes douloureuses commencèrent elles aussi à ‘parler’.» (p. 117) Charcot disant : « faites-la moins travailler », assimile hystérie avec conditions de vie difficiles. La maladie ou la pathologie s’installe plus aisément dans la classe populaire. Freud parle, lui, des mécanismes inconscients, du complexe oedipien, de l’amnésie... Dans les trois essais de la théorie de la sexualité, Freud consacre trois parties à la question de la sexualité. Il ouvre par la question des aberrations sexuelles, puis la sexualité infantiles et enfin la puberté. Il attire l’attention sur ce qui fit un scandale à l’époque à savoir la sexualité infantile. « Il est généralement admis que la pulsion sexuelle fait défaut à l’enfance et ne s’éveille qu’à la puberté. Or, on découvre les traits essentiels de la pulsion sexuelle dès lors qu’on approfondit les manifestations sexuelles de l’enfant. Freud soulève la question de l’amnésie infantile que Freud compare à un voile épais lors des premières années de la vie. Nous n’avons conservé que des « fragments de souvenirs ». Mais ces mêmes impressions, qui sont tombées dans l’oubli, n’en ont pas moins laissé dans notre âme les traces les plus profondes, et qu’elles furent décisives pour notre évolution ultérieure. Donc, « il ne peut donc être question d’une réelle disparition des impressions d’enfance, mais d’une amnésie analogue à celle qui, chez les névrosés, a effacé le souvenir d’événements survenus dans un âge plus avancé, et qui est caractérisée par le refus d’admettre certaines impressions dans la conscience (le refoulement » (p. 67). Cette amnésie infantile n’est pas sans rapport avec la sexualité de l’enfant. « Ce n’est pas un jeu d’esprit que de vouloir relier l’amnésie infantile à l’amnésie hystérique. Cette dernière, qui contribue au refoulement, s’explique seulement par le fait que l’individu possède un ensemble de vestiges laissés par le souvenir, dont la conscience ne peut pas disposer et qui deviennent, par un processus d’association, centre d’attraction pour les éléments que de forces parties de la conscience repoussent et refoulent. On peut dire que, sans l’amnésie infantile, il n’y aurait pas d’amnésie hystérique » (Les trois essais, p. 68). C’est donc l’amnésie infantile qui cache les débuts de la vie sexuelle. Freud en vient par la suite à considérer les manifestations de la sexualité chez l’enfant. Il commence par le suçotement. Je vous renvoie aux Trois essais. Il existe chez le nourrisson et peut subsister jusqu’à l’âge adulte. La volupté de sucer absorbe toute l’attention de l’enfant. (rappel de l’étayage. Terme qui désigne la relation primitive des pulsions sexuelles aux pulsions d’autoconservation. Les pulsions sexuelles dans un premier temps s’appuient sur les fonctions vitales qui leur fournissent une source organique, une direction et un objet. La satisfaction de la zone érogène était au début étroitement associée à la satisfaction du besoin de nourriture. Donc la fonction corporelle fournit à la sexualité sa zone érogène ou sa source. Le plaisir qu’elle fournit n’est pas réductible à l’assouvissement pur et simple de la faim. Le besoin de répéter la satisfaction sexuelle se séparera du besoin de nutrition. La satisfaction devient auto-érotique). Pour Freud, le refoulé, c’est toujours le sexuel. « Il faut se souvenir … Eros du divin Platon.» Freud parle d’une sexualité plus étendue. On est passé, comme le souligne Laplanche, du sexuel comme instinct vital au sexuel comme véritable perversion universel de l’instinct. La sexualité est plaisir auto-érotique, il y a un plaisir de l’organe, plaisir localisé. On peut rétorquer : il y a la sexualité partout. CE pansexualisme, dit Laplanche, ne veut pas nécessairement dire que la sexualité soit tout. Mais que dans tout il y a la sexualité. Et la sexualité mène au refoulement. L’exemple de Dora qui souffre d’une irritation de la gorge et de la toux. Le lien entre son père et madame K. Elle se rappelait très bien avoir été, dans son enfance, une suçoteuse. Le père se souvenait de l’avoir sevrée de cette habitude qui s’était perpétuée chez elle jusqu’à l’âge de 4 ou 5 ans. p. 36-37 (Les 5 Pses). La sexualité est le refoulé par excellence. Freud écrit dans l’Esquisse : « Il doit exister un caractère de la représentation sexuelle qui explique que seules des représentations sexuelles soient soumises au refoulement ». Pourquoi seule notre sexualité est refoulée ? Freud explique ce fait par « l’instauration diphasée », cad le fait qu’elle apparaisse en deux temps. D’une part une phase infantile, et une pubertaire. Les deux étant séparées par une phase de latence. Il y a un rythme temporel. Une première apparition prématurée de la sexualité et reprise des significations anciennes sur la base des possibilités physiologiques. On se souvient du père et de l’oncle pervers. L’invraisemblance d’une telle fréquence de la perversion et l’incapacité de décider si une scène retrouvée renvoie au réel ou au fantasme. Cette lettre (69) a été saluée comme un moment fécond qui fraie un chemin vers le fantasme. Voie royale de la psychanalyse. Freud introduit là la catégorie de la réalité psychique. La perversion Définition du Vocabulaire de la psychanalyse : « Déviation par rapport à l’acte sexuel « normal », défini comme coït visant à obtenir l’orgasme par pénétration génitale, avec une personne du sexe opposée. » On dit qu’il y a perversion lorsque l’orgasme est obtenu avec d’autres objets sexuels (pédophilie, zoophilie, …) ou quand l’orgasme est subordonné de façon impérieuse à certaines conditions extrinsèques (fétichisme, transvestisme, voyeurisme, exhibitionnisme, sado-masochisme). Pratiques apportant la satisfaction sexuelle. Donc, une atypie dans l’obtention du plaisir. Se définit par rapport à une norme. Mais en psychanalyse, on ne parle de la perversion que par rapport à la sexualité. Notons que dans Les trois essais sur la théorie de la sexualité, Freud parle d’abord des déviations sexuelles. En dépit de leur hétérogénéité, les perversions trouvent leur unité dans la solution qu’elles constituent face au conflit que suscite la différence sexuelle et l’angoisse de castration. Il y a un déni de la castration qui permet de trouver la jouissance en dehors « de la relation génitale hétérosexuelle ». Chaslin. Décrit le cas de cet homme père de famille, exhibitionniste. La disposition à la perversion est une partie de la constitution dite normale. Car la sexualité infantile est soumise au jeu des pulsions partielles. Les perversions adultes apparaissent comme la persistance ou la réapparition d’une composante partielle de la sexualité. La perversion serait une régression à une fixation antérieure de la libido. Freud parlait de la névrose comme le négatif de la perversion. A savoir que la perversion serait la manifestation brute non refoulée de la sexualité infantile. Quel est le mécanisme de la perversion ? non pas le refoulement, mais le désaveu qui porte sur la castration. Dans son texte sur le fétichisme (1927), Freud part d’un constat clinique chez un certain nombre d’hommes : le choix de l’objet est dominé par un fétiche. C’est une anomalie dit Freud mais non douloureuse. « Il est rare qu’on le ressente comme un symptôme douloureux » (p. 133). Dans le fétichisme, le sujet fixe son intérêt érotique sur un objet féminin (soulier, sous-vêtements…) indispensables à l’obtention de l’orgasme. L’article de 1927 bien que court, analyse la position perverse, dégage le concept de déni de la castration qui fonde la position perverse. Déni ou désaveu. Il ne s’agit pas du refoulement, pas de forclusion (ce qui n’est pas admis dans le symbolique) mais de désaveu. Freud lie le fétichisme au complexe de castration. L’enfant refuse l’absence du pénis chez la mère. « Le processus est le suivant : l’enfant s’était refusé à prendre connaissance de la réalité de sa perception. La femme ne possède pas de pénis » (p. 134). Ce n’est pas vrai que la femme est châtrée. L’enfant scotomise la perception du manque du pénis chez la femme. Freud refuse d’utiliser le terme de refoulement et préfère celui du déni. Le déni est un terme psychanalytique qui porte sur l’absence du pénis chez la femme ou sur la réalité, terme que Freud utilise pour parler de la psychose et de la perversion. L’horreur de la castration s’est érigé un monument en créant un substitut : le fétiche. Il est recommandé instamment l’étude du fétichisme à tous ceux qui doutent encore du complexe de castration. Cette position du manque de pénis chez la femme sera déniée et maintenue. Deux croyances qui cohabitent. « L’horreur de la castration s’est érigée à elle-même un monument commémoratif dans la création d’un phallus substitutif ». Ainsi la femme n’a pas de pénis et elle a un pénis sous la forme d’un fétiche. Il s’agit d’un clivage du moi. « Horreur de la castration, déni de la différence sexuelle, clivage, défi, triomphe : telles sont les caractéristiques de la structure perverse. »