LIBÉRALE Société Et si on parlait du stress ? Le terme stress est répandu et a subi une extension abusive voire déviée de son sens. Le concept de stress a pris une place importante tant en médecine qu’en psychiatrie où il est considéré comme l’ensemble du processus d’adaptation psychique et physique en réponse à une agression. C ontroversé, le mot stress est passé dans le langage commun, employé ici et là comme un résumé de tout et de rien. Mais que dit le Larousse ? “Ensemble des perturbations physiologiques et métaboliques provoquées dans l’organisme par des agents agresseurs variés”. Si, dans le langage usuel, les mots stress et émotion sont employés l’un pour l’autre, l’émotion doit être identifiée comme la réponse psychologique et le stress comme la réponse purement biologique face à une agression. La distinction doit également se faire entre les processus stressants et le stress lui-même qui est la réponse qui en découle. Pour le Pr Dominique Pringuey, psychiatre, « le terme de stress dans le langage courant tient sans doute son succès de sa capacité à évoquer les émotions les plus fortes telles la peur, l’effroi ou la terreur. “Je suis stressé” veut dire “je suis anxieux”...“Il me stresse” : il me presse, il me menace... “J’ai un stress” : je suis dans une situation difficile... » Pour le Dr Jean-Louis Nahon, chercheur au CNRS : « Deux types de stress doivent être clairement distingués : le stress aigu et le stress chronique. Dans le cas d’un stress chronique, le rétrocontrôle est diminué et conduit à des états pathologiques. Les effets se font sentir sur la reproduction, la croissance et le système immunitaire ». Pourquoi le stress ? Toute situation nouvelle nécessite une adaptation. Selon l’intensité du stress, la réponse varie en fonction de l’individu et de sa forme physique à un moment donné. Souvent le travail est cité comme le premier facteur de stress. Les journaux se font l’écho du stress des cadres pris entre les impératifs dictés par leur hiérarchie et les résultats de leurs subordonnés. Les agents stressants peuvent provenir de multiples sources 42 liées aux conditions physiques du travail, aux facteurs relationnels, à l’organisation du travail et à l’environnement. Mais les enfants, les adolescents et les personnes âgées sont également des populations extrêmement vulnérables. Le stress, réponse de l’organisme à une sollicitation stimulante qu’elle soit physique ou psychique, est quelquefois considéré comme positif chez les sportifs de haut niveau ou les créatifs. Encore faut-il qu’à la suite le succès survienne. En effet, les échecs à répétition peuvent submerger l’individu et le stress peut devenir pathogène. Asthénie, anorexie, qui sont souvent des signaux d’alarme conduisent « à la faillite des processus d’adaptation et ouvrent ainsi le champ à des maladies caractérisées qui conduisent, en dehors de toute thérapeutique, à la multidéfaillance d’organes », souligne le Dr Patrice Broker à propos des personnes âgées. Comment soigner le stress ? Il n’existe pas de médicament spécifique du stress. Il s’agit d’abord de le prévenir en reconnaissant notamment la situation. « Les thérapeutiques chimiques ne sont que le complément d’une stratégie de soin incluant les différentes techniques psychothérapeutiques. Le traitement pharmacologique repose sur l'utilisation de benzodiazépines, précise le Dr Frantz Kohl, psychiatre. Les antidépresseurs peuvent être utilisés dans le traitement du stress post-somatique ». Les molécules utilisées le sont pour traiter les symptômes et doivent s’associer à une prise en charge diversifiée. Car la thérapeutique du stress s’inscrit dans une prise en charge bio-psycho-sociale. Propos recueillis lors de la Journée de la santé, CHU de Nice, mars 99.