Physiopathologie P o l y a r t h r i t...

publicité
P o l y a r t h r i t e r h u m a t o ï d e :
PR - Physiopathologie
phys i o p a t h o l o g i e, asp e c ts mé dico - é conomiques et imagerie
Physiopathologie
Physiopathology
IP J. Morel, C. Miceli
 Points forts
 Microchimérisme dans la polyarthrite rhumatoïde (PR) :
un rôle pathogène médié par les cellules microchimériques
trouvées chez les patientes atteintes de PR ne possédant pas
de gène codant pour l’épitope partagé ?
 Inflammasome : un lien entre immunité innée et immunité
adaptative dans la pathogénie de la PR ?
 De nouveaux polymorphismes associés à la PR : STAT4
et C5 TRAF.
 OSCAR, un récepteur des ostéoclastes impliqué dans l’inflammation et la destruction : une future cible thérapeutique ?
 In vitro, les T régulateurs inhibent l’ostéoclastose par la
molécule CTLA4 : une nouvelle propriété des T régulateurs.
 Une citrullination antigénique croissante amplifie la
réponse auto-anticorps, induisant l’apparition des anti-CCP
avant le déclenchement de la PR.
 Les anticorps anti-énolase citrullinée : un nouvel outil
diagnostique pour les PR anti-CCP négatifs et le témoin d’une
réponse à une infection bactérienne dentaire ?
 La présence des anti-CCP n’est pas associée à une moindre
amélioration de la PR au cours de la grossesse.
 Les nouveaux critères incluant les anti-CCP sont plus
­sensibles pour diagnostiquer les PR débutantes.
certains arguments suggèrent un rôle du microchimérisme. Les
patientes sclérodermiques ont en effet un taux d’ADN mâle plus
élevé que les témoins sains du même sexe. Par quels mécanismes
ces cellules microchimériques peuvent-elles intervenir dans la
pathogénie des maladies auto-immunes ?
1. Rôle des cellules microchimériques dans la réponse immunitaire
de type alloréactivité par analogie avec les manifestations dysimmunitaires observées dans la réaction du greffon contre l’hôte.
2. Rôle des cellules microchimériques dans la transmission d’un
message cytokinique ou antigénique.
Dans la polyarthrite rhumatoïde (PR), 20 % des femmes
atteintes n’ont pas de gène codant pour l’épitope partagé. Pour
ces patientes, ce gène pourrait être transmis par les cellules
microchimériques (L. Maestroni, 744). Pour tester cette hypothèse, les cellules mononucléées (PBMC) ont été extraites du
sang périphérique de patientes atteintes de PR non porteuses
des gènes HLA-DRB1*04 (n = 43) ou HLA-DRB1*01 (n = 33)
ainsi que de sujets témoins (n = 64 pour HLA-DRB1*04 et n = 46
pour HLA-DRB1*01). Un typage génétique sur ces cellules a été
réalisé par technique SSO (Single Sequence Oligonucleotide).
Les femmes atteintes de PR ont un nombre de cellules micro­
chimériques porteuses de l’allèle HLA-DRB1*04 plus important
que les témoins (figure 1). La même observation est faite pour
5 % 500 000
Mots-clés : Microchimérisme – Inflammasome – Anticorps
anti-CCP.
le Rôle du microchimérisme
dans la pathogénie
de la polyarthrite rhumatoïde
On appelle microchimérisme la présence de cellules génétiquement différentes chez un même individu. Par exemple, des
cellules fœtales d’un enfant mâle (XY) ont été retrouvées chez une
femme de 26 ans après sa grossesse. Ces cellules, dites “microchimériques”, peuvent être transmises d’un individu à l’autre lors
d’une grossesse normale ou d’une fausse couche par un transfert
entre la mère et le fœtus via le placenta, lors d’une transfusion ou
encore lors d’une transplantation d’organe ou de cellules souches.
Dans les maladies auto-immunes (sclérodermies, myosites, etc.),
LR-NN-337-0108.indd 6
Nombre de cM/million de PBMC
Keywords: Microchimerism – Inflammasome – Anti-CCP
antibodies.
300 000
Expression de cM
HLA-DRB1*04
PR (n = 43)
1 % 10 000
9 000
7 000
5 000
3 000
1 000
0,1 %
800
600
400
200
0
Témoins (n = 64)
p = 0,031
8
= 1 patient
Figure 1. L’épitope partagé HLA-DRB1*04 est transmis aux patientes
atteintes de PR par les cellules microchimériques (CM) fœtales.
Nombre de cellules microchimériques HLA-DRB1*04 dans le sang
de 43 patientes atteintes de PR (points roses) et de 64 témoins
sains (points verts) ne possédant pas le gène HLA-DRB1*04.
Chaque point correspond à un patient.
La Lettre du Rhumatologue - n° 338 - janvier 2008
23/01/08 16:55:30
L’inflammasome : un lien entre immunité
innée et immunité adaptative ?
La cellule présentant l’antigène peut reconnaître un antigène
(agents infectieux ou un signal de danger) et déclencher une
réponse inflammatoire immédiate médiée par l’immunité innée
impliquant les polynucléaires neutrophiles (PNN), les macrophages et le complément. Dans certaines situations, une réponse
plus lente mais plus spécifique dirigée contre l’antigène est
médiée par l’immunité adaptative impliquant les lymphocytes
(B et T).
DAMP
ATP
PAMP
P2X7
TLR/NLR
Inflammasome
Activation de caspase 1
IL-1β
IL-18
IL-33
PAMP : Pathogen Associated Molecular Patterns
DAMP : Danger Associated Molecular Patterns
NALP : Nacht LRR PYD domains
Figure 2. L’inflammasome.
Lorsque le signal de danger (DAMP) ou un agent infectieux (PAMP)
se lie au récepteur Node-Like Receptor, un complexe se forme
avec les protéines NACHT, PYD et ASC : l’inflammasome. La protéine ASC va favoriser le clivage de la caspase 1, qui pourra ainsi
activer les cytokines présentes dans le cytoplasme sous forme
inactive comme la pro-IL-1. Le récepteur purinergique P2X7 est
capable d’activer l’inflammasome.
La Lettre du Rhumatologue - n° 338 - janvier 2008
LR-NN-337-0108.indd 7
L’inflammasome est un complexe qui intervient dans l’immunité
innée (figure 2). Les signaux de danger DAMP (Danger Associated Molecule Patterns) ou les molécules d’agents infectieux
PAMP (Pathogen Associated Molecule Patterns) se lient à des
récepteurs membranaires (Toll-Like Receptor) ou intracellulaires (Node-Like Receptor). Cette liaison entraîne la formation
d’un complexe recrutant les protéines NACHT, PYD et ASC
(Apoptosis-associated Speck-like protein containing a CARD)
et formant ainsi l’inflammasome. Ce complexe va activer la
caspase 1, qui peut alors cliver un domaine de certaines cytokines présentes dans le cytoplasme sous forme inactive (proIL-1, pro-IL-18, etc.). Les cytokines deviennent alors actives
et sont excrétées dans le milieu extracellulaire, provoquant
ainsi une inflammation immédiate. Il existe trois récepteurs de
l’inflammasome : NALP1 (NACHT LRR PYD), NALP3 et IPAF.
Ces trois récepteurs ont une protéine ASC qui intervient dans
l’activation de la caspase 1.
Dans cette étude, trois souches de souris DBA1 knockout ont
été utilisées. La première n’a pas le gène NALP3 (KO NALP3),
la deuxième n’a pas le gène IPAF (KO IPAF) et la troisième ne
possède pas le gène ASC (KO ASC), qui code pour une protéine présente sur les trois récepteurs de l’inflammasome (Karababa, 1280). Une arthrite à adjuvant est induite dans l’une des
articulations de la souris avec de l’albumine bovine méthylée
(mBSA). Seule la souris KO ASC développe une arthrite moins
sévère sur les plans clinique, biologique et histologique. L’IL-1
intra-articulaire est diminuée, mais l’activité de la caspase 1 est
conservée, témoignant qu’une autre molécule est aussi capable
d’activer la caspase indépendamment de la protéine ASC. Les
lymphocytes T des souris KO ASC produisent moins d’IFNγ
et d’IL-2, ce qui suggère que la protéine ASC est capable de
moduler la sécrétion des cytokines TH1. Cette dernière observation indique que la protéine ASC pourrait être un lien entre
l’immunité innée et l’immunité adaptative de type TH1 dans
l’arthrite expérimentale. Quel est maintenant le rôle de l’inflammasome dans la PR ?
Mécanisme de la destruction osseuse : OSCAR,
un nouveau récepteur des ostéoclastes
exprimé dans la polyarthrite rhumatoïde
Protéine ASC
Pro-IL-1β
Pro-IL-18
Pro-IL-33
PR - Physiopathologie
l’allèle HLA-DRB1*01. En revanche, l’expression d’un allèle non
associé à la PR (HLA-DQB1*02) est similaire chez les patientes
atteintes de PR et les témoins. L’épitope partagé porté par les
cellules microchimériques est observé presque exclusivement
chez les patientes atteintes de PR. Ce résultat suggère que les
gènes HLA-DRB1*04 et 01 pourraient être transmis par les
cellules microchimériques chez les patientes non porteuses du
gène de l’épitope partagé. Des observations comparables ont été
faites par une autre équipe en utilisant une technique différente
(Yan, 368). Au lieu de typer les gènes HLA-DRB1*04 et 01, Yan
et al. ont typé les séquences de l’épitope partagé (QRRAA et
QKRAA) chez les patientes atteintes de PR ne possédant pas
de gène codant pour cet épitope partagé. Ils ont observé une
prévalence plus élevée de cellules microchimériques porteuses
de l’épitope partagé que chez les témoins sains.
OSCAR (OSteoClast Associated Receptor) est un récepteur des
ostéoclastes possédant un domaine Fcγ-like qui ne se lie pas
avec les immunoglobulines. Le ligand d’OSCAR n’est pas connu,
mais la liaison de ce ligand avec OSCAR active des tyrosines
kinases (SYK) puis des phospholipases C (PLC) qui contrôlent
l’ouverture des canaux calciques. L’entrée de calcium au niveau
intracellulaire entraîne l’activation de l’ostéoclaste. L’expression
d’OSCAR est induite par les cytokines pro-inflammatoires (TNF,
IL-17). Il existe également un récepteur soluble d’OSCAR capable
de bloquer l’activation de l’ostéoclaste. Dans l’articulation des
patients atteints de PR, le récepteur OSCAR est exprimé dans la
synoviale rhumatoïde et au niveau des érosions osseuses sur les
ostéoclastes (Herman, 1304). Dans le sang périphérique, OSCAR
23/01/08 16:55:35
P o l y a r t h r i t e r h u m a t o ï d e :
PR - Physiopathologie
phys i o p a t h o l o g i e, asp e c ts mé dico - é conomiques et imagerie
est surexprimé sur les monocytes des patients atteints de PR par
rapport aux témoins sains (figure 3A). Chez les malades, l’expression d’OSCAR est corrélée au DAS 28, à la CRP (pro­téine C réactive) [figure 3B] et à la VS (vitesse de sédimentation) tandis que
le taux de récepteur soluble d’OSCAR est diminué dans le sérum
des patients atteints de PR par rapport aux témoins. Ces résultats
permettent d’envisager le développement d’un récepteur soluble
d’OSCAR qui pourrait avoir un effet antirésorptif mais aussi antiinflammatoire. Cette propriété pro-inflammatoire du récepteur
OSCAR le distingue de la cytokine RANKL, qui n’a qu’une action
ostéoclastique. Le denosumab (anticorps anti-RANKL) a un effet
sur la résorption, mais pas sur l’inflammation !
clastes bloque la différenciation en ostéoclastes et leur activation.
Les Treg sont mis en présence d’un nombre croissant de préostéoclastes (5, 10, 20…). Le nombre d’érosions osseuses évalué
par le bone pit resorption assay est significativement diminué
jusqu’au ratio de 1 Treg pour 20 préostéoclastes (figure 4). En
d’autres termes, au-delà de 20 préostéoclastes, un Treg ne suffit
plus pour bloquer l’activité ostéoclastique. Lorsqu’un anticorps
anti-CTLA4 neutralisant est ajouté avant la coculture des Treg
et des préostéoclastes, la différenciation des préostéoclastes
en ostéoclastes est augmentée, démontrant l’implication de
CTLA4. L’effet inhibiteur des Treg sur les préostéoclastes est
surtout contrôlé par la molécule CTLA4 et, dans une moindre
mesure, par les cytokines IL-10 et TGFβ.
In vitro, les lymphocytes T régulateurs
inhibent les ostéoclastes via CTLA4
A
Expression d’OSCAR
(intensité moyenne
de fluorescence)
p < 0,0001
250
200
150
100
PR
Expression d’OSCAR
(intensité moyenne
de fluorescence)
PR
Témoins
p < 0,01
200
100
0
CRP
CRP
≤ 5 mg/dl > 5 mg/dl
Figure 3. OSCAR, un nouveau récepteur des ostéoclastes, est
exprimé dans la PR. A. Expression d’OSCAR sur les monocytes
extraits du sang périphérique de patients atteints de PR (colonne
orange) comparée à celle observée chez des témoins sains
(colonne verte). B. L’expression d’OSCAR est corrélée au taux
de CRP. Le récepteur OSCAR est plus exprimé sur les monocytes
du sang périphérique des patients atteints de PR lorsque la CRP
est supérieure à 5 mg/­dl (colonne jaune).
LR-NN-337-0108.indd 8
60
* p < 0,05
30
0
1:5
1:10
1:20
1:50
1:∞
Ratio Treg/préostéoclastes
Contrôles
Figure 4. In vitro, les lymphocytes T régulateurs (Treg) inhibent
l’activation des ostéoclastes.
Les Treg sont mis en présence d’un nombre croissant de préostéoclastes. La résorption osseuse, évaluée par le nombre d’érosions
osseuses sur la lamelle d’hydroxyapatite du bone resorption
assay, est inhibée par les Treg jusqu’à un ratio de 1 Treg pour
20 préostéoclastes.
50
0
B
90
Résorption osseuse
Les lymphocytes T régulateurs (Treg) régulent surtout les
lymphocytes T activés avec un effet inhibiteur sur la réponse
immunitaire pour éviter la persistance de l’inflammation ou le
développement d’une maladie auto-immune. Les Treg expriment
les marqueurs membranaires CD4 et CD25 et le facteur de
transcription Foxp3. Ils régulent l’activation des lymphocytes T
CD4+ soit par contact cellulaire direct impliquant la molécule
CTLA4 qui interagit avec le système CD28/CD80-CD86, soit
à distance via les cytokines suppressives IL-10 et TGFβ qu’ils
sécrètent. L’effet des Treg sur les ostéoclastes n’est pas connu.
In vitro, la mise en présence (coculture) des Treg et des préostéo-
Les anti-CCP
Phase préclinique :
rôle des peptides citrullinés et des cytokines
L’apparition des anti-CCP peut survenir avant les premiers signes
cliniques de la PR. À quelle phase préclinique de la maladie les
anticorps anti-CCP apparaissent-ils ? Y a-t-il un lien avec l’apparition croissante de peptides antigéniques natifs ou citrullinés
avant la maladie ? Pour répondre à ces questions, une étude
a été réalisée à partir du sérum de patients prélevé à la phase
préclinique de la PR, avant et après l’apparition des anti-CCP
et après le diagnostic de la PR (Hueber, 1289). Pour la phase
préclinique, la durée médiane des périodes avant et après l’apparition des anticorps est respectivement de 4 et 0,7 ans. Pour la
période correspondant à la phase clinique de la maladie, la durée
moyenne d’évolution de la PR est de 3 ans. Le dosage des peptides
citrullinés et des cytokines a été effectué pour chacune de ces
La Lettre du Rhumatologue - n° 338 - janvier 2008
23/01/08 16:55:37
gingivalis, impliquée dans les infections gingivales. L’anti-CEP1
reconnaît l’énolase de P. gingivalis mis ou non en présence d’une
PAD (Peptidyl Arginine Deiminase) qui favorise la citrullination des peptides. Cette observation suggère que P. gingivalis
possède une PAD endogène capable d’induire la citrullination
de l’énolase. L’ensemble de ces résultats privilégie non seulement la théorie du mimétisme moléculaire entre un peptide du
soi et celui d’un agent étranger, tous deux ayant une structure
proche (figure 6), mais aussi celle de la diffusion épitopique avec
l’existence de nombreux anticorps dirigés contre des peptides
citrullinés. Cette analogie entre des énolases bactérienne et
humaine privilégie également l’hypothèse du rôle déclenchant
d’une infection bactérienne (gingivale) dans la PR.
Mimétisme moléculaire
Anti-CCP –
Période 1 : 4 ans
Anti-CCP +
PR
Période 2 : 0,7 an
Peptides citrullinés
Cytokines
Figure 5. Phase préclinique : rôle des peptides citrullinés et des
cytokines.
Dans la phase préclinique, on distingue deux périodes : avant
(période 1) et après (période 2) l’apparition des anti-CCP. La
période 3 correspond à la phase symptomatique de la PR. Le
nombre de peptides citrullinés (en vert) augmente plus que
le nombre de peptides natifs non citrullinés (en jaune) entre
les périodes 1 et 3. Les cytokines et les chimiokines augmentent entre les périodes 2 et 3. Le phénomène d’amplitude de
la réponse auto-anticorps explique une diffusion épitopique
(“epitope spreading”), conséquence de la citrullination antigénique croissante.
Un nouvel antigène citrulliné : l’énolase
L’énolase est une enzyme qui intervient dans la glycolyse.
Onze différents peptides citrullinés obtenus à partir de l’énolase humaine ont été mis en présence de sérums de patients
atteints de PR. Le sérum a réagi avec un seul peptide : CEP1
(Citrullinated Enolase Peptide 1). L’anticorps anti-CEP1 isolé
n’a pas de réaction croisée avec les 10 autres énolases, ni avec
les anticorps anti-CCP. En revanche, l’anti-CEP1 est, comme
les anti-CCP, plus fréquemment associé à l’épitope partagé. La
sensibilité et la spécificité de cet anticorps ont été testées sur
trois cohortes différentes et varient respectivement de 37 à 62 %
et de 96 à 98 %. La présence d’anticorps CEP-1 chez les patients
atteints de PR sans anticorps anti-CCP permet d’envisager son
utilisation comme une aide supplémentaire au diagnostic de
PR. L’anti-CEP1 reconnaît une énolase bactérienne. L’épitope
dominant reconnu par l’anti-CEP1 a une parfaite homologie de
séquence (100 %) avec l’énolase de la bactérie Porphyromonas
La Lettre du Rhumatologue - n° 338 - janvier 2008
LR-NN-337-0108.indd 9
Réponse
auto-immune
Anti-CEP1
P. gingivalis
Période 3 : 3 ans
Peptides natifs
PR - Physiopathologie
trois périodes. Avant l’apparition des anti-CCP, l’augmentation
croissante des peptides citrullinés, alors que le nombre de peptides natifs, quant à lui, augmente peu, suggère que l’amplitude
de la réponse anti-CCP est plutôt une conséquence de la citrullination croissante des peptides, ce qui privilégie la théorie de
l’epitope spreading (diffusion épitopique) [figure 5]. L’amplitude
de la réponse auto-anticorps expliquerait une diffusion épitopique, conséquence de la citrullination antigénique croissante.
Cette reconnaissance des peptides citrullinés, marquée par
l’apparition des anticorps anti-CCP, est suivie, après l’apparition
des anticorps et durant la phase clinique de la maladie, d’une
augmentation des cytokines et chimiokines de l’inflammation
ainsi que de cytokines anti-inflammatoires. Cette production
cytokinique témoigne d’une réponse inflammatoire qui suit la
réponse immunitaire avec production d’anticorps (anti-CCP).
Énolase citrullinée
ou autoantigène citrulliné
CPA : cellule présentant l’antigène
TH1 : lymphocyte TH1
Figure 6. Un nouvel antigène citrulliné : l’énolase.
Mimétisme moléculaire entre énolase humaine et bactérienne
(Porphyromonas gingivalis). L’énolase bactérienne a une
structure proche de l’énolase humaine qui pourrait activer une
réponse immunitaire auto-immune avec des anticorps antiénolase humaine (anti-CEP1).
L’amélioration clinique observée pendant la grossesse
n’est pas corrélée à la présence des anticorps anti-CCP
L’étude TARA est un suivi de patientes atteintes de PR pendant
leur grossesse avec une évaluation de l’activité de la PR par le
DAS (Disease Activity Score) 28 3 critères (CRP) tous les 3 mois
puis 6, 12 et 26 semaines après l’accouchement (De Man, 1838).
Des dosages biologiques étaient disponibles pour 119 patientes,
et 76 d’entre elles avaient des anti-CCP. En considérant une
évolution favorable selon les critères de réponse EULAR, les
patientes sans anti-CCP n’ont pas plus d’amélioration de leur
PR que les patientes ayant des anti-CCP (tableau I). Le taux
d’anti-CCP ne variait pas avant et pendant la grossesse (200 UI/­l
en moyenne). Pour les facteurs rhumatoïdes, IgG, IgM et IgA,
les taux étaient également stables au cours de la grossesse. Après
l’accouchement, seul le taux de FR IgM diminuait significativement à la reprise du traitement.
Tableau I. Amélioration clinique de la PR pendant la grossesse et antiCCP. Le pourcentage de patientes qui voient leur état s’améliorer pendant la grossesse est indépendant du statut des anticorps anti-CCP.
Amélioration pendant
la grossesse selon les critères
de réponse EULAR
Bonne/modérée
(n = 47)
Aucune
(n = 72)
p
Anti-CCP+ (n = 76)
29 (38,2 %)
47 (61,8 %)
0,69
Anti-CCP – (n = 43)
18 (41,9 %)
25 (58,1 %)
0,6
23/01/08 16:55:43
P o l y a r t h r i t e r h u m a t o ï d e :
phys i o p a t h o l o g i e, asp e c ts mé dico - é conomiques et imagerie
Nouveaux critères diagnostiques de la PR débutante
Tableau II. Nouveaux critères diagnostiques des PR récentes. Les
4 critères cliniques (arthrite > 3, atteinte des mains, symétrique,
raideur matinale > 1 h) plus anti-CCP ont une meilleure sensibilité
que les critères ACR 1987 incluant ou non les anti-CCP.
ACR 1987 ACR 1987+ anti-CCP
Nouveaux critères :
4 critères cliniques
+ anti-CCP
Sensibilité (%)
25
44
63
Spécificité (%)
86
86
72
Facteurs de prédisposition génétique
à la polyarthrite rhumatoïde
Le congrès ACR 2007 a été marqué par des avancées significatives dans l’identification de facteurs de prédisposition génétique
à la PR. En effet, une première étude, utilisant une approche par
criblage systématique de 300 000 variants bialléliques (Single
10
LR-NN-337-0108.indd 10
IL-12
IL-23
P19 P40
P19 P40
STAT 1, 2, 4, 5
IL-23R
IL-12R
Les critères ACR 1987 ne sont pas adaptés au diagnostic de PR
débutantes lorsque les signes d’arthrite évoluent depuis moins
de 6 mois. Une révision de ces critères est envisagée, incluant
les anti-CCP. Dans cette étude, de nouveaux critères ont été
établis et testés sur une population de 292 patients atteints de PR
incluant 79 malades ayant une arthrite évoluant depuis moins de
6 mois. Les données cliniques, biologiques et radiologiques ont
été obtenues à partir des dossiers médicaux des patients suivis
pendant une durée de 6 mois. Parmi les critères ACR 1987,
certains sont rarement observés au début de la maladie. Ainsi,
dans cette étude, sur les 79 patients dont l’arthrite était récente,
aucun n’avait de nodules rhumatoïdes, et 8 % avaient des érosions radiologiques – alors que sur l’ensemble de la population,
16 % ont des érosions et 8 % des nodules (Liao, 2150). À partir
de ces observations, différentes combinaisons ont été testées :
les critères ACR 1987 avec anti-CCP, les 4 critères cliniques
ACR 1987 avec anti-CCP, les 4 critères cliniques plus le critère
radiologique et les anti-CCP. Le diagnostic de PR était retenu
par un expert à la dernière visite. La spécificité et la sensibilité
de ces différents critères ont été testées sur la population totale
(n = 292) et sur la population PR débutante (< 6 mois, n = 79)
[tableau II]. Pour le diagnostic des PR récentes, les 4 critères
cliniques plus anti-CCP ont la meilleure sensibilité (63 % versus
25 % pour les critères ACR 1987), avec une spécificité qui reste
correcte. Pour l’ensemble des 292 patients, l’ajout des anti-CCP
aux critères ACR 1987 augmente peu la sensibilité et la spécificité. Avec les 4 critères cliniques plus anti-CCP, par rapport aux
critères ACR 1987 plus anti-CCP, la sensibilité est augmentée,
passant à 74 % (versus 55 %), mais avec une perte de la spécificité calculée, celle-ci passant à 81 % (versus 91 %). L’association
des 4 critères cliniques ACR 1987 et des anti-CCP semble plus
adaptée pour le diagnostic de PR récente.
IL-12Rβ2
IL-12Rβ1C
PR - Physiopathologie
STAT 1, 2, 4, 5
IFNα
IL-17
Figure 7. Rôle du facteur de transcription STAT4 dans la transduction du signal des voies IL-12 et IL-23.
Nucleotide Polymorphisms [SNP]) du génome, a conduit à l’identification de deux SNP, dans le locus TRAF1-C5. Ces polymorphismes ne sont pas localisés dans des régions codantes et ne
correspondent pas, à l’évidence, à des variations du génome
pouvant conduire à une dysrégulation des gènes C5 ou TRAF1.
Le polymorphisme causal est donc vraisemblablement situé à
proximité de ces deux SNP ; une analyse plus fine de la région est
en cours. Néanmoins, les deux gènes peuvent logiquement être
impliqués dans la PR, comme acteur de la réaction inflammatoire
pour C5, ou comme élément de la transduction du signal après
fixation du TNF sur son récepteur pour TRAF1.
Un autre facteur de prédisposition génétique à la PR a été identifié par une approche différente. Il s’agissait de préciser une
région située sur le chromosome 2q, où une liaison avait été
mise en évidence en 2003 au cours de la polyarthrite rhumatoïde
(D. Jawaheer et al., Arthritis Rheum 2003;48(4):906-16). Ce
résultat signifiait que, dans des familles où plusieurs membres
étaient atteints de PR (familles dites “multiplex”), il existait un
excès de ressemblance entre germains atteints à cette région du
génome. Cette équipe a affiné ce résultat par l’analyse de polymorphismes de 13 gènes candidats dans cette région de liaison
et a pu mettre en évidence une association significative avec un
SNP (rs7574865) localisé dans le gène STAT4 (p = 8,3 x 10 – 5 ;
OR = 1,3 ; IC95 : 1,1-1,4). Ce gène code pour un facteur de transcription impliqué dans la transduction du signal des voies IL-12
et IL-23 (figure 7).
■
La Lettre du Rhumatologue - n° 338 - janvier 2008
23/01/08 16:55:44
Téléchargement