PR - Physiopathologie
Figure 1. Lépitope parta HLA-DRB1*04 est transmis aux patientes
atteintes de PR par les cellules microchimériques (CM) fœtales.
Nombre de cellules microchimériques HLA-DRB1*04 dans le sang
de 43 patientes atteintes de PR (points roses) et de 64 témoins
sains (points verts) ne possédant pas le gène HLA-DRB1*04.
Chaque point correspond à un patient.
Expression de cM
HLA-DRB1*04
Nombre de cM/million de PBMC
PR (n = 43)
Témoins (n = 64)
500 000
300 000
10 000
9 000
7 000
800
600
400
0
5 000
3 000
1 000
200
5 %
1 %
0,1 %
= 1 patient
8
p = 0,031
La Lettre du Rhumatologue - n° 338 - janvier 2008
6
Polyarthrite rhumatoïde :
physiopathologie, aspects médico-économiques et imagerie
Physiopathologie
Physiopathology
IP J. Morel, C. Miceli
POINTS FORTS
Microchimérisme dans la polyarthrite rhumatoïde (PR) :
un rôle pathogène médié par les cellules microchimériques
trouvées chez les patientes atteintes de PR ne possédant pas
de gène codant pour l’épitope partagé ?
Inammasome : un lien entre immunité innée et immunité
adaptative dans la pathogénie de la PR ?
De nouveaux polymorphismes associés à la PR : STAT4
et C5 TRAF.
OSCAR, un cepteur des osoclastes impliq dans l’inam-
mation et la destruction : une future cible thérapeutique ?
In vitro, les T régulateurs inhibent l’ostéoclastose par la
molécule CTLA4 : une nouvelle propriété des T régulateurs.
Une citrullination antigénique croissante amplifie la
réponse auto-anticorps, induisant l’apparition des anti-CCP
avant le déclenchement de la PR.
Les anticorps anti-énolase citrullinée : un nouvel outil
diagnostique pour les PR anti-CCP négatifs et le témoin d’une
réponse à une infection bactérienne dentaire ?
La présence des anti-CCP nest pas associée à une moindre
amélioration de la PR au cours de la grossesse.
Les nouveaux critères incluant les anti-CCP sont plus
sensibles pour diagnostiquer les PR débutantes.
Mots-clés : Microchimérisme Inammasome Anticorps
anti-CCP.
Keywords: Microchimerism – Inflammasome – Anti-CCP
antibodies.
LE RÔLE DU MICROCHIMÉRISME
DANS LA PATHOGÉNIE
DE LA POLYARTHRITE RHUMATOÏDE
On appelle microchimérisme la présence de cellules généti-
quement différentes chez un même individu. Par exemple, des
cellules fœtales d’un enfant mâle (XY) ont été retrouvées chez une
femme de 26 ans après sa grossesse. Ces cellules, dites “micro-
chimériques, peuvent être transmises d’un individu à l’autre lors
d’une grossesse normale ou d’une fausse couche par un transfert
entre la mère et le fœtus via le placenta, lors d’une transfusion ou
encore lors d’une transplantation d’organe ou de cellules souches.
Dans les maladies auto-immunes (sclérodermies, myosites, etc.),
certains arguments suggèrent un rôle du microchimérisme. Les
patientes sclérodermiques ont en effet un taux d’ADN mâle plus
élevé que les témoins sains du même sexe. Par quels mécanismes
ces cellules microchimériques peuvent-elles intervenir dans la
pathogénie des maladies auto-immunes ?
1.
le des cellules microchiriques dans la ponse immunitaire
de type alloréactivité par analogie avec les manifestations dysim-
munitaires observées dans la réaction du greffon contre l’hôte.
2.
Rôle des cellules microchimériques dans la transmission dun
message cytokinique ou antigénique.
Dans la polyarthrite rhumatoïde (PR), 20 % des femmes
atteintes nont pas de gène codant pour l’épitope partagé. Pour
ces patientes, ce gène pourrait être transmis par les cellules
microchimériques (L. Maestroni, 744). Pour tester cette hypo-
thèse, les cellules mononucléées (PBMC) ont été extraites du
sang périphérique de patientes atteintes de PR non porteuses
des gènes HLA-DRB1*04 (n = 43) ou HLA-DRB1*01 (n = 33)
ainsi que de sujets témoins (n = 64 pour HLA-DRB1*04 et n = 46
pour HLA-DRB1*01). Un typage génétique sur ces cellules a été
réalisé par technique SSO (Single Sequence Oligonucleotide).
Les femmes atteintes de PR ont un nombre de cellules micro-
chimériques porteuses de l’allèle HLA-DRB1*04 plus important
que les témoins (figure 1). La même observation est faite pour
LR-NN-337-0108.indd 6 23/01/08 16:55:30
PR - Physiopathologie
Figure 2. L’inammasome.
Lorsque le signal de danger (DAMP) ou un agent infectieux (PAMP)
se lie au récepteur Node-Like Receptor, un complexe se forme
avec les protéines NACHT, PYD et ASC : l’inammasome. La pro-
téine ASC va favoriser le clivage de la caspase 1, qui pourra ainsi
activer les cytokines présentes dans le cytoplasme sous forme
inactive comme la pro-IL-1. Le récepteur purinergique P2X7 est
capable d’activer l’inammasome.
PAMP : Pathogen Associated Molecular Patterns
DAMP : Danger Associated Molecular Patterns
NALP : Nacht LRR PYD domains
Activation de caspase 1
Protéine ASC
Inammasome
DAMP PAMP ATP
P2X7
TLR/NLR
Pro-IL-1β
Pro-IL-18
Pro-IL-33
IL-1β
IL-18
IL-33
La Lettre du Rhumatologue - n° 338 - janvier 2008
7
l’allèle HLA-DRB1*01. En revanche, l’expression d’un allèle non
associé à la PR (HLA-DQB1*02) est similaire chez les patientes
atteintes de PR et les témoins. Lépitope partagé porté par les
cellules microchimériques est observé presque exclusivement
chez les patientes atteintes de PR. Ce résultat suggère que les
gènes HLA-DRB1*04 et 01 pourraient être transmis par les
cellules microchimériques chez les patientes non porteuses du
gène de l’épitope partagé. Des observations comparables ont été
faites par une autre équipe en utilisant une technique différente
(Yan, 368). Au lieu de typer les gènes HLA-DRB1*04 et 01, Yan
et al. ont typé les séquences de l’épitope partagé (QRRAA et
QKRAA) chez les patientes atteintes de PR ne possédant pas
de gène codant pour cet épitope partagé. Ils ont obserune
prévalence plus élevée de cellules microchimériques porteuses
de l’épitope partagé que chez les témoins sains.
L’INFLAMMASOME : UN LIEN ENTRE IMMUNITÉ
INNÉE ET IMMUNITÉ ADAPTATIVE ?
La cellule présentant l’antigène peut reconnaître un antigène
(agents infectieux ou un signal de danger) et clencher une
réponse inflammatoire immédiate médiée par l’immunité innée
impliquant les polynucléaires neutrophiles (PNN), les macro-
phages et le complément. Dans certaines situations, une réponse
plus lente mais plus spécifique dirigée contre l’antigène est
médiée par l’immunité adaptative impliquant les lymphocytes
(B et T).
Linflammasome est un complexe qui intervient dans l’immunité
innée (figure 2). Les signaux de danger DAMP (Danger Asso-
ciated Molecule Patterns) ou les molécules d’agents infectieux
PAMP (Pathogen Associated Molecule Patterns) se lient à des
récepteurs membranaires (Toll-Like Receptor) ou intracellu-
laires (Node-Like Receptor). Cette liaison entraîne la formation
d’un complexe recrutant les protéines NACHT, PYD et ASC
(Apoptosis-associated Speck-like protein containing a CARD)
et formant ainsi l’inflammasome. Ce complexe va activer la
caspase 1, qui peut alors cliver un domaine de certaines cyto-
kines présentes dans le cytoplasme sous forme inactive (pro-
IL-1, pro-IL-18, etc.). Les cytokines deviennent alors actives
et sont excrétées dans le milieu extracellulaire, provoquant
ainsi une inflammation immédiate. Il existe trois récepteurs de
l’inflammasome : NALP1 (NACHT LRR PYD), NALP3 et IPAF.
Ces trois récepteurs ont une protéine ASC qui intervient dans
l’activation de la caspase 1.
Dans cette étude, trois souches de souris DBA1 knockout ont
été utilisées. La première na pas le gène NALP3 (KO NALP3),
la deuxième na pas le gène IPAF (KO IPAF) et la troisième ne
possède pas le ne ASC (KO ASC), qui code pour une pro-
téine présente sur les trois récepteurs de l’inflammasome (Kara-
baba, 1280). Une arthrite à adjuvant est induite dans l’une des
articulations de la souris avec de l’albumine bovine méthylée
(mBSA). Seule la souris KO ASC développe une arthrite moins
vère sur les plans clinique, biologique et histologique. L’IL-1
intra-articulaire est diminuée, mais l’activité de la caspase 1 est
conservée, témoignant qu’une autre molécule est aussi capable
d’activer la caspase indépendamment de la protéine ASC. Les
lymphocytes T des souris KO ASC produisent moins d’IFNγ
et d’IL-2, ce qui suggère que la protéine ASC est capable de
moduler la sécrétion des cytokines TH1. Cette dernière obser-
vation indique que la protéine ASC pourrait être un lien entre
l’immunité innée et l’immunité adaptative de type TH1 dans
l’arthrite expérimentale. Quel est maintenant le le de l’in-
flammasome dans la PR ?
MÉCANISME DE LA DESTRUCTION OSSEUSE : OSCAR,
UN NOUVEAU RÉCEPTEUR DES OSTÉOCLASTES
EXPRIMÉ DANS LA POLYARTHRITE RHUMATOÏDE
OSCAR (OSteoClast Associated Receptor) est un récepteur des
ostéoclastes posdant un domaine Fcγ-like qui ne se lie pas
avec les immunoglobulines. Le ligand d’OSCAR nest pas connu,
mais la liaison de ce ligand avec OSCAR active des tyrosines
kinases (SYK) puis des phospholipases C (PLC) qui contrôlent
l’ouverture des canaux calciques. Lentrée de calcium au niveau
intracellulaire entraîne l’activation de l’ostéoclaste. Lexpression
d’OSCAR est induite par les cytokines pro-inflammatoires (TNF,
IL-17). Il existe également un récepteur soluble d’OSCAR capable
de bloquer l’activation de l’ostéoclaste. Dans l’articulation des
patients atteints de PR, le récepteur OSCAR est exprimé dans la
synoviale rhumatoïde et au niveau des érosions osseuses sur les
ostéoclastes (Herman, 1304). Dans le sang périphérique, OSCAR
LR-NN-337-0108.indd 7 23/01/08 16:55:35
PR - Physiopathologie
Figure 4. In vitro, les lymphocytes T régulateurs (Treg) inhibent
l’activation des ostéoclastes.
Les Treg sont mis en présence d’un nombre croissant de préostéo-
clastes. La résorption osseuse, évaluée par le nombre d’érosions
osseuses sur la lamelle d’hydroxyapatite du bone resorption
assay, est inhibée par les Treg jusqu’à un ratio de 1 Treg pour
20 préostéoclastes.
* p < 0,05
90
60
30
0
Résorption osseuse
1:5 1:10 1:20 1:50 1:∞ Contrôles
Ratio Treg/préostéoclastes
Figure 3. OSCAR, un nouveau récepteur des ostéoclastes, est
exprimé dans la PR. A. Expression d’OSCAR sur les monocytes
extraits du sang périphérique de patients atteints de PR (colonne
orange) comparée à celle observée chez des témoins sains
(colonne verte). B. Lexpression d’OSCAR est corrélée au taux
de CRP. Le récepteur OSCAR est plus exprimé sur les monocytes
du sang périphérique des patients atteints de PR lorsque la CRP
est supérieure à 5 mg/dl (colonne jaune).
p < 0,0001
p < 0,01
250
200
150
100
50
0
Expression d’OSCAR
(intensité moyenne
de uorescence)
PR Témoins
CRP
≤ 5 mg/dl CRP
> 5 mg/dl
Expression d’OSCAR
(intensité moyenne
de uorescence)
200
100
0
A
BPR
La Lettre du Rhumatologue - n° 338 - janvier 2008
8
Polyarthrite rhumatoïde :
physiopathologie, aspects médico-économiques et imagerie
est surexprimé sur les monocytes des patients atteints de PR par
rapport aux témoins sains (gure 3A). Chez les malades, l’expres-
sion d’OSCAR est corrélée au DAS 28, à la CRP (protéine C réac-
tive) [figure 3B] et à la VS (vitesse de sédimentation) tandis que
le taux de récepteur soluble d’OSCAR est diminué dans le sérum
des patients atteints de PR par rapport aux moins. Ces résultats
permettent d’envisager le développement d’un récepteur soluble
d’OSCAR qui pourrait avoir un effet antirésorptif mais aussi anti-
inflammatoire. Cette propriépro-inflammatoire du récepteur
OSCAR le distingue de la cytokine RANKL, qui na qu’une action
ostéoclastique. Le denosumab (anticorps anti-RANKL) a un effet
sur la résorption, mais pas sur l’inflammation !
IN VITRO, LES LYMPHOCYTES T RÉGULATEURS
INHIBENT LES OSTÉOCLASTES VIA CTLA4
Les lymphocytes T gulateurs (Treg) gulent surtout les
lymphocytes T activés avec un effet inhibiteur sur la réponse
immunitaire pour éviter la persistance de l’inflammation ou le
développement d’une maladie auto-immune. Les Treg expriment
les marqueurs membranaires CD4 et CD25 et le facteur de
transcription Foxp3. Ils régulent lactivation des lymphocytes T
CD4+ soit par contact cellulaire direct impliquant la molécule
CTLA4 qui interagit avec le système CD28/CD80-CD86, soit
à distance via les cytokines suppressives IL-10 et TGFβ qu’ils
sécrètent. Leffet des Treg sur les ostéoclastes nest pas connu.
In vitro, la mise en présence (coculture) des Treg et des préostéo-
clastes bloque la différenciation en ostéoclastes et leur activation.
Les Treg sont mis en présence d’un nombre croissant de pré-
ostéoclastes (5, 10, 20…). Le nombre d’érosions osseuses évalué
par le bone pit resorption assay est significativement diminué
jusqu’au ratio de 1 Treg pour 20 préostéoclastes (figure 4). En
d’autres termes, au-delà de 20 préostéoclastes, un Treg ne suffit
plus pour bloquer l’activité ostéoclastique. Lorsqu’un anticorps
anti-CTLA4 neutralisant est ajouté avant la coculture des Treg
et des préostéoclastes, la différenciation des posoclastes
en osoclastes est augmentée, démontrant l’implication de
CTLA4. Leffet inhibiteur des Treg sur les préostéoclastes est
surtout contrôlé par la molécule CTLA4 et, dans une moindre
mesure, par les cytokines IL-10 et TGFβ.
LES ANTICCP
Phase préclinique :
rôle des peptides citrullinés et des cytokines
Lapparition des anti-CCP peut survenir avant les premiers signes
cliniques de la PR. À quelle phase préclinique de la maladie les
anticorps anti-CCP apparaissent-ils ? Y a-t-il un lien avec lappa-
rition croissante de peptides antigéniques natifs ou citrullinés
avant la maladie ? Pour répondre à ces questions, une étude
a été réalisée à partir du sérum de patients prélevé à la phase
préclinique de la PR, avant et après l’apparition des anti-CCP
et après le diagnostic de la PR (Hueber, 1289). Pour la phase
préclinique, la durée médiane des périodes avant et après l’appa-
rition des anticorps est respectivement de 4 et 0,7 ans. Pour la
période correspondant à la phase clinique de la maladie, la durée
moyenne d’évolution de la PR est de 3 ans. Le dosage des peptides
citrullinés et des cytokines a été effectué pour chacune de ces
LR-NN-337-0108.indd 8 23/01/08 16:55:37
PR - Physiopathologie
Figure 5. Phase préclinique : rôle des peptides citrullinés et des
cytokines.
Dans la phase préclinique, on distingue deux périodes : avant
(période 1) et après (période 2) l’apparition des anti-CCP. La
période 3 correspond à la phase symptomatique de la PR. Le
nombre de peptides citrullinés (en vert) augmente plus que
le nombre de peptides natifs non citrullinés (en jaune) entre
les périodes 1 et 3. Les cytokines et les chimiokines augmen-
tent entre les périodes 2 et 3. Le phénomène d’amplitude de
la réponse auto-anticorps explique une diusion épitopique
(“epitope spreading”), conséquence de la citrullination anti-
génique croissante.
Peptides natifs
Anti-CCP
Période 1 : 4 ans
Anti-CCP +
Période 2 : 0,7 an
PR
Période 3 : 3 ans
Peptides citrullinés
Cytokines
Figure 6. Un nouvel antigène citrulliné : l’énolase.
Mimétisme moléculaire entre énolase humaine et bactérienne
(Porphyromonas gingivalis). Lénolase bactérienne a une
structure proche de l’énolase humaine qui pourrait activer une
réponse immunitaire auto-immune avec des anticorps anti-
énolase humaine (anti-CEP1).
Mimétisme moléculaire Réponse
auto-immune
P. gingivalis
Énolase citrullinée
ou autoantigène citrulliné CPA : cellule présentant l’antigène
TH1 : lymphocyte TH1
Anti-CEP1
La Lettre du Rhumatologue - n° 338 - janvier 2008
9
trois périodes. Avant l’apparition des anti-CCP, laugmentation
croissante des peptides citrullinés, alors que le nombre de pep-
tides natifs, quant à lui, augmente peu, suggère que l’amplitude
de la réponse anti-CCP est plutôt une conséquence de la citrul-
lination croissante des peptides, ce qui privilégie la théorie de
lepitope spreading (diffusion épitopique) [figure 5]. Lamplitude
de la réponse auto-anticorps expliquerait une diffusion épito-
pique, conséquence de la citrullination antigénique croissante.
Cette reconnaissance des peptides citrullinés, marquée par
l’apparition des anticorps anti-CCP, est suivie, après lapparition
des anticorps et durant la phase clinique de la maladie, d’une
augmentation des cytokines et chimiokines de l’inflammation
ainsi que de cytokines anti-inflammatoires. Cette production
cytokinique témoigne d’une réponse inflammatoire qui suit la
réponse immunitaire avec production d’anticorps (anti-CCP).
gingivalis, impliquée dans les infections gingivales. Lanti-CEP1
reconnaît l’énolase de P. gingivalis mis ou non en présence dune
PAD (Peptidyl Arginine Deiminase) qui favorise la citrullina-
tion des peptides. Cette observation suggère que P. gingivalis
possède une PAD endogène capable d’induire la citrullination
de l’énolase. Lensemble de ces résultats privilégie non seule-
ment la théorie du mimétisme moléculaire entre un peptide du
soi et celui d’un agent étranger, tous deux ayant une structure
proche (figure 6), mais aussi celle de la diffusion épitopique avec
l’existence de nombreux anticorps dirigés contre des peptides
citrullinés. Cette analogie entre des énolases bactérienne et
humaine privilégie également l’hypothèse du rôle déclenchant
d’une infection bactérienne (gingivale) dans la PR.
L’amélioration clinique observée pendant la grossesse
nest pas corrélée à la présence des anticorps anti-CCP
Létude TARA est un suivi de patientes atteintes de PR pendant
leur grossesse avec une évaluation de l’activité de la PR par le
DAS (Disease Activity Score) 28 3 critères (CRP) tous les 3 mois
puis 6, 12 et 26 semaines après l’accouchement (De Man, 1838).
Des dosages biologiques étaient disponibles pour 119 patientes,
et 76 d’entre elles avaient des anti-CCP. En considérant une
évolution favorable selon les critères de réponse EULAR, les
patientes sans anti-CCP nont pas plus d’amélioration de leur
PR que les patientes ayant des anti-CCP (tableau I). Le taux
d’anti-CCP ne variait pas avant et pendant la grossesse (200 UI/l
en moyenne). Pour les facteurs rhumatoïdes, IgG, IgM et IgA,
les taux étaient également stables au cours de la grossesse. Après
l’accouchement, seul le taux de FR IgM diminuait significative-
ment à la reprise du traitement.
Un nouvel antigène citrulliné : l’énolase
Lénolase est une enzyme qui intervient dans la glycolyse.
Onze différents peptides citrullinés obtenus à partir de l’éno-
lase humaine ont été mis en présence de sérums de patients
atteints de PR. Le sérum a agi avec un seul peptide : CEP1
(Citrullinated Enolase Peptide 1). Lanticorps anti-CEP1 isolé
na pas de réaction croisée avec les 10 autres énolases, ni avec
les anticorps anti-CCP. En revanche, l’anti-CEP1 est, comme
les anti-CCP, plus fréquemment associé à l’épitope partagé. La
sensibilité et la spécificité de cet anticorps ont été testées sur
trois cohortes différentes et varient respectivement de 37 à 62 %
et de 96 à 98 %. La présence danticorps CEP-1 chez les patients
atteints de PR sans anticorps anti-CCP permet d’envisager son
utilisation comme une aide supplémentaire au diagnostic de
PR. L’anti-CEP1 reconnaît une énolase bactérienne. Lépitope
dominant reconnu par l’anti-CEP1 a une parfaite homologie de
séquence (100 %) avec l’énolase de la bactérie Porphyromonas
Tableau I. Amélioration clinique de la PR pendant la grossesse et anti-
CCP. Le pourcentage de patientes qui voient leur état s’améliorer pen-
dant la grossesse est indépendant du statut des anticorps anti-CCP.
Amélioration pendant
la grossesse selon les critères
de réponse EULAR
Bonne/modérée
(n = 47)
Aucune
(n = 72)
p
Anti-CCP+ (n = 76) 29 (38,2 %) 47 (61,8 %) 0,69
Anti-CCP – (n = 43) 18 (41,9 %) 25 (58,1 %) 0,6
LR-NN-337-0108.indd 9 23/01/08 16:55:43
PR - Physiopathologie
Tableau II. Nouveaux critères diagnostiques des PR récentes. Les
4 critères cliniques (arthrite > 3, atteinte des mains, symétrique,
raideur matinale > 1 h) plus anti-CCP ont une meilleure sensibilité
que les critères ACR 1987 incluant ou non les anti-CCP.
ACR 1987 ACR 1987+ anti-CCP Nouveaux critères :
4 critères cliniques
+ anti-CCP
Sensibilité (%) 25 44 63
Spécicité (%) 86 86 72
Figure 7. Rôle du facteur de transcription STAT4 dans la trans-
duction du signal des voies IL-12 et IL-23.
IL-12 IL-23
IFNα
IL-17
P40
IL-12R
IL-23R
IL-12Rβ1C
IL-12Rβ2
STAT 1, 2, 4, 5
STAT 1, 2, 4, 5
P19
P40
P19
La Lettre du Rhumatologue - n° 338 - janvier 2008
10
Polyarthrite rhumatoïde :
physiopathologie, aspects médico-économiques et imagerie
Nouveaux critères diagnostiques de la PR débutante
Les critères ACR 1987 ne sont pas adaptés au diagnostic de PR
débutantes lorsque les signes darthrite évoluent depuis moins
de 6 mois. Une révision de ces critères est envisagée, incluant
les anti-CCP. Dans cette étude, de nouveaux critères ont é
établis et testés sur une population de 292 patients atteints de PR
incluant 79 malades ayant une arthrite évoluant depuis moins de
6 mois. Les données cliniques, biologiques et radiologiques ont
été obtenues à partir des dossiers dicaux des patients suivis
pendant une due de 6 mois. Parmi les critères ACR 1987,
certains sont rarement observés au début de la maladie. Ainsi,
dans cette étude, sur les 79 patients dont l’arthrite était récente,
aucun navait de nodules rhumatoïdes, et 8 % avaient des éro-
sions radiologiques – alors que sur lensemble de la population,
16 % ont des érosions et 8 % des nodules (Liao, 2150). À partir
de ces observations, différentes combinaisons ont été testées :
les critères ACR 1987 avec anti-CCP, les 4 critères cliniques
ACR 1987 avec anti-CCP, les 4 critères cliniques plus le critère
radiologique et les anti-CCP. Le diagnostic de PR était retenu
par un expert à la dernière visite. La spécificité et la sensibilité
de ces différents critères ont été testées sur la population totale
(n = 292) et sur la population PR débutante (< 6 mois, n = 79)
[tableau II]. Pour le diagnostic des PR récentes, les 4 critères
cliniques plus anti-CCP ont la meilleure sensibilité (63 % versus
25 % pour les critères ACR 1987), avec une spécificité qui reste
correcte. Pour lensemble des 292 patients, l’ajout des anti-CCP
aux critères ACR 1987 augmente peu la sensibilité et la spécifi-
cité. Avec les 4 critères cliniques plus anti-CCP, par rapport aux
critères ACR 1987 plus anti-CCP, la sensibilité est augmentée,
passant à 74 % (versus 55 %), mais avec une perte de la spécifi-
cité calculée, celle-ci passant à 81 % (versus 91 %). L’association
des 4 critères cliniques ACR 1987 et des anti-CCP semble plus
adaptée pour le diagnostic de PR récente.
Nucleotide Polymorphisms [SNP]) du génome, a conduit à l’iden-
tification de deux SNP, dans le locus TRAF1-C5. Ces polymor-
phismes ne sont pas localisés dans des régions codantes et ne
correspondent pas, à l’évidence, à des variations du génome
pouvant conduire à une dysrégulation des gènes C5 ou TRAF1.
Le polymorphisme causal est donc vraisemblablement situé à
proximité de ces deux SNP ; une analyse plus fine de la région est
en cours. Néanmoins, les deux gènes peuvent logiquement être
impliqués dans la PR, comme acteur de la réaction inflammatoire
pour C5, ou comme élément de la transduction du signal après
fixation du TNF sur son récepteur pour TRAF1.
Un autre facteur de prédisposition génétique à la PR a été iden-
tifié par une approche différente. Il s’agissait de préciser une
région située sur le chromosome 2q, une liaison avait été
mise en évidence en 2003 au cours de la polyarthrite rhumatoïde
(D. Jawaheer et al., Arthritis Rheum 2003;48(4):906-16). Ce
résultat signifiait que, dans des familles où plusieurs membres
étaient atteints de PR (familles dites “multiplex”), il existait un
excès de ressemblance entre germains atteints à cette région du
génome. Cette équipe a affiné ce résultat par l’analyse de poly-
morphismes de 13 gènes candidats dans cette région de liaison
et a pu mettre en évidence une association significative avec un
SNP (rs7574865) localisé dans le gène STAT4 (p = 8,3 x 10 5 ;
OR = 1,3 ; IC95 : 1,1-1,4). Ce gène code pour un facteur de trans-
cription impliqué dans la transduction du signal des voies IL-12
et IL-23 (figure 7).
FACTEURS DE PRÉDISPOSITION GÉNÉTIQUE
À LA POLYARTHRITE RHUMATOÏDE
Le congrès ACR 2007 a été marqué par des avancées significa-
tives dans l’identification de facteurs de prédisposition génétique
à la PR. En effet, une première étude, utilisant une approche par
criblage systématique de 300 000 variants bialléliques (Single
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