SÉNAT – SÉANCE DU 12 FÉVRIER 2009 1857
En tout cas, vous n’avez pas envisagé, apparemment, de
présenter le projet de loi organique qui est pourtant néces-
saire afi n de mettre en œuvre cette nouvelle disposition
constitutionnelle, c’est-à-dire le semblant de référendum
d’initiative citoyenne !
Je rappelle que ce référendum « nouvelle formule » peut
être organisé sur l’initiative d’un cinquième des membres
du Parlement, soit cent quatre-vingt députés et sénateurs, et
qu’il doit être soutenu par un dixième des électeurs inscrits,
c’est-à-dire par plus de quatre millions de personnes.
Vous constatez, mes chers collègues, qu’il n’est pas très
menaçant !
D’ailleurs, cette initiative aboutirait à une proposition de
loi soumise au bon vouloir de la majorité, ce qui montre
que le dispositif est très encadré et que nous restons bien
loin de la démocratie directe et du référendum d’initiative
populaire !
Toutefois, ce nouvel espace démocratique, si étroit soit-il,
doit être aménagé.
Je propose donc que nous évitions une nouvelle loi
organique et décidions de mettre en œuvre le dispositif de
l’article 11 à travers cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission de
la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d’administration générale,
rapporteur. Comme l’a indiqué Mme Nicole Borvo Cohen-
Seat, le troisième alinéa de l’article 11 de la Constitution
prévoit une initiative référendaire et fi xe les conditions dans
lesquelles celle-ci peut être organisée.
Pour permettre l’application de ces dispositions, une loi
organique sera nécessaire, et peut-être M. le secrétaire d’État
pourra-t-il nous apporter quelques indications sur la date
du dépôt de ce texte.
En tout état de cause, les mesures proposées n’ont pas leur
place dans le présent projet de loi organique, puisque celui-
ci ne vise que les articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution.
Un autre texte organique sera nécessaire, comme d’ailleurs
pour bien d’autres dispositions.
Le projet de loi organique relatif au référendum devrait
être déposé le plus rapidement possible, me semble-t-il,...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il n’a même pas été
annoncé !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. ... mais, je le répète,
cette disposition n’a pas sa place dans le présent texte.
La commission demande donc le retrait de cet amende-
ment, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Roger Karoutchi, secrétaire d’État chargé des relations
avec le Parlement. Il est vrai que, lors de mon audition
devant la commission des lois, j’ai évoqué la préparation des
autres projets de loi organique sans entrer dans les détails.
Toutefois, un texte relatif au référendum sera bien déposé,
et il est lui aussi en préparation.
Un projet de loi organique a d’ores et déjà été transmis
au Conseil d’État, qui porte sur l’exception d’inconstitu-
tionnalité. Comme l’a souligné Mme Nicole Borvo Cohen-
Seat, deux autres textes sont prêts, qui sont relatifs respecti-
vement au Conseil économique, social et environnemental
et au Conseil supérieur de la magistrature.
Quant au projet de loi organique sur le référendum, nous
y travaillons. Bien sûr, tous les textes prévus par la révision
constitutionnelle seront présentés progressivement au
Parlement, au cours de l’année 2009.
Au bénéfi ce de cet engagement du Gouvernement,
madame Borvo Cohen-Seat, je vous demande de bien
vouloir retirer votre amendement, faute de quoi j’émettrai
un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Michel,
pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Michel. Je voterai cette disposition, comme
l’ensemble des sénateurs de mon groupe.
Tout d’abord, monsieur le rapporteur, cet amendement a
tout à fait sa place dans ce projet de loi organique.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Non !
M. Jean-Pierre Michel. Ce n’est pas un cavalier : il suffi t
de modifi er l’intitulé du projet loi organique et de préciser
que celui-ci s’appliquera également à l’article 11 de la
Constitution pour que cet amendement soit recevable !
Dans un projet de loi organique relatif à l’application de
la révision constitutionnelle de juillet 2008, nous pouvons
tout à fait introduire d’autres dispositions...
M. Patrice Gélard. Non ! Ce n’est pas la règle !
M. Jean-Pierre Michel. ... que celles que le Gouvernement
a restrictivement prévues, d’ailleurs dans son intérêt propre
et non dans celui du Parlement ou de la démocratie ! (M. le
secrétaire d’État se récrie.)
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Et pourquoi pas un
projet de loi organique unique pour tous les articles de la
Constitution ?
M. Jean-Pierre Michel. Monsieur le secrétaire d’État,
si nous pouvions organiser aujourd’hui un référendum
d’initiative populaire, comme le prévoit l’article 11 de la
Constitution, je suppose que l’on trouverait assez de parle-
mentaires pour interroger les citoyens, par exemple, sur la
politique économique et sociale du Gouvernement !
Il serait intéressant de consulter les Français pour savoir
s’ils approuvent, ou non, les demi-mesures prises par le
Gouvernement, ou encore le plan de relance de l’automo-
bile ! Peugeot annonçait hier la suppression de dix mille
postes sans licenciements, mais cela augmentera le chômage
dans les régions où l’entreprise est implantée, notamment
celle dont je suis l’élu !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d’État. Quel rapport avec le
projet de loi organique ?
M. Jean-Pierre Michel. Il serait intéressant de savoir ce
que pensent les Français de la situation aux Antilles, en
Martinique et en Guadeloupe, ou ailleurs outre-mer !
Toutefois le Gouvernement se garde bien de demander
l’avis des Français sur ces questions, tandis que le Président
de la République continue à pérorer, de saut de puce en saut
de puce, en France ou à l’étranger ! (Exclamations sur les
travées de l’UMP, ainsi qu’au banc des commissions.)
Mme Christiane Hummel. C’est inacceptable !
M. Jean-Pierre Michel. Cet amendement me semble donc
tout à fait intéressant.
Mme la présidente. Madame Nicole Borvo Cohen-Seat,
l’amendement no 70 est-il maintenu ?