dossier thématique
Radiothérapie du cancer
de la prostate localisé
Correspondances en Onco-Urologie - Vol. III - no 3 - juillet-août-septembre 2012
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et de proposer un traitement actif sur la maladie
métastatique parallèlement au traitement local par
radiothérapie.
Dans une étude de phase III, conduite par A.V. D’Amico
et al. (1), 206 patients ont été randomisés entre une
radiothérapie seule à la dose de 70 Gy (technique
conformationnelle en 3D) et la même irradiation
associée à un blocage androgénique complet (acétate
de leuproréline ou goséréline + fl utamide) pour une
durée de 6 mois. Les patients étaient atteints d’un
cancer de la prostate localisé (T1b à T2b), avec un
score de Gleason supérieur ou égal à 7 et/ou un taux
de PSA situé entre 10 ng/ml et 40 ng/ml. La majorité
des patients présentait un cancer de la prostate de
risque intermédiaire (85 % de score de Gleason < 8
et 87 % de taux de PSA ≤ 20 ng/ml). À 5 ans, la survie
globale est augmentée de 78 % à 88 % par l’association
radiothérapie/hormonothérapie (p = 0,04). La survie
sans hormonothérapie de rattrapage était de 82 %
dans le bras radio-hormonothérapie contre 57 % dans
le bras radiothérapie seule (p = 0,002).
Dans une deuxième analyse (2), avec un recul
médian de 7,6 ans, le bénéfice en survie globale
est confirmé : 74 % avec hormonothérapie versus
61 % sans hormono thérapie (p = 0,05). Une analyse
plus spécifi que a montré que ce bénéfi ce existerait
uniquement pour les patients ayant peu ou pas de
comorbidités (HR = 4,2 [2,1-8,5] ; p < 0,001). Pour les
patients présentant des comorbidités modérées à
importantes (infarctus du myocarde, etc.), l’asso-
ciation d’un blocage androgénique complet avec
la radiothérapie aurait un eff et délétère, conduisant
à une majoration de la mortalité cardiovasculaire.
L’association d’une hormono thérapie pendant 6 mois
à la radiothérapie externe n’améliorerait alors plus la
survie globale (HR = 0,5 [0,27-1,10] ; p = 0,08).
Dans l’essai RTOG 94-08 (3), 1 979 patients ont été
randomisés pour recevoir une radiothérapie à la dose
de 66,6 Gy à 68,4 Gy seule ou combinée à un blocage
androgénique complet (fl utamide + goséréline ou
acétate de leuproréline), débuté 2 mois avant la
radiothérapie et poursuivi pendant 4 mois. Tous les
patients avaient un PSA inférieur ou égal à 20 ng/
ml et une lésion T1 ou T2. Le score de Gleason était
inférieur à 7 pour 61 % des patients. Avec un suivi
médian de 9,1 ans, la survie globale estimée à 10 ans
était augmentée, allant de 57 % à 62 % (p = 0,03), par
l’association avec l’hormono thérapie. Les survies spéci-
fi ques, sans évolution méta statique et sans progression
biologique, étaient de même significativement
améliorées par l’hormono thérapie. Des biopsies de
contrôle ont été réalisées chez 439 patients dans le
bras radio-hormono thérapie et chez 404 dans le bras
radiothérapie seule. Les taux de biopsies positives
étaient respectivement de 20 % et 39 % (p < 0,001),
confi rmant un bénéfi ce en termes de contrôle local
de la maladie. Une analyse par sous-groupes a montré
que les risques intermédiaires tiraient le plus grand
bénéfi ce de l’association hormonothérapie-radio-
thérapie, une augmentation de la survie globale à
10 ans de 54 % à 61 % (p = 0,03) étant constatée, alors
que ce bénéfi ce n’est pas retrouvé pour les cancers
de la prostate de bas risque.
L’association d’une radiothérapie à la dose de 70 Gy
et d’une hormonothérapie d’une durée de 6 mois est
considérée comme un traitement de référence dans
les cancers de la prostate de risque intermédiaire.
Radiothérapie à dose élevée dans les cancers
de la prostate de risque intermédiaire
Plusieurs études ont suggéré qu’il pourrait exister une
relation dose/réponse pour le cancer de la prostate.
En 1988, G.E. Hanks et al. (4) ont analysé rétrospecti-
vement, sur 1 516 patients traités par radiothérapie
externe, l’eff et de la dose sur le contrôle local. Ils ont
observé qu’une dose d’irradiation supérieure à 70 Gy
semblait donner un meilleur contrôle local pour les
cancers de stade C. Sur une série de 1 127 patients
traités au MD Anderson Cancer Center par radio-
thérapie externe entre 1987 et 1997, A. Pollack et al. (5)
ont observé qu’une augmentation de la dose totale
d’irradiation au-delà de 77 Gy améliorait la survie sans
récidive biologique des patients souff rant de cancers
de la prostate de stade intermédiaire (T1-T2 avec PSA
entre 10 et 20 ng/ml). Enfi n, l’analyse à long terme
(8 à 12 ans de suivi) des résultats d’une étude d’escalade
de dose du Fox Chase Cancer Center (6) portant sur
229 patients était aussi en faveur d’un eff et de la dose
totale de radiothérapie. Dans le groupe de patients
ayant un PSA entre 10 et 20 ng/ml avant traitement,
les taux de survie sans récidive biologique étaient de
19 %, 31 % et 84 % pour des doses totales d’irradiation
respectivement inférieures à 71,5 Gy, entre 71,5 Gy et
75,6 Gy, et supérieures à 75,6 Gy. Ces résultats ont justifi é
la réalisation d’études randomisées afi n de confi rmer
l’eff et dose pressenti.
Différentes études de phase III (7-13) ont ainsi été
menées comparant des doses de l’ordre de 66 à 70 Gy
à des doses de 74 à 80 Gy. Les populations étudiées
étaient souvent peu homogènes, ayant des cancers de
risque faible, intermédiaire et fort selon la classifi cation
de D’Amico. Toutes ont cependant confi rmé qu’une
augmentation de la dose d’irradiation de l’ordre de
10 Gy était associée à une amélioration des taux de