La Lettre de L’Hépato-Gastroentérologue - n° 4 - août 1998 167
juger de l’infection au sein de la nécrose. Le drainage doit alors
être repoussé de quelques heures pour attendre le résultat de cet
examen bactériologique. Comme la plupart des auteurs (8),
nous pensons que le drainage doit être réservé aux nécroses
infectées. S’il s’agit au contraire d’un abcès, il est vidé et le
drain est d’emblée introduit sous neuro-analgésie selon la tech-
nique de Seldinger.
SUITES POST-DRAINAGES
Le patient est amené en salle de réveil où le drain est immédia-
tement mis en lavage au sérum physiologique. Comme Van
Sonnenberg (7), nous pensons que l’utilisation de solutions
contenant un antibiotique ou un agent protéolytique est inutile,
voire nuisible.
Le malade est ensuite reconduit en service de soins intensifs, la
relative bénignité du geste ne dispensant pas bien sûr des soins
hautement spécialisés que nécessitent ces patients. Ils peuvent
être mis au fauteuil quelques heures après le drainage, et, le cas
échéant, être réalimentés. Le lavage est poursuivi à raison de
3 à 4 litres de sérum salé par jour. Dès que l’état des patients
l’autorise, les drains sont débranchés plusieurs fois par jour afin
de permettre aux patients de faire quelques pas dans le couloir.
L’ensemble de ces manipulations nécessite une attention toute
particulière de la part de l’ensemble du personnel du service
afin d’éviter l’obstruction du drain : il s’agit d’une technique
très consommatrice de temps qui peut, comme nous l’avons déjà
dit, difficilement s’envisager en dehors d’une structure de soins
intensifs.
Au début de l’évolution de la PA, le patient a un contrôle TDM
toutes les semaines (7,5 par patient en moyenne dans notre expé-
rience). Nous rejoignons encore Van Sonnenberg pour penser
que la réalisation d’abcessogrammes est inutile et dangereuse sur
le plan septique. En cas d’apparition de nouvelles collections, il
faut savoir rajouter d’autres drains, certains patients dans notre
série ayant eu jusqu’à 4 drains de façon concomitante. Les drains
sont changés à la demande en cas d’obstruction, ce changement
s’effectuant alors de façon simple, sans anesthésie, sous contrô-
le scopique (figure 3). Dans notre pratique ces changements sont
nécessaires en moyenne trois fois par site de drainage.
RÉSULTATS
Nous n’avons relevé dans la littérature qu’une dizaine d’articles
faisant état de DP pour PA. La plupart des auteurs concluent à
l’inefficacité de la méthode (4, 9, 10), mais ces équipes ont
choisi des drains de petit calibre (14 French au maximum)
(tableau I), ce qui explique à notre sens ces échecs. Par ailleurs
les effectifs étaient très réduits, la plus grosse série française (4)
regroupant 13 patients seulement, avec un taux de laparotomie
secondaire de 85 %. Dans d’autres études (11, 12), les résultats
étaient plus tempérés mais les patients étaient sélectionnés, les
drainages étant limités aux abcès et aux pseudo-kystes infectés.
Pour notre part, après avoir essayé des drains de petit calibre et
constaté un taux d’échec important, nous avons résolument opté
pour le drain de gros diamètre. Ainsi, depuis 1992, tous nos
patients atteints de PA infectées ont été traités de première
intention par DP. Trente-deux malades au total (Ranson moyen
4,6, Balthazar D 10 cas, E 22 cas) ont été soignés selon cette
technique ; il s’agissait de 49 drainages correspondant à huit
abcès et 41 nécroses infectées.
Dans notre série 25 patients sur 32 (78 %) ont été guéris par le
drainage percutané exclusif. En effet, cinq malades sont décédés
(15,6 %), ce qui équivaut à la moyenne des résultats des
meilleures séries chirurgicales récentes : 35 % pour Chaudhary
(13), 30 % pour Margulies (14), 25 % pour Rotman (15),ou
7 % pour Farkas (16). D’autre part, deux autres patients (6,2 %)
ont subi une nécrosectomie chirurgicale pour échec du drainage
après plusieurs semaines de lavage.
Parmi les 25 malades guéris, nous avons enregistré 55,5 % de
complications évolutives dominées, comme dans les séries chi-
rurgicales, par les fistules (14 cas) et les pseudo-kystes (3 cas).
Les fistules digestives (28 %) plus directement imputables à la
méthode sont sans doute plus fréquentes que lors des abords
chirurgicaux rétropéritonéaux (15 %) (13), mais elles ont tou-
Tableau I. Drainage percutané des complications infectieuses intra-
abdominales des pancréatites aiguës nécrotico-hémorragiques.
Auteur Année Effectif Taille drain Conversion %
(French)
Leone 1996 15 12 - 16 33
Lee 1992 30 12 - 24 55
Feig 1992 16 12 62
Rotmann 1992 13 14 85
Karlson 1982 6 7 - 8 50
Figure 3.
Changement
de drain par contrôle
scopique.