Mise au point Les progrès en pharmaco-génomique : qu’apporte la connaissance des polymorphismes ? Progress in pharmacogenomics: what about polymorphisms? J.M. Antoine* » La pharmacogénomique consiste à étudier l’effet des polymorphismes génétiques sur la sensibilité individuelle aux traitements et leurs éventuels effets indésirables. Pharmacogenomics is the study of the effects of genetic polymorphisms on individual sensitivity to various treatments and to their possible adverse effects. » Dans le domaine de la stimulation ovarienne, l’objectif est de In the field of ovarian stimulation, the goal is to arrive at a better-adjusted personalised initial dose of FSH based on the specific needs of the patient, so as to avoid insufficient ovarian response and ovarian hyperstimulation syndrome. mieux individualiser la dose initiale de FSH en fonction des besoins spécifiques de la patiente de façon à éviter une réponse ovarienne insuffisante et un syndrome d’hyperstimulation ovarienne. Data on the gene of the FSH receptor, found in chromosome 2, suggest reduced sensitivity to FHS in vivo for the variant Ser680, that can be corrected by increasing the dose of exogenous FSH. However, Asn680 homozygotic women have a greater risk of severe ovarian hyperstimulation. chromosome 2, suggèrent une sensibilité réduite à la FSH in vivo pour le variant Ser680, pouvant être corrigée par l’augmentation de la dose de FSH exogène. En revanche, les femmes homozygotes pour Asn680 sont plus à risque d’hyperstimulation ovarienne sévère. » On peut envisager, à terme, que cette approche fera partie du bilan précédant la stimulation ovarienne, mais des études complémentaires sont nécessaires pour mieux évaluer le poids spécifique des différents paramètres : âge, réserve ovarienne, indice de masse corporelle, taux plasmatiques d’androgènes et d’insuline, polymorphismes des récepteurs de FSH, AMH, estradiol, variants de LH, BMP 15 et AMH. Highlights P o i nt s f o rt s » Les données sur le gène du récepteur de la FSH, situé sur le Mots-clés : Pharmacogénomique – FSH – Récepteur de la FSH – Stimulation ovarienne Définitions ✓ Mutations (inhibitrices/activatrices), délétions, translocations : modifications majeures de la séquence d’ADN, rares et à l’origine de variations importantes du phénotype. ✓ Polymorphismes : variants physiologiques du génotype, fréquents dans la population générale. Eventually, this approach might be included in the exams that precede ovarian stimulation, but additional studies are necessary to better evaluate the specific role of each parameter: age, ovarian reserve, body mass index, plasma levels of insulin and androgens, as well as polymorphism of FSH, AMH, estradiol, LH, BMP 15 and AMH variant receptors. Keywords: Pharmacogenomics – FSH – FSH receptor – Ovarian stimulation ✓ SNP (single nucleotide polymorphism) : changement d’une seule base présent dans au moins 1 % de la population. ✓ Pharmacogénomique : étude de l’effet des polymorphismes sur la sensibilité individuelle aux traitements et leurs effets indésirables, dans le but de mieux adapter la dose administrée à chaque personne en fonction de ses caractéristiques génétiques propres. Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XVII - n° 10 - décembre 2013 © La Lettre du Gynécologue 2010;355:29-31. * Université Pierre-et-Marie Curie (Paris-VI) et hôpital Tenon, Paris. 345 Mise Quiz I. Qu'est-ce que le polymorphisme d’un gène ? ➊ L’expression variable d’un gène sous l’influence de modulateurs épigénétiques. ➋ Des variants physiologiques du génotype fréquents dans la population générale. ➌ L’expression phénotypique variable d’un gène au sein d’une fratrie. ➍ Des variations de la structure d’un gène d’une population à l’autre sans conséquences connues. II. Le polymorphisme Asn/Asn 680 du gène du récepteur de la FSH : ➊ n’a pas de conséquence connue ; ➋ expose à un risque de réponse ovarienne insuffisante ; ➌ expose à un risque de syndrome d’hyperstimulation ovarienne plus sévère ; ➍ nécessite d’introduire précocement de la LH au cours de la stimulation ovarienne. Réponses : I : 2 ; II : 3. 346 au point Gène du récepteur de la FSH (FSHR) Situé sur le chromosome 2 p21-p16, le récepteur de la follicle-stimulating hormone (FSH) comprend 10 exons et 9 introns : ✓ Les 9 premiers exons codent pour le domaine extracellulaire du récepteur. ✓ L’exon 10 code pour l’extrémité C terminale du domaine extracellulaire et pour les domaines transmembranaire et intracellulaire de FSHR. Il est donc fondamental pour la transduction du signal mais non nécessaire à la liaison du ligand. Le FSHR est situé, chez la femme, exclusivement à la surface des cellules de la granulosa. Il appartient à la famille des récepteurs couplés à la protéine G et constitué de 678 acides aminés, groupés en un domaine extracellulaire N terminal (349 acides aminés formant une poche en fer à cheval : la spécificité de liaison de la FSH repose sur des acides aminés des sous-unités α et β). Elle entraîne des changements de conformation de la FSH et une activation de la protéine kinase A (PKA), principal signal de la transduction ; en 7 domaines transmembranaires, composés de 264 acides aminés ; en 1 domaine intracellulaire C terminal constitué de 65 acides aminés, à l’origine de la transduction du signal induit par la fixation de la FSH à son récepteur. La FSH est constituée de deux sous-unités α et β. Par activation de FSHR des cellules de la granulosa de l’ovaire, elle stimule la croissance des follicules antraux et la synthèse de l’aromatase indispensable à la production d’estradiol. Les mutations inactivatrices du gène FSHR sont rares. Décrites initialement en Finlande (1), elles entraînent dans la forme complète une insuffisance ovarienne majeure avec retard pubertaire, aménorrhée primaire, estradiol plasmatique bas et FSH très élevée, arrêt du développement folliculaire au stade primordial. Des résistances partielles se traduisent par une puberté normale et aménorrhée secondaire avec des follicules antraux jusqu’à 5 mm. D’autres mutations de FSHR entraînent la perte de spécificité de liaison pour la FSH et un syndrome d’hyperstimulation ovarienne familial spontané induit par hCG (2-4). ✓ Environ 1 800 polymorphismes ont été mis en évidence par séquençage du gène, mais la plupart sont situés sur un intron et 8 seulement sur un exon (codant pour les protéines), dont 7 sur l’exon 10 en position 307, 329, 449, 524, 567, 665 et 680 et 6 associés à des substitutions d’acides aminés. Les polymorphismes les plus fréquents concernent les nucléotides 919 et 2039 de l’exon 10, qui cor- respondent aux acides aminés 307 et 680 de la protéine mature : Ala307Thr (alanine ou tréonine) et Ser680Asn (sérine ou asparagine) dont la fréquence et la distribution ethnique ont été bien caractérisées : les combinaisons Ala307-Ser608 (AS) et Thr307Asn680 (TN) sont les plus fréquentes, représentant environ 40 % de tous les allèles du FSHR au niveau mondial. Le polymorphisme du codon 680 a fait l’objet de la majorité des études en ce qui concerne l’impact sur la fonction ovarienne : ✓ Au cours du cycle menstruel normal, l’allèle Ser/ Ser 680 est significativement plus fréquent chez les femmes avec FSH élevée par rapport aux femmes avec FSH normale, suggérant une sensibilité à la FSH réduite (5). ✓ En revanche, il n’apparaît pas d’association entre le polymorphisme du FSHR et une insuffisance ovarienne prématurée (6). ✓ En cycle stimulé, la quantité de FSH nécessaire pour obtenir le même pic d’estradiol est significativement plus faible chez les femmes homozygotes pour le variant Asn680 par rapport aux femmes homozygotes Ser680 ou hétérozygotes, suggérant une plus faible sensibilité à la FSH in vivo pour le variant Ser680 (7). La réponse plus faible chez les homozygotes Ser680 est corrigée par l’augmentation de la dose de FSH (8). ✓ En FIV, pour certains, le génotype du codon 680 influe significativement sur les nombres de follicules et d’ovocytes (9) ; le taux de grossesses cliniques est significativement plus élevé chez les homozygotes pour Asn680 (10) ou à l’inverse pour Ser680 (11). Des études sur des effectifs plus importants sont nécessaires pour tirer des conclusions à ce sujet ; le syndrome d’hyperstimulation ovarienne iatrogène serait plus sévère chez les femmes Asn/Asn 680 par sensibilité accrue à la FSH exogène (12). Le polymorphisme en 307 semble également influer sur la réponse à la stimulation, avec des besoins plus réduits en FSH exogène, un estradiol plasmatique plus élevé et davantage de syndrome d’hyperstimulation chez les patientes Ala307Ala (13). Le polymorphisme, G/A dans la région 5’ en position -29, a également été étudié : in vitro, la présence de l’allèle A est associée à une diminution de l’activité transcriptionnelle du récepteur par rapport à l’allèle G ; in vivo, les femmes AA ont un besoin supérieur en FSH, des taux d’estradiol plus bas, des nombres de follicules et d’ovocytes ponctionnés et des taux de grossesses plus faibles que les GG, suggérant une plus grande résistance à la FSH (14). Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XVII - n°10 - décembre 2013 Les progrès en pharmaco-génomique : qu’apporte la connaissance des polymorphismes ? Gène du récepteur de LH Conclusion Il est situé à côté du gène de FSHR sur le chromosome 2 et comporte 11 exons. Les mutations hétérozygotes n’ont pas d’expression phénotypique chez la femme. Les mutations homozygotes sont associées à une puberté normale ou subnormale, une aménorrhée primaire ou secondaire, une FSH normale mais une LH très élevée, et à l’existence de follicules primordiaux et antraux, sans corps jaune. Ces données suggèrent que des variants génomiques sont susceptibles de modifier la réponse ovarienne à la FSH exogène, notamment celui du codon 680 du gène du récepteur de la FSH, dont la détermination fera probablement partie à terme du bilan requis avant stimulation ovarienne. Le but ultime est d’individualiser chaque protocole thérapeutique en fonction des besoins spécifiques de la patiente et d’éviter les réponses ovariennes insuffisantes et les hyperstimulations iatrogènes. À l’évidence, cette approche ne peut se limiter à la détermination d’un génotype isolé. Des études prospectives complémentaires en cours permettront de mieux évaluer le poids spécifique de chaque paramètre potentiel : âge, réserve ovarienne, indice de masse corporelle, androgènes, insuline, polymorphismes des récepteurs de FSH, AMH, estradiol, variants de LH, BMP 15 et AMH. ■ Gène de la LH Le variant le plus courant de la LH-β (v-βLH) est retrouvé plus fréquemment chez les femmes avec résistance à la rec-FSH exogène (15). Autres variants à l’étude : le récepteur de l’estradiol (16, 17), l’AMH et son récepteur (18, 19), GDF9 et BMP 15 (20, 21). L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêts. Références 1. Aittomaki K, Lucena JL, Pakarinen P et al. Mutation in the 8. Behre HM, Greb RR, Mempel A et al. Significance of a com- follicle-stimulating hormone receptor gene causes hereditary hypergonadotropic ovarian failure. 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