
Dans 55,7 % des cas, la transmission des informations
se fait indistinctement soit à la demande du médecin, soit
àcelle dupilote. Plusd’unnavigantsurquatre esten quête
d’information. Ainsi 97 pilotes du ministère de la
Défense (27 %) et 42 du ministère de l’Intérieur (29,2 %)
sont à l’origine de la demande d’information.
Ces informations transmises sont dans la majorité des
cascomprises, maisdansau moins1cas sur10,les pilotes
déclarent n’avoir pas ou peu compris les données reçues.
Globalement, les informations reçues sont considérées
comme utiles pour la gestion et le déroulement de la
mission par 64,4 % des pilotes. Toutefois, l’utilité des
informations est appréciée de façon significativement
différente selon l’entité d’appartenance (p=0,001). En
effet,si72,9%despilotesdel’ALATet 71,2%despilotes
de l’armée de l’Air jugent les données relatives au blessé
commetoutàfaitutiles,seuls43,3%pilotesdelaSécurité
civile trouvent une utilité à ces informations.
Il est intéressant de noter que pour 59 % des personnels
navigants interrogés, les informations relatives au patient
ontinfluencé,à un moment donné, lagestiondu vol.Mais
il existe une divergence entre ministère de la Défense et
ministère de l’Intérieur, avec une différence significative
(p=0,0001). Ainsi pour la Défense, plus de deux pilotes
sur trois (66,9 %) trouvent que ces informations ont
influencé leur vol de façon importante. Au sein de la
Sécurité civile, cette communication n’engendre que peu
de modifications (44,8 %), voire aucune (23,9 %).
Évaluation de la prise de risque
Plus d’un quart des navigants interrogés (26,4 %)
estime avoir étéau moins une fois au-delà de leurs limites
personnelles.
Près de la moitié des pilotes (47,3 %) déclare avoir pris
au moins une fois une décision ayant conduit à une
modification des procédures dans le but, entre autres,
de gagner du temps. En tenant compte de l’entité
d’appartenance des pilotes, il s’avère que plus de 40 %
des pilotes de l’ALAT, de la Marine nationale, de la
Gendarmerie et de la Sécurité civile déclarent s’être
écartés des procédures aumoinsune fois, alors quemoins
de 40 % des pilotes de l’armée de l’Air étaient dans cette
situation.
Plus de la moitié des pilotes (50,8 %) est influencée par
ce qu’elle a pu voir (blessures, sang…), entendre (cris…)
ou ressentir (sensation d’urgence vitale). A posteriori,
quasiment 1 pilote sur 7 (13,4 %) regrette des décisions
prises contraires à la sécurité des vols. Ceci est d’autant
plus marqué au sein du ministère de l’Intérieur avec près
d’un quart des pilotes (23,1 %).
D’une manière générale, 49,4 % des navigants ont le
sentiment de prendre plus de risque au cours d’une
mission médicalisée.
Analyse analytique
Régression analytique univariée
Il existe une association significative entre le fait
d’avoir pris des risques et la réalisation de missions
d’évacuations sanitaires primaires, avec un pà 0,003 et
un Intervalle de confiance (IC) à 95 % compris entre 1,27
et 3,10 (Odds ratio à 1,98).
Le fait d’être commandant de bord expose de manière
significative au ressenti de prise de risque avec un p à
0,033 et un intervalle de confiance compris entre 0,32 et
0,95 (Odds ratio à 0,55). Les pilotes d'hélicoptère
prennent significativement 1,7 fois plus de risque que les
pilotes d'avion (p=0,05, IC 95 % [1,00; 2,98]).
La fréquence des missions médicalisées est
significativement associée à la prise de risque (p=0,018).
En effet, les pilotes effectuant souvent ou très souvent ce
type de missions prennent 3,5 fois plus de risque (IC à
95 %[1,09 ; 2,58]) que ceux effectuant rarement ces
missions.
Lesinformationsdonnéesparleséquipesmédicalessur
la gravité des lésions et/ou les circonstances de survenue
influencent de manière significative la prise de risque
(p=0,047). Ainsi les pilotes qui ont connaissance de
la gravité des lésions prennent 2,5 fois plus de risque
(IC 95 % [1,01; 6,21]).
Régression logistique multivariée
Au terme de l’analyse multivariée, les variables
significativement associées à la prise de risque sont la
fréquence des missions médicalisées et le type de
qualification du pilote.
Ainsi, toutes choses égales par ailleurs:
– les pilotes effectuant très souvent des missions
médicalisées estiment prendre un risque 3,5 fois plus
important que les autres (IC à 95 % [1,62 ; 7,65]);
– les pilotes d’hélicoptère estiment prendre 2 fois plus
souventderisqueque lespilotesd’avion (ICà95%[1,04 ;
4,00]).
Le fait de connaître la gravité de l’état du patient ou les
circonstances de survenue sont plutôt un facteur
favorisant la prise de risque au cours de ces missions
(OR=2,58 ; IC 95 % [0,82; 8,11]). Mais cette association
n’esttoutefois passtatistiquement significative(p=0,10).
Enfin,lesmissionsdesecoursetlesEVASANprimaires
sont plutôt un facteur favorisant la prise de risque
(OR=1,72 ; IC 95 % [0,88 ; 3,34]) sans association
statistiquement significative (p=0,11).
Discussion
Le pourcentage de questionnaires exploitables
renvoyés aux auteurs (56 %) tend à démontrer un réel
intérêt des équipages de conduite pour le sujet.
L’analyse des critères sociodémographiques rapporte
une différence significative entre la moyenne d’âge des
pilotes du ministère de l’Intérieur et celle du ministère de
la Défense. Les pilotes de la Sécurité civile sont en effet
plus âgés que ceux du ministère de la Défense car ils ont
souvent réalisé une première carrière dans le milieu
militaire.
Dès la réalisation du questionnaire, il est apparu
important de pouvoir distinguer les pilotes qualifiés sur
avion et ceux qualifiés sur voilure tournante. Dans notre
étude, près des trois quarts des pilotes sont qualifiés sur
hélicoptère et seules l’armée de l’Air et la Marine
nationale comptent des navigants qualifiés sur avion
(respectivement 47,2 % et 8,6 %).
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