Au niveau géographique, l’accès à l’eau est également une source majeure
d’inégalités et de déséquilibres. Exception faite de l’Espagne et des deux
Etats insulaires méditerranéens, Chypre et Malte, l’Europe à 28 peut être
considérée comme globalement bien dotée en ressources en eau, il n’en va
pas de même pour la plupart des pays méditerranéens où elles sont très
inégalement réparties.
Un autre déséquilibre croissant concerne l’urbanisation. Il y aura 60
millions d'urbains en plus d'ici 2025 dont seulement 5 millions au Nord et
quelques 55 millions au Sud, selon le rapport sur le Développement humain
du Programme des Nations-Unies pour le Développement (PNUD).
Mais si la Méditerranée est un espace e crises et de fractures, c’est aussi
un espace d’opportunités. Les rives Nord et Sud de la Méditerranée
présentent en effet des complémentarités.
A l’ère de la mondialisation, la taille critique d’un marché est d’environ
800 millions à 1 milliard de personnes. C’est la taille de la Chine, de
l’Inde. Afin de nous constituer un marché d’une telle envergure, la
population méditerranéenne est un atout indispensable pour l’Europe. A
l’horizon 2030, le marché euro-méditerranéen sera composé de quelques
800 millions de personnes. Les pays du Sud et de l’Est de la Méditerranée
disposent d’un potentiel de croissance important et font preuve de
résilience, en dépit du ralentissement récent, imputable au contexte de
transition et à un environnement extérieur défavorable.
Autres facteurs de complémentarité en quelques mots : le besoin de main
d’œuvre au Nord et les ressources en main d’œuvre au Sud, le besoin
énergétique au Nord et les ressources énergétiques présentes au Sud, les
ressources en technologie au Nord et le besoin de technologie au Sud, ou
encore l’excédent agricole au Nord et le besoin alimentaire au Sud.
Tout cela explique et justifie les actions en faveur du démantèlement des
barrières douanières entrepris depuis plusieurs années, pour favoriser
l’émergence d’une zone de libre circulation des produits, et, peut-être un
jour, des personnes.
J’en veux pour preuve trois évolutions cruciales enclenchées par les
mouvements arabes et leur slogan transfrontière en faveur de la dignité, de
la liberté et de l’emploi.
Tout d’abord, les révolutions arabes ont fait de la démocratie, l’horizon
commun de tous les peuples méditerranéens. Au cours des différentes
campagnes électorales qui se sont déroulées depuis 2012 au Sud de la
Méditerranée, tous les partis politiques, quelle que soit leur tendance,
ont accepté de prendre la démocratie comme cadre de référence. Bien sûr, le
contenu de cette forme de gouvernement continue de faire débat. Mais
qu’elles soient progressistes ou conservatrices, laïques ou islamiques, ces
forces ont toutes souhaité doter leur pays d'un nouveau cadre
constitutionnel plus démocratique.
En outre, fruits de l’irruption des sociétés civiles sur les scènes
politiques arabes, les bouleversements de 2011 ont conduit à une
recomposition des rapports de force. Les militants, les activistes, les
ONG, les acteurs privés sont désormais une véritable force de changement
politique et social à prendre en compte au Sud comme au Nord de la
Méditerranée. Enfin, dernière observation, les slogans portés par les
manifestants ont mis en exergue une convergence entre ce que doivent
être nos priorités d’action publique au Nord et au Sud de la Méditerranée
aujourd’hui, à savoir la jeunesse, l’emploi, la formation professionnelle,
les droits des femmes, la sécurité alimentaire, l’économie numérique, les
énergies renouvelables, les infrastructures de transport durables.
Enfin, les pays de l’espace méditerranéen ont en partage un bien
collectif : la mer. La France et ses voisins méditerranéens partagent le
même besoin de sécurité, de démocratie, de liberté de la presse, de
biodiversité, mais surtout ils ont en partage aussi la mer Méditerranée.
Pourtant, ce bien collectif reste peu géré de manière coopérative, en dépit
de tentative à l’instar de la mise en place du Plan d’Action pour la
Méditerranée, d’instruments juridiques, institutionnels et financiers. De