R ev u e de presse Coordination : Estelle Louiset (Rouen) Histoire de Shadoks Histoire de Shadoks Polémique sur les effets des traitements par hormone de croissance Sécrétion de mélatonine et risque de diabète L’hyperaldostéronisme primaire est dû, dans la moitié des cas, à un adénome de Conn et, pour l’autre moitié, à une hyperplasie de la zone glomérulée touchant l’une des glandes surrénales ou les 2. Les études moléculaires récentes ont révélé que plus de 1/3 des cas familiaux et sporadiques d’hyperaldostéronisme primaire sont associés à des mutations germinales et somatiques du gène codant pour le canal potassique KCNJ5. Le réseau de recherche européen de l’Institut national du cancer (Inca), en collaboration avec le réseau français Corticomédullo tumeurs endocrines (COMETE), rapporte pour la première fois des mutations somatiques des gènes codant pour les pompes Na+/K+ ATPase (ATP1A1) et Ca2+ ATPase (ATP2B3) dans des adénomes de Conn. En permettant l’efflux de 3 Na+ en contrepartie d’un influx de 2 K+, la pompe Na+/K+ ATPase maintient le potentiel de repos des cellules. En extrayant des ions Ca2+ des cellules, la pompe Ca2+ ATPase participe au contrôle de l’homéostasie calcique. Le séquençage des 2 gènes, réalisé sur plus de 300 tissus d’adénomes de Conn, a révélé la présence de mutations somatiques chez 21 sujets (6,8 %). Dans le gène ATP1A1, des mutations ponctuelles (c.311T>G, c.995T>G et c.1738A>G) entraînant les substitutions Leu104Arg, Val332Gly et Ile580Val, ainsi qu’une délétion (c.299_313delTCTCAATGTTACTGT) responsable d’une perte de la région Phe100_Leu104, ont été détectées. Dans le gène ATP2B3 des délétions (c.1272_1277delGCTGGT, c.1273_1278delCTGGTC et c.1277_1282delTCGTGG) à l’origine de la perte de 2 acides aminés 425-426 ou 426-427 (p.Leu425_ Val426del ou p.Val426_Val427del) ont été observées. Les études fonctionnelles réalisées in vitro sur des cellules montrent que les mutations induisent une perte de l’activité enzymatique des pompes. Les mutations du gène ATP1A1 engendrent une dépolarisation des cellules tumorales qui pourrait faciliter l’ouverture des canaux calciques voltage-dépendants permettant un influx de calcium. L’augmentation du calcium cytosolique stimulerait à son tour la production d’aldostérone. De même, les mutations d’ATP2B3 à l’origine d’une perte de fonction de la pompe Ca2+ ATPase pourraient induire une élévation de la concentration cellulaire de Ca2+ capable d’augmenter la synthèse d’aldostérone. Il est à noter qu’aucune mutation germinale des gènes ATP1A1 et ATP2B3 n’a été détectée, que ce soit chez ces quelque 300 patients atteints d’un adénome de Conn ou chez les 18 cas d’hyperaldostéronisme familial et 91 cas d’hyperplasie bilatérale associée à un hyperaldostéronisme primaire. La sécrétion d’aldostérone par les cellules corticosurrénaliennes est donc contrôlée par les Na+/K+ ATPase et Ca2+ ATPase, qui, tels des Shadoks, pompaient, pompaient, pompaient… E. Louiset (Rouen) • Beuschlein F et al. Nat Genet 2013;45:440-4. Polémique sur les effets des traitements par hormone de croissance Après la polémique sur les effets cancérigènes potentiels du traitement par hormone de croissance, plusieurs études ont infirmé que les enfants traités par hormone de croissance aient un risque accru de développer un cancer de novo par rapport à la population générale. Mais un signal d’alerte a été émis concernant un sous-groupe d’enfants ayant survécu à un cancer, chez qui un risque de développer une néoplasie secondaire aurait été observé. Le déficit en hormone de croissance est une complication fréquente chez des enfants ayant survécu à un cancer. La cause de ce déficit peut être la tumeur, lorsqu’elle atteint l’axe hypothalamohypophysaire, ou bien les traitements instaurés (chimiothérapie et radiothérapie). Le but de cette étude était d’analyser, de façon rétrospective, 2 cohortes prospectives et d’établir l’incidence de néoplasie secondaire chez des enfants ayant survécu à un cancer. La première base de données, GeNeSIS (Genetics and Neuroendocrinology of Short Stature International Study), attachée au groupe pharmaceutique Lilly, collecte des informations sur la prise en charge et le suivi des enfants ayant un retard de croissance. La deuxième, HypoCCS (Hypopituitary Control and Complications Study), est un programme de veille sanitaire chez des adultes traités par hormone de croissance. Les patients ayant eu un cancer avant l’âge de 21 ans ont été inclus dans l’étude, soit 421 (394 traités par hormone de croissance et 27 non traités) dans la base GeNeSIS, et 280 (252 traités et 28 non traités) dans la base HypoCCS. Le cancer secondaire était défini par la présence d’un cancer bénin ou malin apparu après le cancer primitif, en excluant les métastases et les rechutes du cancer primitif. Dans GeNeSIS, l’incidence de néoplasie secondaire était de 3,8 % chez les enfants traités par hormone de croissance (IC95 : 2,2-6,2), alors qu’il n’y a eu aucun cas rapporté chez les sujets non traités. Dans la base HypoCSS, l’incidence était de 6,0 % (IC95 : 3,4-9,6) chez les patients traités par hormone de croissance, et de 7,1 % (IC95 : 0,9-23,5) chez les patients non traités. >>> 162 Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XVII - n° 6 - juin 2013 R ev u e de presse >>> Si les auteurs concluent que leurs résultats sont en accord avec un risque accru de néoplasie secondaire à la suite du traitement par hormone de croissance des enfants ayant survécu à un cancer, il est bien difficile de passer à côté des faiblesses de l’étude. La disproportion entre le nombre d’enfants traités et non traités dans les bases de données ne permet pas d’analyse statistique fiable. De plus, il n’y a pas d’information sur le type de chimiothérapie et les doses de radiothérapie utilisés dans le traitement du cancer primitif, composants connus pour être des facteurs de risque de néoplasies secondaires et sources de biais potentiels pour cette étude. Même si une attitude circonspecte reste de mise dans l’instauration d’un traitement par hormone de croissance dans ce groupe de patients, des études prospectives devront être réalisées pour éclaircir l’effet cancérigène potentiel du traitement par hormone de croissance chez les enfants ayant survécu à un cancer. A. Naccache (Rouen) • Woodmansee WW et al. European Journal of Endocrinology. 2013;168:565-7. Sécrétion de mélatonine et risque de diabète La mélatonine est une hormone sécrétée par la glande pinéale sous le contrôle de l’horloge biologique en fonction de la lumière. Sa sécrétion suit un rythme circadien, avec un pic entre 3 et 5 h après l’endormissement. Les récepteurs de la mélatonine sont présents dans les cellules β pancréatiques. Des mutations du récepteur ont été associées à un risque accru d’insulinorésistance et de diabète de type 2. L’étude de McMullan et al. avait pour objectif d’évaluer le lien entre la sécrétion de mélatonine et le risque de développer un diabète de type 2. Pour cela, les auteurs ont étudié, au sein de la cohorte de la Nurses’ Health Study, 370 femmes non diabétiques à l’inclusion en 2000 qui ont développé par la suite un diabète et 370 femmes n’ayant pas développé de diabète. Les participantes ont été appariées sur de nombreuses caractéristiques cliniques et d’habitudes de vie, comme la qualité du sommeil. La sécrétion de mélatonine a été évaluée par le rapport de la 6-sulfatoxymélatonine (6-S-MT) sur la créatinine urinaire (créat.). Les médianes étaient de 28,2 ng/mg chez les patientes et 36,3 ng/mg chez les témoins. La sécrétion de mélatonine variait considérablement parmi les participantes. Comparativement aux femmes dans la catégorie la plus haute du rapport 6-S-MT/ créat. (67,0 ng/mg), celles de la catégorie la plus basse (14,4 ng/mg) avaient un risque multiplié par 2 de développer un diabète de type 2 (OR en analyse multivariée de 2,17 [IC95 : 1,18-3,98]). Cela se traduit par un écart absolu de l’incidence du diabète de 5 cas pour 1 000 personnes par année. Cette analyse montre donc qu’une faible sécrétion de mélatonine est associée à un risque accru de diabète de type 2. Des études d’observation ont révélé que le travail nocturne et la restriction de sommeil sont associés au diabète. Il reste à déterminer si l’augmentation des niveaux de mélatonine (endogène via un sommeil prolongé ou exogène via une supplémentation en mélatonine) peut augmenter la sensibilité à l’insuline et diminuer l’incidence du diabète de type 2. C. Sanz (Toulouse) • McMullan CJ et al. JAMA 2013;309(13):1388-96. Les auteurs n’ont pas précisé leurs éventuels liens d’intérêts. AVIS AUX LECTEURS Les revues Edimark sont publiées en toute indépendance et sous l’unique et entière responsabilité du directeur de la publication et du rédacteur en chef. Le comité de rédaction est composé d’une dizaine de praticiens (chercheurs, hospitaliers, universitaires et libéraux), installés partout en France, qui représentent, dans leur diversité (lieu et mode d’exercice, domaine de prédilection, âge, etc.), la pluralité de la discipline. L’équipe se réunit 2 ou 3 fois par an pour débattre des sujets et des auteurs à publier. La qualité des textes est garantie par la sollicitation systématique d’une relecture scientifique en double aveugle, l’implication d’un service de rédaction/révision in situ et la validation des épreuves par les auteurs et les rédacteurs en chef. 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