La Lettre du Cancérologue • Vol. XXII - n° 10 - novembre 2013 | 401
Résumé
Dans le cadre du développement de la médecine personnalisée concernant la problématique du cancer,
ilnous a paru important de lancer quelques pistes de réflexion sur ce thème. Dans un premier temps sont
présentés les résultats d’une étude parue en 2008, visant à identifier l’espace thérapeutique investi par les
médecins généralistes face au cancer et leurs relations avec les équipes spécialisées. Ensuite, nous rappelons
les grands principes issus d’une expérience ancienne de coordination entre ville et hôpital : l’Association
pour une bonne coordination diagnostique (ABCD), initiée en 1985. Puis nous nous intéressons aux outils
mis en place dans le cadre du deuxième Plan cancer 2009-2013. Enfin, les propositions du troisième Plan
cancer, présentées le 30 août 2013 dans le rapport Vernant, sont utilisées comme conclusion provisoire.
Mots-clés
Médecine
personnalisée
Cancer
Coordination ville-
hôpital
Médecin généraliste
Summary
In connection to the develop-
ment of personalized medicine
applied to cancer, it seemed
important to launch a few
lines of thought on this topic.
First, the results of a study
published in 2008 to identify
the therapeutic space invested
by general practitioners facing
cancer and their relationship
with specialized teams are
presented. Then the principles
of a past city-hospital coordina-
tion experience, ABCD (Asso-
ciation for a Good Diagnostic
Coordination), initiated in 1985,
are recalled. Questions about
the use of the tools developed
within the framework of the
second Cancer Plan 2009-2013
are considered. Finally, the third
Cancer Plan proposals in the
Vernant report, dated August
30th 2013, are used as a provi-
sional conclusion.
Keywords
Personalized medicine
Cancer
Coordinating city hospital
GP
La méthode de l’étude :
utilisation d’une imbrication d’enquêtes
◆Enquête quantitative
Population concernée
➤
Constitution d’un panel national de médecins
généralistes (MG) en France et en Norvège, disposés
à répondre à un questionnaire élaboré collective-
ment avec un groupe européen de généralistes et
validé dans 5 pays d’Europe (2). Ce questionnaire
recense des données contenues dans les dossiers
médicaux des patients conservés par les généralistes.
Les médecins sont volontaires et bénévoles. Il n’y
a pas de relance. En France, 5 dossiers par MG sont
obtenus ; en Norvège, 2.
➤
Constitution de 2 autres populations de patients
français sélectionnés auprès d’un échantillon de
médecins généralistes enseignants et d’un échan-
tillon de généralistes impliqués dans les réseaux
cancer.
Résultats de l’étude quantitative
➤Panel national de médecins généralistes
En France : 1 679 questionnaires exploitables ont été
remplis et retournés par 349 MG, soit 4,8 question-
naires en moyenne pour 7 % de répondants.
En Norvège : 386 questionnaires exploitables ont été
remplis et retournés par 292 MG, soit une moyenne
de 1,3 questionnaire pour 36 % de répondants.
➤Généralistes enseignants et maîtres de stage
Mille neuf cent quatre-vingt-quatorze patients inclus
par 410 MG, 11 % de répondants, soit une moyenne
de 4,9 questionnaires.
➤MG proches des réseaux cancer
Quatre cent vingt-quatre dossiers, soit un taux de
réponse de 11,8 % et une moyenne de 4,8 ques-
tionnaires.
◆Enquête qualitative
Le recueil des données françaises a, en outre, été
complété par une enquête sociologique qualita-
tive par entretien semi-directif menée auprès de
60 généralistes établis en région parisienne et en
province, dont 19 généralistes membres de réseaux
cancer.
Les apports de l’enquête concernant
la prise en charge du cancer
◆La prévention personnalisée
Les généralistes s’impliquent dans les politiques
ou actes de dépistage systématique des cancers
pour 30 % des patients en France, contre 42 % en
Norvège.
◆La découverte du cancer
En France, le processus est commencé par les géné-
ralistes pour 78 % des patients, en raison d’une suspi-
cion (58 %), dans le cadre d’un dépistage (19 %) ou
à la suite d’une découverte fortuite (16 %). Ils ont
prescrit les premières investigations pour 70 % des
patients, avant de les adresser à un spécialiste.
◆Choix de l’équipe traitante
En Norvège, les fi lières sont imposées. En France,
l’orientation par le MG se fait sur la renommée de
l’équipe (24 %) ou selon le choix du malade (29 %).
Pour 80 % des patients, c’est le généraliste qui
a contacté l’équipe spécialisée, 6 fois sur 10 par
courrier.
L’enquête qualitative révèle également un recours
préférentiel à des réseaux personnels de corres-
pondants spécialisés pour le suivi ultérieur des
patients.
◆Annonce de la maladie
C’est un processus éclaté et morcelé entre plusieurs
professionnels. Le généraliste annonce la maladie
pour plus de la moitié des patients et des proches
(35 % des patients en informent ensuite leurs
proches). Il prépare au mieux le patient à la prise
en charge spécialisée.
◆Le suivi
Certains généralistes regrettent de ne pas pouvoir
faire valoir auprès des équipes spécialisées leur bonne
connaissance des particularités de leurs patients
(adaptation personnalisée des traitements, en
particulier pour les personnes âgées ou les patients
angoissés). Ils assurent souvent la prise en charge
des effets indésirables délétères, mais se plaignent
parfois d’un manque d’information sur les traite-
ments mis en place.