et importante pour la compr´ehension de la bistabilit´e. Elle acquiert un statut
proche de ce qu’on appellerait r´ealit´e si l’on consid`ere une histoire de parti-
cules ´el´ementaires, les kaons neutres : K0et son antiparticule. L’exp´erience
montre que si l’on fait traverser une feuille m´etallique `a un faisceau de kaons
neutres, apr`es une ´epaisseur suffisante on ne d´etecte plus que des K0, car
les antikaons interagissent rapidement avec la mati`ere pour donner d’autres
particules. N´eanmoins, `a la sortie du milieu on retrouve K0et K0. Murray
Gell-Mann a interpr´et´e dans les ann´ees 70 (et fait des pr´edictions quantita-
tives) le kaon comme un syst`eme `a deux ´etats K0et K0coupl´es : dans le vide,
il est d´ecrit par une nouvelle base d’´etats stationnaires, qui ont chacun une
dur´ee de vie bien d´efinie (le klong et le kcourt). Lorsqu’il reste K0seul, dans
le vide, nous retrouvons des oscillations entre K0et K0. Le mot particules
´el´ementaires sugg`ere que ces entit´es ont une existence propre, qu’elles consti-
tuent des «briques »stables de la r´ealit´e. On pourrait en attendre, dans une
vision ordonn´ee et classique de la nature, des m´etaphores fond´ees sur une cer-
taine permanence. Que l’on puisse raisonnablement imaginer une exp´erience
en les d´epla¸cant par la pens´ee, les soumettre `a de nouvelles situations, `a
des protocoles exp´erimentaux. Quoique possible, ce n’est pas satisfaisant,
d’autres descriptions de la r´ealit´e sont sugg´er´ees. Ce qui peut ˆetre compris
initialement comme une commodit´e math´ematique (la structure lin´eaire sur
les ´etats), comme une mani`ere de description et non une ´evidence fondamen-
tale ou une forte contrainte de la tradition, de notre entendement comme la
r´ef´erence `a la notion d’espace et de mouvement analytique (rendu naturel par
la m´ecanique `a partir de la Renaissance, et clarifi´e techniquement par Leib-
niz et Newton), devient un ph´enom`ene physique, un ´ev`enement se d´eroulant
dans le cadre de la r´ealit´e. En contrepartie, les objets de la r´ealit´e ne sont
plus si simplement tangibles. C’est une concession `a l’histoire, puisque la
th´eorie atomique a rencontr´e de nombreuses oppositions, e l’existence des
atomes a ´et´e accept´e grˆace aux travaux des chimistes, qui ont d´emontr´e par
l’effort de l’exp´erimentation que les propri´et´es de conservation des ´el´ements
(de l’isolation de l’oxyg`ene par Lavoisier ), de stabilit´e et de transforma-
tion ´etait parfaitement explicable, et mˆeme pr´edictive ( `a la classification
p´eriodique de Mendele¨ıev qui couronnait la compr´ehension atomique de la
mati`ere) dans le cadre de l’atomisme. Depuis, et mˆeme avec la d´ecouverte
de structures internes (nucl´eaires dans un premier temps avec les exp´erience
de Rutherford sur la diffusion de particules alpha sur les atomes lourds),
l’atome, initialement une affaire d’id´ees, constitue un niveau de description
stable en entit´es qui peut combler les empiristes et les r´ealistes. Une nuance
toutefois, il me semble que le d´ebat sur l’existence des atomes ´etait relatif en
partie `a «la r´ealit´e qui se trouve dans la nature ». L’atomisme a ´et´e contest´e
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