L Quelle imagerie dans la sclérodermie systémique ? SynthèSE

Figure 1. Capillaroscopie péri-unguéale montrant des méga-
capillaires et, sur le cliché de gauche, une grande plage
déserte.
Figure 2. Angio-IRM des mains avec mise en évidence de
lésions artérielles et défaut de perfusion distale avec troubles
trophiques sur l’index du cliché de gauche, correspondant
au territoire le plus touché.
1. Koenig M, Joyal F, Fritzler MJ
et al. Autoantibodies and
microvascular damage are
independent predictive
factors for the progression of
Raynaud’s phenomenon to
systemic sclerosis: a twenty-
year prospective study of
586 patients, with validation
of proposed criteria for early
systemic sclerosis. Arthritis
Rheum 2008;58:3902-12.
2. Allanore Y, Seror R,
Chevrot A, Kahan A, Drapé JL.
Hand vascular involvement
assessed by magnetic reso-
nance angiography in sys-
temic sclerosis. Arthritis Rheum
2007;56:2747-54.
3. Allanore Y, Avouac J,
Kahan A. Systemic sclerosis:
an update in 2008. Joint Bone
Spine 2008;75:650-5.
4. Allanore Y, Meune C,
Vonk MC et al. Prevalence
and factors associated with
left ventricular dysfunction in
the EULAR Scleroderma Trial
And Research group (EUSTAR)
database of systemic sclerosis
patients. Ann Rheum Dis
2009 Mar 10. [Epub ahead of
print].
5. Allanore Y, Wahbi K, Bor-
derie D, Weber S, Kahan A,
Meune C. N-terminal brain
natriuretic peptide in systemic
sclerosis: a new cornerstone of
cardiovascular assessment?
Ann Rheum Dis 2008 Dec 3.
[Epub ahead of print].
Références
bibliographiques
La Lettre du Rhumatologue Suppl. 2 au n° 353 - juin 2009 | 3
SynthèSE
Quelle imagerie
dans la sclérodermie systémique ?
Y. Allanore*
* Université Paris-Descartes,
rhumatologie A (hôpital Cochin), et
Inserm U 781 (hôpital Necker), Paris.
Le diagnostic de sclérodermie systémique est en
général assez simple : il repose essentiellement
sur l’examen clinique.
Exploration
d’un syndrome de Raynaud
Dans les formes incomplètes ou très précoces,
l’étude fine du syndrome de Raynaud peut être
nécessaire et une capillaroscopie peut aider au dia-
gnostic de vasculopathie organique, orientant vers
une connectivite qui sera souvent une sclérodermie
systémique, voire une dermatomyosite. Les signes
les plus fréquents au cours de la sclérodermie sys-
témique sont la présence concomitante de plages
désertes et de mégacapillaires (figure 1).
Des séries en cours étudient la valeur prédictive de
la capillaroscopie, mais il vient d’être montré que,
face à un syndrome de Raynaud, les pertes capillaires
étaient particulièrement évocatrices du développe-
ment ultérieur d’une sclérodermie systémique (1).
Place de l’angio-IRM
On développe actuellement l’angio-IRM pour l’étude
des vaisseaux distaux de gros calibre dans les mains ;
elle permet en effet une analyse des temps arté-
riel, veineux et tissulaire (figure 2) [2]. D’autres
méthodes telles que la thermographie, le doppler
et le laser sont à l’étude ; elles pourraient permettre
d’évaluer l’atteinte vasculaire microcirculatoire et
des petits vaisseaux des mains.
Atteintes cardiaques
et pulmonaires
Les complications cardio-pulmonaires font toute
la gravité de la sclérodermie et en expliquent la
surmortalité. L’hypertension artérielle pulmonaire
survient chez 7 à 8 % des malades (3), et l’insuffi-
sance cardiaque chez 5,4 % (4). Latteinte pulmo-
naire interstitielle est plus fréquente ; elle touche
environ 70 % des malades, mais elle n’est réellement
symptomatique et génératrice de syndrome res-
trictif que chez 10 à 12 % d’entre eux (3). Lévalua-
tion cardio-pulmonaire doit toujours être couplée,
car, bien entendu, il existe des interactions entre
ces complications. Parmi les marqueurs de pre-
mière ligne, les peptides natriurétiques semblent
apporter une réelle avancée dans l’identification
des malades avec une souffrance cardiaque et des
modifications de contraintes ventriculaires (5). En
cas de perturbations, notamment du NT-pro-BNP,
il faut compléter les explorations afin de déterminer
le mécanisme en cause et d’envisager les possibilités
thérapeutiques.
Figure 5. Pneumopathie infiltrante diffuse très sévère, avec atteinte très étendue comportant
des images en rayon de miel et des bronchectasies.
Figure 3. Hypertension artérielle pulmonaire : dilatation
majeure des cavités cardiaques droites.
A B C
Figure 4. Apport de l’IRM pour l’évaluation cardiaque des malades sclérodermiques avec visua-
lisation de lésions ischémiques (A), d’une myocardite (B) et de lésions fibreuses sur des temps
tardifs (C).
4 | La Lettre du Rhumatologue Suppl. 2 au n° 353 - juin 2009
SynthèSE
Échographie
Le deuxième examen cardiaque de première inten-
tion est l’échographie doppler, idéalement associée
au doppler tissulaire ; il faut alors bien analyser la
fraction d’éjection ventriculaire gauche (dysfonction
VG systolique), les pressions de remplissage (dys-
fonction VG diastolique), l’estimation de pression
artérielle pulmonaire, le ventricule droit (figure 3)
et le péricarde.
En cas de suspicion d’hypertension artérielle pulmo-
naire (figure 3), l’examen de référence reste le cathé-
térisme droit, car il permet de mesurer directement
la pression artérielle pulmonaire et d’en déterminer
le mécanisme en mesurant les pressions capillaires.
En cas de pressions normales (≤ 12 mmHg), le dia-
gnostic sera une hypertension artérielle pulmonaire
précapillaire, justifiant un traitement vasodilatateur,
mais, en cas de pressions capillaires augmentées, le
diagnostic sera celui d’une forme postcapillaire, donc
d’origine cardiaque, et essentiellement par dysfonc-
tion diastolique. Dans ce dernier cas, l’élévation de
la pression artérielle pulmonaire est une adaptation
physiologique et il est délétère de tenter de la faire
baisser ; le traitement consiste alors plutôt en petites
doses de diurétiques.
Les critères de réalisation d’un cathétérisme car-
diaque ne font pas l’objet d’un consensus, mais des
valeurs de pression artérielle pulmonaire systolique
supérieures à 40 mmHg, une altération très profonde
(< 50 %) de la diffusion du monoxyde de carbone
ou une dyspnée inexpliquée ont été retenus dans
différents travaux.
IRM cardiaque
En cas de suspicion d’atteinte myocardique primitive
touchant le ventricule gauche, ou, parfois le ventri-
cule droit, l’IRM nucléaire peut aider à l’évaluation
cardiaque. Cet examen sera très discriminant pour
mettre en évidence des atteintes ischémiques micro-
circulatoires (figure 4A), une éventuelle myocardite
(figure 4B) [plutôt rencontrée dans les formes de
chevauchement ou associée à une myosite], voire
des lésions fibrosantes (figure 4C).
Tomodensitométrie thoracique
L’atteinte parenchymateuse pulmonaire doit être
étudiée par scanner en haute résolution en coupes
millimétriques. Les principaux éléments radio-
logiques des pneumopathies infiltrantes diffuses
sont les suivants :
les opacités en verre dépoli (augmentation de la
densité pulmonaire neffaçant pas les contours des
vaisseaux pulmonaires et des parois bronchiques),
qui peuvent traduire une alvéolite ou un épaissis-
sement du tissu interstitiel alvéolaire, considérées
par beaucoup comme un stade débutant ;
les opacités réticulaires, qui traduisent l’épaissis-
sement du tissu interstitiel interlobulaire ;
Figure 6. Calcinose du pouce : le scanner 3D révèle l’enva-
hissement des gaines tendineuses.
A B
La Lettre du Rhumatologue Suppl. 2 au n° 353 - juin 2009 | 5
SynthèSE
les images kystiques et microkystiques sous-
pleurales, réalisant un aspect en “rayons de miel”
(figure 5) ;
les opacités micronodulaires interstitielles ou
linéaires (lignes au sein du parenchyme pulmonaire) ;
l’irrégularité des interfaces (irrégularité et distor-
sion des scissures, de la plèvre viscérale, des gaines
péribronchovasculaires) ;
des bronchectasies de traction, souvent présentes
au cours de la sclérodermie systémique (figure 5).
Le retentissement des lésions est évalué grâce aux
tests fonctionnels pulmonaires, avec la recherche
d’un syndrome restrictif et de troubles de la dif-
fusion du monoxyde de carbone. Ce dernier point
peut refléter l’atteinte capillaire, et il semble que
la mesure du rapport DLCO/ volume alvéolaire per-
mette de mieux analyser la composante vasculaire.
La mesure des gaz du sang peut être utile, mais ce
sont surtout les tests d’effort qui se développent.
Si le test de marche de 6 minutes paraît fortement
biaisé par l’ atteinte systémique (articulaire, muscu-
laire, fatigue générale…), la mesure de la désatura-
tion à l’effort semble, quant à elle, importante.
Comme chaque année, le congrès de la Société
américaine de radiologie, la RSNA (Radiolo-
gical Society of North America), a eu lieu à Chicago.
Du 30 novembre au 5 décembre 2008, la “cité des
Vents” a été la “Mecque” de la radiologie internatio-
nale réunissant 35 000 participants dans un ballet
parfaitement réglé !
Dans l’
arthrose, Roemer et al. ont montré en
IRM sur 347 genoux explorés à J0 et à 30 mois,
que la présence d’un épanchement et d’une syno-
vite à l’inclusion est le seul paramètre IRM associé
à une chondrolyse rapide en analyse multivariée
(OR = 5,79 ; IC
95
: 2,49-13,45). Les lésions méniscales
sont incriminées dans les deux types de perte de
cartilage lente et rapide (1).
Dans la
polyarthrite rhumatoïde (PR), Esched
et al. ont étudié en IRM les lésions élémentaires
(synovites ténosynovites et érosion) aux mains et
aux poignets, qui seraient prédictives du diagnostic
de PR. Une population de 95 patients, souffrant soit
de rhumatismes indifférencés soit de polyarthrites
suspectées sans lésion érosive radiographique, est
étudiée en IRM à J0. Le diagnostic de certitude est
établi par le rhumatologue référent à partir d’un
suivi effectué entre 6 et 42 mois. Les ténosynovites
des tendons fléchisseurs sont les seuls paramètres
IRM associés au diagnostic de PR précoce avec une
sensibilité de 60,3 % et une spécificité de 73,4 %.
La sensibilité augmente à 78,9 % lorsque l’analyse
est faite avec les anti-CCP tandis que la spécificité
reste identique (2).
Ah, que c’était beau Chicago !…
D. Lœuille*
* Service de rhumatologie,
Vandœuvre-lès-Nancy.
1. Roemer FW. Guermazi A, Lynch JA, Crema MD, Marra MD, Zhang Y. MRI – detected fast
tibiofemoral cazrtilage loss during a 30- months interval and its association with baseline
risk factors: the most study. Radiology 2008:298.
2. Esched I, Tel Hashomer I, Feist E, Bachaus M, Konen E. Tenosynovitis of the flexor tendons
of the hand detected by MRI: ana indicator for early Rheumatoid arthritis. Radiology
2008:296.
Références bibliographiques
Autres atteintes
L’atteinte de l’appareil locomoteur nécessite aussi
des examens d’imagerie ; les radiographies standard,
voire l’IRM, peuvent aider à l’évaluation ostéo-arti-
culaire, voire musculaire. La calcinose est une com-
plication parfois sévère et souvent déroutante de
cette maladie ; le scanner avec reconstruction peut
aider à son évaluation, notamment si une chirurgie
est envisagée (figure 6).
CongrèS
rÉUnion
1 / 3 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !