neuse s’associe à une cellule réceptrice et
lui cède tout ou partie de son chromo-
some. La variabilité qui résulte de la trans-
mission, en une seule fois, de tout un lot
d’informations génétiques constitue, pour
les populations bactériennes, un formida-
ble outil d’adaptation. Elle s’ajoute à la
variabilité résultant des mutations qui,
elles, sont ponctuelles et n’entraînent que
de légères modifications phénotypiques.
Enfin, le parasitisme par des virus appe-
lés phages, s’il ne détruit pas la bactérie
infectée, peut modifier son comportement.
En outre, des fragments d’ADN, libérés
par la mort d’une bactérie, peuvent s’in-
troduire dans une autre et s’intégrer à
son chromosome : c’est la transformation,
qui porte rarement sur plus d’un caractère.
Les bactéries phytopathogènes n’ont pas
de spore, forme de résistance que l’on
trouve par exemple chez les
Bacillus
, dont
certains sont agents de pathologies ani-
males (charbon du mouton).
En conditions défavorables, froid ou sé-
cheresse, elles peuvent rester en survie, à
condition d’être protégées par un peu de
matière organique. Elles sont tuées en cha-
leur humide au-delà de 60 °C.
Reconnaître une infection
bactérienne
Les symptômes exprimés par les plantes at-
teintes de bactériose sont assez peu ty-
piques, et de multiples convergences vien-
nent troubler le diagnostic lorsque la plante
est sujette à plusieurs maladies, ce qui est
la règle dans la plupart des cas.
L’infection peut se traduire par l’apparition
de pourritures molles, de taches huileuses
entourées d’un halo jaune, ou encore de
nécroses sèches. Si elles colonisent le sys-
tème vasculaire en le rendant impropre à la
circulation de la sève, elles provoquent des
flétrissements de pousses et de rameaux,
et des dépérissements généralisés. Tel est le
cas des maladies dites vasculaires, quelles
que soient leurs origines, bactériennes ou
non. C’est le cas de
Ralstonia solanacea-
rum
sur diverses solanacées. Certaines peu-
vent induire des tumeurs, des galles ou des
chancres sur les divers organes du végé-
tal. Il en est ainsi de
Pseudo-
monas savastonoi pv. nerii
sur les feuilles et
les inflorescences du laurier-rose, et de
Rhodococcus fascians
sur diverses plantes,
dont le pélargonium.
Les
Xanthomonas
provoquent générale-
ment des symptômes de flétrissement, mais
également des taches nécrotiques au ni-
veau du feuillage. Le chancre bactérien
des agrumes (
Xanthomonas axonopodis
pv. citri
) s’exprime en outre par des érup-
tions de tissus spongieux et liégeux au ni-
veau de l’écorce des fruits.
Dans certaines maladies, en condition de
forte hygrométrie, des gouttelettes conte-
nant les bactéries exsudent des tissus, ce
qui a valu à la bactériose à
Xanthomonas
de la jacinthe son appellation commune
de “morve”.
Le spectre d’hôte d’une bactérie peut être
limité à une seule espèce végétale, comme
il peut couvrir plusieurs familles botaniques :
c’est le cas du crown-gall, où la bactérie
(Agrobacterium tumefaciens)
infecte aussi
bien le rosier que le pélargonium ou le
chrysanthème.
La transmission des maladies
Contrairement à certains champignons qui,
grâce à la production d’enzymes – les chi-
tinases – peuvent forcer la paroi des cel-
lules végétales, les bactéries doivent
se contenter de pénétrer par les ouvertures
naturelles : stomates des feuilles, lenticelles
des tiges, nectaires des fleurs, cicatrices
foliaires et insertions racinaires. Les ou-
vertures accidentelles, comme les blessu-
res causées par les pratiques culturales et
les événements climatiques (poils cassés et
lésions provoquées par le gel) sont large-
ment utilisées. Certaines peuvent rester à
la surface des feuilles ou des tiges avant
de pénétrer : c’est la phase épiphyte, où
aucun signe de réaction de la plante n’éveil-
le l’attention. Une bouture ou une graine
porteuse d’un germe pathogène donnera
une plante malade.
Les bactéries sont transmises par le sol, le
vent et l’eau – pluie mais aussi arrosage et
brumisation – les insectes, en particulier
au moment de la pollinisation, les oiseaux
et l’homme. Les opérations culturales ou-
vrent des voies de pénétration privilégiée :
au moment de la taille, du bouturage et
du greffage, les bactéries qui infectent le
végétal sont disséminées par le greffoir et
la main du manipulateur. Lors de ces tra-
vaux, les outils et les machines utilisés fa-
vorisent la dissémination des maladies en
général. Il faut donc veiller à une grande
hygiène et bien contrôler les facteurs en
cause.
Comment agissent les bacté-
ries phytopathogènes ?
Elles ont sélectionné, au cours de l’évolu-
tion, des outils adaptés à leurs stratégies
d’infection et d’invasion des tissus végé-
taux vivants, afin de survivre et de se pro-
téger des compétitions microbiennes. Mais
l’établissement de la maladie résultera de
la compatibilité entre la bactérie et la
plante-hôte. Pour beaucoup d’entre elles,
la compatibilité bactérie-plante s’établit à
la suite de la sécrétion de protéines par le
microorganisme.
Une fois pénétrée dans la plante, la bac-
térie va se multiplier entre les cellules, pro-
voquant de proche en proche leur mort,
conférant cet aspect translucide désigné
par le terme de “graisse”. La production
de toxines par certains germes est asso-
ciée à l’apparition de nécroses et de flé-
trissement. Les déséquilibres en phytohor-
mones se traduisent par l’apparition de
tumeurs et de modifications, associées à
des proliférations désordonnées des cellu-
les végétales (on parle d’hyperplasie),
dans les pathologies à
Agrobacterium
en
particulier, mais également dans des mal-
adies provoquées par d’autres germes,
par exemple
Rhodococcus fascians
. Les
NOVEMBRE 2006 •JARDINS DE FRANCE •33
INRA
Vue en microscopie électronique de balayage
de bactéries pénétrant au niveau de la lésion
produite par l’extrusion d’une racine.