Edito
Octobre 2005
Pendant des millénaires, le
contrôle de la maternité fut
affaire d’hommes. Les femmes
avaient comme seule fonction
celle d’être mères.
Légitimé par les préceptes
bibliques, le devoir d’enfanter
confortait chaque sexe dans
une fonction bien définie. Les
femmes, cantonnées aux tâches
domestiques et à l’éducation des enfants, n’avaient
guère le temps, contrairement aux hommes,
d’accéder aux affaires publiques...
Depuis, et grâce aux mouvements féministes,
les femmes ont repensé leur sexualité,
c’est-à-dire choisi de la vivre d’abord
pour elles-mêmes et non dans la
crainte d’une grossesse... Mais cette
“égalité sexuelle” a été l’occasion de
ressortir des placards les théories
anciennes sur la nature “frivole” des
femmes. Sans “la peur au ventre”,
elles allaient devenir “adultères” ou
“libertines”... Des mots désuets
aujourd’hui mais remplacés par
d’autres ! En 1990, à la mise sur
le marché de la pilule du lendemain,
les arguments des opposants étaient
les mêmes qu’en 1967 : “Elles vont faire
n’importe quoi !”.
En 2005 encore, il n’est pas simple de faire bouger
les mentalités, même chez les professionnels.
Un exemple ? La loi stipule que les pharmaciens doivent
délivrer gratuitement et anonymement la pilule
du lendemain aux mineures. Pourtant, beaucoup
d’officines ne le font pas !
Dans la vie publique aussi, l’évolution est lente et
la misogynie évidente quand un homme politique,
réfractaire à la candidature de Ségolène Royal aux
fonctions suprêmes, argumente : “la Présidence de la
République n’est pas un concours de beauté” et qu’un
autre s’inquiète de “qui va garder les enfants ?”.
La société reconnaîtra-t-elle un jour aux femmes le droit
de choisir et d’envisager toute carrière, toute ambition,
toute destinée… ?
Aline VERGNON-BONDARNAUD
Présidente du GRAIF
Depuis 1967, la pilule n’est plus illé-
gale en France... Difficile d’imagi-
ner qu’il y a encore quarante
ans, maîtriser sa maternité
était puni par la loi.
Aujourd’hui, la contra-
ception est accessible
à toutes et à tous,
mais son “hyper-médi-
calisation“ peut parfois
donner aux femmes le
sentiment de ne pas
avoir le choix de la
méthode. Seuls trois
moyens anticonceptionnels,
à savoir la contraception hor-
monale (pas toujours acceptée
par les femmes), le stérilet (sous
conditions), et le préservatif (pas tou-
jours accepté par les hommes), sont réelle-
ment proposés et promus... Un véritable problème,
souvent éludé, qui conduit à de nombreuses grossesses non prévues.
En effet, en France, près de 100000 IVG sont dues, chaque année,
à une contraception mal adaptée. Par ailleurs, les tabous qui
pèsent encore à l’heure actuelle sur l’avortement, ainsi que son
statut médical différent, en font toujours un acte à part. S’ajoute à
cela un questionnement nouveau. Quelle est la place de l’homme
dans tout ça ? Et si la contraception pouvait être réellement une
affaire entre deux partenaires, plus qu’une affaire de femme ?
“L’émancipation des femmes commence
au ventre”
Simone de Beauvoir
1,20
N°30
Contraception
et IVG :
un droit,
des choix !
La pilule est la méthode contraceptive
la plus utilisée. Elle n’est plus taboue,
les médecins la prescrivent quasi-sys-
tématiquement aux jeunes filles, mais
elle ne convient pas à toutes les fem-
mes. En 2000, 60,8% des femmes de 20
à 44 ans ayant une contraception y
avaient recours.
Pourtant, plus les années passent, plus
les femmes s’en détournent. Les 20-24
ans (ayant des relations sexuelles et ne
désirant pas d’enfant) sont 68% à choi-
sir la pilule. Les 30-34 ans ne sont plus
que 43,8%1. Des chiffres qui s’expli-
quent d’abord par le « passage » au sté-
rilet mais pas seulement !
« Une jeune fille qui commence la
pilule à 16 ans en est lassée à 30. Si ma
génération était pro-pilule, la nouvelle
en ressent plus vite les contraintes
(prise quotidienne, contrôles sanguins,
visites médicales) », commente Nicole
Roussel, du Mouvement Français pour
le Planning Familial (MFPF).
LE RAS-LE-BOL DU COMPRIMÉ
À HEURE FIXE
Il a été entendu puisque aujourd’hui
sont commercialisés patch, anneau
vaginal et implant, qui dispensent les
femmes d’une gestion quotidienne de la
contraception. L’implant, par exemple,
évite les effets secondaires les plus
reprochés aux pilules œstro-progestati-
ves (problèmes circulatoires notam-
ment), mais peut en provoquer d’autres
(règles irrégulières, nausées). Une vic-
toire qui ne répond donc pas à tout !
« Pour les femmes jeunes qui ont vécu
leur sexualité à l’heure de la contracep-
tion moderne, les contraintes liées aux
effets secondaires et à la médicalisa-
tion apparaissent d’autant moins
acceptables que les conditions d’exer-
cice de la sexualité sont aujourd’hui
très différentes de celles qui prévalaient
dans les années 70 » expliquent les
sociologues de l’INSERM2.
La réticence hormonale de certaines
jeunes femmes d’aujourd’hui risque de
gagner demain leurs cadettes
puisqu’elle s’inscrit en plus dans un
esprit « bio » de plus en plus répandu.
« Le droit au bien-être sexuel apparaît
aujourd’hui légitime et peut conduire à
ressentir la prise d’une contraception
hormonale comme une contrainte anti-
naturelle » poursuivent les sociolo-
gues. « D’autant plus que se développe
une conscience globale des enjeux
écologiques à tous niveaux. Les recher-
ches en matière de contraception qui
visent à la seule amélioration des
contraceptifs existants n’ont pas tenu
compte de ces nouveaux enjeux. »
PEU D’ALTERNATIVE
Bien entendu, du côté des médecins,
c’est l’efficacité maximale qui prime,
d’où la forte prévalence de la contra-
ception hormonale. Seulement, si la
pilule est mal vécue, elle sera plus pro-
pice aux oublis ! Valérie Gelin, anima-
trice de prévention au Mouvement
Français pour le Planning Familial de
Marseille va plus loin : « L’efficacité
n’est pas la même pour les femmes qui
acceptent la pilule et pour celles qui la
subissent! » Martin Winckler (auteur
de La maladie de Sachs et médecin
spécialisé dans les questions de sexua-
lité et de contraception) fait le même
constat : « L’efficacité "théorique"
d’une méthode compte moins que le
choix et l’acceptation par la femme, en
connaissance de cause. Une pilule
qu’on ne tolère pas ou qu’on oublie est
moins efficace qu’un diaphragme
qu’on utilise bien... »
A l’heure actuelle, la contraception
hormonale est la seule proposée aux
françaises sans enfant3. Le stérilet,
même s’il existe pour les nullipares, est
souvent soumis au veto des gynécolo-
gues qui redoutent un risque d’infec-
tion. En 2000, seules 0,9% des 20-24 ans
et 7,5% des 25-29 ans utilisaient un sté-
rilet ! Les méthodes « barrière », type
spermicide ou diaphragme, considé-
rées comme trop peu fiables d’un
point de vue statistique sont, elles
aussi, rarement proposées.
LA PLUPART DES IVG DUES
À UNE CONTRACEPTION
INADAPTÉE
« La meilleure contraception est celle
qu’une femme choisi en connaissance
de cause, insiste Martin Winckler. Des
études récentes montrent que la plu-
part des grossesses non désirées - qui
se soldent par 203.000 IVG annuelles4-
ont pour cause les informations insuffi-
santes ou inappropriées délivrées par
des médecins qui ne connaissent que
la pilule contraceptive et rejettent les
méthodes plus sûres que sont le dispo-
sitif intra-utérin (DIU ou stérilet), l’im-
plant contraceptif et les progestatifs
injectables !5»
Situation contraceptive
des femmes au moment
de la conception ayant donné
lieu à une IVG (France)
Situation contraceptive
pas de contraception
pilule
préservatif
méthodes naturelles
stérilet
autres méthodes
total
Source : enquête Cocon 2000
(réalisée avec le soutien de l’INSERM, l’INED
et le laboratoire Wyeth-Lederlé)
1 Enquête Cocon-2000, INSERM/INED
2 De la contraception à l’avortement. Sociologie des
grossesses non prévues. Nathalie Bajos, Michèle
Ferrand et l’équipe Giné. INSERM (Institut National de
la Santé et de la Recherche Médicale)
3 Voir l’article de Winckler : l’ignorance criminelle des
médecins Nouvel observateur 29/01/04
4 Enquête sur les chiffres 2003. Direction de la
Recherche des Etudes de l’Evaluation et des
Statistiques. Parution : octobre 2005
5 Médecins sous influences, le Monde Diplomatique,
janvier 2003
%
28,1
23,1
19,3
19,1
7,0
3,4
100
2
UNE CONTRACEPTION EFFICACE
EST UNE CONTRACEPTION
CHOISIE
LA CONTRACEPTION LOCALE
LA CAPE CERVICALE :
Petite membrane incurvée (22 à 31 mm)
de silicone ou de latex à enduire de
spermicide avant de la placer sur le col
de l’utérus. Apprentissage nécessaire
de la mise en place. A retirer au plus tôt
8 heures après le rapport. Bien entrete-
nue, se conserve 2 ans. Le problème :
obtenir une prescription. Très peu de
praticiens français connaissent la
méthode et aucune formation en
faculté de médecine ! (De 30 à 50
euros. Prescription obligatoire).
LE DIAPHRAGME :
Membrane de silicone ou de latex, (55 à
95 mm de diamètre). Il est maintenu par
une bague et se place au fond du vagin. Il
s’utilise avec une crème spermicide.
Durée de vie : 2 ans. Très difficile d’obte-
nir une prescription, pourtant obliga-
toire. Mise en place facile (De 28 à 40
euros).
LES SPERMICIDES :
Existent sous trois formes : crème, ovule
et éponge et se placent au fond du vagin.
La crème et l’ovule doivent être appli-
qués plusieurs minutes avant le rapport.
L’éponge n’a pas cette contrainte et est
reconnue comme plus efficace (agissant
en plus elle-même comme une barrière).
Il est déconseillé de se laver 2 heures
avant et 6 heures après le rapport.
L’efficacité varie entre 74 et 94%. (Sans
ordonnance. Prix moyen des ovules :
8 euros les 12. Prix moyen des éponges :
12 euros les 6. Prix moyen d’un tube de
crème : 8 euros).
LE PRÉSERVATIF MASCULIN :
Il protège en plus des Infections
Sexuellement Transmissibles (IST) (Prix
moyen : 5 à 10 euros les 12).
LE PRÉSERVATIF FÉMININ :
Comme le préservatif masculin, pro-
tège des IST. Avantage : peut se placer
plusieurs heures avant le rapport. Il est
muni de 2 an-neaux flexibles : un petit
qui se « cale » lors du rapport au fond du
vagin, et un plus large qui reste à l’exté-
rieur. Aussi effi-
cace que le préser-
vatif masculin,
voire plus puisqu’il
n’est pas néces-
saire de le retirer
immédiatement
après le rapport.
(Prix moyen : 2
euros l’unité).
LE STÉRILET OU DIU
(dispositif intra-utérin)
Il mesure envi-
ron 3 cm une
fois déplié.
Durée : 3 à 5
ans. La pose
est parfois
légèrement
douloureuse
pour les nulli-
pares. Le stérilet « se fait oublier » mais
peut entraîner des règles plus longues.
Il existe aussi un stérilet hormonal.
(Prix : autour de 30 euros, remboursé
partiellement par la sécurité sociale.
Compter en plus la pose).
LA CONTRACEPTION
HORMONALE (efficacité maximale
si prise correctement)
LA PILULE
Forme la plus courante des contracep-
tions hormonales. Il en existe beaucoup
mais les remboursées sont rares.
Eventuels effets indésirables : problèmes
veineux, baisse
de la libido,
prise de poids,
etc...
Il en existe à
progestatif
simple
(préconisées
chez les grandes fumeuses, en cas d’hy-
pertension ou de diabète), à prendre à
heure fixe, qui occasionnent parfois des
saignements pendant le cycle.
Prescription médicale obligatoire. (Prix
moyen : 10 euros la plaquette mensuelle).
L’IMPLANT
Bâtonnet (4cm de long et 2 mm de dia-
mètre) que le médecin insère sous la
peau du bras. Peut être conservé 2 à 3
ans. (Prescription médicale obligatoire.
Remboursé).
L’ANNEAU VAGINAL
Même principe : il libère les hormones
au fil des jours et l’utilisatrice le place
elle-même au début de chaque cycle. Il
reste au fond du vagin 3 semaines et se
change tous les mois. Il contient oes-
trogène et progestérone et n’est pas
remboursé. (Prescription médicale
obligatoire. Prix : environ 40 euros
pour trois mois).
LE PATCH
S’applique sur le haut de la cuisse et
reste collé la semaine. A changer tous
les 7 jours pendant 3 semaines et une
semaine sans patch. Il contient oestro-
gène et progestérone. (Prescription
médicale obligatoire. Prix : environ 40
euros pour trois mois, non remboursé).
L’INJECTION
Un progestatif en injections mensuelles
existe. Mais on lui attribue des effets
secondaires d’ordre psychologique. En
France, il est très peu proposé, contrai-
rement au Canada par exemple.
LA PILULE DU LENDEMAIN
Elle se prend après un rapport non pro-
tégé. La pilule Norlévo (seule sur le mar-
ché) est un progestatif simple qui s’admi-
nistre en une seule prise. Plus tôt elle est
administrée, plus grande est son effica-
cité (95% dans les 12 heures et 50% dans
les 72 heures). La loi impose aux pharma-
ciens de la délivrer gratuitement aux
mineures. (Prix : 7,60 euros. Remboursée
si ordonnance). 3
PANORAMA DE LA
CONTRACEPTION
4
RETOUR
DIFFICILE DU
DIAPHRAGME
EN FRANCE
Si diaphragme et cape cervicale
sont largement répandus en
Amérique du Nord et en
Angleterre, nombreuses sont
les Françaises, notamment les
jeunes, à en ignorer l’existence.
Le diaphragme, depuis les années
80, n’était plus commercialisé en France.
Le marché, pas assez rentable, n’intéressant pas les
fabricants, celles qui tenaient à ce mode de contra-
ception devaient se rendre à Londres ... Depuis
février 2005, une société bordelaise5s’est lancée
dans la commercialisation de la cape cervicale et
du diaphragme « génération 2000 ». « Ces métho-
des n’ont pas vocation à remplacer la pilule, expli-
que Gilles Moreau, le responsable. Elles concer-
nent plutôt les femmes qui en ont assez d’avaler
des hormones et qui aspirent à quelque chose sans
effets secondaires. Mais son efficacité nécessite la
maîtrise de sa manipulation et il faut en tenir
compte au moment du choix de la contraception ».
LA PATERNITE
HEUREUSE
Où en est la contraception masculine ? En
dehors du préservatif ou du retrait, peu d’avan-
cées... L’idée d’un contraceptif hormonal pour
hommes fait tout de même son chemin.
Plusieurs laboratoires travaillent sur le projet
pour tenter de concevoir la fameuse « pilule » et
des scientifiques australiens ont annoncé avoir
mis au point un contraceptif masculin efficace et
réversible. En France, si l’industrie et les politi-
ques craignent le manque de rentabilité de ce
type de contraception, les jeunes seraient plutôt
demandeurs. « Toutes les études entreprises sur
ce thème révèlent qu'il existe des hommes prêts
à partager le fardeau de la contraception à l'inté-
rieur des couples stables », expose le Docteur
Bernard Jégou, Directeur de recherche à
l’INSERM. Car, si les femmes peuvent décider de
leur maternité, les hommes peuvent avoir la sen-
sation de subir parfois leur paternité... Reste à
savoir si les femmes accepteront de déléguer
une responsabilité dont elles supporteraient
seules les manquements et si le corps médical
suivra. « Je ne me vois pas engager ma responsa-
bilité et prescrire la pilule à un homme puisqu’il
ne risque pas lui-même d’être enceinte, explique
une docteure de Grasse. Ce n’est plus une ques-
tion d’avancée en matière d’égalité mais un pro-
blème purement médical. » Vaste débat.
A suivre...
CONTRACEPTION ET IVG : DEUX HEURES
DE FORMATION EN FACULTE DE MEDECINE
Diaphragmes et capes sont utilisés par moins de 0,5% des femmes ne sou-
haitant pas de grossesse. « Les médecins eux-mêmes ne connaissent pas
bien le sujet ! Je vends mon jeu de diaphragmes seulement 32 euros aux pro-
fessionnels ! poursuit-il. Mais j’ai un mal fou à les convaincre d’investir
« On se mord la queue, s’indigne Catherine Gros, Présidente régionale du
MFPF. Moins on en parle, moins les praticiens savent faire... Et vice-versa. »
Pourtant, la prescription médicale est indispensable (art. L5134-1 du code de
la santé7) ! A l’heure actuelle, l’orthogénie se résume à un créneau de deux heu-
res en faculté de médecine ! La pose du diaphragme y apparaît comme « déca-
lée» à l’heure d’une hyper-médicalisation de la contraception. « On subit
une politique du risque zéro qui se traduit par la promotion exclusive de la
pilule ou du préservatif. C’est absurde. Le risque zéro n’existe pas. Et la cape,
c’est tout de même mieux que le retrait ! », poursuit Catherine Gros.
« Quand on en parle aux politiques, ils répondent qu’un
pays riche comme la France ne peut se contenter de moyens
de contraception dont le « taux d’efficacité » est plus faible
que celui de la pilule, renchérit Nicole Roussel, militante au
MFPF. Le Ministère de la santé oublie que chaque femme vit
une sexualité différente et qu’une méthode ne peut pas
convenir à tout le monde et à tous les moments de la vie. »
Des médecins aimeraient pouvoir prescrire le diaphragme,
comme le Docteur Sophie Eyraud, membre du conseil d’ad-
ministration de l’ANCIC8et responsable d’un centre d’inter-
ruption de grossesse en région parisienne. « On ne peut pas enseigner la
pose du diaphragme aux médecins puisque les hôpitaux n’en disposent pas.
C’est dommage car c’est une alternative qui peut convenir à beaucoup de
femmes, à condition qu’elles soient à l’aise avec leur corps. »
PUDEUR LATINE
En effet, toutes les femmes ne sont pas prêtes à assumer la manipulation du
diaphragme ou de la cape. « Ces méthodes s’adressent aux femmes qui ne
font pas de complexe avec leur intimité. Paradoxalement, beaucoup accep-
tent que le partenaire touche leur vagin mais s’interdisent de le faire elles-
mêmes, notamment les jeunes-filles, explique Gilles Moreau. Dans les pays
latins, les femmes sont davantage pudiques que dans les pays de culture
anglo-saxonne. »
Martin Winckler confirme : « L’utilisation est plus importante en Angleterre
et en Amérique parce que le rapport au corps n’y est pas "culpabilisé"
comme il le fut, dans les pays latins - dont la France - par la religion catholi-
que. Le diaphragme est une méthode très efficace quand on s’en sert correc-
tement ! »
Certes... mais le combat est loin d’être gagné et le marché de la cape et du
diaphragme remis à l’ordre du jour en France est encore incertain.
Catherine GROS
6 BIVEA. 3, place du
Chaperon rouge. 33600
Pessac. 05.57.26.09.00.
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7 Article L5134-1 du
code de la santé :
« Les sages-femmes sont
habilitées à prescrire les
diaphragmes, les capes,
ainsi que les contraceptifs
locaux. La première pose
du diaphragme ou de la
cape doit être faite par un
médecin ou une sage-
femme »
8 Association Nationale
des Centres d’Interruption
de grossesse et de
Contraception.
CONCESSIONS
INTIMES
« Il faut être deux pour « tomber »
enceinte ! » rappelle ironiquement Nicole
Roussel, du MFPF. Le rapport à la sexualité
de chacun des partenaires et leur capa-
cité de communication sont des facteurs
qui jouent considérablement sur la prise
de risque ! Dans la conclusion de la
recherche sur la contraception et l’avor-
tement menée par l’INSERM en 2002, il
est établi que nombre de grossesses non
désirées sont dues au refus des hommes
d’utiliser une contraception. «Malgré la
demande explicite des femmes, leur par-
tenaire a refusé d’utiliser le préservatif ou
de pratiquer le retrait. La grossesse non
prévue apparaît ici liée à la priorité, accor-
dée aussi bien par la femme que par
l’homme, au plaisir sexuel masculin. Ces
situations s’inscrivent au cœur des rap-
ports sociaux de sexe, et renvoient à la
domination masculine. » Il n’est pas rare
que les femmes fassent des concessions
pour faire plaisir à leur partenaire: soit en
acceptant le rapport sans en ressentir
l’envie, soit en tolérant son refus d’utiliser
le préservatif, soit devant le fait accompli
si le retrait est « oublié ».
La contraception est une affaire de couple à
partir du moment où, pour l’homme
comme pour la femme, les désirs de chacun
ont la même valeur.
5
L’IVG ENCORE TABOUE
BILAL, 20 ANS, EN BTS
DE COMMUNICATION
ET PASSIONNÉ DE VOYAGES
HUMANITAIRES :
Marcher sur des oeufs...
Les garçons de
ma génération ne
s’occupent pas
trop de la contra-
ception de leur
copine. C’est un
sujet délicat. On
ne sait pas si on
doit s’en mêler...
On ne veut pas être indiscret. Mais il y a
aussi des garçons qui ne s’en occupent
pas par égoïsme !
Préservatif : difficile mission
J’ai beau avoir 20 ans, je suis toujours
aussi gêné quand il faut que j’achète des
préservatifs.
JULIE, 25 ANS, COMÉDIENNE
ET ÉTUDIANTE EN LETTRES :
Redonner la cote au préservatif
Le préservatif ne
pose pas pro-
blème ni à mon
copain ni à moi.
Beaucoup de jeu-
nes y voient un
« tue-l’amour », ce
n’est pas comme
ça que je vois les
choses. Je vis la mise du préservatif
comme un jeu, avec de la complicité.
Hou hou, les garçons !
J’ai des amies qui prennent la pilule et
qui culpabilisent à l’idée de demander
à leur copain de mettre un préservatif
quand elles ont un souci gynéco. La
contraception est vraiment considérée
comme un problème féminin et les
garçons en profitent sans en subir les
inquiétudes. Peu d’entre eux pensent à
rappeler à leur copine l’heure du com-
primé ou participent à l’achat des pla-
quettes.
VIRGINIE, 23 ANS, ÉTUDIANTE
EN SCIENCES POLITIQUES :
Ca coûte cher de ne pas « tomber
enceinte » !
Ma plaquette coûte 13 euros par
mois. Elle n’est pas remboursée par
la sécu mais je n’en supporte aucune
autre. C’est scandaleux que certaines
pilules soient entièrement à la charge
des femmes !
C’est un gros pro-
blème de payer
autant. Je suis
sûre que certai-
nes filles pren-
nent des risques
à cause de ça !
DES JEUNES SE CONFIENT...
Trente ans après la loi Veil, l’inter-
ruption volontaire de grossesse
suscite toujours des polémiques.
L’accessibilité à la contraception
et sa diffusion servent souvent de
justification aux positions anti-
IVG... Difficile d’échapper aux
idées reçues : « Les IVG sont la
suite logique d’une négligence de
la contraception »... ou pire « de
l’insouciance des femmes », le
tout accompagné de « Avec tout
ce qui existe aujourd’hui ! ». Malgré le rapport du Professeur Nisand (1999)
qui établissait clairement que « la légalisation de l’avortement n’a pas
entraîné sa banalisation, pas plus qu’elle n’a conduit au relâchement de la
contraception », les idées préconçues perdurent. Si la loi s’est assouplie
(l’IVG relève du code de la santé et non plus du code pénal depuis 2001),
les mentalités, elles, ont du mal à évoluer.
DÉDRAMATISER L’IVG
« Les femmes font plein de choix difficiles dans leur vie, et des choix plus
lourds que celui d’avorter, commente Nicole Roussel. Il faut arrêter de dra-
matiser l’IVG. Avoir un enfant dans de mauvaises conditions aussi peut
laisser des séquelles ! » Il ne s’agit pas de nier les souffrances qu’elle peut
impliquer, mais de ne plus la considérer comme un acte honteux. Pour y
parvenir, peut-être faut-il d’abord changer de regard sur la sexualité. En
effet, aujourd’hui encore, les femmes qui ont recours à l’IVG se sentent
soumises à un jugement social hérité des traditions judéo-chrétiennes.
Celles qui avortent alors qu’elles ont un partenaire fixe et une contracep-
tion sont, dans l’inconscient collectif, moins « coupables » que celles qui
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