Anneaux et corps Prof. E. Bayer Fluckiger Bachelor Semestre 4 23 mars 2016 Quiz 4 Question 1. Soit K un corps et P ∈ K[X]. Montrer que α ∈ K est une racine de P si et seulement si (X − α) divise P . Solution. On a P = (X − α) · Q + R, avec R ∈ K. Donc P (α) = (α − α) · Q(α) + R = R. Ainsi P (α) = 0 si et seulement si R = 0. Question 2. Est-ce qu’un diviseur de zéro peut être inversible ? Solution. Non. En effet, si α est inversible alors αβ = 0 implique β = 0. Question 3. Soient A et B deux anneaux tels que A ' B. (1) Si A est un corps, est-ce que B est un corps ? (2) Si A est intègre, est-ce que B est intègre ? Solution. Soit φ l’isomorphisme de A dans B. Si A est commutatif, alors B est commutatif. En effet, b1 b2 = φ(φ−1 (b1 ))φ(φ−1 (b2 )) = φ(φ−1 (b1 )φ−1 (b2 )) = = φ(φ−1 (b2 )φ−1 (b1 )) = φ(φ−1 (b2 ))φ(φ−1 (b1 )) = b2 b1 . Clairement φ(a) 6= 0 si a 6= 0, et vice versa. (1) Si tout élément dans A−{0} est inversible, alors tout élément dans B−{0} est inversible. En effet, soit a l’inverse de φ−1 (b), alors 1 = φ(φ−1 (b)a) = bφ(a). (2) Si B n’est pas intègre, alors b1 b2 = 0 pour certains b1 , b2 ∈ B − {0}. Ainsi φ−1 (b1 ) est clairement un diviseur de zéro de A. Anneaux et corps Prof. E. Bayer Fluckiger Bachelor Semestre 4 23 mars 2016 Série 4 Exercice 1. (les résultats de cet exercice sont à retenir). Soient K un corps et f, g ∈ K[X] deux polynômes. (1) Montrer l’existence d’une relation de Bézout entre f et g i.e. de deux polynômes r, s ∈ K[X] tels que f r + gs = (f, g). (2) Traduire l’existence d’une relation de Bézout en termes d’idéaux de K[X]. Solution. (1) Dans l’Ex.2, Série 3, nous avons montré qu’une division euclidienne était possible dans K[X]. Par conséquent, on peut procéder exactement de la même manière qu’à l’Ex.5 de la Série 1, Théorie de groupes, pour montrer qu’il existe des relations de Bézout dans K[X], avec un algorithme constructif pour déterminer celles-ci ainsi que les plus grands diviseurs communs. Pour une autre démonstration, voir le point suivant. (2) En fait, on peut aussi donner une démonstration (non-constructive) de l’existence de relations de Bézout dans K[X] en termes d’idéaux, fournissant une seconde interprétation du plus grand diviseur commun. Soient f, g ∈ K[X] deux polynômes, dont on dénote par h le pgcd. Considérons l’idéal (f, g) de K[X] engendré par f et g. Comme K[X] est principal (voir le cours), il existe l ∈ K[X] tel que (f, g) = (l). De cette relation, on tire que l divise f et g, et que tout diviseur commun de f et g divise l. Ainsi, comme le pgcd est unique à multiplication par une unité près, on trouve que (l) = (h). En d’autres termes, le plus grand diviseur commun de f est g est égal à tout générateur de l’idéal de K[X] engendré par ceux-ci, d’où la double notation (f, g) pour le pgcd de f et g ou l’idéal engendré par ces derniers. Finalement, puisque h ∈ (h) = (f, g), il existe r, s ∈ K[X] tels que h = rf + sg, ce qui est la relation de Bézout cherchée. 3 Exercice 2. Calculer une relation de Bézout entre les deux polynômes à coefficients rationnels suivants : X 4 + X 3 + 3X + 1 et X 2 − 2. Est-ce qu’ils ont des racines communes dans Q ? Solution. On utilise l’algorithme (Ex.5 de la Série 1, Théorie de groupes). — Itération 1 : La division euclidenne du premier polynôme par le second donne X 4 + X 3 + 3X + 1 = (X 2 − 2)(X 2 + X + 2) + 5X + 5. — Itération 2 : X 2 − 2 = (5X + 5)(1/5)(X + 1) − 1 En combinant ces deux équations, on trouve que X 4 + X 3 + 3X + 1 et X 2 − 2 sont premiers entre eux, avec la relation de Bézout −5 = (1 − X)(X 4 + X 3 + 3X + 1) + (X 3 + X + 3)(X 2 − 2). Par le Quiz 1., α est une racine commune de X 4 + X 3 + 3X + 1 et X 2 − 2 si et seulement si (X − α) divise le pgcd de X 4 + X 3 + 3X + 1 et X 2 − 2. Les deux polynômes sont premiers entre eux, donc ils n’ont pas de racines communes. Exercice 3. On note M2 (Z) l’anneau des matrices à coefficients dans Z et a b ∈ M2 (Z) : a, b, c, d ∈ Z T := 0 d I := 9a b 0 9d ∈ M2 (Z) : a, b, d ∈ Z . Montrer que T est un sous-anneau de M2 (Z), que I est un idéal bilatère de T , et que T /I est isomorphe à Z/9Z × Z/9Z. Solution. La vérification que T est un sous-anneau de M2 (Z) est ordinaire. Pour la seconde partie de la question, considérons l’application f a 0 : T → (Z/9Z)2 b 7→ (a, d). d Notons que f (( 00 00 )) = (0, 0), f (( 10 01 )) = (1, 1) et que pour tous a, b, d, a0 , b0 , d0 ∈ Z, on a 0 0 a b a b a + a0 b + b 0 + = , 0 d 0 d0 0 d + d0 4 0 0 0 aa ab0 + bd0 a b a b . = 0 dd0 0 d0 0 d Par conséquent, il suit que f est un homomorphisme d’anneaux, qui est de plus clairement surjectif. Or, ker f = I, donc I est un idéal bilatère de T et par le premier théorème d’isomorphisme pour les anneaux, on a T /I ∼ = (Z/9Z)2 comme souhaité. Exercice 4. Soit C l’ensemble des fonctions continues de R dans R. (1) Montrer que C est un anneau commutatif, avec les opérations (f +g)(x) := f (x) + g(x) et (f · g)(x) := f (x)g(x). (2) Soit M := {f ∈ C | f (2) = 0}. Montrer que M est un idéal de C et que C/M ' R. (3) Montrer que si I 6= C est un idéal tel que M ⊂ I, alors M = I. Solution. (1) La vérification que C est un anneau commutatif est ordinaire. Le zéro de C est la fonction constante f : x 7→ 0 et l’identité de C est la fonction constante f : x 7→ 1. (2) Soit φ : C → R la fonction definiée par φ(f ) := f (2). On a clairement que φ est un homomorphisme surjectif d’anneaux. En effet, φ(f + g) = (f + g)(2) = f (2) + g(2) = φ(f ) + φ(g) et φ(f g) = (f g)(2) = f (2)g(2) = φ(f )φ(g). En plus, φ est surjectif parce que pour obtenit φ(f ) = c ∈ R il est suffisant de prendre la fonction constante f : x 7→ c. On a que M = ker φ, donc M est un idéal et C/M ' R par le premier théorème d’isomorphisme. (3) On a que I/M est un idéal de C/M , qui est un corps. Donc I/M = M/M ou I/M = C/M . Mais I 6= C, donc I = M . Exercice 5. Montrer que les anneaux R[X]/(X 2 + 1) et C sont isomorphes. Solution. Premièrement, on montre que pour tout f ∈ R[X], il existe un couple (a, b) ∈ R2 unique tel que [f ] = [aX + b] dans R[X]/(X 2 + 1). En effet, pour f ∈ R[X], il existe par division euclidienne des polynômes g, r ∈ R[X] tels que f = g(X 2 + 1) + r avec deg r < 2, c’est-à-dire que [f ] = [r] avec r linéaire, comme souhaité. De plus, s’il existe a, b, c, d ∈ R, avec (a, b) 6= (c, d), tels que [aX + b] = [cX + d], 5 alors [(a − c)X + (b − d)] = [0]. En d’autres termes, X 2 + 1 divise (a − c)X + (b − d) ce qui est impossible à cause des degrés, d’où l’unicité de l’écriture. Notons que pour a, b, c, d ∈ R, on a [aX + b][cX + d] = [(aX + b)(cX + d)] = [acX 2 + (ad − bc)X + bd] = = [ac(X 2 + 1) + (ad − bc)X + (bd − ac)] = [(ad − bc)X + (bd − ac)]. Par conséquent, R[X]/(X 2 + 1) s’identifie isomorphiquement à C. Notons que cet isomorphisme est explicitement donné par l’homomorphisme evi : R[X]/(X 2 + 1) → C, [f ] 7→ f (i) qui est bien-défini puisque i2 + 1 = 0.